ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [États gén. 1789. Cahiers. [Province du Bourbonnais.] 449 d’aviser au moyen de rendre le cens, la banalité et la blairie racheta blés. Art. 13. Que les paroisses soient maintenues dans la propriété des terrains dont elles ont la possession à titre de communaux. Art. 14. Que les arrêts et règlements concernant les droits de péages et de laides soient strictement exeéeutés. Art. 15. Qu’il y ait un seul poids et une seule mesure dans le royaume. Art. 16. Qu’il soit permis de stipuler l’intérêt au taux de l’ordonnance, dans les obligations ou billets payables à temps, sans aliéner le principal. Art. 17. Qu’il soit établi des hospices pour les bâtards, lorsqu’ils auront atteint l’âge de sept ans, et qu’il soit avisé aux moyens de prévenir la mendicité. Art. 18. Que les hôpitaux soient confirmés dans les privilèges à eux attribués par les lettres patentes de leurs établissements, et qu’en dérogeant à l’édit de 1749, ils soient exempts du droit d’a-mortissemeqt, et autorisés à placer leur argent sur les particuliers, sans, néanmoins, qu’ils puissent acquérir aucuns immeubles. SECTION V. Clergé. Art. 1er. Les députés demanderont que les droits d’annates soient supprimés et que les dispenses soient accordées gratis. Art. 2. Que la célébration des fêtes soit renvoyée aux dimanches. Art. 3. Que les canons et ordonnances, concernant la résidence des bénéficiers et la pluralité des bénéfices, soient mis en vigueur. SECTION VI. Militaire. Art. 1er. Les députés demanderont que les troupes soient employées aux ouvrages publics, et pour cet effet distribuées dans tous les cantons du royaume, où elles pourront travailler le plus utilement, tant que leur réunion ne sera pas nécessaire pour la défense de l’Etat. Art. 2. Que la milice soit abolie. Art. 3. Que la maréchaussée soit augmentée, et les brigades plus rapprochées. Art. 4. Enfin, les députés demanderont que la généralité du Bourbonnais soit conservée dans son entier, et que les villes, bourgs et paroisses, qu’elle enclave, dépendent des Etats particuliers qui seront créés dans la province. Députés de notre Province, les cahiers qui vous sont remis vous en font connaître le vœu ; faites valoir, auprès de la nation assemblée, les droits du tiers-état qui vous sont confiés. Nous approuvons d’avance tout ce que vous propose-rer, remontrerez, aviserez et consentirez en Etats généraux, pour le bonheur de tous. Le pouvoir que nous vous donnons n’aura de bornes que celles que l’honneur, l’amour de la liberté, la sûreté du peuple et le bien de l’Etat, ne permettent pas de franchir. Nous vous recommandons surtout de porter au pied du trône l’assurance de notre amour, de notre reconnaissance, de notre fidélité et de notre profond respect pour le bon Roi qui nous gouverne. Ledit cahier arrêté par ordre du tiers-état de la province du Bourbonnais, qui a nommé pour ses députés aux Etats généraux : M. Michelon, procureur du roi en la Châtellenie de Montmaraut ; M. BerthomiédelaVillette, procureur du roi en la Châtellenie de la Bruière-l’Àubepin-Cerilly. lre Série, T. IL M. Lomet, avocat en Parlement, à Moulins ; M. Goyard, avocat en Parlement, à Moulins; M. Vernin, assesseur civil et criminel de la sénéchaussée et siège présidial de Bourbonnais ; Lebrun, bourgeois propriétaire, à Sulliet. Suppléants. M. Regnard, procureur du roi en la châtellenie de Montluçon; M. Lucas, procureur du roi, à Gannat ; M. Ruet de la Motte, avocat en Parlement, à la Palisse. CAHIER Des doléances de MM. les officiers de l'élection de Moulins , pour les Etats généraux. Du 27 avril 1789 (1). Les Etats généraux du royaume ont toujours été convoqués dans des temps critiques et orageux; la réformation des abus en a toujours ôté le prétexte, et les impôts la conséquence. Les intérêts du tiers-état ont été constamment sacrifiés aux deux ordres privilégiés. Le tiers-état, qui peut tout, a toujours étécompté pour rien dans ces fameuses assemblées; toujours opprimé , toujours humilié sous le joug féodal. Ce tiers-état peut-il donc enfin entrevoir un terme à ses maux? Peut-il donc se promettre que la vertu de Louis XVI et la sagesse de Necker feront triompher la raison et la justice des préjugés et de l’ignorance ? Députés du tiers-état, librement choisis par nous, répondez à notre confiance, faites entendre nos justes doléances avec cette fermeté noble et décente qui sied si bien aux grandes âmes; le meilleur des rois vous l’ordonne, la patrie vous en fait un devoir. Un déficit immense, le trésor royal épuisé, des impôts impossibles à lever sur un peuple appauvri, le lien social rompu, un luxe effréné, une dette immense, et une législation imparfaite : voilà le tableau fidèle du plus beau des empires. Cependant ce royaume a des ressources immenses et presque inépuisables ; il ne faut que vouloir, et il sera bientôt un objet d’envie pour ses voisins et de terreur pour ses ennemis. ' Un peuple" fidèle, industrieux et sensible, y gémit seul sous le poids des impôts; que ces impôts soient partagés également entre les trois ordres ; que d’odieux privilèges soient détruits, et bientôt le fardeau, devenu léger, sera supporté sans peine; que des pensions non méritées n’épuisent plus le trésor de l’Etat, que des dons immodérés et des dépenses inutiles n’absorbent plus les impôts des provinces ; qu’une sage économie préside à l’emploi des finances, bientôt la nation occupera le rang qu’elle doit tenir dans le système politique : elle payera, sans murmure, des impôts qu’elle aura librement consentis elle-même, et qui seront partagés également entre tous les Français, sans aucune distinction d’ordres ou de privilèges. Une observation importante à faire, c’est que l’on peut bien tourmenter et opprimer les nations, mais qu’aucune puissance au monde ne peut les forcer à donner ce qu’elles n’ont pas ; que tout impôt, qui excédait les facultés réellesdes contribuables, n’était point payé; qu’il épuisait et énervait l’Etat; que la misère des peuples était toujours le signal des révolutions et de la chute des empires. ' (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. 450 > [États gén 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Bourbonnais. Des impositions. Un seul impôt territorial, également payé par les trois ordres, peut-il suffire aux charges du gouvernement, aux intérêts de la dette nationale, et à son acquittement? Les impôts sur les consommations doivent-ils être appelés en concurrence avec l’impôt territorial, et dans quelle proportion? Ces deux importantes questions seront discutées aux Etats généraux ; à eux seuls en appartient la solution. Toute la nation doit se soumettre à la décision de cette auguste assemblé. Si les impôts sur les consommations étaient supprimés, le rentier, le capitaliste, le banquier, le négociant ne contribueraient pour rien aux charges de l’Etat : le territoire n’y suffirait pas. La gabelle. Dans le nombre des impôts, aujourd’hui perçus sur les consommations, il en est un proscrit par l’opinion,- jugé désastreux parle gouvernement, c’est la gabelle; le vœu général est pour sa suppression, et qu’il soit remplacé par une contribution en argent. Les aides. Elles peuvent être adoucies, surtout dans la rigueur de son exercice; mais il est indispensable de supprimer les droits sur les cuirs, les fers, et les droits réservés. Les contrôles. Cette partie, insupportable par son obscurité , mérite toute l’attention des Etats généraux; et ils ne peuvent se dispenser de solliciter un tarif clair et précis qui fixe le droit et en détruise l’arbitraire despotique ; des recherches odieuses pendant vingt ans pour de prétendues fausses déclarations, troublent la paix des familles ; il faut les restreindre à deux ans. Les francs-fiefs. Droit odieux qui rappelle toujours au tiers-état son ancienne servitude sous la tyrannie féodale; ligne de démarcation cruelle entre la noblesse et le peuple ; tribut injuste qui enlève le patrimoine d’une famille quand elle pleure un père, une épouse, un parent chéri; enfin, droit barbare qui se paye sur un patrimoine, sans déduction des charges dont il est grevé ; sa suppression est indispensable. Les corvées . Cet impôt, qui ne porte que sur le tiers-état, doit être définitivement converti en argent, également réparti sur les trois ordres. Les vingtièmes. 11 est indispensable de le confondre avec la taille sous une dénomination qui ne blesse les préjugés de personne, et d’asseoir ces deux impôts réunis sur toutes les propriétés, nobles, roturières. Demandes à former. L’objet le plus important pour nos représentants aux Etats généraux sera de demander : 1° Que l’on opine par tête et non par ordre, et de n’accorder aucun subside qu’après avoir obtenu cette égalité de suffrages. 2° Que la nation assurera le retour des Etats généraux à des époques fixes et déterminées, et ne consentira des subsides que jusqu’à l’époque où leur tenue sera indiquée. 3° Que des Etats provinciaux, constitués comme ceux du Dauphiné, seront substitués en Bourbonnais aux administrations provinciales, trop dispendieuses pour cette province. 4° Que la noblesse et le clergé ne jouiront d’aucune exemption pécuniaire. 5° Que tout Français ne dépendra que des lois, et que sa liberté ne sera plus à la discrétion des ministres et de leurs subalternes. 6e Que tous les citoyens du tiers-état, qui par leur fortune, leur mérite et leurs talents, seront susceptibles des grâces du souverain, pourront posséder, en concurrence avec les deux ordres jorivilégiés, des places dans la magistrature et l’armée. 7° Que si les Etats généraux jugent convenable la suppression de plusieurs officiers, les titulaires seront indemnisés équitablement de la valeur réelle des sacrifices qu’ils feront au bien de l’Etat. 8° Que Jes portions congrues des curés, insuffisantes aujourd’hui, seront augmentées, et que l’Etat, en assurant leur subsistance, les mettra à portée de se livrer, sans inquiétude, aux importantes fonctions qui leur sont déférées. 9° Que le Uoi rendra aux villes la nomination de leurs officiers municipaux, droit que la ville de Moulins a payé plusieurs fois. 10° Que les _ maréchaussées , trop peu nombreuses, en raison de leur utilité, seront augmentées. 11° Que toutes les douanes intérieures seront reculées aux frontières; et que le commerce jouira enfin du seul avantage qui puisse le faire prospérer et élever les manufactures françaises au niveau de celles des Anglais, nos rivaux. 12° Que la dette nationale sera consolidée et garantie par la nation, à condition toutefois que les dettes abusives et usuraires seront réduites à leur taux légitime; que toutes les créances seront scrupuleusement vérifiées, et qu’aucune considération de faveur ne pourra balancer un principe de toute justice, c’est que, si un particulier peut bien faire résilier un contrat usuraire, à plus forte raison la nation en a le droit réel et imprescriptible. L’immensité de la dette nationale, l’impossibilité de la solder sans manquer à la foi publique, ont seuls déterminé la convocation des Etats généraux; et la plus grande question s’y réduira à savoir si l’on doit sacrifier les propriétaires des terres aux créanciers de l’Etat, ou les créanciers de l’Etat aux propriétaires des terres : il est prudent de s’en rapporter, sur cet important objet, au caractère moral du Roi, à la sagesse de son ministre, et à la bonne volonté de la nation assemblée. C’est par l’opinion la plus parfaite que les Etats généraux peuvent faire espérer, de la régénération du royaume, la réforme des abus, et le bonheur du meilleur des rois : bonheur inséparable de celui de vingt-quatre millions d’hommes disposés à tous les sacrifices, si la noblesse et le clergé les partagent. Fait et délibéré en la chambre du conseil de l’élection de Moulins, le 1er novembre 1789. Signé Fay de Thébaux, président; Aumaistre; Meilheu-rat de Magny; Bordai ; Parchot du Marais; Turcliy l’Hermite; Baruel du Breuil; Boisset; Merle, procureur du Roi; Servoir, substitut du procureur du Roi; Groisier, greffier en chef.