SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nl>s 38-39 145 38 Les Belges, réfugiés en France, viennent témoigner à la Convention nationale leur joie sur les victoires des armées de la république. Ils demandent qu’une colonne, élevée au milieu de la plaine de Fleurus, transmette à la postérité que c’est sur le sol de la Belgique que le dernier arrêt des rois fut prononcé. Ils demandent aussi que plusieurs de leurs frères, privés de leur liberté depuis longtemps, leur soient rendus, ou que leurs têtes tombent sous le glaive de la loi s’ils sont coupables (l). L’ORATEUR : Citoyens représentants, les Belges viennent à votre barre vous témoigner leur joie sur les victoires multipliées des troupes de la république. Il est arrivé ce grand jour ! le drapeau tricolore flotte sur les remparts de la Belgique, et nous venons vous demander qu’une colonne transmette à la postérité (au milieu de la plaine de Fleurus) que c’est sur le sol de la Belgique que le dernier arrêt des rois fut prononcé. En vain le prêtre Richelieu ligua toute l’Europe contre l’audacieuse maison d’Autriche ! Ce que ne purent faire tous les potentats réunis, les Français libres l’ont exécuté dans la plaine de Fleurus. L’orgueilleux François est humilié, l’aigle dominateur, suspendu à la voûte du sanctuaire de la liberté, apprend à l’univers notre triomphe et la honte du plus lâche des tyrans. Ainsi s’éclipseront tous ces rois malfaisants qui oseront tirer l’épée contre nous. C’est au moment que nous partageons la joie de la France régénérée, c’est au moment où le flambeau du génie de la liberté guide nos pas vers notre patrie, qu’il nous reste des regrets. Plusieurs de nos frères gémissent depuis longtemps dans la captivité ; nous ne présumons ni leur innocence ni leur crime ; nous demandons qu’ils nous soient rendus, ou que leur tête tombe sous le glaive de la loi. Veuillez donc, citoyens représentants, mettre le comble aux soins paternels que vous avez pris jusqu’à ce jour de vos enfants adoptifs; rendez nous nos frères s’ils sont innocents, punissez-les s’ils sont coupables, pour qu’il ne nous reste plus rien à désirer en retournant dans nos foyers, et qu’une justice éclatante apprenne à la Belgique entière que vous protégez l’innocence avec autant d’énergie que vous en mettez à frapper les conspirateurs. Vive la république ! vive la Montagne ! vivent nos libérateurs ! (2). Renvoyé au comité de sûreté générale. Mention honorable, insertion au bulletin (3). 39 Le conseil -général de la commune de Paris vient se réjouir avec la Convention nationale (1) P.V., XLI, 239. (2) Mon., XXI, 217 ; Débats, n° 662 ; J. Lois, n° 654 ; C. Eg., n° 695 ; J. Mont., n° 79 ; J. S. Culottes, n° 515 ; C. Univ., n° 926 ; J. Matin, n° 7 18 ; J. Perlet, n° 660 ; F.S.P., n° 375 . (3) C. Eg., n° 695 ; J. Mont., n° 79 ; J. Perlet, n° 660. sur les résultats du courage que le peuple de Paris a montré à l’époque du 14 juillet. Les discours prononcés à la barre par le maire et l’agent national sont entendus avec applaudis-semens (l). LE MAIRE : Représentants du peuple, Le Conseil général de la commune vient se réjouir avec vous sur les résultats du courage que le peuple de Paris a montré à l’époque du 14 Juillet. Que nos chants d’allégresse retentissent de toutes parts pour saluer le 1er jour de la liberté, que le tocsin de la résistance à l’oppression se fasse entendre jusques aux extrémités de la terre, que les tyrans coalisés contre la liberté des peuples tremblent, qu’ils en frémissent, que dans leur frayeur ils précipitent encore leur fuite honteuse devant les armées de la République. O ! jour à jamais mémorable dans l’histoire du monde, Quatorze Juillet, nous te saluons, tu as éclairé le courage du peuple de Paris, tu as fondé la première pierre de l’édifice de la liberté publique; tu as appris aux peuples combien est foible le despotisme quand il est aux prises avec les hommes généreux qui ont le sentiment de la liberté dans le cœur. Et vous, peuples de la terre, qui gémissez encore sous le despotisme des rois, qu’attendez-vous donc pour imiter l’exemple des français ? Vous combattez pour des Tygres altérés du sang des hommes. Nous, nous combattons pour la liberté, vous êtes vaincus partout, l’être suprême a béni les armes de la république, nous triomphons partout; comparez votre avilissement à notre gloire, à notre bonheur. Qu’attendez-vous donc encore une fois pour renverser vos bastilles, vous ne serez nos freres qu’à cette condition. Et toi, peuple marchand, féroce Anglais, qui ose te dire libre, et seconde l’infâme Pitt, l’im-becile Georges dans le projet de détruire la liberté par la corruption, vas[,]tu ne réussiras pas. Que sont devenues tes phalanges mercenaires ? elles sont exterminées par les hommes libres, ou elles ont fui devant eux. Hommes perfides et corrompus, bientôt vous n’opprimerez plus la liberté, les français vous ont voué une haine immortelle; vous apprendrez à respecter un peuple généreux et digne de la liberté. Législateurs, nous ne pouvons contenir le saint enthousiasme dont nous sommes saisis en nous rap-pellant devant vous l’époque du 14 juillet. Mais ce jour n’a pas suffit à la liberté, il falloit encore au 10 Aoust renverser le thrône, et fonder l’égalité; il falloit par un grand exemple effrayer les rois de la terre, et vous, représentants du peuple, l’avez fait en envoyant l’infâme Capet à l’échaffaud. Le monstre du fédéralisme menaçoit d’étouffer la liberté et le 31 Mai l’a terrassé. Nos chants d’allégresse seront répétés n’en dout-tons pas, dans toute la République, ils se feront entendre surtout dans nos armées. Dignes représentants du peuple, nous ne sçavons quel pressentiment heureux l’amour de la liberté (1) P.V., XLI, 239. Bin, 27 mess.; J. Fr., n° 658; M.U., XLI, 426; Ann. R.F., n°226; J. Paris, n° 561 ; Rép., n° 207 ; J. Mont., n° 79 ; Audit, nat., n° 659 ; J.S. Culottes, n° 515 ; Mess, soir, n° 694 ; F.S.P. n° 375 ; Débats, n° 662 ; J. Sablier, nos 1437, 1438; J. Perlet, n°660; J. Matin, n° 718 ; C. Eg., n° 695 ; J. Lois, n° 654 ; Ann. patr. N° DLX. 10 SÉANCE DU 26 MESSIDOR AN II (14 JUILLET 1794) - Nl>s 38-39 145 38 Les Belges, réfugiés en France, viennent témoigner à la Convention nationale leur joie sur les victoires des armées de la république. Ils demandent qu’une colonne, élevée au milieu de la plaine de Fleurus, transmette à la postérité que c’est sur le sol de la Belgique que le dernier arrêt des rois fut prononcé. Ils demandent aussi que plusieurs de leurs frères, privés de leur liberté depuis longtemps, leur soient rendus, ou que leurs têtes tombent sous le glaive de la loi s’ils sont coupables (l). L’ORATEUR : Citoyens représentants, les Belges viennent à votre barre vous témoigner leur joie sur les victoires multipliées des troupes de la république. Il est arrivé ce grand jour ! le drapeau tricolore flotte sur les remparts de la Belgique, et nous venons vous demander qu’une colonne transmette à la postérité (au milieu de la plaine de Fleurus) que c’est sur le sol de la Belgique que le dernier arrêt des rois fut prononcé. En vain le prêtre Richelieu ligua toute l’Europe contre l’audacieuse maison d’Autriche ! Ce que ne purent faire tous les potentats réunis, les Français libres l’ont exécuté dans la plaine de Fleurus. L’orgueilleux François est humilié, l’aigle dominateur, suspendu à la voûte du sanctuaire de la liberté, apprend à l’univers notre triomphe et la honte du plus lâche des tyrans. Ainsi s’éclipseront tous ces rois malfaisants qui oseront tirer l’épée contre nous. C’est au moment que nous partageons la joie de la France régénérée, c’est au moment où le flambeau du génie de la liberté guide nos pas vers notre patrie, qu’il nous reste des regrets. Plusieurs de nos frères gémissent depuis longtemps dans la captivité ; nous ne présumons ni leur innocence ni leur crime ; nous demandons qu’ils nous soient rendus, ou que leur tête tombe sous le glaive de la loi. Veuillez donc, citoyens représentants, mettre le comble aux soins paternels que vous avez pris jusqu’à ce jour de vos enfants adoptifs; rendez nous nos frères s’ils sont innocents, punissez-les s’ils sont coupables, pour qu’il ne nous reste plus rien à désirer en retournant dans nos foyers, et qu’une justice éclatante apprenne à la Belgique entière que vous protégez l’innocence avec autant d’énergie que vous en mettez à frapper les conspirateurs. Vive la république ! vive la Montagne ! vivent nos libérateurs ! (2). Renvoyé au comité de sûreté générale. Mention honorable, insertion au bulletin (3). 39 Le conseil -général de la commune de Paris vient se réjouir avec la Convention nationale (1) P.V., XLI, 239. (2) Mon., XXI, 217 ; Débats, n° 662 ; J. Lois, n° 654 ; C. Eg., n° 695 ; J. Mont., n° 79 ; J. S. Culottes, n° 515 ; C. Univ., n° 926 ; J. Matin, n° 7 18 ; J. Perlet, n° 660 ; F.S.P., n° 375 . (3) C. Eg., n° 695 ; J. Mont., n° 79 ; J. Perlet, n° 660. sur les résultats du courage que le peuple de Paris a montré à l’époque du 14 juillet. Les discours prononcés à la barre par le maire et l’agent national sont entendus avec applaudis-semens (l). LE MAIRE : Représentants du peuple, Le Conseil général de la commune vient se réjouir avec vous sur les résultats du courage que le peuple de Paris a montré à l’époque du 14 Juillet. Que nos chants d’allégresse retentissent de toutes parts pour saluer le 1er jour de la liberté, que le tocsin de la résistance à l’oppression se fasse entendre jusques aux extrémités de la terre, que les tyrans coalisés contre la liberté des peuples tremblent, qu’ils en frémissent, que dans leur frayeur ils précipitent encore leur fuite honteuse devant les armées de la République. O ! jour à jamais mémorable dans l’histoire du monde, Quatorze Juillet, nous te saluons, tu as éclairé le courage du peuple de Paris, tu as fondé la première pierre de l’édifice de la liberté publique; tu as appris aux peuples combien est foible le despotisme quand il est aux prises avec les hommes généreux qui ont le sentiment de la liberté dans le cœur. Et vous, peuples de la terre, qui gémissez encore sous le despotisme des rois, qu’attendez-vous donc pour imiter l’exemple des français ? Vous combattez pour des Tygres altérés du sang des hommes. Nous, nous combattons pour la liberté, vous êtes vaincus partout, l’être suprême a béni les armes de la république, nous triomphons partout; comparez votre avilissement à notre gloire, à notre bonheur. Qu’attendez-vous donc encore une fois pour renverser vos bastilles, vous ne serez nos freres qu’à cette condition. Et toi, peuple marchand, féroce Anglais, qui ose te dire libre, et seconde l’infâme Pitt, l’im-becile Georges dans le projet de détruire la liberté par la corruption, vas[,]tu ne réussiras pas. Que sont devenues tes phalanges mercenaires ? elles sont exterminées par les hommes libres, ou elles ont fui devant eux. Hommes perfides et corrompus, bientôt vous n’opprimerez plus la liberté, les français vous ont voué une haine immortelle; vous apprendrez à respecter un peuple généreux et digne de la liberté. Législateurs, nous ne pouvons contenir le saint enthousiasme dont nous sommes saisis en nous rap-pellant devant vous l’époque du 14 juillet. Mais ce jour n’a pas suffit à la liberté, il falloit encore au 10 Aoust renverser le thrône, et fonder l’égalité; il falloit par un grand exemple effrayer les rois de la terre, et vous, représentants du peuple, l’avez fait en envoyant l’infâme Capet à l’échaffaud. Le monstre du fédéralisme menaçoit d’étouffer la liberté et le 31 Mai l’a terrassé. Nos chants d’allégresse seront répétés n’en dout-tons pas, dans toute la République, ils se feront entendre surtout dans nos armées. Dignes représentants du peuple, nous ne sçavons quel pressentiment heureux l’amour de la liberté (1) P.V., XLI, 239. Bin, 27 mess.; J. Fr., n° 658; M.U., XLI, 426; Ann. R.F., n°226; J. Paris, n° 561 ; Rép., n° 207 ; J. Mont., n° 79 ; Audit, nat., n° 659 ; J.S. Culottes, n° 515 ; Mess, soir, n° 694 ; F.S.P. n° 375 ; Débats, n° 662 ; J. Sablier, nos 1437, 1438; J. Perlet, n°660; J. Matin, n° 718 ; C. Eg., n° 695 ; J. Lois, n° 654 ; Ann. patr. N° DLX. 10