[Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Mirecourt.j six nobles, il se trouve trois députés à choisir, nombre égal à celui de Nancy, où l’on en compte plus de deux cents ; que, pour faire cesser ces disproportions, il serait nécessaire qu’on n’indiquât qu’un petit nombre de bailliages, auxquels on attribuerait le droit de députer directement et sans réduction, et dans lesquels se rendraient tous les membres de la noblesse, du clergé et du tiers des autres bailliages, qui, par cette réunion, auraient la faculté de faire un meilleur choix. Fait et arrêté en l’assemblée des commissaires soussignés, en vertu de la délibération de la noblesse du 27 de ce mois, ce 27 mars 1789. Signé d’Haussonville ; Duhoux ; comte de Fresnel ; Bassompierre ; Melon de la Grèze ; Bail-livy ; Duparge d’Ambacourt ; Le Maillot de Pont. CAHIER Des remontrances, plaintes, doléances , moyens et avis de tous les sujets du ressort du bailliage de Mirecourt (1). En se conformant aux vues bienfaisantes de Sa Majesté, qui daigne appeler près d’elle ses fidèles sujets, pour l’éclairer sur les moyens d’opérer le bien de son royaume et faire cesser, autant que possible, les maux qui affligent singulièrement le tiers-état et les abus dont il est la victime, il se permet de proposer à Sa Majesté, et de la supplier d’ordonner ; Art. 1er. Que, dans les Etats généraux, pour toutes sortes de délibérations, et dans tous les cas, l’on opinera par tête et non par ordre, et que les voix du tiers y seront recueillies de la même manière et en la même forme que celle des deux premiers ordres. Art. 2. Que les impôts, librement consentis par la nation, seront supportés par tous les sujets de Sa Majesté, de quelque ordre qu’ils soient, à raison de leurs propriétés , revenus et facultés. L’on se persuade que les deux premiers ordres et les villes exemptes jusqu’à présent ne se refuseront pas à la justice de cette demande, déjà si généreusement accordée par les ecclésiastiques et les nobles de plusieurs provinces du royaume. Art. 3. Les juridiciables du bailliage, considérant que Sa Majesté, en accordant à l’ordre du tiers une représentation égale en nombre à celle des deux autres ordres réunis, a déjà prononcé, autant qu’elle a cru devoir le faire, sur la justice de la première réclamation, puisque, dans toute supposition contraire, la représentation à eux accordée, au lieu d’une faveur, ne leur serait qu’un surcroît de dépense; considérant aussi que la raison, répuisement des villes et des campagnes et la grandeur de la dette à acquitter, commandent impérieusement la seconde, ils ont délibéré que, si, contre leur espoir justement conçu, les premier et second articles n’étaient pas préliminairement consentis, leurs députés seraient chargés de supplier Sa Majesté d’agréer leur respectueuse protestation contre tout ce qui pourra être fait au contraire, et tenus de se retirer de l’assemblée, tous pouvoirs cessant, dans le cas seulement où la majeure partie des députés du tiers-état aurait le même ordre de leurs commettants, lesdits juridiciables • ne voyant rien, dans la discussion de ces deux articles, qui puisse intéresser la majesté du trône, mais seu-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. lement une prétention à régler entre les différents ordres. Art. 4. Que les Etats particuliers de la province de Lorraine soient rétablis ; que l’ordre du tiers y ait autant de représentants que les deux premiers ordres réunis , et que les voix, dans toutes délibérations , y soient également prises et comptées par tête, et non par ordre Art. 5. Que les Etats provinciaux se tiendront alternativement dans les principales villes de la Lorraine, ainsi qu’il se pratique dans différentes provinces qui jouissent de leurs Etats particuliers, et qu’ils s’assembleront aussi annuellement. Art. 6. Que les impôts, librement consentis par les Etats généraux, soient répartis par ceux de la province et supportés parles trois ordres, chacun suivant ses forces et facultés, assis sur un seul et même rôle, sans que ni villes ni communautés, corps ecclésiastiques, séculiers, réguliers ou laïques, ni aucun particulier de quelque ordre, état et condition qu’il soit, puissent exhiber de privilèges ou exemptions dont ils auraient joui jusqu’à présent. Art. 7. Qu’il sera procédé à la vérification du déficit et de la dette nationale, et qu’il ne pourra être fait aucun emprunt, directement ou indirectement, sans le consentement des Etats généraux. Art. 8. Que les Etats généraux soient rendus périodiques et triennaux, et que les impôts, librement consentis par eux, ne puissent avoir lieu que pendant trois ans. Art. 9. Que la plus exacte économie soit introduite dans tous les départements, et que la multitude de places créées sous une infinité de dénominations différentes soit réduite autant que possible. Art. 10. Qu’en suite de la vérification des emprunts qui ont été faits jusqu’à présent, ceux dont les intérêts seront reconnus excéder le taux fixé par les lois du royaume pour tous les sujets, y seront réduits. Art. il. Que les membres du tiers-état seront habiles et admis à posséder toutes charges et dignités ecclésiastiques, militaires et civiles, non-nobstant toutes lois générales et statuts particuliers faisant au contraire. Art. 12. Que les places qui se trouveront vaquer, tant dans les chapitres d’hommes que dans les cours supérieures, seront remplies par les sujets de l’ordre du tiers, jusqu’à ce que, dans chacune, il se trouve autant de membres de cet ordre que des deux premiers ; et en cas de vacances ultérieures, que chacune place sera conférée à un sujet du même ordre que celui qui l’aura laissée vacante, sans avoir égard aux expectatives ou lettres de survivance, qui auraient pu ci-devant être accordées, et qui pourraient être, dans la suite, surprises à la religion de Sa Majesté, et à toutes lois et usages faisant au contraire. Art. 13. D’interdire tout transport d’argent en cour de Rome, sous quelque prétexte que ce puisse être; en conséquence , autoriser les évêques, chacun dans leur diocèse, à accorder les bulles, dispenses et provisions qui en sont l’objet. xArt. 14. Permettre la liberté de la presse dans tout le royaume, sauf à répondre des écrits répréhensibles suivant l’exigence des cas ; et d’accorder, d’après le vœu de tous les juridiciables, une imprimerie à Mirecourt, une des villes principales de la province, chef-lieu d’un bailliage. Art. 15. Dans toutes les administrations quelconques , ordonner qu’il sera rendu annuellement un compte qui sera publié, pour éclairer la nation sur l’emploi des deniers publics, dans la [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Mirecourt.] forme qui sera réglée par les Etats généraux. Art. 16. Qu’il soit' fait, par les Etats généraux, un examen sérieux de toutes les pensions dont l’Etat est grevé, pour vérifier les motifs qui ont déterminé aies accorder; supprimer celles qui seraient jugées n’être point suffisammentmotivées, et réduire à un juste taux celles qui seraient arbitrées exorbitantes. Art. 17. De diminuer le nombre et le traitement des fermiers, administrateurs, régisseurs, directeurs, receveurs, contrôleurs et employés dans tous les genres d’administration. Art. 18. Que les lois consenties par la nation dans les Etats généraux soient adressées aux Etats provinciaux pour y être inscrites, et directement à tous les tribunaux pour être, par eux, publiées et enregistrées, et exécutées, sans que ni ces assemblées, ni ces tribunaux puissent y apporter aucune modification, ni en arrêter la publication ni l’éxécution, sous aucun prétexte. Art. 19. D’abolir les traites foraines qui donnent ouverture à des vexations sans nombre exercées continuellement par les percepteurs, qui coûtent au peuple dix fois plus que le droit même, qui ne produit au domaine qu'un revenu très modique ; qu’à l’égard de la question touchant l’admission du tarif et le reculement des barrières, cette question ne soit point agitée aux Etats généraux, mais renvoyée à ceux de la province qui, après une discussion profonde, pourront seulement en solliciter l’introduction. Art. 20. D’éteindre les droits de la marque des cuirs, et autres accessoires, impôt qui pèse sur toutes les classes des citoyens, singulièrement sur celle des cultivateurs, et qui a forcé les fabricants en cuirs et peaux de cette province à cesser l’exercice de cette profession. Art. 21. Réduire au quart les forges, verreries et autres usines à feu, établies en Lorraine. Cet objet et les salines occasionnent une consommation de bois tellement considérable que la province, si boisée autrefois, éprouve, depuis quelques années, une disette progressive et qui fait craindre que, dans peu, elle ne soit absolument privée de cet objet de première nécessité. Art. 22. Détruire, par la même raison, les salines de Lorraine, et, attendu que le sel est d’une nécessité première et pour les hommes et pour les troupeaux, le rendre marchand, en tout cas en réduire le prix au taux où il était avant l’enregistrement de l’édit qui en ordonne le payement en argent de France ; permettre à tous les sujets indistinctement de s’en approvisionner dans quel magasin ils jugeront à propos, sans que la ferme puisse les assujettir à se munir de bulletins. Art. 23. La conservation des forêts étant extrêmement imposante, et les peines infligées aux délinquans trop légères, il conviendrait que Sa Majesté en augmentât la sévérité, que la punition suivît de près le délit, pour que les propriétés forestières fussent respectées à l’égal des autres propriétés des campagnes ; les formalités prescrites aujourd’hui ne produisant que des frais superflus à la charge du domaine de Sa Majesté et de ses vassaux. Art. 24. La dévastation des forêts ayant rendu insuffisante pour les besoins des communautés, les portions affouagères qu’on leur délivre annuellement, elles supplient Sa Majesté d’ordonner que les arbres surnuméraires des coupes usées leur seront délivrées de deux années l’une, par forme de supplément d’affouage. Art. 25. Que l’impôt représentatif de la corvée sera supprimé et les choses à cet égard remises sous l’ancien régime, à charge que les deux premiers ordres contribueront à cette prestation, suivant qu’il sera réglé par les Etats généraux. Art. 26. Que Je droit de franc-fief, dont la charge pèse également sur la noblesse et le tiers-état, sera supprimé ; que les droits et privilèges de committimus , qui forcent les pauvres sujets à abandonner leurs foyers et à se transporter au loin pour contester par-devant des juges qu’ils. ne connaissent pas, seront également abolis ; de supprimer pareillement les tribunaux d’exception et d’attribution, sans aucune réserve, tant à cause de l’indécence des conflits, des plaintes en règlements de juges, que des dépenses extraordinaires qu’elles occasionnent aux parties, autant tourmentées par l’incertitude de savoir à quel tribunal elles doivent demander justice, qu’écrasées par les frais de voyages et dépenses énormes qu’elles sont obligées de supporter. Art. 27. La Lorraine, se trouvant surchargée de-trente-quatre bailliages, dont quatre présidiaux, de quarante-cinq sièges de municipalités et de police, quinze maîtrises des eaux et forêts, onze. prévôtés royales, il conviendrait de réduire le tout en juridictions ordinaires, dont le nombre modéré serait réglé sur l’étendue et la population de la province, et particulièrement de supprimer les maîtrises des eaux et forêts, dont le régime est universellement reconnu pour désastreux. Et, en cas de conservation des présidiaux, d’augmenter leur pouvoir avec des mesures certaines pour empêcher que les affaires présidiales puissent se juger et être portées en d’autres tribunaux, et l’assurance de l’entière exécution de leurs jugements rendus en dernier ressort, ou abolir ces tribunaux qui, institués pour le bien des sujets, ne leur sont plus aujourd’hui qü’onéreux et nuisibles. Art. 28. De révoquer l’arrêt rendu au conseil du feu roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar, sous la date du 26 janvier 1753 , qui suspend. l’exécution de l’édit du duc Léopold, du 30 décembre 1728; ordonner, en conséquence, que les juifs ne pourront faire aucun acte avec les autres sujets de la province que par-devant notaire, à peine de nullité. Art. 29. De supprimer l’impôt d’industrie, qui ne porte presque que sur les communautés d’arts et métiers, par conséquent sur la classe la plus misérable du peuple ; de supprimer également les jurandes d’arts et métiers; de suppriuier encore les offices de jurés-priseurs, vendeurs de biens meubles, qui vexent les villes et les campagnes, mettent des entraves dans le commerce et causent à tous les sujets une gêne incroyable et une multitude de procès dispendieux. Art. 30. De supprimer l’impôt établi pour payer les gages du parlement de Nancy; autoriser ce tribunal à percevoir les droits à lui attribués par les ordonnances de la province, ainsi qu’il se pratiquait avant l’établissement de cette imposition. Il doit paraître injuste que les citoyens (et c’est le plus grand nombre) sacrifient leurs intérêts pour éviter les procès, et cependant supportent une charge qui doit être la peine du téméraire plaideur. Art. 31. Autoriser tous les propriétaires d’héritages chargés de cens, obits et fondations, tant envers le domaine de Sa Majesté, qu’envers l’Eglise et les vassaux, à en faire le rachat pour un capital qui sera fixé par les Etals généraux ; en conséquence, autoriser les gens de mainmorte à replacer les fonds, sans avoir besoin de lettres [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Mirecourt.] patentes; et pour favoriser les réunions, autoriser ] les mêmes gens de mainmorte à faire des échanges, en observant seulement les formalités anciennes de la province. Art. 32. Que la dîme de raisins sera fixée au vingt-quatrième dans toute la province, les droits, néanmoins, de ceux qui payent à une moindre quotité réservés, avec la faculté aux communautés abonnées de choisir ladite fixation, ou de s'en tenir à leur abonnement. Art. 33. De supprimer les banalités des fours, pressoirs et moulins. Art. 34. Pour parer aux inconvénients qu’entraîne après soi la lenteur des procédures, ordonner que toutes actions intentées entre rôgnicoles, en quelque tribunal que ce soit, seront terminées dans le délai de deux ans; et entre sujets d’outremer et absents du royaume pour cause publique, ou entre étrangers, dans celui des trois ans, sous les peines qui seront arbitrées; ordonner encore l'abréviation des formes de la justice criminelle et civile. Art. 35. Supplient très-humblement Sa Majesté de ne permettre, en aucun cas, le partage des pâquis communaux de la province, d’annuler ceux qui ont pu être faits précédemment; comme aussi de révoquer l’édit de mars 1767 qui permet indistinctement de clore les héritages; d’ordonner que les héritages qui étaient autrefois en nature de prés, pâquis et terres arables, qui sont clos, et qui sont encore aujourd’hui même nature de prés, pâquis et terres arables, seront ouverts à la vaine pâture. Art. 36. Les droits seigneuriaux, tels que ceux de corvée, de charrues, charrois de bras, tant envers les seigneurs qu’envers les curés, ceux de guet et de garde, de sauvegarde, de bourgeoisie, d’assise, les redevances en argent, grains, volailles, qui se lèvent par conduit, par feu ou par tête, et jusque sur les bêtes de trait, le tiers appartenant aux seigneurs dans les cas d’aliénation des fonds et ventes des fruits communaux, la arde franche du bétail des curés, et mille autres ont vos malheureux sujets ne peuvent pas même vous faire l’énumération, sont autant de plaies par où leur vies s’écoulent douloureusement. Mais, comme ils prévoient que les Etats généraux ne pourront que jeter un. coup d’œil rapide sur les détails d’administration secondaire, ils se contenteront de solliciter, à cet égard, la suppression actuelle des droits flétrissants de servitude. Art. 37. Dans la province de Lorraine, les communautés ont des deniers provenant de la vente de leurs émoluments communaux, qui sont destinés à subvenir aux dépenses publiques auxquelles elles sont assujetties. Les seigneurs en perçoivent d’abord le tiers, et ce droit est connu sous le nom de tiers-denier. Vos fidèles communes supplient très-humblement Votre Majesté de statuer que toutes les dépenses communales, autorisées par l’administration, seront, à l’avenir, acquittées sur la totalité des deniers provenant de la vente des fruits et émoluments communaux ; et que le tiers-denier, appartenant au seigneur, ne se percevra plus que sur ce qui restera de ces deniers, toutes dépenses acquittées. Art. 38. L’expérience prouvant aux malheureux cultivateurs que le dégât que font les pigeons, pendant le temps des semailles et des récolles, afflige et appauvri� plus les campagnes que l'imposition des vingtièmes, ordonner la suppression des colombiers de tous ceux qui n’ont que des concessions, et obliger les seigneurs fondés en droit à tenir leurs colombiers fermés quinze jours seulement pendant la semailledeschènevis; fixer le npnibre des boulins suivant l’étendue et la possibilité du finage, et statuer que, dans le cas où il y aurait plusieurs seigneurs, ils ne pourraient avoir, pour tous, que la quantité de boulins qui aurait été arrêtée. Art. 39. Ordonner que ceux qui ont droit de troupeau à part, de même que les communautés, ne pourront, en aucun temps, faire conduire dans les prés leurs troupeaux de bêtes blanches, et que ceux des bêtes à cornes ne pourront aller paître dans les embannis, qu’au moment où ceux de la harre des communautés y seront conduits. Art. 40. Ordonner que l’examen des droits de châtrerie et rïflerie, sera renvoyé aux Etats provinciaux, pour la correction des abus qui se commettent dans leurs exercices. Art. 41. Ordonner la suppression de l’édit de création des hypothèques, en suppliant Sa Majesté d’v substituer, sur l’avis des Etats généraux, une forme nouvelle moins périlleuse pour les créanciers hypothécaires et moins onéreuse au peuple. Art. 42. Ordonner pareillement la suppression de l’édit du 13 août 1782, concernant la fabrication des eaux-de-vie dans la province : ces entraves imposées aux propriétés gênent considérablement les particuliers, et n’enrichissent que très-faiblement le domaine de Sa Majesté. Art. 43. Les fidèles communes de votre bailliage de Mirecourt ont l’honneur de vous représenter qu’un grand nombre d’entre elles sont diversement chargées d’une multitude de droits seigneuriaux qui se portent quelquefois au delà des impositions royales auxquelles elles sont assujetties ; elles supplient très-humblement Sa Majesté d’ordonner que, dans la répartition des subsides, les Etats provinciaux qu’elles lui ont demandés auront égard à ce qu’elles payent à leurs seigneurs particuliers, et seront imposées de telle sorte que le fardeau qu’elles supportent ne soit pas en totalité plus lourd pour elles que pour les autres communautés de la province. Art. 44. Les mêmes communes supplient encore Sa Majesté d’ordonner que les gros décimateurs seront chargés à l’avenir des réparations des églises et des presbytères, sans que les communautés puissent jamais y être obligées. Art. 45. Sur la question importante de l’aliénation des domaines de Votre Majesté, les sujets de votre bailliage de Mirecourt, ne doutant pas qu’elle ne dût être discutée et approfondie par les Etats généraux, ils déclarent s’en référer à la prudence d’un si grand nombre d’hommes éclairés, dans la persuasion où ils sont que Votre Majesté, d’après leurs avis, pourra alors prononcer avec une entière connaissance de cause. Art. 46. Pour prévenir les inconvénients multipliés des baux et sous-baux à l’infini qui se font des domaines non aliénés de Votre Majesté, baux qui enrichissent certainement les premiers baillistes, ruinent presque toujours les derniers, et les provoquent à des rapines et à des vexations de toute espèce, il conviendrait ordonner que les baux en seront passés par les officiers du bailliages où seront situés lesdit domaines, et que les deniers qui en proviendront seront versés dans la caisse royale la plus prochaine. Art. 47. Par l’excellente qualité de ses eaux et ses fourrages, la ville de Mirecourt étant dans le cas d'être désignée pour quartier de’cavalerie, vos très-humbles sujets supplient Votre Majesté d’ordonner qu’il y sera construit des casernes, à l’édification desquelles la province contribuera, la ville et le bailliage de Mirecourt ayant été im- 9 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Mirecourt.] posés pour la construction des corps de caserne faits dans différentes autres villes de la province, telles que Nancy, Saint-Mihiel, Rosières, Pont-à-Mousson et Sarreguemines. Art. 48. L’éducation de la jeunesse étant de la première importance, et la ville de Mirecourt étant une des principales de la province par sa population, elle mériterait du gouvernement la faveur de l’établissement d’un régent des humanités, dont elle est privée depuis quelques années. Sa Majesté est très-humblement suppliée d’accorder à la ville un établissement si nécessaire. Art. 49. Elle est encore suppliée d’accorder à ladite ville la suppression des droits portés en l’arrêt du conseil du "28 mai 1757, et du règlement du 12 novembre 1782, surpris à la religion de Sa Majesté, ainsi que la suppression du quart en sus qu’elle perçoit sur les deniers d’octrois de la même ville, et la suppression encore du coupel. Telles sont, Sire, les plaintes, doléances, avis et moyens que les fidèles sujets de votre bailliage de Mirecourt ont l’honneur de faire passer respectueusement au pied de votre trône. Ils respirent dans la douce persuasion que Votre Majesté trouvera un moyen de soulagement pour eux, et de libération pour l’Etat dans les impositions également réparties sur le clergé, la noblesse, les privilégiés et le peuple, dans l’intérêt de la dette nationale réduit au taux licite, et déterminé pour tous les sujets de Votre Majesté, dans la suppression d’une foule de places inutiles de l’état militaire, la robe et la finance, et dans la réduction de traitements pour celles reconnues absolument nécessaires; dans la conservation de l’argent du royaume, qui s’en écoule continuellement pour aller enfler les revenus de la chambre apostolique, et que Votre Majesté peut réunir aux économats, et destiner à l’extinction de la dette nationale; dans la réduction des pensions accordées à ceux qui ont bien mérité de l’Etat, mais qui s’offenseraient sûrement de n’être point appelés. pour contribuer à sa libération; et dans la suppression absolue de celles qui seraient trouvés n’être tombées que sur des gens oisifs, inutiles et à charge. Mais, si, après toutes ces opérations effectuées, il arrivait que Votre Majesté n’eût pas encore atteint le but qu’elle se propose (le soulagement de son peuple), ils vous offrent, Sire, leur sang, leur vie et le peu de bien qui leur reste. Que Votre Majesté daigne en disposer, et qu’elle veuille bien les regarder comme le peuple le plus attaché à son roi, le plus zélé pour la défense des droits sacrés de son trône, le plus fidèle et le plus soumis qui exista jamais. Ils vous supplient enfin, Sire, de recevoir avec bonté leurs très-respectueux remercîments pour la faveur que leur a faite Votre Majesté, de les appeler près de son trône, et de les entendre dans leurs justes et respectueuses représentations. Fait, clos et achevé le 27e jour de mars 1789, en la salle de l’auditoire du bailliage de Mire-court, en présence des députés de toutes les communautés, qui, après avoir eu lecture du présent cahier, ont déclaré approuver tous et un chacun des articles y insérés; le même cachier contenant 9 feuillets et 17 pages écrites, qui ont été cotées et paraphées par M. Marcellin Bénit, lieutenant général du bailliage dudit Mirecourt; et ont tous lesdils députés signe : Marchai; Deville; G. Vautrin; F. Maton ; P. L. Grand-Didier; Nicolas Rousselle; S. Potié; Joseph Mathiey; G. Chilliet; G. Vaillant; J. Henry; G. Marchaf; J. Georget; N. Parin : F. Mausuey; Joseph Curé; R. Renauld; D. Hugo; Jacob Grillot; G. Vauthier; Félix Claude; S.-C. Hugo; F. Barry; C. Gérard; Brosse; N. Gilbert ;J. -F. Févotte; Jean - Baptiste Urion; J. Pillement ; C. Fairiso ; J. - B. Fourcaulx; N. Gocquard; F-Panzol; P. Joly; F. Ambroise; G. Jaudet;G. Noirtin; François Carlet; Grand-mésin ; P. Magniau; P. Vallance ; Béry; G. Thiéry ; Joseph Galier; J. Simonin; J. -Louis Dumont; L. Lescoffier; G. -F. Valon; Byrot; Olivier; Nicolas Morlot; J. -B. Durand; J. Aubel; G. Cuvy; Antoine Clément; Pierre Noël; François Muslié; J.-F. Bas-tien; N. Bourguignon; J. Mougel;J. Philippe; Royer; N. François; Brice Manignet; C.-N. Four-catilx; D. B. Mangin; Claude Gaspard; F. Miche-lant; Jean Curé; Joseph Lacombe; Petitjean le jeune; N. -Joseph Bron; D. Denvs; G.-F. Berné; Claude Malgros; G. Denis; J. Vautier; F. Richard; N. Grandmaire; J.-F. Drouin; Rémy Moinot; N. Blat; V. Laprévotte; Joseph Aubry; N. Gilbert; V. Druaux ; Claude Ghauvelet; J. Laprévote ; J. Thuillier; N.-F. Thouvenel; P. Noiriet; Louis Ferry; J. -G. Hambré; P. Bourdot; J.-B. Gravol; N. Humbert; J. Vantard; G. Barjanot; F. Jahel; Gosserat; F. Pierrot; G. Petitjean; Bônil ; Thiboult; J. Chrétien Bellot; Grandjean; Chantaire; Rolin. CAHIER Des deliberations du clergé et du tiers-état du bailliage royal de Bruyères en Lorraine , formant les instructions et pouvoirs des députés de ces deux ordres aux Etats généraux du royaume (1 ). L’an 1789, le 24e jour du mois de mars, en la grand’salle de l’hôtel de ville ; En vertu de la lettre du Roi pour la convocation des Etats généraux du royaume, du 7 février dernier, conformément aux règlements y annexés, en exécution des arrêtés du clergé et du tiers-état dudit bailliage, en date du 16 du présent mois, consignés dans les procès-verbaux de leurs assemblées particulières dudit jour ; lesdits ordres s’étant réunis et délibérant sur ce qui pourrait contribuer à la prospérité du royaume, à celle de la Lorraine, et du bailliage de Bruyères en particulier; vivement frappés de ce grand objet; animés du patriotisme le plus pur et le plus désintéressé; pénétrés d’amour et de respect pour la personne sacrée du Roi, et pour l’auguste assemblée de la nation; après avoir ouï le rapport des commissaires chargés de lire, d’examiner les divers cahiers et mémoires des demandes, vœux et doléances proposés par les ecclésiastiques et les députés des villes et communautés du ressort, et de les réduire en un seul et unique cahier; Ont arrêté, d’une voix unanime, que les délibérations, qui s’ensuivent, seraient présentées au Roi et aux Etats généraux, comme le résultat des vœux, des demandes et des réclamations desdits deux ordres : Prospérité du royaume. 1° Une loi ne peut être constitutionnelle et nationale qu’ autant qu’elle est l’expression de la volonté au plus grand nombre manifestée par la pluralité des suffrages. La nation, étant divisée en trois ordres, dont les deux premiers réunis ne sont au troisième que dans la proportion de deux cent mille à vingt-cinq millions, il est de justice rigoureuse que le tiers-état ait, au moins, une représentation (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.