694 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j �'cerntTre�n�! son brevet que l’on a fait brûler. Je te prie d’ordonner l’insertion au Bulletin du dépôt et de l’envoi pour sa tranquillité et pour la mienne. « Le secrétaire de la municipalité de Briey, « Gergonne. » Le citoyen Carbillet, peintre à Dijon, fait don à la nation de trois médailles d’argent à l’effigie de Capet. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du citoyen Carbillet (2). « Du 24 frimaire an II de la République française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Le vrai sans-culotte Carbillet, peintre, de Dijon, département de la Côte-d’Or, n’a pour toute possession que trois médailles d’argent, à l’effigie du scélérat Capet, dont la divine guil¬ lotine nous a délivré. Je dépose cette faible fortune sur l’autel de la patrie pour aider à exterminer les tyrans et leurs vils suppôts coalisés contre notre sainte liberté. « La République ou la mort, tels sont les sentiments qui animent mon cœur et mon âme. « Ton concitoyen, « Carbillet. » Le citoyen Pierre Noël, général de brigade à l’armée du Nord, envoie sa médaille en or, et le brevet signé Bailly et Lafayette; il joint à ce don un assignat de 50 livres. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (3). Extrait du registre des délibérations de la muni¬ cipalité de la commune de la Capelle, dépar¬ tement de V Aisne, district de Vervins, canton dudit Lacapélle (4). Séance permanente du 21 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. La municipalité en permanence ; s’est présenté en la maison commune le citoyen Pierre Noël, général de brigade à l’armée du Nord, divi¬ sion du général Maisonneuve, et a présenté une médaille en or qui lui a été donnée à Paris le 11 septembre 1789 (vieux style) pour récom¬ pense des services qu’il a rendus pour secouer le joug de nos tyrans, avec le brevet, signé Bailly et Lafayette. Ne voulant plus être por¬ teur de brevet portant des seings qu’il voit avec horreur ; il a déposé aussi un assignat de cin¬ quante livres sous le n° 35888. Signé Pommerie, en invitant la municipalité d’adresser le tout au citoyen Président de la Convention natio¬ nale en le priant de l’accepter pour le bien et pour le soutien de la République en promettant en outre qu’il donnera cinquante livres par an jusqu’à la paix. La municipalité lui a promis (1) Procès-verbaux~de la Convention, t. 27, p. 319. (2) Archives nationales, carton C 284, dossier 817. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 320. (4) Archives nationales, carton C 284, dossier 817. de s’empresser de faire passer à la Convention son don patriotique, avec copie de la présente délibération. Signé : Mambour, maire, Lecerf, Guerre, Giret-Vairon, Lefèvre, secrétaire gref¬ fier, et R oh aux, procureur de la commune. Le procureur syndic de Commune-d’Armes écrit que déjà Saint-Chamond et Commune-d’Armes ont renoncé au pieux charlatanisme des prêtres. Le temple de l’imposture est fermé, et l’autel du mensonge est abattu; 428 marcs d’argenterie viennent d’être envoyés aux repré¬ sentants du peuple à Commune-Affranchie. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du procureur syndic de Com¬ mune d' Armes (2). Le procureur syndic de la Commune dé Armes, au Président de la Convention nationale. « Commune d’ Armes, ce 22 frimaire l’an II de la République, une et indivisible. « Citoyen Président, « Enfin, la raison s’est levée du sein des pré¬ jugés qui la tenaient asservie, la lumière douce et bienfaisante pénètre, vivifie tous les esprits que la superstition tuait; l’auguste vérité vient, sur ses pas, un flambeau à la main, développer au peuple les éternelles maximes de l’évangile de la philosophie. Ses progrès sont lents dans nos campagnes, cependant le fana¬ tisme est blessé à mort, bientôt il expirera; déjà Saint-Chamond et Commune -d’ Armes ont renoncé au pieux charlatanisme des prêtres, le temple de l’imposture est fermé et l’autel du mensonge est abattu. « Les Sociétés populaires ont démasqué l’hypocrisie des apôtres de la superstition, combattu leur erreur et dissipé les ténèbres mystérieuses dont ils s’enveloppaient. Nous irons pas à pas avec les villageois, nous ne romprons pas en visière à leurs préjugés; nous commencerons à les instruire et les livres qui ont fait la révolution physique de la France feront encore dans cette classe intéressante d’hommes une révolution morale si nécessaire. « Nous avons demandé au comité de Salut public des écrits simples et lumineux pour les campagnes, rappelez-lui notre demande. Nous venons d’envoyer aux représentants du peuple à Commune-Affranchie 428 marcs d’argenterie, dont la raison a dépouillé le despotisme terrassé. Tartaras, Dargoire et Fir-miny, communes de notre arrondissement, ont donné un exemple philosophique qui gagnera de proche en proche. La première d’entre elles a consacré à la raison son église, d’où elle a fort poliment congédié ses saints honteux et lar¬ moyants de se voir sans asile ; elle y va entendre la morale des hommes libres et s’enflammer d’enthousiasme à la lecture touchante des droits de l’homme et de la Constitution. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 320. (2) Archives nationales, carton G 285, dossier 826. [ Conventien nationale.] i Courage, représentants, philosophes, d’un grand peuple qui le deviendra, courage, le règne des mômeries va finir. « Vive la République ! vive le triomphe de la raison ! « Laforêt, procureur syndic. La Société populaire de Villeneuve-sur-Landes. nouvellement épurée, adresse le procès-verbal de l’inauguration des bustes de Marat et Le Peletier. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre d'envoi du procès-verbal (2). La Société populaire de Villeneuve-des -Landes, nouvellement épurée, à la Société séante aux Jacobins, à Paris. « Villeneuve-des-Landes, le sextidi fri¬ maire, l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. <( Frères et amis, « Nous vous adressons le verbal de l’inaugu¬ ration (sic) de Marat et Le Peletier. Vous verrez que les sentiments de regret et d’estime pour ces victimes illustres de la liberté pénètrent tous les citoyens jusqu’aux lieux les plus recu¬ lés de la République. Nous mourrons tous avec eux, nous en faisons le serment solennel, ou nous assoierons sur des bases éternelles l’em¬ pire de la liberté et de la raison. Saint-Marcq fils, président ; Desetjilhès, secrétaire ; II ont an G, secrétaire. Verbal historique de l'inauguration (sic) de Marat et Le Peletier, faite à Villeneuve-des-Landes (3). Le nonidi de la 2e décade du mois de brumaire. Le comité choisi pour présider aux préparatifs de l’inauguration de Marat et de Le Peletier fit planter la veille un jeune chêne sur la place de la Fédération, auquel on a donné le nom d’arbre de la Fraternité. On eut soin de laisser toutes les racines à cet arbre afin qu’il pût être un monument à jamais durable de cette fête et que les citoyens, témoins de son accroissement, se rappelassent que bien loin de laisser affaiblir par le temps les sentiments de leur patriotisme, ils devaient, au contraire, s’enflammer chaque jour davantage de l’amour de la liberté. Le jour de la fête, on dressa une tombe funèbre plus remarquable par sa simplicité champêtre que par sa pompe. Ses plus précieux ornements étaient les symboles touchants qui distinguaient les deux illustres victimes de la liberté. On y voyait l’urne sacrée où reposaient leurs cendres, couverte d’un crêpe funèbre. A côté de ce signe lugubre, s’élevaient deux tiges de cyprès entourées de guirlandes et sur¬ montées du bonnet glorieux de la liberté. Au pied de cet arbrisseau, étaient placés les bustes des deux martyrs de la patrie et au-dessus on lisait en gros caractères : Marat n'est point mort, (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 320. (2) Archives nationales, carton G 286, dossier 842. (3) Archives nationales, carton G 286, dossier 842. 695 I ü vit parmi nous; Le Peletier satisfait par sa mort. Deux jeunes vestales, soutenant le crêpe noir, gémissaient sur la mort de ces grands hommes ; l’une portait une équerre dans sa main; l’autre, une balance, comme pour apprendre aux spec¬ tateurs que l’amour de l’égalité ne doit jamais être séparé de celui de la justice. Plus bas, pa¬ raissait une fille fraîche et robuste, image vive et naturelle de la liberté; deux républicains l’en¬ touraient de deux côtés dans une attitude fière et imposante, armés d’un sabre et d’une pique pour la défendre contre tous ses ennemis. Les citoyens, préparés pour ce spectacle, attendaient avec impatience l’ouverture de la cérémonie, lorsqu’un mauvais génie, soufflant tout à coup les vents et la pluie pendant quelques heures, nous fit craindre de ne pouvoir nous livrer à tous les transports qu’inspirait ce grand jour. Mais le Ciel, touché de la justice de nos vœux, seconda nos désirs, et fit succéder à ce temps orageux un temps calme et serein. Aussitôt les corps constitués rassemblés dans la maison commune et décorés des marques de leurs fonctions, dirigèrent leur marche vers la place de la Fédération, précédés de la garde nationale qui portait l’étendard tricolore d’un pas grave et ordonné et suivis de toute la foule des bons citoyens. A leur approche, des cris mille fois répétés de Vive la liberté! vive la République! frappent agréablement les airs. Parvenus au pied de la tombe funèbre, le corps municipal invite les orateurs, chargés de célébrer les vertus civiques des deux héros, de remplir leur glorieuse tâche. Ceux-ci montent à l’instant sur l’amphithéâtre qui avait été dressé, pro¬ noncent l’éloge funèbre de Marat et Le Peletier et méritent, par leurs discours, l’applaudisse¬ ment de tout le peuple. A peine l’éloge achevé, on alluma près du tombeau un bûcher fatal aux vaines distinc¬ tions et l’on y consuma tous les titres des sots préjugés de noblesse, tous les titres de féoda¬ lité, tous les signes de la royauté, tontes les marques des grandeurs passées. C’est ainsi que des hommes libres effacent la honte de leur esclavage et qu’ils immolent à la gloire de la liberté jusqu’aux plus frêles vestiges de l’odieuse servitude. Tel fut l’agréable encens qu’on brûla en l’honneur de Marat et Le Peletier, ces deux illustres victimes de la rage du despo¬ tisme anéanti; telle fut la plus douce récom¬ pense qu’on peut offrir à leurs travaux et à tous les efforts que leur avait coûtés l’affranchisse¬ ment de leur patrie. Pendant ce sacrifice, si flatteur pour les vrais citoyens, si douloureux pour les ennemis de l’égalité, on dansa la farandole, on chanta l’hymne de la liberté, le peuple se livra à tous les transports de la plus vive joie. La cérémonie achevée, les corps constitués et la garde natio¬ nale, revenant dans le même ordre avec lequel ils étaient partis, se réunirent sur la place de la liberté. On y reprit le chant de l’hymne sacré, et c’est en le continuant qu’on est revenu dans la maison commune. Là, un repas frugal, un repas sans linge et sans couvert, digne des Spartiates et des sans-culottes, attendait les amis de la liberté et de l’égalité. Mais les senti¬ ments qui ont assaisonné ce banquet agreste en ont surtout relevé le prix. C’est là qu’on a reconnu que les vrais républicains ne voient que des frères dans leurs semblables. Saint-Marcq, fils, président; Desetjilhès ca* det, secrétaire; Hontang, secrétaire. archives parlementaires.