[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 novembre 1789.] 654 M. Bafnave, secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance cl’hier; mais après quelques observations, il est décidé qu’il sera relu à la prochaine séance. M. le Président annonce que MM. An son et Salomon ont été nommés par l’Assemblée dans ses bureaux pour inspecter le travail des commis. M. Delabat, prieur de Saint-Léger, dont les pouvoirs ont été vérifiés, est admis en qualité de député de Soissons.en remplacement de M. Delet-tre, démissionnaire. M. le marquis de Beauharnais, suppléant de Paris dontles pouvoirs ont été également vérifiés, est admis à remplacer M. le comte de Lally-Tol-lendal démissionnaire. M. Gayla de La Garde, général de Saint-Lazare, suppléant de Paris, dont les pouvoirs ont été vérifiés, est admis en remplacement de M. Veytard, curé de Saint-Gervais, démissionnaire. M. Cochon de Lapparent, suppléant des communes du Poitou, dont les pouvoirs ont été vérifiés, est admis en remplacement de M. d’Abbaye, démissionnaire. M. Bernard, syndic du chapitre de Wissem-bourg, député des dix villes jadis impériales d’Alsace, donne sa démission et demande un passeport pour retourner dans sa province à raison de sa santé, sans attendre l’arrivée de son suppléant; sa demande est accordée. M. le Présideot communique à l’Assemblée deux lettres. L’une est de M. de Nicolaï, premier président de la Cour des comptes, contenant des observations relatives aux finances ; cette lettre est renvoyée au comité des finances. L’autre, de M. le comte de Gassini, représente que les ingénieurs occupés à lever différentes cartes de Bretagne, ont été inquiétés dans leur travail ; il demande qu’ils soient autorisés par l’Assemblée nationale à le continuer. Cette autorisation est accordée. L’ordre du jour était de suivre la délibération sur les conditions de Véligibilité ajournée jeudi dernier, toutes choses étant demeurées en état. M. le coiMte de Mirabeau demande la parole sur un objet qui n’est pas exactement àl’ordre du jour, mais qui paraît y avoir quelque rapport. En ce moment, dit-il, toutes les anciennes municipalités sont prêtes à se renouveler: lorsqu’il est question de les détruire, vous devez empêcher ce renouvellement ; c’est dans celte vue que je propose la motion suivante : « Décréter que les municipalités actuelles subsisteront jusqu’à ce que la nouvelle organisation soit arrêtée ; que cependant les échevins qui doivent sortir de place, sortiront et seront remplacés par cinq personnes pour les villes où il y a trois échevins, et par trois personnes pour les villages. Ges nouveaux officiers municipaux seront élus librement au scrutin. » M. de Praslin offre de la part des officiers, bas officiers et soldats du régiment de Beaujolais, une somme de 13,000 livres. M. le Président est chargé d’écrire à ce régiment pour lui témoigner la sensibilité de l’Assemblée. Après des débats fort tumultueux sur la question de savoir à quel point devait être reprise la la délibération de jeudi dernier, l’Assemblée regarde comme régulièrement et définitivement rendus tous les décrets qui y ont été portés. M. Target représente que, puisqu’il s’agit de reprendre la discussion sur le plan du comité, il est indispensable de mettre à la délibération un article présenté il y a peu de jours, et relatif à l’éligibilité des ministres et agents du pouvoir exécutif. Cet article est ajourné. M. Gaultier de Biauzat demande qu’on s’occupe à l’instant de l’organisation des municipalités. Trois pouvoirs, dit-il, régnent dans chaque ville : la municipalité ancienne, le comité permanent et la garde nationale. Tout annonce l’anarchie et réclame vos soins et votre activité. En créant un corps, on doit d’abord établir ses éléments; les municipalités sont les éléments du corps politique. M. Démeunier. J’opine pour que, selon un ancien décret, vous discutiez le projet de division du royaume proposé par le comité de Constitution et non l’organisation des assemblées municipales qui doit être une suite de ce projet. Après de légères discussions, l’Assemblée adopte cet avis. On fait lecture des articles du plan relatif à la division générale du royaume. M. Thouret, membre du comité de Constitution, lit un discours où il développe les motifs qui ont déterminé le comité dans ses propositions. M. Thouret (1). Messieurs, voire comité en se livrant au travail dont vous l’avez chargé, en a reconnu toute l’importance ; et il est impossible que vous n’en soyez pas pénétrés vous-mêmes, au moment où vous allez consommer ce grand ouvrage par vos décrets. Les objets traités dans les deux parties du rapport du comité, sont essentiellement la Constitution. C’est beaucoup, sans doute, d’avoir établi la permanence du Corps législatif, et d’avoir décidé comment les lois seront faites à l’avenir : mais cela ne fait pas à beaucoup près la Constitution. Les membres du Corps législatif seront des représentants de la nation; pour avoir des représentants, il faut les élire. Les administrations provinciales et municipales seront de même composées de députés élus. Il faut donc parvenir à distribuer la représentation avec égalité, d’abord entre les différentes parties du royaume, ensuite entre les différentes parties de chaque province, et fixer l’ordre des élections: il faut d’ailleurs déterminer avec précision le rang que les diverses classes d’administrations tiendront dans l’ordre des pouvoirs publics, la nature et l’étendue de leur autorité ; ou rien ne sera véritablement fait pour la Constitution. Ceci posé, il est facile de reconnaître quelles dispositions d’esprit il faut apporter au traitement de ces importantes matières. Etablir la constitution d’un grand empire, est une des plus hautes entreprises dont l'intelligence humaine puisse s’occuper. Il n’y faut donc pas employer des idées trop vulgaires, aussi nuisibles au succès de cette œuvre sublime, qu’incompatibles avec sa dignité. Etablir la Constitution, c’est, pour nous, reconstruire et régénérer l’Etat. 11 ne faut donc pas qu’une pusillanimité routinière nous tienne asti) Le Moniteur ne donne qu’un sommaire du discours de M. Thouret.