[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j *g 143 simplement présents à ce second désarmement (auquel ils n’ont pas voulu paraître) qui a donné lieu au scandale qui a fait tant de bruit, et qu’on n’ose répéter par égard pour l’autorité supérieure en tort; Considérant : 4° que le district a entrepris sur les pouvoirs exclusivement confiés aux municipalités par la loi, au moyen, entre nombre d’exemples, d’une réquisition au com¬ mandant de la garde nationale d’établir une patrouille de vingt hommes par nuit jusqu’à nouvel ordre, à dater du jour de ce désarmement, sans en prévenir aucunement la municipalité qui, à la vue dudit ordre donné au mépris de la loi, livra néanmoins sur le récépissé dudit commandant le nombre de cartouches requis, mais sous réserve de réclamer lors de l’arrivée des commissaires de la Convention; Considérant : 5° que dans le cas particulier du désarmement Lerebours, jamais la sûreté publique ne fut compromise (le procès-verbal des commissaires et l’arrêté du conseil, aujour¬ d’hui entre les mains des députés représentants en font foi); que dans l’affaire dont il s’agit le directoire a mal à propos amalgamé ou confondu l’arrestation et conduite illégale de l’avoué Tournier en la maison d’arrêt, laquelle n’y avait aucun rapport, et qui n’a occasionné à un des membres d’icelui le désagrément par lui éprouvé à cette époque que par ses impru¬ dences . et indiscrétions ; Considérant : 6° que l’acte de dénonciation au juge de paix contre ledit Lerebours ne porte, à ce qu’on assure, que sur des faits vagues, non circonstanciés, au désir de la loi, et démontrés faux par la notoriété publique; que l’instruction qui s’est ensuivie, comme la dénonciation, sont faites incomplètement et par contravention aux articles 2 et 3 du décret du 11 août 1792, cela avec d’autant plus de raison qu’il n’y avait à cette époque ni émeute, ni trouble, ni aucun danger pour la chose publique, sauf ce qui s’est passé à l’occasion du membre du directoire au sujet dudit Tour¬ nier, laquelle affaire n’a, comme on l’a dit, aucun rapport avec celle du citoyen Lerebours, seul cas cependant qui aurait nécessité des mesures hors de la loi; Considérant : 7° que Boissard est frère d’émigré, que même un de ses fils qui se desti¬ nait ci-devant à l’état ecclésiastique est entiè¬ rement opposé au nouvel ordre de choses, et qu’on le dit aujourd’hui en arrestation à Salins, ayant été appréhendé au corps dans les envi¬ rons de cet endroit, comme surpris dans ses courses inciviques, ce qui rend ce père plus que suspect. Qu’il n’oppose pas à l’incivisme qu’on lui impute le certificat contraire à lui délivré par le conseil général, cette objection serait ici nulle, puisque tous les jours on voit les citoyens les plus vertueux, trompés dans les divers témoignages que la loi les met dans le cas de rendre ; Considérant : 8° que e’est au mépris de la loi et de l’autorité supérieure constituée, qu’il a été célé à la municipalité et au conseil l’ordre du département de cesser la surveillance des postes exigée par l’arrêté départemental du 19 janvier dernier ; Considérant : 9° que la lettre signée par le pro¬ cureur syndic sous la date dudit mois de janvier aux commissaires de cette commune est un abus d’autorité repréhensible; que celle du même personnage datée de la veille 26 même mois au citoyen Lochet, receveur des douanes à Jougne, marque un mépris sans exemple de toutes les lois civiles et naturelles en ce qui concerne les citoyens Gresset père et fils, Vincent et Lom¬ barde, comme on peut s’en convaincre, pages 4 et 5 du mémoire de ce dernier, dont un exem¬ plaire a été remis aux citoyens commissaires; le procès qui existe à ce sujet au tribunal criminel de Besançon doit se juger aujourd’hui, c’est dans sa discussion qu’on puisera nombre de nou¬ veaux abus d’autorité contre partie desquels on s’élève aujourd’hui; Considérant : 10° que la loi du désarmement exceptant formellement les fonctionnaires pu¬ blics, l’assemblée trouva étrange et inouï que le directoire y ait compris le citoyen Begnauld, président du tribunal de conciliation, et par là même fonctionnaire comme élu par l’assemblée électorale ; Considérant enfin, qu’une dernière lettre du directoire sous la date du 14 courant enfantée sans doute par le même auteur quoique signée de plusieurs autres membres du district, inculpe mal à propos, indiscrètement et sans aucun fon¬ dement le conseil général, le club, la garde natio¬ nale, le bataillon de la Drôme et celui de G en t-cinq ; que tout cela montre à l’évidence le déses¬ poir d’une mauvaise cause, puisque le civisme le plus pur de la part de tous est notoire ; d’où il suit qu’il leur importe nécessairement de faire taire la calomnie ; pourquoi le conseil a arrêté de se reti¬ rer par-devant les commissaires de la Conven¬ tion pour que leur procès à eux membres du conseil soit fait et parfait, comme encore pour obtenir réparation complète de tant d’atrocités. Ils sollicitent donc le plus pressamment, même comme mesure de sûreté, le bien et la tranquillité de cette localité l’exigeant impérieusement, la destitution définitive de ce dangereux individu. Signé au registre : Claudet, J. -B. Pion, P. -F. Besancenet, Michaud, maire; Liê-vremont père, Bidaud, Péraudin l’aîné* Lafferrière, Piquet, P.-X. Charin, Bal-tyet, A. Arryer, Petit, F. -J. Pochard, Chambord, fils, Salomon, Gresset, chi¬ rurgien; Battandier, notable; J.-C. Gril¬ lon, Samey, C.-J. Nicod, Perrou l’aîné, Battandier, procureur de la commune et Jacquemet, secrétaire, et ainsi que C.-J. Vuillemin. A la séance du 23, l’assemblée, après avoir révisé partiellement, radié divers chefs contenus au délibéré et ajouté comme nouveau grief rela¬ tivement à la lettre inculpante lue le jour d’hier au club, que dans cette lettre se trouve la signa¬ ture du citoyen Falconnet, administrateur, lequel a dit, en présence de témoins, à cette occasion, qu’il avait signé cette maudite lettre sans l’avoir lue, ni en savoir le contenu. Par délibération du conseil, Jacquemet, secrétaire greffier. Pièce n° 2 (1). Extrait des minutes du directoire du district de Pontarlier. Au nom de la Bépublique française, Claude-François-Brunot Siblot, et Jean-Bap¬ tiste Michaud, représentants du peuple députés (1) Archives nationales , carton W 358, dossier 753, 2e partie, pièce 81. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j «j �£"£*�3 144 par la Convention nationale près les départe¬ ments du Doubs et de la Haute -Saône; Sur la dénonciation qui nous a été faite par le conseil général de la commune et la Société des Amis de la liberté et de l’égalité de la ville de Pontarlier, que le citoyen Boissard, procureur syndic du district, n’a cessé jusqu’ici d’y exciter des divisions; que dans l’exercice de ses fonc¬ tions publiques on l’a vu constamment guidé par l’arbitraire efc ses passions, plutôt que par l’intérêt public; que, non content d’opprimer ses concitoyens on l’a vu aussi maltraiter plusieurs étrangers; que dans le temps qu’il exerçait les fonctions de procureur de la commune de ladite ville, il s’est permis, en faveur de plusieurs personnes suspectes, des ménagements indignes d’un fonctionnaire public; que depuis qu’il est procureur syndic il a rompu les liens d’amitié et la fraternité qui existaient entre cette Adminis¬ tration et la municipalité; que contre le prescrit de la loi concernant le désarmement des per¬ sonnes suspectes et qui ordonne que les districts et les municipalités seront chargés de la faire exécuter sur leur responsabilité respective, il a exigé que ladite municipalité fît exécuter dans ses murs un désarmement ordonné par le dis¬ trict seul; enfin que ledit citoyen Boissard a un frère émigré et un fils dont les principes sont entièrement contraires au nouvel ordre de choses, ce qui le rend de plus en plus suspect à tous les bons citoyens. Nous lesdits commissaires, considérant : 1° qu’il importe essentiellement au salut de la chose publique que la paix et l’union soient entretenues dans toutes les municipalités de la République et particulièrement dans celles qui sont situées sur l’extrême frontière; 2° Qu’il n’est pas moins intéressant que tous les fonctionnaires publics soient investis de la confiance du peuple et particulièrement ceux qui sont employés dans les corps administratifs, lesquels sont chargés spécialement du maintien de la sûreté et de la tranquillité publiques ; 3° Qu’il résulte des faits ci-dessus que si le citoyen Boissard exerçait plus longtemps les fonctions de procureur syndic du district de Pontarlier, la tranquillité publique pourrait être compromise, non seulement dans cette ville, mais encore dans tout le district, que ses correspondances officielles le mettent à même d’influencer; avons arrêté et arrêtons, après l’avoir entendu sur tous les chefs d’accusation portés en ladite dénonciation : 1° Qu’il demeure provisoirement suspendu de ses fonctions de procureur syndic dudit district et qu’elles seront remplies par le citoyen Parrod, vice-président ; 2° Que la place de celui-ci sera occupée par le membre du directoire qui après lui a réuni le plus de suffrages pour y entrer; 3° Que tous les membres composant ladite Administration et auxquels nous avons reconnu le zèle, le patriotisme et les talents nécessaires pour en diriger avec succès les mouvements, continueront à remplir les fonctions qui y sont attachées. Fait et arrêté à Pontarlier, ce vingt -cinq avril mil sept cent quatre-vingt-treize, l’an second de la République. Signé : Michaud et Siblot. Pour expédition conforme : Jouffbot, secrétaire. Pièce n° 3 (1). Observations de la Société populaire de la ville de Pontarlier sur le libelle diffamatoire de Bois¬ sard, ci-devant procureur syndic du directoire du district de Pontarlier. Citoyens représentants, Une Société populaire ne peut avoir d’autre vue que celle du bien public; d’autre désir que celui de maintenir dans leur intégrité les droits de l’homme et du citoyen; d’autre ambition que celle de voir se propager dans son sein les bases fondamentales d’une Constitution vraiment grande; d’autre attention enfin que celle de maintenir tous ses membres dans l’esprit de la loi, sans lequel nous ne marcherions pas dans son sens; de rappeler au devoir les sociétaires qui s’en jouent et d’expulser de son sein ceux qui, sous le masque du bien public, ne cherchent qu’à désorganiser, en coupant le fil de la concorde. C’est cette peine qu’a encourue un membre de la Société de Pontarlier, ce n’est qu’avec répugnance qu’elle a été mise en œuvre vis-à-vis de l’homme de loi Boissard qui, jadis militaire (comment se fait-il qu’au bout de quelques années et au moment d’être à la tête des lieute¬ nants, avec espoir d’être bientôt capitaine, il ait quitté le régiment de Picardie?) puis avocat, puis président du bureau de conciliation, puis enfin successivement procureur de la commune et procureur syndic du directoire de district, ne semble avoir ainsi promené son inconstance que pour parvenir à des places encore plus relevées dont il a cru se frayer la route par différents actes capricieux qu’il appelle justice et confor¬ mité aux lois. Ces actes sont néanmoins tout autre chose : est-ce, on le lui demande, par la subversion des lois que l’on parvient à les affermir? Est -ce en immolant des citoyens qui ont bien mérité de la patrie qu’on fait des prosélytes? Est-ce en les vouant à la haine publique que l’on maintient la tranquillité? Est-ce, enfin, en semant le dé¬ goût qu’ôn assure l’ordre? Oui, citoyens représentants, Boissard a fait tout ce mal, et comme s’il eût dû en faire encore davantage, il vient, en 33 pages d’impression, revues, corrigées et augmentées, sous prétexte de vous peindre sa vie privée et publique, calom¬ nier avec la plus grande noirceur tous ses conci¬ toyens parce qu’ils ont rendu témoignage à la vérité. Vous le voyez, dans cette pièce tragi-comique et dégoûtante qui l’éloigne du but qu’il devait atteindre, étendre son détestable pinceau sur presque toutes les conditions, les ravaler les uns après les autres et les calomnier arbitraire¬ ment, comme si les faits qu’il impute maligne¬ ment aux uns et aux autres pouvaient effacer le souvenir de ses écarts. Est-ce, par exemple, qu’il parlerait d’agiotage si on eût eu la facile complaisance d’exposer des deniers dont il manifestait un besoin pressant? Ce qui, l’on convient, n’est pas un crime; mais la mère nourricière de la passion qui le domine. Est-ce qu’il ne se présentait d’autres moyens pour le justifier que d’inculper maladroitement des gens contre qui il aurait dû faire des pour-(1) Archives nationales , carton W 358, dossier 753, 3e partie, pièce 24.