SÉANCE DU 26 BRUMAIRE AN III (16 NOVEMBRE 1794) - N°s 5-6 293 5 Le citoyen Gentil, qui a perdu un bras en combattant les ennemis de la République, demande du service. Mention honorable, renvoi au comité Militaire (52). 6 La commission centrale de bienfaisance soumet à la Convention nationale des observations sur la distribution des secours. Renvoyé au comité des Secours publics (53). On lit la pièce suivante (54) : La commission centrale de Bienfaisance des quarante-huit sections établie à Paris, par décret du 28 mars 1793 (vieux style), à la Convention nationale. Représentans du peuple, L’intérêt sacré de soixante-dix mille indigens amène à votre barre les membres de la commission centrale de bienfaisance. En déclarant, par votre décret du 23 messidor dernier, dettes nationales, les créances passives des établissemens de bienfaisance, et propriété nationale, leur actif, vous avez ordonné que les administrateurs de ces établissemens rendroient leurs comptes pour le premier vendémiaire, et continueroient jusqu’à cette époque d’acquitter les intérêts de la dette constituée ou viagère. Vous avez encore ordonné que la commission des Secours pourvoiroit, avec les fonds mis à sa disposition, aux besoins que ces établissemens pouvoient avoir, pour le paiement des intérêts ci-dessus mentionnés, ou pour leur dépense courante, jusqu’à ce que la distribution des secours soit définitivement décrétée. La commission centrale s’est empressée de satisfaire à la première partie de ce décret, en rendant et affirmant son compte et en déposant la totalité des propriétés des indigens, représentant un capital de plus de 13 millions. Elle n’eût rempli que la moindre partie de ses obligations, si, se bornant à ce double dépôt, elle n’eût pas veillé à ce que les indigens confiés à sa sollicitude n’eussent point à souffrir d’une mesure qui, avant l’organisation définitive des secours, ôtoit de leurs mains leurs capitaux. Aussi s’est-elle hâtée de porter ses réclamations à votre comité des Secours, qui, de concert avec la commission des Secours publics, avoit arrêté qu’il seroit payé, chacun des trois mois (52) P.-V., XLIX, 228. (53) P.-V., XLIX, 228. (54) Débats, 784, 796-798. d’été, une somme de 36000 L, pout mettre la commission centrale en état de continuer la distribution qu’elle n’a cessé, depuis sa création, de faire chaque mois aux comités de bienfaisances des sections. Déjà ces comités avoient touché les mois messidor et thermidor, lorsqu’une difficulté élevée, tant à la Trésorerie nationale que par votre comité des Finances, a subitement paralysé cette distribution, aussi urgente qu’indispensable. Est-elle fondée, ou non, cette étonnante difficulté? Si elle ne touchoit qu’à l’intérêt particulier de la commission centrale, elle eût gardé le silence ; mais c’est l’intérêt des indigens que cette difficulté compromet. Chargée spécialement de cet intérêt sacré, la commission centrale ne peut, sans manquer à ses devoirs, se taire plus long-temps. Qu’il lui soit permis de retracer rapidement les principes. Les secours nécessaires aux indigens sont un devoir naturel ; pour être efficaces, ces secours ne doivent jamais se faire attendre. Chaque instant les besoins renaissent; et quant à la majeure partie, il est impossible de les prévoir et de les calculer. De là la conséquence évidente que toujours des fonds d’avance doivent donner à ceux chargés de distribuer ces secours, l’heureuse possibilité de prévenir en quelque sorte les besoins. C’est sur cette base que la commission centrale a distribué chaque mois, une somme quelconque aux comités de bienfaisance, en raison de la masse de leurs indigens. Par quelle fatalité cette marche, si simple et si facile à surveiller, se trouve t-elle aujourd’hui contrariée, et quelle est celle qu’on veut y substituer? Sous le motif que la Trésorerie nationale ne doit payer que sur des pièces comptables, on oppose que le contingent des sections ne peut, chaque mois, être délivré que sur les quittances des différens fournisseurs, vérifiées par les comités de bienfaisance, et ordonnancées par la commission centrale. Mais outre le détail immense et inextricable d’une pareille opération qui, présentant au moins un millier de fournisseurs, nécessiteroit chaque mois plus de mille ordonnances, au lieu de quarante-huit seulement qu’exige la comptabilité des trésoriers; qui ne voit que cette mesure viole ouvertement ce principe sacré, si solemnellement reconnu, que les secours publics doivent toujours être payés d’avance. Il est évident que cette mesure force les fournisseurs à un crédit plus ou moins long, que leurs facultés souvent ne leur permettent pas de faire. Il se présente beaucoup d’autres incon-véniens : mais jetons un voile sur ce tableau déchirant pour des âmes compatissantes; bornons-nous à croire que le résultat eût été de priver, depuis près de trois mois, les indigens de leur pain journalier, si l’active sensibilité des comités de bienfaisance ne leur eût fait trouver quelques ressources que désormais il ne leur est plus permis d’espérer. Citoyens Législateurs, vous avez solemnellement décrété que les secours publics sont une