201 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790.] tre punis, doivent être remerciés du zèle qu’ils ont témoigné. Je vous prie d’observer qu’ils entrent pour la première fois dans la carrière de vos lois. Il ne serait pas étonnant qu’ils fissent des fautes, bien pardon nab'es quand elles sont commises par les bons citoyens. M. Vernier. Mon avis personnel est que vous ordonniez l’exécution du jugement du directoire du département, mais que vous accordiez à la municipalité un sursis de deux mois, pour qu’elle puisse dresser un nouveau rôle. Cette dernière proposition obtient la priorité sur l’avis du comité. — Elle est décrétée, sans amendement, à une grande majorité en ces termes : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, ordonne que l’arrêté du département d’Indre-et-Loire, en date du 21 septembre 1790, sera exécuté; que, sans avoir égard au projet de rôle, présenté par les officiers municipaux de la ville de Ghinon, ils seront tenus de procéder, dans deux mois pour tout délai, à compter de la notification du présent décret et de l’installation des nouveaux officiers municipaux et notables, et aux frais de la commune, à la confection d’un nouveau rôle sur les trois bases fixées et éterminées par le département; et pondant ledit délai de deux mois, il sera sursis contre eux à toutes poursuites. » M. le Président. Le rapporteur du comité des rapnoris va rendre compte de l 'affaire de la municipalité d’ Hagueneau. M. Régnier, rapporteur. Messieurs, la ville d’Hagueneau, agitée depuis un an nar des troubles intérieurs, attend sa tranquillité du decret que vous allez porter. Voici les faits sur lesquels vous avez à prononcer. 11 s’est formé, il y a un an, dans cette ville, une garde nationale; mais a même moment a éclaté une division imtre les citoyens. Plus eurs ont refusé de se faire inscrire, jusqu’au 15 juin 1790, temps auquel il fut, question de célébrer, à Strasbourg, une confédération générale du département. L�s bons citoyens ont fait à cette époque cesser la division. On s’est incorporé; un detacheuu nt est parti pour Strasbourg. Plusieurs officiers municipaux, et notamment M. Westermann, ont vu avec peine cette reunion à laquelle ils s’étaient longtemps opno-sés. M. Westermann a commencé à faire des difficultés à M. Berquemm, et s’est oimoséàce qu’il entrât dans la ville. Il est vérifié que l\1. Westermann est considéré comme l’auteur de l’insurrection du 15 ou du 16 juin 1790. Quoi qu’il en soit, il a été député, vers la fin de juin, à l’A-semblée nationale pour se plaindre des excès commis à Hagueneau, et de la formation prétendue d’une seconde garde nationaleinconstitution-neile, et entièrement séparée de la première. L’Assemblée a rendu un décret par lequel elle a ordonné qu’il serait informé contre les auteuo des violences et voies de fait que M. Westermann disait avoir été commises contre les officiers municipaux, ainsi que du pillage du greffe qu’il prétendait égalent nt avoir eu lieu. Vous avez en même temps ordonné l’incorporation de la seconde garde nationale. Ce décret avait été exécuté avant d’être rendu, puisqu’il n’était pas vrai qu’il se fût formé une secondegarde nationale, puisque la procédure de Strasbourg constate que le greffe n’a point été pillé. Le 14 juillet arrivant, il s’agissait de prêter le serment civil. Les officiers municipaux prétendirent que l’incorporation, s’étant faite avant le décret de l’Assemblée, était nulle, et que la garde nationale ne pouvait être admise à prêter le serment: ils portèrent une ordonnance pour en différer la cérémonie au 28. Le comité de la garde nationale délibéra qu’elle se ferait le 14. Le commandant particulier de la ville, M. Bonne, le directoire du département, l< s commissaires du Bas-Rhin envoyés à Hagueneau, ont été du même avis. La municipalité a rendu une S' conde ordonnance, pour que la cérémonie se fît sans armes, en bourgeois actifs , et sans uniforme. C’est après cette époque qu’il est parvenu au comité des rapports plusieurs réclamations contre le décret surpris par les officiers municipaux, et contre les obstacles apportés par eux à la consommation de la céi émonie du serment. Le comité crut devoir employer les voies de la douceur et écrivait aux ofliciers municipaux la lettre suivante : « Le comité, instruit que, dans plusieurs circonstances importantes, le corps munieipil s’est trouvé dispersé de manière à ce pouvoir exercer les fonctions importantes qui lui étaient confiées (effectivement M. Westermann, secrétaire-greffier, M. Àldermann, et antres officiers municipaux, s’étaient retirés dans une abbaye avec ces mêmes papiers qu’ils prétendaient avoir été pillés par leurs ennemis), le comité, instruit en outre que la municipalité s’est refu-ée, malgré les instances de M. Dietrich, commissaire, à convoquer la garde nationale pour la nomination des députés à la fédération de Paris, a pensé que, pour vous épargner un jugement sévère de la part de l’Assemblée nationale, il lui suffirait de vous rappeler les principes qui devaient diriger votre conduite, >'tC. » Cette lettre est datée du 23 juillet; c’est le 24 qu’< st arrivé à Haeue eau le fait le plus désastreux. Profitant de l’entrée que faisait à Hague-nean le régiment de Picardie, et craignant qu’une garnison nuisît à leurs projets, les officiers municipaux ameutèrent les paysans des campagnes et vinrent à leur tête à la rencontre du régiment. L s’engagea un combat, dans lequ l mx citoyens furent tués et plusieurs blessas. M. Westermann et ses confrères n’en restèrent pas moins à Hagueneau. Le 29, ils dressèrent un acte qu’tl est important de mettre sous vos yeux. « La municipalité, considérant tue a conduite indecente delà maréch lussée, qui refuse d’entendre les témoins indiqués, et entend les ennemis de la municipalité et les complices des crimes contre lesquels il faut informer, ne lui permet plus de rétablir le cal ne : considérant que le commandant pour le oi est à la tête des rebelles, et que le comité les rapports lui-même improuve sa conduite, en alléguant des pièces faites dans les ténèbres par des aristocrates, déclare qu’elle donnera sa démission entre les mains des trois commissaires etc. » Les officiers municipaux l’ont en effet donnée te même jonr; mais les commissaire*, persuadés de l’illégalité de ci tte démission combinée, ne l’ont point acceptée. Quelque temps après, le comité des rapports reçut une pétition signée par un assez grand nombre de citoyens d’Hagueneau, qui prétendaient qu’il importait infiniment que les officiers municipaux conservassent b urs fonctions, et que l’Assemblée nationale les invitât à les reprendre, Le comité s’occupait de l’examen des pièces qui lui avaient été envoyées contre C' s olficters lorsqu’il survint une nouvelle réclamation des pre- ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 12 novembre 1790.1 202 (Assemblée nationale.] miers pétitionnaires, dans laquelle ils exposaient que les officiers municipaux allaient être immolés parla municipalité de Strasbourg. Ils demandaient que la procédure fût renvoyée à un autre tribunal, que le décret de prise de corps lancé contre M. Westermann, et ceux d’ajournement personnel prononcés contre d’autres officiers municipaux, fussent annulés, ou qu’au moins il fût sursis à leur exécution. L’Assemblée s’en est tenue à la sévérité de la règle. Le comité en a conclu qu’il ne pouvait plus être question des faits ui font l’objet de l’information commencée à trasbourg, puisque l’Assemblée a jugé qu’il n’était pas nécessaire que l’information lui fût apportée : nous nous bornons donc aux faits qui sont du ressort de l’administration. Les officiers municipaux sont coupables d’avoir surpris un décret à l’Assemblée nationale, d’avoir employé les moyens les plus criminels pour s’opposer à la consommation du serment; ils sont coupables par leur résistance à l’avis du comité des rapports, par la démission combinée qu’ils ont donnée et qu’ils ont fait donner par le conseil général de la commune, ü’un autre côté, la conduite du commandant et de la garde nationale est digne d’éloges. Nous vous proposons sur tous ces faits le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, considérant que la municipalité d’Hagueneau, par la conduite qu’elle a tenue, a entretenu les troubles de cette ville, tandis que son devoir était de les calmer; que cette conduite est devenue plus répréhensible encore d’après la lettre de son comité des rapports, en date du 23 juillet, et qu’enfin, elle est devenue tout à fait inexcusable par sa démission illégale du 28 du même mois, dans laquelle elle a persévéré malgré le refus fait par ies commissaires du département du Bas-Rhin de la recevoir; « Déclare qu’elle improuve la conduite de la municipalité d’Ragueneau, et qu’elle est satisfaite de celle de la garde nationale et du sieur de Vos-tadt, son commandant; « Décrète que le roi sera prié de donner les ordres nécessaires pour faire procéder à l’élection d’une nouvelle municipalité; décrète, en outre, qu’il n’y a lieu de délibérer sur les diverses pétitions d’une partie des citoyens composant la commune d’Hagueneau, et que la procédure criminelle commencée en exécution du décret du 3 juillet dernier, sera continuée ». (Ce projet de décret est adopté sans discussion .) M. he Chapelier. Plusieurs difficultés ont été portées à votre comité de Constitution par des directoires de départements. Vous vous rappelez que vous leur avez confié toutes les fonctions de détail et d’exécution qui exigent de l’ensemble, de l’unité, une suite de vues, de l’expérience, et pour ainsi dire de la routine; mais ces fonctions doivent-elles être exclusivement exercées par le directoire? Les conseils d’administration ne sont établis que pour l'administration générale du département, pour toutes les lois dont l’exécution doit ensuite être confiée au directoire, et ne peut être suivie par une assemblée très nombreuse. Tout pouvoir particulier du directoire cesse au moment où il est réuni avec le conseil général. Il faut donc un décret spécial de l’Assemblée nationale pour les autoriser à conserver l’exercice des fonctions d’exécution; ii leur sera facile de trouver, dans l’intervalle des séances communes, le temps de se livrer à ces occupations. C’est d’après ces motifs que le comité de Constitution vous propose le projet de décret suivant : « Les directoires de départements et de districts ne cesseront point d’être en activité pendant les assemblées des conseils de départements et de districts. Ils continueront les fonctions particulières qui leur sont attribuées, les conseils de départements et de districts ne devant pas s’occuper des affaires d’exécution. Ceux qui composent les directoires ne pourront pas pour cela se dispenser ou être empêchés d’assister à l’Assemblée générale dont ils sont membres. » (Ce projetée décret est adopté.) M. le Président lève la séance à l’heure ordinaire. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 2 NOVEMBRE 1790. PREMIER rapport fait au nom du comité des monnaies, par Gabriel de Cussy, député du bailliage de Caen (1). (Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale.) Messieurs, votre comité des monnaies, jaloux de répondre à la confiance dontvous l’avez honoré, a commencé par mesurer l’étendue des obligations que vous lui avez imposées. Bientôt il s’est convaincu que le zèle le plus ardent, le dévouement le plus entier à ses devoirs, seraient insuffisants pour remplir une tâche si difficile; mais une considération importante a ranimé son courage et relevé ses espérances. Vous l’avez autorisé, Messieurs, à appeler à ses discussions toutes les personnes capables de l’éclairer sur les diverses parties de législation et d’administration qu’il était chargé de préparer pour les soumettre à vos décisions. Dès lors, votre comité a conçu le noble espoir de soutenir la fortune publique en rappelant la confiance par la circulation, et en ranimant la circulation parla confiance. Pour parvenir à ce but, il fallait commencer par ramener la législation des monnaies aux principes de justice dont elle n’aurait jamais dû s’écarter; leur administration a des proportions que l’impéritie, ou une cupidité criminelle n’aurait pas dû déranger; leur fabrication a la fidélité qu’une probité sévère et une surveillance attentive eussent dû v maintenir, Mais pour vous démontrer la nécessité de rétablir ces principes, de restaurer ces proportions et de faire cesser les désordres effrayants qui s’étaient introduits dans cette partie de l’administration, il fallait des méditations de plus d’un jour; des observations de plus d’un genre; il fallait, en vous proposant la fin, vous offrir les moyens. C’est pour y parvenir avec la célérité que commandent les besoins de l’Etat, que votre comité s’est empressé de rassembler les personnes les plus versées dans la science politique et administrative des monnaies, dans la connaissance des changes et des proportions adoptées par les puissances étrangères, les personnes enfin qui, par leurs fonctions publiques, avaient été les plus à (1) Ce rapport n’a pas été inséré au Moniteur.