288 [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 mars 1791. | comité vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, coosidérant les circonstances particulières qui ont précédé et suivi les désordres qui ont eu lieu à l’époque des mois de i'uillet et août 1789 dans la ci-devant province du lâconnais, décrète : « Qu’il ne sera continué ni intenté aucunes poursuites civiles ni criminelles pour les désordres qui ont eu lieu dans la ci-devant province du Mâconnais, dans le cours des mois de juillet et d'août 1789, non plus que pour les événements qui en ont été la suite; elle invite tous les habitants de cette partie de l’Empire à faire à la tranquillité publique le sacrifice de leur ressentiment, et à oublier des événements dont le souvenir ne pourrait que leur rappeler des malheurs, éterniser des haines et perpétuer les troubles. « L’Assemblée charge son président de porter incessamment le présent décret à la sanction du roi » Plusieurs membres à gauche : Aux voixl aux voixl M. de Murinais. Messieurs, je dois vous faire apercevoir que M. le rapporteur vous a Seint, comme des brigands, les citoyens de âcon qui se sont dévoués au maintien des propriétés ( Murmures )...; il les a peints, pour ainsi dire, comme des assassins. Il faut que vous sachiez que le premier devoir de l’homme est la légitime défense. Or, Messieurs, je crois qu’il est très impolitique, très imprudent, de dire que des citoyens qui défendent leur vie, leurs propriétés attaquées, puissent être regardés comme des perturbateurs et des assassins publics, et poursuivis en conséquence. 11 fautque vous sachiez qu’à Mâcon positivement, l’élite des jeunes gens s’est réunie contre des brigands incendiaires, contre des gens peut-être égarés, mais qui n’en étaient pas moins des scélérats. Ges jeunes gens ont fait un acte digne de l’estime publique. Je ne m’oppose pas au décret : mais je m’oppose à ce qu’on attaque, comme des scélérats, des gens qui protègent les propriétés. Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Dufraisse-Duchey. Je rends, moi, l’Assemblée nationale responsable des malheurs qui pourront résulter du décret qu’on vous propose. Plusieurs membres: Aux voix! aux voixl (L’Assemblée, consultée, adopte le projet de décret du comité.) M. de Folle ville. Je demande à proposer un article additionnel. Je crois que l’Assemblée nationale a outrepassé ses pouvoirs, a violé les droits les plus légitimes de la société, en ôtant les moyens d’obtenir les réparations légitimes et naturelles. Certes, vous ne pouvez pas disposer des propriétés ainsi. Vous pouvez empêcher que les gens égarés ..... Plusieurs membres: A l’ordre du jour! à l’ordre du jour ! M. de Folleville. Monsieur le Président, je demande à continuer mon opinion. M. Madîerde Montjau. Le décret est rendu. M. de Folleville. Monsieur le Président, il faut que vous soyez complice d’une telle iniquité. (Murmures prolongés.) M. le Président rappelle M. de Folleville à l’ordre. M. Bontteville-Dumetz. Je demande qu’on laisse continuer Monsieur; il inculpe avec tant de hardiesse; il faut voir comment il se justifiera. M. de Folleville. J’avais donc l’honneur de vous dire qu’il est impossible, sans violer la justice de toutes les lois distributives, de faire une pareille amnistie en ce qui concerne les réparations civiles. Un seul citoyen, dont je n’ai pas toujours adopté les opinions... Un membre à gauche : Tant pis pour vous! M. de Folleville... mais auquel je ne peux pas refuser mon assentiment quand il propose des mesures dictées par la justice, vous avait proposé de consacrer une somme quelconque à cette espèce d’indemnité, et ce n’est qu’en faisant vous-mêmes réparation civile que vous pouvez... Plusieurs membres à gauche : A l’ordre du jour! M. de Folleville... en dispenser des citoyens qui n’ont été coupables que par leur égarement. Plusieurs membres à gauche : A l’ordre du jour ! (L’Assemblée, consultée, passe à l’ordre du jour.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre des administrateurs composant le directoire du département de Rhône-et-Loire . Cette lettre est ainsi conçue : « Lyon, le 19 mars 1791. « Monsieur le Président, « Nous avons l’honneur de vous adresser un mémoire présenté au directoire du département par la municipalité de Roanne relativement à M. Goulard, curé de cette ville, député à l’Assemblée nationale. Nous ne saurions trop insister, Monsieur, auprès de vous pour vous prier de prendre en considération l’objet de cette pétition. « Ce député qui, sous prétexte de sa mauvaise santé, a obtenu un congé de l’Assemblée nationale, paraît dans ce moment avoir reeueilli toutes ses forces ; du moins il est de notoriété qu’il n’en a jamais fait un usage plus immodéré que dans les circonstances présentes. Il ne craint pas, Monsieur, de débiter les maximes les plus attentatoires à l’autorité des lois, et de porter le trouble et l’alarme dans les consciences. 11 multiplie journellement le nombre de ses prosélytes, et il serait peut-être dangereux de procéder à son remplacement selon la forme des décrets. D’ailleurs, le caractère d’inviolabilité à l’abri duquel ce fonctionnaire se livre à tous ces excès, ne contribue pas peu à l’enhardir à la manifestation de ces dangereux principes. - Veuillez bien, Monsieur, employer tous bons offices auprès de l’Assemblée nationale pour obtenir le rappel de ce député au lieu de ses fonctions ; il ne sera pas difficile alors de ramener les esprits à la paix et le remplacement sera effectué sans désordre. « Nous sommes avec respect, etc. »