(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (17 mars 1791 .j m M. Dupont. Si l’on avait pu ajouter, à l’imposition que vous avez décrétée, une somme arbitraire de sous ou deniers pour livre, lorsque vous auriezvoulu décréter 300 millions de contributions, il serait peut-être arrivé que vous en auriez décrété 400; et alors le peuple, qui s’attendait, avec raison, à un grand soulagement, aurait été trompé dans ses espérances. Le comité a donc dû. vous proposer que l’imposition eût une limite; et c’est pour cela qu’il a cru que les sous additionnels pour les besoins locaux devaient être limités ; et cependant il n’a pas entendu que ces impositions additionnelles seraient portées jusqu’au terme même qu’il vous a proposé, dans les lieux où elles ne seraient pas nécessaires. En effet, il y aura des départements qui pourront peut-être faire face aux dépenses que vous aviez mis à leur charge avec 2 s. 6 d. ou 3 sous additionnels : il y aura d’autres départements dans lesquels les dépenses mises à leur charge pourront s’élever plus haut que le maximum proposé. Que devait vous proposer le comité dans le cas où il ne voulait pas que la masse des contributions pût, dans aucun des départements, excéder une proportion déterminée? Il devait alors rejeter sur le grand secours que vous avez formé, et sous lequel, dans aucun pays, on ne parviendrait à faire une révolution et une constitution, il a dû vous proposer de rejeter pour cette année, sur la caisse de l’extraordinaire, les sommes auxquelles l’impôt régulier ne pourrait pas suffire. Il n’a pas entendu que l’on en chargeât les autres contribuables : il a puisé dans la caisse générale, mais il a prévenu que ce serait pour cette fois seulement. M. de Tracy. Vous avez décrété que vous feriez une loi pour les dépenses des corps administratifs; et vous puniriez les peuples de ce que votre loi n’est pas faite ! c’est une injustice. En conséquence, je demande la question préalable sur l’amendement de M. Legrand. (L’Assemblée ferme la discussion.) M. le Président. Je mets aux voix l’amendement de M. Legrand. (L’amendement de M. Legrand est repoussé.) M. de Follevilie. Je propose, par amendement de l’article 5, que les sous additionnels soient fixés à la même quantité sur chacune des deux contributions foncière et mobilière et qu’ils ne puissent excéder 3 sols pour livre. Plusieurs membres : La question préalable! M. le Président. Je mets aux voix la question préalable sur l’amendement de M. de Follevilie. (L’épreuve est douteuse.) M. Dauchy. Je dois vous observer que si vous portez l’augmentation à 3 sous pour livre, sur la contribution foncière et sur la contribution mobilière, il en résultera un déficit de 9 millions, car en diminuant d’un sou pour livre sur la contribution foncière, vous diminuez l’imposition de 12 millions, et en ajoutant un sou sur la contribution mobilière, vous n’ajoutez cpie 3 millions à la contribution; reste donc un déficit de 9 millions. M. de Mûri nais. La question est très simple. Le préopinant vient de vous dire qu’en diminuant d’un sou la contribution foncière il en résultait undéficitde 12 mil lions, et qu’enangmentantd’un sou la contribution mobilière, l’augmentation de l’impôt n’était que de 3 millions; il faut donc imposer également les facultés mobilières et immobilières. ( Applaudissements .) Si vous vou3 éloignez de ce principe, les campagnes auront droit de dire qu’elles sont sacrifiées aux capitalistes. Je conclus à ce que les sous additionnels soient également répartis sur les facultés mobilières et immobilières. ( Applaudissements .) M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angêly .) L’intention de l’Assemblée est que l’on supporte l’impôt en proportion de sa fortune, soit qu’elle soit foncière, soit qu’elle soit mobilière. Si vous mettiez de l’inégalité dans les fonds additionnels, les propriétaires fonciers payeraient le double, ce qui serait une injustice que vous n’avez pas l’intention de faire. J’appuie donc la proposition de M. de Murinais. M. de Follevilie. J’adopte la motion de M. de Murinais et je me borne à demander l’égalité du nombre des sols additionnels sur chacune des deux contributions foncière et mobilière. (Cette dernière proposition est décrétée.) M. le Président. Il nous reste à statuer sur l’amendement de M. Gaultier-Biauzat. Un membre observe que la disposition de l’amendement est prévue par l’article 8du projet de décret. M. Gaultier-Biauzat. Je retire mon amendement. M. de Fa Rochefoucauld, rapporteur , donnelecture des articles rédigés, avec les amendements, dans les termes suivants : Art. 5. « Les départements et les districts fourniront aux frais de perception et aux dépenses particulières mises à leur charge par les décrets de l’Assemblée nationale, au moyen de sols et deniers additionnels en nombre égal sur les contributions foncière et mobilière, sans que ces accessoires puissent excéder 4 sois pour livre du principal de chacune de ces contributions. » (Adopté.) Art. 6. « Si, pour l’année 1791, dans quelques départements ou quelques districts, les 4 sols pour livre mentionnés en l’article précédent étaient insuffisants, le Corps législatif y suppléera, pour celte fois seulement, et par un secours pris sur les fonds de la caisse de l’extraordinaire, sans que, pour l’avenir, pareil secours puisse leur être ac cordé. » (Adopté.) M. de Fa Rochefoucauld, rapporteur, donne lecture de l’article 7 ainsi conçu : Art. 7. « Les municipalités fourniront pareillement à la rétribution et aux taxations de leurs receveurs, au moyen de deniers additionnels aux contributions foncière et mobilière. » M. de Follevilie. J’observe qu’il faut fixer un [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 mars 179l.| maximum pour les districts et les municipalités, comme on en a fixé un pour les départements. M. Rœderer. Ce que vous demandez est décrété dans la contribution foncière. (L’article 7 est décrété.) M. de Rochefoucauld, rapporteur, donne lecture de l’article 8 ainsi conçu : Art. 8. « Les sols et deniers additionnels que les départements, les districts et les municipalités auront à imposer, en exécution des articles précédents, seront répartis sur chaque rôle, dans une colonne particulière, au marc la livre de la cote de chaque contribuable. » M. Ramel-lfogaret. Vous avez décrété constitutionnellement que personne nesera exempt de contribution. Je demande que le comité des contributions publiques soit chargé de vous faire un rapport sur cette question : « Le roi sera — il sujet à la contribution mobilière? » (Murmures.) Voix diverses : À l’ordre du jour! La question préalable I (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) M. le Président. Je mets aux voix l’article 8 du projet du comité. (L’article 8 est décrété.) M. le Président annonce l’ordre du jour des séances de ce soir et de demain. Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une lettre du Président de l’ Assemblée électorale du département de la Charente , qui annonce que, sur le refus par M. d’Albignac-Castelnau, ci-devant évêque d’Angoulême, de prêter le serment, les électeurs se sont réunis le 6 du présent mois pour remplacer le réfractaire par un homme qui, par ses vertus et son civisme, fût digne d’occuper le sièste épiscopal. M. Malhieu Joubert, curé de Saint-Martin et député à l’Assemblée nationale, a réuni la majorité des suffrages et a été proclamé évêque du département de la Charente. ( Applaudissements .) M. de Custine. J’ai commission d’annoncer à l’Assemblée que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district de Saarbourg, dont j’ai l’honneur d'être député, ont prêté le serment décrété par l’Assemblée nationale et sanctionné par le roi. Je dois ajouter que plusieurs d’entre eux, qui avaient d’abord montré un grand éloignement pour ce serment et avaient même prêché contre les decrets, sont montés en chaire pour rétracter publiquement les principes qu’ils avaient émis. (Applaudissements.) Un de MM. les secrétaires donne lecture : 1° P’ une lettre du Président de l'assemblée électorale du département de la Somme , qui annonce la nomination de M. üesbois, curé de Saint-André-des-Arts, à Paris, à l’évêché du département de la Somme; 2° D'une lettre du Président du corps électoral de la Loire-Inférieure , qui annonce que les électeurs ont choisi pour évêque de ce département M. l’abbé Julien Millet. Cette dernière lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, le corps électoral du 151 département de la Loire-Inférieure vous prie d’être son organe auprès de l’Assemblée nationale. « Nous bénissons une Révolution dont nous reconnaissons l’heureuse influence : nous avons élu pour évêque du département M. Julien Millet. « Ce curé citoyen qui a signalé son patriotisme dès l’aurore de la liberté; le premier curé qui s’est montré patriote était destiné sans doute à être le pasteur du département qui, le premier, a réclamé les droits de l’homme. « Je suis, avec respect, Monsieur le Président, etc. (Applaudissements.) La séance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE MONTESQUIOU. Séance du jeudi 17 mars 1791, au soir( 1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes : Adresse des juges du tribunal du district de Saint-Maximin, qui présentent à l’Assemblée nationale l’hommage de leur reconnaissance et de leur dévouement. Adresse des officiers municipaux de Pont-Saint-Esprit, qui envoient le procès verbal des événements occasionnés par le rassemblement des troupes effectué au camp de Jalès le 20 du mois dernier : il eu résu 1 1 e que l’ordre est rétabli dans le département du Gard, et que les citoyens de la ville du Saint-Esprit ont donné, dans cette occasion, les preuves les plus frappantes d’un dévouement absolu pour l’exécution des décrets de l’Assemblée. Adresse des officiers municipaux de Pont-à-Mousson, qui annoncent que les instituleurs qui ont remplacé les chanoines réguliers attachés à l’Ecole royale et militaire de cette ville, ont solennellement prêté le serment civique. Délibération du corps municipal de Nancy, qui, persuadé qu’il trahirait le plus impérieux de ses devoirs, s’il n’usait pas de toutes les ressources que la loi a mises entre ses mains pour s’opposer, dans le principe, à des ressources d’autant plus déplorables, qu’elles ont la religion pour prétexte, le fanatisme pour moyen, la discorde pour instrument, la guerre pouf but, et pour motif réel une haine profonde de notre sainte Constitution, a requis l’accusateur public de poursuivre et faire punir, suivant la rigueur des lois, les auteurs et complices de discours séditieux tenus sur la place publique de cette ville, les auteurs et distributeurs d’un ouvrage incendiaire intitulé : mon Apologie , et enfin un prêtre qui a prononcé un sermon rempli de déclamations contre les lois de l’Etat. Adresse de la société des amis de la Constitution établie à Pmzoi -sur-Serre, qui expose ses vives alarmes sur les efforts des ennemis de la Constitution, et supplie l’Assemblée de s’occuper sans relâche de l’organisation et de l’armement complet des gardes nationales. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.