[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 19 bruma.re an il 657 19 novembre 1793 fénérale a fait arrêter dans le moment où. ils taient chargés d’une commission bien chère à leur cœur; et certes ce comité n’a pu être trompé que par le petit nombre de ceux qui regrettent les abus dont ils profitaient. « Le sextidi 16 brumaire (1), au moment où les députés de la commune de Mennecy ap¬ portaient à cette barre l’argenterie de leur ci-devant église, et les affublements inutiles de son prêtre, un gendarme s’est présenté à l’auberge où ils logeaient, et a demandé qu’on lui remît les ohandeliers, ornements, croix, bannières, etc., pour les conduire au district de Corbeil, et que tous les députés l’y accompagnassent. On lui a demandé ses ordres; ils portaient d’arrêter seu¬ lement cinq desdits députés : ces derniers ont obéi à la loi et ont laissé à leurs collègues le soin d’exécuter le sage arrêté de la commune. « Pendant ce temps, d’autres gendarmes en¬ levaient de Mennecy d’autres habitants; et il en est, dans les maisons desquels on est allé faire des perquisitions, et qui auraient été arrêtés, s’ils se fussent tfouvés chez eux. « Soit adresse, soit étourderie, car la haine, et surtout la haine religieuse, raisonne toujours mal, on a compris dans ces arrestations, quelques personnes qui n’ont pas paru à l’assemblée qui a proscrit la dépense inutile du clergé de Mennecy. « Ainsi, dans le moment où vous nous accueil¬ liez à cette barre, dans le moment que vous re¬ ceviez nos calices pour faire le paiement de nos troupes, nos linges pour étancher le sang de nos blessés, nos bannières même, pour les transfor¬ mer en guidons patriotes, des ordres surpris à la religion de notre comité plongeaient, au nom de la Convention nationale, dans une malheu¬ reuse captivité, une partie de ceux qui étaient chargés de vous les offrir. « On s’était bien gardé de déclarer à votre comité quel était le motif des arrestations qu’on sollicitait près de lui; mais il n’est pas permis de révoquer en doute, d’après les demandes du gendarme quel était le but que se proposaient les dénonciateurs; car un homme chargé d’ar¬ rêter des gens regardés comme suspects, eût-il commencé par demander, contre la teneur de ses ordres, les croix et les bannières, si ces der¬ niers objets n’eussent été ceux dont on désirait prévenir la fonte? « Avec quelque adresse que se soit masqué l’homme qui a sans doute le plus participé à faire tomber, sur d’excellents patriotes, la peine qui ne doit être que le partage du crime, on ne peut méconnaître celui auquel l’arrêté delà commune de Mennecy enlève 1,500 livres de revenu, et la jouissance d’une magnifique maison : trop ha¬ bile dans l’art de feindre, il se sera sans doute bien gardé de paraître, et aura fait agir ceux qu’il a séduits sous le prétexte que nous voulions abo¬ lir la religion. Loin de nous cette pensée, citoyens législateurs ! nous professons tous cette religion que vous nous avez annoncée, et que nous trouvons dans l’Evangile des Droits de l’homme : l’humanité est en la base; c’est sur celle-ci qu’est établie solidement l’humanité couronnée par la liberté. Nous ne voulons point faire aux autres ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît. Et ceux qui, à cette religion primitive, veulent (1) Voy. ci-dessus, séance du 16 brumaire an II, p. , , . , l’admission à la barre des citoyens de Men¬ necy. en joindre une autre, trouveront toujours sûreté et protection parmi nous, pourvu qu’ils ne sortent pas des bornes que leur prescrit l'éga¬ lité. « Le rabbin juif, le prédicant luthérien, le ministre calviniste et le prêtre catholique peu¬ vent venir exercer leur culte dans notre com¬ mune; ils y trouveront, eux et leurs sectaires, la liberté la plus entière; mais de la même ma¬ nière que l’État ne loge pas, ne nourrit pas, ne paie pas les trois premiers, nous demandons à ne plus payer, nourrir et loger le quatrième; car nul ne doit être contraint de payer le ministre d’un culte auquel il ne croit pas. « Les pères, les mères, les épouses, les enfants désolés des victimes du fanatisme, viennent vous supplier de leur rendre leurs enfants, leurs maris et leurs pères : vos champs vous redemandent leurs cultivateurs; et comme aucun de nous n’a le projet de procurer la liberté à des coupables, nous nous bornons à solliciter de votre justice un décret qui ordonne à votre comité de sûreté générale de vous faire le plus prompt rapport des motifs de l’ordre d’arrestation lancé contre les habitants de la commune de Mennecy : nous laisserons sous la hache de la loi ceux des accusés dont nous ne pourrons prouver que le véritable crime est d’avoir fait profession de patriotisme, abjuration du fanatisme et proclamation de la parfaite égalité entre les divers cultes qui peu¬ vent partager l’esprit humain et soumettre malheureusement sa raison. « Signé sur la minute : Aubin; Jenret; Ber-nateau; Leloup; Baran; F. Clouet; Leblanc; Gervaise; Jean-Baptiste Hi-VERT; LoiSEAU ; GrUERIN ; VAURY; Marc; Avril; Guérin; Louis Rem y; Laurent Fournier; Gremilly; Grivotte; Delton; Turquois et autres au nombre de 88 qui ont fait leur signature à la marque d'une croix. » Le Président a répondu aux pétitionnaires et ils furent admis aux honneurs de la séance. PÉTITION A LA SOCIÉTÉ POPULAIRE SÉANT aux Jacobins, le même jour (1). « Citoyens, amis et frères, « Des hommes qui professent la créance que vous avez propagée, des hommes, qui, dépouillés de tous les préjugés que cette société a vaincus, sont en butte à la persécution du fanatisme et ont été enlevés et à leur commune et à leur Société populaire dans le moment même où ils apportaient à la Convention les dons de leur commune, sont ceux dont nous sommes venus réclamer auprès de la Convention la liberté ! « Nous demandons, à double titre, et de pa¬ triotes persécutés, et de membres de la Société populaire, les secours que la société mère doit à tous ses frères et qu’elle a juré d’accorder au nom de l’humanité à tous les hommes. « Donnez-nous, frères et amis, des défenseurs officieux actifs et vigilants ; et pour vous assurer que le fanatisme seul cherche à nous opprimer, {1) Bibliothèque de la Chambre des députés » Collection Portiez (de l'Oise), in-4°, t. 45, n° 25. lre SÉRIE, T. LXXVIII. 42 658 (Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { J�rumaire an» et que nous avons besoin de secours contre cet hydre toujours renaissant, nous vous conjurons d’entendre la lecture de la pétition que nous avons présentée ce matin à la Convention natio¬ nale; elle contient nos griefs et nos moyens. 90 hommes et femmes exilés de leur commune attendent la réponse de la Convention et ré¬ clament la sollicitude de leurs confrères. » (Ici, a été lue la pétition à la Convention natio¬ nale.) « Telle est notre pétition, frères et amis, et nous comptons sur vos bons offices pour l’ap¬ puyer, avec d’autant plus de confiance, que la Société populaire de Mennecy avait arrêté de solliciter l’affiliation avec cette société mère, et que l’ enlèvement de plusieurs de nos membres, et la suite que les autres sont obligés de donner à l’affaire qui les en a privés, est la seule cause pour laquelle nous ne pouvons vous communi¬ quer que l’extrait qui contient leur vœu à cet égard. » Les pétitionnaires, après une réponse satisfai¬ sante, furent admis à la séance. II. Lettre du ministre de l’intérieur rela¬ tive AUX RÉPARATIONS A EXÉCUTER DANS LES ÉGLISES ET PRESBYTÈRES (1). Suit le texte de la lettre d'après un document des Archives nationales (2). Le Ministre de l'intérieur, au citoyen Président de la Convention nationale. « Paris, le 18 brumaire de l’an II de la République une et indivisible. « Le décret rendu dans la séance du 16 de ce mois, qui autorise les corps administratifs à prononcer définitivement sur les suppressions, réunions et circonscriptions de paroisses, va donner heu à une foule de décisions que je dois porter sur les demandes en réparations d’églises et surtout de presbytères qui sont restées en sus¬ pens par défaut de décrets de circonscriptions ou qui pourraient me parvenir par la suite. « Je te prie, citoyen Président, d’inviter la Convention nationale à examiner si ces répara¬ tions continueront à rester à la charge du Trésor public, ainsi qu’il est ordonné par la loi du 15 mai 1791. Dans le cas de l’affirmative, suis-je autorisé à consulter directement les habitants mêmes des communes où il se trouve¬ rait des réparations à faire, sur leur intention de conserver ou non leurs institutions religieuses du culte catholique! Déjà plusieurs communes se sont élevées à la connaissance précieuse que (1) La lettre du ministre de l’intérieur n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 19 bru¬ maire an II; mais l’original qui existe aux Archives nationales se trouve dans le dossier de cette séance et porte en marge le n° 56, c’est-à-dire qu’un extrait de cette lettre devrait figurer au procès-verbal immédiatement avant la lettre de Laplanche, que nous reproduisons ci-dessus (voy. p. 651) et qui porte le n° 57. (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 736. les seuls devoirs de l’homme sont renfermés dans les devoirs du citoyen, et que la pratique des vertus sociales est soumise aux seuls principes de la morale; les communes qui suivraient cet exemple de sagesse n’auraient plus besoin d’in¬ termédiaires corruptibles et souvent imposteurs entre elles et l’auteur de la nature; alors il serait inutile de conserver des bâtiments qui pour¬ raient être employés d’une manière plus avanta¬ geuse pour la République. « Paré. » III. PÉTITION DE LA COMMUNE DE CHEUX, DISTRICT de Caen, département du Calvados (1). Suit le texte de cette pétition d'après un docu¬ ment des Archives nationales (2). « Le conseil général de la commune de Cheux, chef-lieu de canton, district de Caen, départe¬ ment du Calvados, assemblé au heu ordinaire de ses séances, s’empresse de témoigner à la Conven¬ tion nationale son vœu et celui de tous ses concitoyens pour que ladite Convention soit et reste permanente et à son poste jusqu’à la paix, méritant entièrement la confiance de tous les bons citoyens. Tel est le désir dudit conseil général. « Ce même conseil général, instruit que la Convention vient de rendre un décret qui pro¬ nonce l'incompatibilité des fonctions de notaire avec cehes de juge de paix, ledit conseil général prend la respectueuse hberté d’observer que dans le courant de septembre dernier, les re¬ présentants du peuple, commissaires députés près de l’armée des côtes de Cherbourg, résidant à Caen, ont nommé le citoyen Hébert, notaire en notre bourg, notre juge de paix provisoire, sans être tenu de faire son option et sans que son emploi puisse être réputé vacant, au heu et place du citoyen Lantin, mis en arrestation. Cette nomination a été ratifiée avec satisfaction par toutes les communes de notre canton pré¬ sentes à son installation. « Nous sollicitons de la Convention et desdits citoyens représentants du peuple à Caen aux¬ quels nous devons témoigner notre reconnais¬ sance de toutes les opérations et du zèle qu’ils apportent à ce que la République soit et vienne à sa perfection, de vouloir bien, par exception ou autrement, continuer ledit citoyen Hébert, notaire, juge de paix de notre canton, n’ayant personne plus que lui en état de remphr ces fonc¬ tions, et y étant très utile pour maintenir l’es¬ prit de notre répubhque; d’ ailleurs, n’ayant jamais cessé de donner des preuves et des mar¬ ques sensibles de son patriotisme et de son ci¬ visme, ayant même un cœur et une âme désin¬ téressés et s’étant toujours comporté de même et avec une conduite autant exemplaire que régulière, chargé de huit enfants. (I) La pétition de la commune de Cheux n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 19 brumaire an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, on lit î « L’ordre du jour, 19 brumaire an ÏI, Fourcroy, secrétaire. * (2) Archives nationales, carton C 279, dossier 752.