30 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 décembre 1789.] Aux puissantes considérations déjà établies en leur faveur, ils vous supplient de joindre celle que, loin de leur être profitables les vastes bâtiments de leurs bourgs ( sur la valeur desquels doit être faite Vassiètte des nouvelles impositions) leur produisant des charges énormes et sans cesse renaissantes de réparations et reconstructions, sans parler de l’ameublement, objet purement et uniquement de spéculation pour les voyages de la cour, mais évidemment ruineux par le défaut de ces mêmes voyages, et les frais d’entretien qu’ils nécessitent. Vous pouvez préjuger, Nosseigneurs, combien est immense et leur fait de tort le vide qu’éprouvent leurs bâtiments, lorsque vous saurez que les voyages de la cour , qui seuls peuvent rétablir l’équilibre, et non l’aisance dans leur fortune, produisent une augmentation de population calculée de 15 à 18,000 personnes auxquelles ils fournissent le logement. Cette ressource détruite, que leur restera-t-il? des charges. Il serait encore une infinité de moyens puissants que la détresse de Fontainebleau pourrait vous présenter pour intéresser votre humanité ; mais, Nosseigneurs, confiants dans votre justice, les habitants se persuadent que la loi que vous avez sagement portée contre les privilégiés ne sera point pour eux l’ordre et la nécessité de la misère la plus absolue, en les confondant dans la classe des véritables privilégiés. Ah ! ce n’est point à ce titre qu’ils vous adressent leurs vœux et leurs suppliques respectueuses. Quels autres privilèges en effet leur seront propres que ceux acquis à l’indigence sur des cœurs sensibles, qui se ront une loi inviolable de la justice et de l’humanité? Ils mettent donc tout leur bonheur à espérer qu’en appréciant leurs trop justes réclamations, dans lesquelles ils se gardent bien de tenter votre bienfaisance pour le petit nombre de véritables privilégiés que renferme leur bourg, et auxquels seul la fortune permet de donner des preuves effectives de patriotisme, vous daignerez faire transmettre à MM. les députés du bureau intermédiaire de Melun vos dispositions à l’égard de la classe nombreuse presque toute infortunée des habitants, relativement au nouveau mode d’impositions, qui, s’il était exécuté sans modifications, ferait leur désespoir en achevant leur ruine. Ils croient superflu de vous répéter ici que, tels réunis que soient les efforts de leur dévouement et de leur patriotisme, s’ils ne peuvent constamment, d’après la déclaration des receveurs, compléter le payement d’une charge annuelle de 33,130 liv. 5 s., il n’est que trop évident qu’ils ne sauraient en acquitter Une de 83,130 liv. 5 s. C’est donc l’ordre de la continuité de l’ancienne fixation qu’ils sollicitent de votre justice, et ils osent espérer qu’ils trouveront d’autant moins de difficultés à l’obtenir, que le commissaire lui-même, préposé à l’assiette des nouvelles impositions, par sa lettre au comité municipal, en date du 19 décembre, ne craint par de dire qu’il est autorisé par MM. de la commission intermédiaire à avancer que, « touchés de la position où se trouvent la plus grande partie des habitants de Fontainebleau, ils ne permettront point que leurs maux soient aggravés par un accroissement d’impôts ; ils feront, au contraire, lont ce qui dépendra d’eux pour les soulager, etc. » Cette phrase seule suffit sans doute pour confirmer la vérité de l’exposé des habitants, et pour porter le calme dans leur âme, puisqu’elle leur apprend que leurs maux connus doivent être soulagés ; aussi, Nosseigneurs, la commune, jalouse de vous devoir autant qu’aux bontés de Sa Majesté, fonde-t-elle toutes ses espérances sur les principes sacrés de votre équité, qui ne vous a jamais portés à vouloir ce qui, loin d’être d’une exécution possible, achèverait d’écraser des citoyens, vos frères et les éternels et respectueux admirateurs de vos vertus, comme ils seront à jamais reconnaissants de l’acte de justice et d’humanité auquel ils devront le bonheur, et, pour ainsi dire, l’existence. Par mandement exprès de la commune du bourg royal de Fontainebleau, Giot, procureur-syndic municipal et député particulier à l’ Assemblée nationale. M. le Président lit une lettre par laquelle M. d’Albert de Rioms, arrivé à Paris, demande à être reçu à la barre de l’Assemblée pour y rendre compte de sa conduite. M. Bouche. Je demande avant tout que l’affaire de Toulon soit mise à l’ordre du jour. M. Goupilleau. M. d’Albert de Rioms ne peut être entendu qu’après le dépôt du rapport sur cette affaire. M. Malouet. M. d’Albert de Rioms est empressé plus que personne de répondre au vœu de l’Assemblée et de donner les renseignements les plus exacts sur toute sa conduite ; il est prêt à répondre à toutes les accusations qui ont été portées contre lui. M. Charles de Cornet h. Je suis bien éloigné d’empêcher M. de Rioms d’être entendu, mais il me semble que nous ne devons pas établir une discussion entre les parties surtout dans une affaire d’une nature aussi active et aussi forte : je crois qu’il faut déclarer qu’il n’y a lieu à délibérer. M. Bouehe. M. d’Albert a déjà fait distribuer à l’Assemblée un mémoire justificatif ; ainsi il a été entendu. M. Paul Nlalrac. Vous avez admis à la barre le procureur du Roi de Falaise et vous l’avez entendu dans sa propre affaire. Vous ne pouvez avoir deux poids et deux mesures. M. Malouet. Afin de ne pas interrompre l’ordre de vos travaux, je propose de renvoyer cette affaire à deux heures. L’Assemblée renvoie cette affaire à deux heures après le rapport du comité. M. le Président fait lecture d’une lettre écrite par les citoyeqs de la ville de Rennes à laquelle est jointe une adresse contenant des détails sur le refus qu’a fait la chambre des vacations du parlement de Bretagne de rendre la justice : elle est terminée par la demande de nommer incessamment des officiers pour remplir les fonctions de cette chambre, au cas que ceux qui seront pris dans le parlement pour les remplacer ne voulussent pas satisfaire à ce devoir.