[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 avril 1791.] 499 même. Je le propose pour faire voir combien il est singulier que l’on puisse forcer des armateurs à prendre nécessairement, parmi 300 personnes, telle personne pour composer leur équipage. C’est pour cela que je propose qu’ils soient alors reçus comme passagers; car on ne peut as forcer des négociants à recevoir sur leur ord des hommes qui n’auraient pas leur confiance. ( Applaudissements .) M. Brillat-Savartn. L’article n’a été combattu que par les habitants des villes maritimes. Les habitants des villes maritimes regarderont toujours comme intrus ceux des provinces qui voudront se livrer à la navigation. Enfin, Messieurs, sur les amendements de MM. Le Chapelier et La Ville-Leroux, je remarque qu’on ne fait aucun tort à des armateurs de leur donner dans leur équipage des jeunes gens instruits et qui ont déjà navigué pendant 3 ans. Quant à la proposition de les prendre comme passagers, c’est absolument leur fermer la porte à toute instruction. N’étant sur un navire que comme passagers, du moment qu’ils voudront se mêler à quelques manœuvres, on leur dira : « Vous êtes ici pour ne rien faire. » jusqu’à un certain point ses équipages comme il le veut. Maintenant on nous propose de lui donner une autre charge; je ne crois pas qu’il soit prudent d’adopter une pareille mesure. Qu’il soit libre à tous les armateurs marchands de choisir et de traiter avec chacun de ces élèves comme ils le jugeront à propos, et qu’en résumé, ceux qui n’auront pas été choisis puissent faire leur quatrième année de navigation sur les vaisseaux de l’Etat. M. Defermon. Si vous décrétez cette disposition, vous pouvez prendre pour certain que les aspirants qui sortiront chaque année trouveront un moyen sûr et prompt de faire leur quatrième année, parce que les armateurs ne feront pas de difficulté de les embarquer. J’applaudis et au patriotisme et aux vues que M. Lecouteulx vous a soumises. J’espère que les autres armateurs n’auront ni d’autres vues, ni moins de patriotisme. Il ne restera donc qu’à faire un règlement; mais je crois que l’on peut toujours délibérer sur l’article, sans entrer dans tous ses détails. Je demande donc que l’on mette aux voix l'article proposé par M. de Rochebrune. (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Goupilleau. Je dis que l’article que l’on propose n’est qu’un privilège en faveur de ceux qui ont été aspirants; car, si, après avoir été aspirants pendant trois ans, il faut une quatrième année de navigation, et si ces aspirants ont la faculté d’être admis sur les vaisseaux de commerce, il s’ensuivra qu’ils forceront la plupart des navigateurs à qui nous n’avons pas le droit d’imposer cette charge. (Murmures.) Un armateur n’est qu’un entrepreneur de manufactures navales : or, vous n’obligeriez pas un commerçant ou un entrepreneur à prendre tel ou tel commis ou ouvrier. M. Popuius. Pour tout concilier, il suffirait de supprimer la quatrième année de navigation. M. liecouteulx de Cantelen. Les armateurs ne peuvent avoir aucune répugnance, parce que ces aspirants-là sont enfants de la loi, enfants de la Constitution. Je demande que l’on mette aux voix l’article. M. de Alenoa. Je n’avais à faire que les mêmes observations que vient de faire tout à l’heure M. Goupilleau. Je crois que c’est porter une atteinte manifeste à la liberté indéfinie (Murmures.) qui doit régner dans le commerce. Mon vaisseau m’appartient comme ma maison ; je ne dois avoir dans mon vaisseau que des gens qui me plaisent. Il est très possible que, dans le nombre des aspirants, il n’y en ait aucun qui ait ma confiance. D’après cela, je ne dois pas être forcé de l’admettre sur mon vaisseau. Je conclus à ce que l’article soit rejeté entièrement. M. Bégouen. U y a peu d’années que le commerce était assujetti, par les règlements et les ordonnances, à prendre tant de novices sur une certaine quantité d’équipage ; le commerce a fait des représentations contre cette mesure qui ne tendait à rien moins qu’à rendre la navigation française plus chère qu’aucune autre navigation. Le commerce a obtenu de l’ancien gouvernement que cette charge fût supprimée. Depuis quelques années, le commerce est libre de composer L’article suivant est décrété : Art. 21. « Chaque armateur sera obligé de recevoir, à bord des bâtiments de 150 tonneaux et au-dessus, qu’il armera pour les voyages au long cours ou de grand cabotage, un aspirant du nombre de ceux qui, après trois ans d’entretien, n’auront pas complété leurs 4 ans de navigation pour être admissibles au concours. » M. Defermon. Nous voici parvenus au grade d’officiers de la marine. Art. 22. Officiers de la marine. « Les grades d’officiers de la marine seront ceux d’enseignes de vaisseaux, lieutenants de vaisseaux et capitaines de vaisseaux, et les grades d’officiers généraux. « On ne pourra être fait officier avant l’âge de 18 ans accomplis. » (Adopté.) « Le grade d’enseigne d’officier de la marine. » M. Defermon donne vant qu’il présente sous 01 Les aspirants de la première classe seront susceptibles d’ôlre embarqués comme enseignes de vaisseaux, après quatre ans de navigation, dont une au moins obligée sur les vaisseaux de l’Etat, en qualité d’aspirants, et avoir satisfait à l’examen qui sera prescrit ; et pour les trois autres années le temps de navigationsurles bâtiments de commerce sera compté à raison des deux tiers de sa durée effective : ils en auront le titre et le grade dès qu’ils auront été appelés au service à tour de rôle». sera le dernier grade (Adopté.) lecture de l’article sui-cette double forme: « Les aspirants de la première classse seront faits enseignes de vaisseau après quatre ans de navigation, dont une au moins obligée sur les vaisseaux de l’Etat en qualité d aspirants, et avoir satisfait à l’examen qui sera prescrit; et pour les trois autres années, le temps de navigation sur les bâtiments de commerce à raison des deux tiers de sa durée effective. » [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |19 avril 1791.) °200 M. Gnalbert. Si vous adoptez le projet de votre comité, il en résulterait qu’il serait illusoire, parce que, si vous admettez le concours au grade de lieutenant, il en résulterait que les 5 ou 600 enseignes de vaisseau que votre comité vous propose de créer navigueraient pendant une guerre, et même pendant plus longtemps, sans pouvoir concourir ; et, par conséquent, vous ne pourriez, sans injustice, refuser à un officier qui aurait fait 4 ou 5 ans de guerre, d’être avancé au grade de lieutenant de vaisseau. 11 faut donc que le concours soit fixé au premier grade d’officier de la marine, qui est celui d’enseigne de vaisseau. C’est ce que je demande à l’Assemblée. M. de Sillery. C’est ici le moment de rappeler ce que j’ai développé, les deux fois que j’ai parlé sur cet article-là. Le nombre des officiers de la marine que vous allez établir sera insuffisant en temps de guerre ; par conséquent, vous seriez obligés de prendre un grand nombre d’officiers de la marine commerçante pour venir servir, comme auxiliaires, sur vos vaisseaux. Il en résultera que les capitaines de navire, qui auront pourtant été obligés de passer un grade d’aspirant, se trouveront arriver dans la marine avec un grade absolument illusoire, c’est-à-dire que la ligne de démarcation entre la marine militaire et la marine marchande sera prononcée par ce mode-là. Je persiste à dire que, si vous n’établissez le concours qu’au grade de lieutenant, vous consolidez le corps de marine le mieux instruit. En Angleterre, il n’y a pas d’enseignes, il n’y a que des capitaines et des lieutenants. Etablissez le même mode qu’eux, puisque vous avez les mêmes ennemis à combattre. Vous établissez la ligne de démarcation et je persiste à demander que le concours soit fixé au grade de lieutenant. M. de Chanipagny. La question présentée à l’Assemblée nationale consiste à savoir si le concours doit être placé au grade d’enseigne ou à celui de lieuienant. Si le préopinant juge que le concours est un moyen propre à donner de bons lieutenants, il aurait pu eu conclure qu’il est également propre à donner des enseignes habile?. Et certes, il importe aussi à l’Etat d’avoir'dos enseignes habbes; car les enseigne?, sur les vaisseaux de guerre, comme les lieutenant?, peuvent commander ou conduire des bâtiments ; de leurs fautes, comme de leurs talents, peuvent dépendre quelquefois les succès ou les revers de nos armées navales. Mais j’examine le concours dans sa nature, pour voir à quel grade il s’applique avec plus de justesse et de convenance. Tout le corps militaire, tout le corps des officiers de mer voués au service public, en y comprenant tous les grades, doit être choisi sur la masse des navigâteuis. Donc le dernier de ce grade, celui par lequel on commence, le grade d’enseigne doit être donné au concours auquel seront appelés tous les navigateurs et spécialement les capitaines de commerce. Le concours ne fera jamais connaître que les connaissances théoriques ; il ne fera juger ni les talents ni les services de ceux qui seront soumis à l’examen, et quand il est question d’élever à un grade aussi important que celui de lieutenant, il faut demander à celui qui se présente et des talents et des services, et non pas de simples connaissances théoriques. M. Dillon. Je demande la priorité pour la motion de M. de Champagny. M. Maloueta la parole et parle quelques instants sur la question . M. le Président. Je crois devoir interrompre ici la délibération pour vous donner connaissance d’une lettre que je viens de recevoir; c’est une lettre de M. le garde des sceaux qui m’annonce la venue du roi. La voici : « Monsieur le Président, « J’ai l’honneur de vous adresser une lettre du roi, dont je vous prie de donner lecture à l’Assemblée nationale. « Je suis, etc. i. Signé : DUPORT. » Voici le billet du roi. « Je vous prie, Monsieur le Président, de prévenir l’Assemblée nationale que je vais m’y rendre dans le moment. (Vifs applaudissements.) « Signé : LOUIS. » Un membre : 11 faut nommer une députation pour aller au-devant du roi. M. le Président. On propose de nommer une députation pour aller au-devant du roi: elle sera de 24 membres. Plusieurs membres : Oui ! oui ! (L’Assemblée décrète par acclamation d’envoyer sur-le-champ au-devant du roi une députation de 24 membres.) M. le Président nomme la députation. Plusieurs membres : Le roi vient 1 (La députation sort.) M. Merlin. Monsieur, le Président, allez donc recevoir le roi ! M. Prieur. Non! nonl le Président ne doit pas se déranger. M. le Président. Messieurs, je recommande le plus grand silence; et je crois me conformer aux intentions de l’Assemblée en ajoutant que personne ne doit prendre la parole que le Président. M. Le Chapelier. Continuons la délibération. M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir et de celle de demain. (L’Assemblée attend eu silence l’arrivée du roi.) Plusieurs membres : Chapeaux bas ! Plusieurs membres : Il n’est pas besoin de le dire. Un huissier : Voici le roi ! Tous les membres de l’Assemblée se lèvent. Le roi entre dans la salle suivi de plusieurs