[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 août 1790.J 141 10 juin 1790. COMITÉ DES DOMAINES. ÉTAT des forêts dépendant des maisons royales à réserver au roi , par décret de l'Assemblée nationale. Paris, le 22 août 1790 (1). i< Monsieur le Président, « Leroi m’ordonne de communiquer à l’Assemblée nationale l’adresse qui a été remise à Sa Majesté par MM. les députés du Béarn, relativement au château de Pau. Le respect lilial qu’elle porte à Henri IV, son auguste aïeul, lui fait désirer que le berceau de ce grand prince soit conservé à ses descendants. « Je suis avec respect, etc. « Sire, « Vos fidèles Béarnais ont cru devoir renoncer à leur Constitution et à leurs privilèges, puisque, par ce sacrifice, ils cédaient aux dé irs et aux invitations de Votre Majesté, en contribuant au bonheur de la France ..... Mais les premiers et les plus zélés sujets de Henri le Grand, toujours pleins de sa mémoire et de ses vertus, ne pouvaient pas imaginer que le château où ce prince commença de vivre serait exposé en vente... Ils supplient Votre Majesté de le comprendre dans les domaines qu’elle conserve... Ils tiennent à ce monument précieux et à ses dépendances, plus qu’à leur fortune, plus qu’à leur vie... La ville de Pau, l’une de celles du royaume qui, dans tous les temps et dans toutes les occasions importantes, a montré le plus d’énergie et de patriotisme, et avec elle, si elle a besoin de secours, tous les habitants du pays, l’entretiendront à leurs dépens ; ils l’embelliront pour l’héritier du trône et des qualités de leur bon, de leur cher Henri... Heureux, mille fois heureux, Sire, ce peuple généreux, s’il pouvait recevoir un jour dans le berceau du roi qui sauva la France, le roi qui la (1) Cette pièce a été imprimée à la suite du mémoire de M. Guignard-Saint-Priest, quoiqu’elle u’ait été communiquée à l’Assemblée que le 22 août. régénère ! et vous y renouveler l’assurance de sa reconnaissance et de son inviolable fidélité. « Darnaudat, pour lui et les autres députés du Béarn. » (L’Assemblée renvoie à son comité des domaines, les pièces qui concernent les maisons et biens que le roi désire conserver, et décide que le rapport en sera fait dans le plus court delai possible.) M. Vieillard {de Coutances). Cent citoyens de Mautauban, ayant pour orateur M. de Maraval, notable Montalbanais, se disant député par tous les citoyens de cette ville, ont écrit à l’Assemblée nationale pour faire révoquer les ordres du roi relatifs au changement de garnison du régiment de Languedoc. Comme l’Assemblée a exprimé son vœu dans un décret postérieur à cette pétition, et avant de la recevoir, le comité pense qu’il n’y a lieu à délibérer. (L’avis du comité est mis aux voix et adopté.) M. le Président. Je propose à l’Assemblée de reprendre la suite de la discussion sur le plan d' organisation de l'armée . M. Malouet. On pourrait aujourd’hui terminer le décret sur le code général des gens de mer. M. d’Ambly. Il vaudrait mieux, je crois* ajourner celte affaire à une séance extraordinaire qui aurait lieu ce soir. (Cette motion est adoptée, et l’Assemblée décide qu’elle aura ce soir une séance extraordinaire, pour entendre la suite du décret proposé par le comité de la marine.) L’Assemblée reprend la discussion du plan du [Assemblée nationale ARCHIVES PARLEMENTAIRES [18 août 1790.) ministre de la guerre sur l'organisation de l'ar-■ mée. Divers membres demandent la parole. M. d’Estourmel. Je suis loin de m’opposer au dispositif de l’article 8; je rends au corpsdes carabiniers toute la justice qu’il mérite, mais je pense que, pour son avantage, il doit être fait à l’article une addition explicative du mode de recrutement ; j’ai été colonel d’un régiment de cavalerie, j’y ai trouvé un préjugé établi, et je crains que ce préjugé ne règne dans tous les autres régiments ; il avait pour objet de donner aux carabiniers un bel homme, sans s’attacher à examiner s’il avait toutes les qualités requises pour être admis au corps d’élite; je pense donc qu’après ces mots, ils se recruteront dans' les troupes à cheval, on doit ajouter : suivant le mode qui sera déterminé sur les règles d’admission au service ; ce mode doit être tel, que tout homme qui, dans la première année de son admission aux carabiniers, se sera mis dans le cas d’être puni, sera renvoyé dans le régiment d’où il aura été tiré, aux frais dudit régiment, un corps d’élite ne devant être composé que de gens dont l’honneur soit le seul guide. Telle est mon opinion ; elle est appuyée par trente ans d’expérience, ayant fait mes premières armes dans un corps (la gendarmerie) où l’honneur était pareillement le seul guide de chaque individu. Un membre propose un amendement qui permettrait de recruter le corps des carabiniers hors des régiments. M. d’Ambly. Les carabiniers ne seraient plus qu’un régiment ordinaire si la cavalerie ne lui fournissait pas des hommes. Je conviens qu’on leur donne souvent des éveillés un peu libertins , mais ce sont toujours les plus braves, et le corps en a donné des preuves dans toutes les occasions. M. de Eautrec rappelle que les carabiniers se sont illustrés dans différentes batailles, et ajoute : il faut, dans une armée, des corps d’élite comme celui-là, parce que leur exemple électrise toutes les troupes. (L’amendement est rejeté.) M. de Promeut demande la suppression des adjudants-majors qui ne sont que des aides-majors renouvelés. On s’est borné, dit-il, à rajeunir leur nom. M. de Wimpffen. Après une discussion très complète, le comité militaire a reconnu que les adjudants-majors étaient nécessaires dans les grands mouvements d’une armée. (L’amendement de M. de Froment est rejeté par la question préalable.) M. Prieur. L’article 16 concerne les dépenses de bureau pour lesquelles le ministre propose en bloc une somme de 1,500,000 francs; je trouve ce chiffre très élevé, et je suis surpris qu’il ne soit accompagné d’aucun état justificatif. Je demande l’ajuurnement de l’article 16. M. de Wlmpffen. Ajourner l’article, ce serait supprimer les bureaux, puisqu’il n’y aurait plus d’argent pour les payer; or, supprimer les bureaux, c’est supprimer l’armée du même coup, ce qui, je crois, n’est dans l'intention ni du préopinant ni de l’Assemblée. M. Mougins. Je demande une réduction provisoire en attendant l’impression des états contenant les détails des traitements. M. de Noailles. J’observe qu’on ne peut voter une réduction provisoire qu’en indiquant les personnes et les objets sur lesquels portera la réduction. M. Regnaud {de Saint-Jean-d' Angély). Je propose un amendement qui répondra à toutes les objections. C’est de voter le crédit pour un mois seulement, et d’ordonner en même temps l’impression de l’état justificatif de la dépense. (Cet amendement est adopté.) M. Iè Président met ensuite aux voix les divers articles et le décret est rendu eu ces termes : L’Assemblée nationale a décrété et décrète ce qui suit : Art. 1er. L’armée, à dater du premier septembre 1790, et de cette époque pour l’année 1791, sera composée de 150,848 hommes, tant officiers que soldats, dont 110,485 d’infanterie, 30,040 de troupes à cheval, 10,137 d’artillerie ou du génie. Le nombre des officiers généraux employés ne pourra pas excéder 94; l’Assemblée nationale se réserve de statuer sur le nombre des adjudants, sur celui des aides de camp, et sur le nombre des commissaires de guerre qui doivent être mis en activité pendant l’année 1791. Art. 2. Les troupes étrangères qui feront partie du nombre ci-dessus, et qui seront à la solde de la nation, ne pourront pas, sans un décret du Corps législatif, sanctionné par le roi, excéder celui de 26,000 hommes. Art. 3. Le nombre d’individus de chaque grade et dans chaque arme sera déterminé, ainsi qu’il est expliqué à l’état n°l, du ministre de la guerre, sans y comprendre l’artillerie et le génie sur lesquels il sera fait uu rapport particulier, et sauf les changements que les circonstances pourraient exiger dans les corps de l’armée. Art. 4. Le ministre proposera les changements qui pourront avoir lieu dans l’armée, dans les notes particulières qu’il adressera au Corps législatif. Art. 5. Les appointements et solde seront fixés pour chaque grade, à compter, ainsi qu’il est dit en l’état n° 2, du ministre de la guerre. Art. 6. Les régiments suisses et grisous conserveront, jusqu’au renouvellement de leur capitulations, les appointements et solde dont ils jouissent en vertu d’icelles. Art. 7. Les officiers, sous-officiers et soldats qui, par l’effet de la nouvelle formation, éprouveraient une nouvelle réduction sur leur traitement actuelle conserveront jusqu’à ce qu’ils en obtiennent un équivalent; en attendant, ils seront payés du supplément sur des états particuliers, dans la forme prescrite par les ordonnances. Art. 8. Les carabiniers serons rendus à leur institution primitive des grenadiers de la cavalerie; en conséquence, ils se recruteront dans les troupes à cheval, ou des sujets ayant fait au moins un congé dans lesdites troupes, et ils jouiront d’un soi de haute paye comme les greuadiers en jouissent dans l’infanterie.