[19 septembre 1789»] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* nous serons privés de la prérogative la plus précieuse, du droit de cité ! Exclus du Corps législatif, nous serions encore exilés dans notre .propre patrie! Nous qui réclamerions, s’il était possible, un droit plus particulier de chérir, de défendre, de servir la constitution que nous aurons fondée, nous n’aurions pas même l’honneur de pouvoir désigner des sujets plus dignes que. nous de la confiance publique. Nous perdrions enfin le droit qu’un citoyen ne peut jamais perdre, sans que la liberté de la nation soit violée, celui de participer à la représentation, d’être électeur ou éligible. M. de Airieu fait sentir la nécessité de s’occuper de l’organisation des pouvoirs, réclame la priorité pour le rapport du comité de constitution, et demande qu’on revienne incessamment à la dernière question de M. Guillotin sur la sanction royale. M. le duc d’ Aiguillon répète la motion qu’il a déjà faite, et prie M. le président de la mettre aux voix. M. Target appuie cette motion : « L’Assemblée décide â l’unanimité qu’il y aura deux jours par semaine consacrés aux finances. Ces deux jours seront le vendredi et le samedi. » « L’Assemblée décide encore que Pavant-veille du jour où le comité des finances fera un rapport, son travail sera imprimé et distribué dans tous les bureaux. » M. de Laborde propose de faire imprimer et distribuer les états des finances du royaume et les états particuliers des départements. (Cette proposition est universellement adoptée.) M. le Président. Le Roi m’a dit: « B.evenez demain soir, et je vous donnerai une réponse aux demandes de l’Assemblée nationale. » M. le garde des sceaux, qui était alors chez le Roi, ayant demandé à Sa Majesté si je pouvais assurer l’Assemblée nationale de ses dispositions favorables, Sa Majesté à répondu avec bonté : « Ah! oui, toujours. » La séance est levée et convoquée pour ce soir sept heures et demie. ANNEXE à la séance du matin de V Assemblée nationale du 19 septembre 1789. Nota. M. le marquis de Gouy-d’Arsy ayant fait imprimer et distribuer un mémoire destiné à servir de complément à son discours sur l’état des finances, nous croyons devoir insérer ce document dans les Archives parlementaires. MOYENS PROPOSÉS A L’ASSEMBLÉE NATIONALE PAR M. LE MARQUIS de Gouy-d’Arsy, pour PRÉVENIR LA BANQUEROUTE JOE L’ETAT (1). Observations préliminaires. Le 7 du mois d’août dernier, les ministres du (1) Ce mémoire , composé rapidement, était destiné à être lu à l’Assemblée nationale, le samedi 19 du mois 41 Roi, envoyés vers l’Assemblée nationale, pour déposer dans son sein les inquiétudes dont le cœur paternel de Sa Majesté était agité, ont dit : Le temps est venu , Messieurs , où une impérieuse nécessité semble vous commander ..... ..... Les conséquences du malheureux état des affaires peuvent être telles, qu’il devienne au-dessus de votre zèle et de vos moyens de prévenir le plus grand désordre , et dans les finances, et dans toutes les fortunes. Vous sentirez la nécessité d’examiner, SANS UN MOMENT DE RETARD, l’état des secours indispensables pour empêcher UNE SUSPENSION DE PAYEMENTS. ... .................... Il faut prévenir une confusion générale ..... Il ne faut pas que les matériaux du bâtiment soient dispersés ou anéantis , pendant que les plus habiles architectes en composent le dessin ..... RÉUNISSONS-NOUS POUR SAUVER L’ETAT ..... . Le mal est si grand que chacun est malheureusement à portée de l’ apprécier. Le même jour, 7 avril dernier, un des orateurs de l’auguste Assemblée, effrayé de l’abîme entr’ou-vert par le désordre des finances, a réclamé des secours prompts et efficaces contre le vœu de la plupart clés cahiers, sous peine , disait-il, de n’avoir plus a faire une constitution et des lois que pour un État QUI N’EXISTERAIT PLUS. Ges terribles vérités si pressantes, il y a deux mois, subsistent aujourd’hui avec bien plus d’empire encore; la plaie s’invétère et s’agrandit : le mal préexistant s’est accru de tout l’équivalent des charges des mois d’août et de septembre; il s’est accru surtout par l’absolu non succès d’un premier emprunt de 30 millions, par l’incertitude encore subsistante du sort d’un second emprunt de 80 millions et enfin par la présence imminente des charges ultérieures à celles qui ont déterminé le décret de ces deux emprunts. En vain chercherait-on à se dissimuler l’étendue du mal ; il est certain que le Trésor public est sans argent comme sans crédit; que la banqueroute, repoussée avec tant d’horreur par les décrets de l’Assemblée nationale , est au moment d’éclater. Or, si l’on veut, en mettant à part le sort des créanciers prêteurs, se représenter pour un jour seulement tous les fournisseurs et tous les agents du pouvoir exécutif sans remboursement et sans salaire , l’armée entière sans solde et sans pain , ne frémit-on pas de penser que quinze jours de septembre courant, à la suite de l’opinion que j’avais entamée sur la situation funeste de nos finances. Si l’on m’avait fait la grâce de m’écouter jusqu’au bout, si quelques personnes , sans doute plus instruites que moi, n’avaient officieusement imposé silence à mon zèle, l’effroi nécessaire qu’aurait causé le début de mon discours, aurait sans doute cédé peu à peu au développement des moyens consolateurs présentés dans cet écrit, et, je ne sais si je me trompe, mais il me semble qu’offrir de telles ressources à un empire sur le bord du précipice, c’est le servir tout autrement que de fasciner, d’une main sacrilège, les yeux de ses modérateurs, ou de les laisser , par un ménagement coupable, ignorer jusqu’à l’abîme qui s’ouvre sous leurs pas.. Frappé des vérités que je viens d’établir, on aurait trouvé peut-être quelque justesse dans des conclusions qui tendaient à supplier l’Assemblée nationale de suspendre momentanément le travail de la constitution elle-même, pour s’occuper uniquement, pendant quelques jours , de la situation des finances, à laquelle est attaché bien certainement aujourd’hui, quoiqu’on en dise, la perte ou le salut de l’Etat (Note de M. de Gouy-d’Arsy).