15 [Assemblée nationale./ ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 mars 1790.] Art. 19. Toutes les corvées, à la seule exception des réelles, sont supprimées sans indemnité. Seront réputées corvées réelles celles qui ne sont dues qu’à cause de la propriété d’un fonds ou d’un droit réel, et dont on peut se libérer en aliénant ou déguerpissant le fonds ou le droit. M. SLanjuinais. Il y a deux sortes de corvées réelles dans le sens de l’article du comité. Celles qui sont dues à cause de la propriété d’un fonds, et celles qui sont seulement fondées sur la coutume, sur l’usage du pays, sur le fief, sur la jurisprudence des arrêts rendus par des magistrats propriétaires de fiefs : ces dernières doivent être abolies sans indemnité. Il est encore des corvées réelles trop bizarres, trop humiliantes, trop outrageantes pour être conservées ; telles sont la chevauchée, la quintaine, le saut du poisson, etc. Toutes ces corvées, sujétions, ou autres semblables, doivent être abolies sans indemnité. Il me ' semblerait convenable d’assurer, par un troisième amendement, aux corvéables ou débiteurs de la corvée, le droit de s’en libérer suivant l’estimation qui serait faite. M. Goupil de Préfeln propose de rédiger ainsi l’amendement auquel donne lieu la seconde observation deM. Lanjuinais. « Toutes sujétions qui, par leur nature, ne peuvent apporter aucune utilité réelle à celui auquel elles sont dues sont supprimés sans indemnitée. » M. Defermon. En vous proposant de supprimer toutes les corvées fondées seulement sur la coutume, sur l’usage du pays ou sur la jurisprudence des arrêts, mon collègue n’a pas développé ces objets. Par exemple, il vous aurait parlé de corvées de collectes, réservées aux fonds roturiers et aux personnes roturières; c’est une corvée vraiment mixte, vraiment personnelle.il faut adopter l’amendement par un léger changement dans la rédaction de l’article. — M. Defermon propose ce changement. M. Garat Vaine. Il faut supprimer cette espèce de corvées; cette suppression est prononcée par la destruction du régime féodal. Si vous ne la reconnaissiez pas, ce régime subsisterait encore en entier. M. Merlin. Il n’est pas possible d’adopter cet amendement. Il se peut que le parlement de Bretagne ait abusé de son autorité pour étendre les corvées réelles ; mais en cherchant à réparer cette injustice, voulez-vous être injustes envers les possesseurs de corvées réelles dans tout le royaume? Toute corvée pour propriété de fonds ne peut être détruite; toute corvée, dont on peut selibé-rer en déguerpissant le fonds, ne peut être détruite : voilà le principe. La question préalable est invoquée sur l’amendement appuyé par M. Defermon. Get amendement est adopté. M. Pison du Gai ami. Il faut mettre aux voix l’article et l’amendement qui vient d’être adopté. On fera un article à part de celui qui a rapport aux sujétions. Ces deux articles sont décrétés en ces termes : • Art. 19. Les corvées, à la seule exception des corvées réelles, sont supprimées sans indemnité; et seront réputées corvées réelles celles qui seront prouvées être dues pour la concession d’un fonds ou d’un droit réel. Art. 20. Toutes sujétions qui, par leur nature, ne peuvent apporter aucune utilité réelle à celui auquel elles sont dues, sont supprimées sans indemnité. M. SSouche. Je propose de décréter sans délai un article qui porte sur un droit seigneurial très oppressif, et que voici. « Toute clause prohibitive de clore les biens vendus et accensés par les ci-devant seigneurs est abolie sans indemnité. » M. Merlin. L’article qui vous est soumis par M. Bouche a déjà été porté à votre comité féodal qui n’a pas cru devoir vous le présenter avant de l’avoir sévèrement discuté : il faut, sur cette question, consulter les baux à cens et les titres. On m’objecte que les titres n’existeront peut-être plus; mais alors la clause est supprimée par elle-même, et le décret devient inutile. Je pense donc que cet article doit être ajourné. M. Prieur. Je demande que l’article soit ren voyé à l’examen du comité féodal. M. Goupil de Préfeln. Je demande la question préalable. M. Démeunier. J’en demande l’ajournement jusqu’à ce que le comité d’agriculture ait été entendu, et j’en fais la motion expresse. Cette motion est appuyée, mise aux voix et décrétée. On fait ensuite lecture de l’article 21. Il est ainsi conçu : Le droit de triage, auquel les biens concédés en propriété par les seigneurs aux communautés d’habitants ont été assujettis par l’article 4 du titre XXV de l’ordonnance des eaux et forêts de 1669, est aboli pour l’avenir. Plusieurs amendements sont proposés, et après une courte discussion, l’article est décrété dans la forme suivante : « Art. 21. Le droit de triage, établi par l’article 4 du titre XXV de l’ordonnance des eaux et forêts de 1669, est aboli. » M. le Président. L’Assemblée va se retirer dans ses bureaux pour procéder à la nomination du comité colonial ; mais avant de nous séparer, j’invite M. le rapporteur à donner lecture des articles adoptés dans cette séance, tels qu’ils se trouvent définitivement rédigés et selon le numérotage qu’entend leur donner le comité. M. Merlin, rapporteur , fait cette lecture ainsi qu’il suit : Titre second. Art. 16. Toute redevance ci-devant payée par les habitants à titre d’abonnement des banalités, de la nature de celles ci-dessus supprimées sans indemnité, et qui n’étaient point dans le cas des exceptions portées par l’article 15, est abolie et supprimée sans indemnité. Art. 17. L’Assemblée nationale fait défense aux ci-devant baniers d’attenter à la propriété des moulins, pressoirs, fours et autres objets de la banalité desquels ils sont affranchis par l’art. 145 ; met ladite propriété sous la sauvegarde de la loi, et enjoint aux municipalités de tenir la main à ce qu’elle soit respectée. Art. 18. Toutes les corvées, à la seule exception des réelles, sont supprimées sans indemnité, et ne