[Convention nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 12 brumaire an II 181 1 • 12 novembre 1793 Sur la proposition d’un autre membre [Bau¬ dot et Gauthier] (1). « La Convention nationale décrète que ceux qui seront prévenus d’avoir pris part aux cons¬ pirations qui ont éclaté dans Bordeaux et Lyon, seront renvoyés aux tribunaux révolutionnaires ou Commissions militaires établies dans ces deux villes pour le jugement des coupables (2). » . Compte rendu du Moniteur universel (3). Baudot. Nos collègues à Bordeaux m’ont chargé de vous rendre compte de leur conduite. La révolution s’y est faite en silence, elle n’en est pas moins inébranlable. La Commission prétendue de Salut pubilc disait qu’elle voulait la République, en employant tous les moyens pour la détruire. Vous connaissez ses attentats, je ne reviendrai pas là-dessus. Notre premier plan fut de ne point l’attaquer d’abord de vive force, parce que nous n’avions pas un assez grand nombre d’bommes. Nous commenç⬠mes par nous emparer de toutes les fortifica¬ tions qui environnent la ville de Bordeaux. Nous y trouvâmes un bataillon qui portait le nom de la Gironde; nous T envoyâmes dans un lieu où il ne pouvait être dangereux, après lui avoir donné des officiers patriotes. Bientôt nous fûmes maîtres du Château-Trompette, dans l’intérieur de la ville; alors nous déclarâmes nos projets. La Commission, sentant sa faiblesse, tenta de s’échapper. Plusieurs de ses membres ont été pris et punis. Il y en a huit dans les prisons de Paris; il faut les renvoyer à Bordeaux, parce que l’exemple aura plus d’effet là qu’ici. Une exécution remarquable est celle de l’ex-député Birotteau, que nous avions pris sur le vaisseau le Corsaire , sur lequel il se préparait à une expédition au profit de la République. Vous sentez combien ses intérêts eussent été en bonnes mains. Il était avec le secrétaire de Brissot. Il nous a fait un aveu bien précieux en convenant que s’ils eussent été vainqueurs, ils nous auraient fait guillotiner. Nous avons trouvé aussi le député du Cal¬ vados, Cussy, qui a subi la peine due aux fédé¬ ralistes. Le traître, l’infâme Lavauguyon, ce scélérat qui a opéré la contre-révolution à Toulon, a péri sur l’échafaud. Nous avons fait aussi punir le maire de Bordeaux, homme riche de dix millions et fécond en ressources d’esprit, et que ceux des habitants qui n’étaient pas de vrais sans-culottes avaient fait un dieu. Nous avons pris un arrêté pour faire changer provi¬ soirement le nom du département de la Gironde en celui du Bec d'Ambez. Nous demandons à la Convention d’approuver cet arrêté. La Convention approuve l’arrêté. Baudot. Une bonne opération que nous avons faite est le désarmement de tous les aristocrates. Vingt mille fusils nous ont été apportés. Il est impossible de voir plus de pré-(1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, cafton C 277, dossier 730. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 275. (3) Moniteur universel [n° 43 du 13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 176, col. 2], Voy. d’autre part ci-après, annexe n° 1, p. 197, le compte rendu de la même discussion publié par divers journaux. cision et plus d’intelligence qu’on n’en a mis dans cette opération. Le château Trompette est rempli d’armes qui seront bien utiles à la défense de l’Etat. Nous pouvons vous assurer que Bordeaux est entièrement à la République. Il n’y a pas une voix récalcitrante. Cependant, avec la meilleure volonté, ils n’ont pas la mesure révolutionnaire; ils sont encore dans l’enfance. Quand à l’état actuel, la Conven¬ tion peut regarder comme certain que tous les délits politiques de la ville de Bordeaux seront effacés par les sans-culottes, disposés à faire tout ce que vous voudrez. Nos collègues Tallien et Ysabeau restent à Bordeaux; ils ont encore beaucoup d’occupations. La régénération de Bordeaux est un événement des plus heureux pour la République. J’insiste pour que la Con¬ vention renvoie à Bordeaux les 8 membres de la Commission populaire. Il ne faut que 8 minutes pour les juger. Thuriot. Il y en a eu 3 jugés ce matin. La Convention décrète le renvoi des 5 autres membres. Sur la proposition d’un membre [Beffroy (1)], la Convention nationale ajourne la discussion sur le rapport présenté par la Commission des sub¬ sistances [Coupé {de l’Oise), rapporteur (2)], rela¬ tivement aux grandes exploitations, au 1er du mois prochain. Le comité de législation et celui d’agriculture se réuniront pour présenter à cette époque le Code rural à la discussion, et le projet du comité des subsistances y sera pris en considération (3). Compte rendu du J ournal de la Montagne (4). Coupé (de l'Oise) appelle l’attention sur les abus des grandes exploitations rurales et les (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 277, dossier 730. (2) D’après les divers journaux de l’époque. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 276. (4) Journal de la Montagne [n° 154 du 13e jour du 2e mois de l’an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 1131, col. 2]. Le compte rendu du Journal de la Montagne n’est qu’un résumé du rapport présenté par Coupé dans la séance du 25e jour du 1er mois de l’an II. (Voy. Archives parlementaires, lre série, t. LXXVI, p. 632, col. 2.) D’autre part, le Moniteur universel [n° 44 du 14 brumaire an II (lundi 4 no¬ vembre 1793), p. 179, col. 3], V Auditeur national [n° 407 du 13 brumaire an II (dimanche 3 novem¬ bre 1793), p. 3], le Journal de Perlel [n° 407 du 13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 267] et le Mercure universel [13 brumaire an II (dimanche 3 novembre 1793), p. 46, col. 1] rendent compte du projet présenté par Coupé (de l’Oise) dans les termes suivants : I. Compte rendu du Moniteur universel. Coupé (de l'Oise), au nom de la Commission des finances, présente un projet de décret relatif à l’ex¬ ploitation des biens ruraux. Ce projet est ajourné jusqu’au 1er du mois nro-chain. II. Compte rendu de Y Auditeur national. Coupé (de l'Oise) fait un rapport sur les moyens de multiplier les objets de subsistances; en obligeant 182 [Convention nationale, [ ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j | Novembre ïraj1 moyens de multiplier les subsistances. La terre sera mieux cultivée, dit -il, lorsqu’elle le sera - par petites portions ; elle sera plus riche, lorsque le cultivateur cessera d’être mercenaire; elle sera plus variée lorsque chaque portion de terrain fournira aux besoins d’une famille. Cependant il y a tel sol dont la culture ne pourrait se soutenir sans une certaine ai¬ sance de la part du fermier, à cause des avances qu’elle exige. 11 est donc sage de proposer un maximum, afin de contenir l’injuste aridité, et de laisser une latitude salutaire à l’émulation, aux entreprises laborieuses du cultivateur. La plus grande richesse d’une récolte est dans sa variété. Il faut donc favoriser toutes les espèces de subsistances. Il en est une surtout qui est un pain tout formé par la nature et qui Se reproduit avec une abondance prodigieuse, sa culture est facile et toujours assurée : c’est la pomme de terre. Cessons de dépendre «Tune seule production. Que la tranquillité, que l’existence d’une nation entière ne soit plus attachée à la réussite ou à la privation du froment. Il est de notre prévoyance de faire en sorte que notre subsistance, comme notre liberté, soit désormais à l’abri de tous les événe-- ments. La discussion du projet présenté à la suite de ces réflexions est ajourné à quinzaine. Au nom du comité de législation, le décret sui¬ vant est rendu : La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de législation [Merlin l(de Douai), rapporteur (1)] sur la pétition du citoyen Vassal contre l’arrêté des administrateurs du district de Rozay, départe¬ ment de Seine-et-Marne, du 9 de ce mois, gui lui enjoint de faire évacuer, sous trois jours, sa maison, qualifiée « château », située dans la com¬ mune de la Fortelle, et ordonne que cette maison sera démolie à ses frais, comme étant comprise dans le décret de la Convention nationale, du 38 du 1er mois de la présente année, et dans l’arrêté pris, le 3 brumaire courant, par le citoyen Dubouchet, représentant du peuple, député dans le département de Seine-et-Marne; les propriétaires de terres et les fermiers à planter en pommes de terre un nombre déterminé d’arpents. Le projet de ce décret a été ajourné jusqu’au rap¬ port qui doit être fait sur le Code rural. III. Compte rendu du Journal de Perlet. Coupé présente un projet de décret relatif aux grandes exploitations. On en décrète l’ajournement. Les comités d’agriculture et de législation présen¬ teront au 1er frimaire le Code rural. IV. Compte rendu du Mercure universel. L’Assemblée a décrété diverses propositions rela¬ tives aux grandes fermes et la défense à tous culti¬ vateurs ou fermiers d’exploiter plus d’une ferme. (IJ D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 277, dossier 730. « Décrète que la pétition et l’arrêté ci-dessus seront envoyés au représentant du peuple Dubou¬ chet, qui, après vérification faite de l’état de la maison dont il s’agit, statuera, tant sur le point de savoir si elle est dans le cas de la démolition, que sur les autres objets de la réclamation du citoyen Vassal; « Surseoit, jusqu’à la décision qui sera défini¬ tivement prise par le citoyen Dubouchet, à la démolition ordonnée par l’arrêté du district de Rozay; « Charge ses comités de la guerre et de législa¬ tion de lui présenter incessamment leurs vues sur le mode d’exécution du décret du 38 du 1er mois. « Le présent décret ne sera point imprimé. Il en sera sur-le-champ adressé des expéditions manuscrites, tant au représentant du peuple Du¬ bouchet qu’aux administrateurs du district de Rozay (1). » Un membre du comité de législation [Camba¬ cérès, rapporteur (3)] fait adopter le décret sui¬ vant (3) : « La Convention nationale, après avoir entendu lefrapport de son comité de législation, décrète ce qui suit : Art. Ie1*. « Les enfants actuellement existants, nés hors du mariage, seront admis aux successions de leurs père et mère, ouvertes depuis le 14 juil¬ let 1789. « Ils le seront également à celles qui s’ouvri¬ ront à l’avenir, sous la réserve portée par l’ar¬ ticle 10 ci-après. Art. 2. «"Leurs droits de successibilité sont les mêmes que ceux des autres enfants. Art. 3. « Us ne pourront néanmoins déranger de leur chef les partages faits; mais ils prendront leur portion sur les lots existants. Art. 4. « Si le père ou la mère de l’enfant né hors du mariage a transmis ses biens en tout ou en par¬ tie, soit ab intestat , soit par disposition, à des pa¬ rents collatéraux ou à des étrangers, ceux-ci, lors de la remise qu’ils feront à l’enfant né hors du mariage, pourront retenir le sixième de ce qui leur est échu, ou de ce qui leur a été donné. Art. 5. « Dans tous les cas, les enfants nés hors du mariage seront tenus de recevoir les biens en (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 276. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 277, dossier 730. (3) Voy. ci-dessus, séance du 9 brumaire, le rap¬ port de Cambacérès et séance du 11 brumaire, la discussion à laquelle il a donné lieu.