422 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {13 novembre 1790.1 M. Goupil veut répondre. (Des cris extraordinaires , partant du côté droit étouffent sa voix.—- On décide de passer à l'ordre jour.) Une députation de la municipalité de Paris est admise à la barre. M. Bailly, maire, qui la préside, prend la parole et dit : « Messieurs, la municipalité de Paris, qui est votre ouvrage, qui est née de la Constitution que vous avez donnée à la France ; la municipalité à qui des circonstances n’ont pas permis de se présenter encore devant vous, pour vous offrir et ses hommages et l’assurance de sa fidélité, a cru que vous pouviez cependant la reconnaître, lorsqu’elle vous apporterait une preuve de vigilance et de zèle pour le bien public. C’est sa sollicitude qui l’amène, et c’est aux pères de la patrie qu’elle [s’adresse pour réclamer de leur sagesse le moyen d’assurer la tranquillité publique. » Il donne ensuite lecture de l’arrêté ci-après : MUNICIPALITÉ DE PARIS. CORPS MUNICIPAL. Extrait du registre du corps municipal du 13 novembre 1790. « Le corps municipal, alarmé de la fréquence des combats singuliers dans la capitale, considérant comme un de ses premiers devoirs d’empêcher le retour des désordres dont il gémit en ce moment et dont les suites peuvent être si funestes : « A arrêté qu’il serait, à l’instant, député vers l’Assemblée nationale pour la supplier de porter le plus tôt possible contre les duels, une loi qui rappelle puissamment les citoyens aux règles de la morale, et les préserve à jamais des suggestions d’un sentiment incompatible avec le caractère d’un peuple libre et juste. Signé : Bailly, maire DE Joly, secrétaire greffier. Certifié conforme à l’original : Signé : DE JOLY, secrétaire greffier. M. le Président répond : « L’Assemblée nationale vient de s’expliquer sur une pétition semblable à celle que vous venez lui présenter. Elle n’a jamais douté de votre vigilance à maintenir l’exécution des lois et la tranquillité publique, et elle est persuadée que vous eussiez été les premiers à exercer cette noble fonction, si les circonstances l’eussent permis. Elle ne saurait vous peindre sa douleur profonde sur l’événement qui vous amène; vous avez pu apercevoir son agitation. Je ne saurais moi-même vous parler plus longtemps en son nom. Elle s’occupera incessamment de votre demande, et vous invite d’assister à sa séance. » M. Bailly. Nous sommes bien sensibles à l’invitation de l’Assemblée ; mais nous lui demandons la permission de retourner à l’hôtel-de-vi Ile, c’est-à-dire à notre poste et à notre devoir. (On applaudit.) M. l’abbé Brouillet propose de donner lecture d’un projet de décret sur le duel qu’il a annoncé à l’Assemblée depuis longtemps. (Voy. Archives parlementaires , tome XVIII, p. 767.) L’Assemblée ordonne simplement le renvoi aux comités de Constitution et de judicature réunis. M. le Président. Le comité des rapports a la parole pour rendre compte d’une contestation entre la municipalité de la ville de Dax et la Société des amis de la Constitution de la même ville. M. Salle, au nom du comité des rapports. Au mois de janvier de celte année, il s’est établi dans la ville de Dax une Société des amis de la Constitution ; elle s’est conformée au décret qui défend aux citoyens de s’assembler sans avoir averti la municipalité, et a obtenu des officiers municipaux de Dax une permission de tenir ses séances. Mais bientôt la municipalité, provoquée par une pétition de quelques citoyens de Dax, a dissous ia société par la force, a fait afficher sa sentence et a mis les scellés sur ses papiers. Les membres de cette .société se sont adressés au comité des rapports, qui, pour ne pas détourner l’Assemblée de ses importantes délibérations, a pensé que les voies de la conciliation et de la persuasion, qu’il a employées si souvent avec succès, suffiraient en cette circonstance. II s’est donc livré à une discussion particulière de l’affaire qui lui était soumise ; il a remarqué que la municipalité ne précisait aucun motif de sa conduite, sinon que la qualification de cette Société d'amis de la Constitution était une espèce d’accusation contre les autres citoyens d’être ennemis de la Constitution ; que cette société était une corporation, et que l’effet de ces corporations était d’opérer une scission entre les citoyens. Votre comité a pensé que la Société des amis de la Constitution ne pouvait pas être accusée d’inculper, par son nom, les autres citoyens plus que les noms des Sociétés philanthropiques, académiques, etc., ne sont parmi nous une injure et une accusation d’inhumanité ou d’ignorance pour tous les citoyens qui n’en sont pas membres. Il a cru que ces sociétés ne pouvaient pas être considérées comme des corporations ; car celles-ci, soumises à des règles intérieures prescrites par la loi, sont autorisées à faire des actes publics, tandis que les sociétés dont il s’agit ne sont que des associations particulières, soumises aux lois générales et devant être protégées par elles comme tous les autres citoyens : elles n’ont d’ailleurs aucun caractère public; elles sont libres dans la formation des règles intérieures de leur organisation ; elles propagent l’esprit public et le patriotisme, et les municipalités ne peuvent les dissoudre que dans le cas où elles formeraient dans leur sein des complots contre l’exécution des lois et troubleraient l’ordre public ; encore faudrait-il alors agir avec de certaines précautions. Deux lettres successives écrites par votre comité des rapports à la municipalité de Dax sont demeurées sans réponse ; quoiqu’il lui ait rappelé le décret qui autorise tous les citoyens à se réunir paisiblement et sans armes pour délibérer sur leurs intérêts, elle a persisté dans le refus de restituer à la Société des amis de la Constitution les papiers qu’elle lui avait enlevés et de lui permettre de tenir ses séances. En conséquence, nous vous proposons le projet de décret suivant : <- L’Assemblée nationale, considérant que, par son décret du 14 décembre 1789, il est libre à tous les citoyens de se réunir paisiblement et