24i | Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES [14 janvier 1791. j Idées sur V organisation de la marine et sur les changements et réformes don t elle est susceptible dans différentes 'parties , par M. de Vlef-ville des Essarts, député du département de l’Aisne (1). Les circonstances et quelques rapports jîe liai-sod m’ayant facilité les moyens de connaître l’organisation de la marine, d’en remarquer les abus et d’en méditer la réforme, je soumets à l’Assemblée nationale les résultats de mes réflexions. Il suffit de jeter les yeux sur la dernière ordonnance de la marine, du mois de janvier 1786, qui a fixé les forces navales du royaume, et de les reporter eosuitesur la liste des officiers de ce corps que l’on publie chaque année, pour être frappé de l’excessive quantité d’officiers généraux, et de leur surabondance, comparativement au nombre des vaisseaux. Elle est telle, qu’il serait possible d’en mettre un sur chaque vaisseau. La marine de France est fixée, par cette ordonnance, à 80 vaisseaux de ligne, divisés en 9 escadres de 9 vaisseaux chacune, et d’un certain nombre de frégates, cutters, corvettes, lougres et autres bâtiments légers ; mais elle est rarement complète, et elle ne doit l’être qu’en temps de guerre. Il est bon seulement que les choses soient disposées de manière qu’elle puisse être complétée aussitôt que les circonstances l’exigent. En temps de paix, elle n’a guère besoin que de 60 vaisseaux; elle n’en a même pas actuellement un pareil nombre en état d’être armés, et son armement total n’emploierait que dix officiers généraux, un commandant en chef et neuf chefs d’escadre. Qu’on ajoute quatre officiers généraux commandants des ports de Brest, Toulon, Rochefort et Lorient (encore ce dernier port n’exige-t-il qu’un capitaine de vaisseau pour commandant et celui de Rochefort ne parait-il pas susceptible d’être conservé), on aura un total de quatorze officiers généraux (2). Voilà, strictement, le besoin réel de la marine dans la classe supérieure des officiers, non compris deux ou trois employés aux Indes et eri Amérique en qualité de gouverneurs, mais qui sontor-dinairement pris parmi les capitaines de vaisseau. Que l’on en admette, si l’on veut, 10 de supplément, ce qui portera le nombre à 24, 2 vice-amiraux, 8 lieutenants généraux et 14 chefs d’escadre. C’est sûrement autant qu’il en faut, et même le plus haut nombre auquel on puisse porter cette classe d’ofticiers. (1) Je m’étais proposé do discuter le plan général de l’organisation de la marine et d’en donner un qui aurait embrassé le civil et le militaire; mais étant incommodé depuis quelque temps, n’ayant pu assister au rapport du comité, ni aux discussions qui ont suivi, me trouvant encore hors d’état do travailler, il m’est devenu impossible de remplir mon projet. Je suis donc forcé de me borner à présenter mes idées : je mo fais un devoir de les rendre publiques et de les soumettre à l’examen et au travail du comité, me réservant de leur donner le développement dont elles sont susceptibles, soit au comité, lorsque ma santé me permettra de m’y rendre, soit à l’Assemblée nationale, lors de la nouvelle discussion qui s’ouvrira. ( Noie de l’auteur. ) (2) Les Anglais n’ont pas de commandants dans les ports d’arsenaux; c’est le capitaine déport qui y commande, qui fait exécuter, sur qui roule toute la besogne. En France, nous avons commandants, directeurs généraux, directeurs particuliers, et tous également bien payés : là, c’est un seul homme. lre SÉRIE. T. XXII. Mais, au lieu de 24, il s’en trouve 62, 4 vice-amiraux, 16 lieutenants généraux et 42 chefs d’escadre. Il y en a donc 38 de surérogation à laisser éteindre auparavant qu’il soit fait de promotion, ou plutôt à mettre hors d’activité ; et en leur laissant les deux tiers de leurs appointements, on y gagnera un tiers, et le remplacement plus prompt d’officiers plus utiles. Autrefois, il n’y avait qu’un vice-amiral : aujourd’hui on en compte quatre, ainsi qu’on vient de l’observer ; et il est rare qu’il y en ait un d’employé, soit parce que l’on ne parvient à ce grade que dans un âge très avancé, ou parce que le traitement de cet officier, lorsqu’il est employé à la mer, est très considérable ; car, outre 24,000 livres d’appointements, il lui est passé 160 livres par jour en supplément et pour sa table ; personnelle (1). Il paraît juste, et c’est un point essentiel delà constitution de la marine, indispensable pour la comptabilité et la détermination de la dépense, que le nombre d’officiers de tous les grades soit invariablement fixé en temps de paix ; qu’on ne voie plus ce corps sujet à ces éternelles variations que chaque mutation de ministre lui a fait éprouver, et qui, depuis 25 ans, est le jouet constant de leurs caprices, chacun d’eux a laissé une ordonnance que le successeur a détruite, soit par la crainte de ne point laisser �de preuve de son ministère, soit par l’intention de corriger son prédécesseur. Si l’on a pensé que 24 officiers généraux suffisaient, on pense également que 100 capitaines de vaisseau suffisent pour le commandement de 81 vaisseaux de ligne et le service des ports. Les 40 premiers seront chefs de division, ayant le rang de brigadier des armées du roi (ils le sont), et tous seront en activité dans les ports. Mais au lieu de 100, la liste en porte 130, 40 chefs de division, 70 en activité, et 20 en non-activité. Il s’en trouve donc 30 de supplément à laisser éteindre, ou à mettre hors d’activité, en leur accordant les deux tiers de leurs appointements. Cent majors de vaisseau paraissent également suffisants, un pour chaque vaisseau : les dix-neuf restant pour les détails et le commandement des frégates supérieures portant du 18. (Us sont sur la liste , ils ont le rang de lieutenants-colonels ; il n’y a conséquemment rien d changera cet égard.) Plus, . 500 lieutenants de vaisseau {ils sont également sur la liste)] mais on pense qu’il convient de les diviser en deux classes pour le rang, ainsi qu’ils le sont pour les appointements ; la première, quia 1,600 livres, continuera de jouir du rang de major ; la seconde, qui a 1,050 livres, sera mise au rang de capitaine d’infanterie. Il est en effet hors des règles de la subordination et de l’émulation du système militaire, que des jeunes gens, encore écoliers après six années de navigation en qualité d’élèves, passent tout à coup au grade supérieur de major d’infanterie. C’est trop abaisser ce rang, qu’un officier de terre n’obtient qu’après de très longs services. Il est bon, d’ailleurs, d’établir une gradation qui les (1) Ce traitement de labié, fixé par ordonnance da 1768, primilivemenl dû à la prodigalité du feu duc de Choi-seul, semble devoir être réduit, non seulement pour le vice-amiral, mais aussi pour tous les officiers généraux employés, chefs de division, capitaines commandants, et officiers de tous les rangs. On est fondé à croire que j la réduction provisoire, décrétée le 26 juillet, restera définitive. 46 [14 janvier 1791.] 242 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. mette dans une évidence à pouvoir les faire juger dignes de Foccuper, M. le maréchal de Castries a créé, par l’ordonnance de 1786, 840 sous-lieutenants de vaisseau, destinés à compléter l’armement en temps de guerre. Ce nombre n’est point complet; on a jugé convenable de ne pas le remplir pendant la paix, et il n’y en a environ que 450 portés sur la liste. Mais cette création, à charge à l’Etat pendant la paix, a été mal vue et mal combinée. On pourrait, lors de la guerre, prendre ce supplément d’officiers parmi les capitaines les plus expérimentés des navires marchands, qu’on a, jusqu’ici, fait marcher indécemment comme matelots. Le ministre de la marine demanderait, au mois de janvier de chaque année, à toutes les chambres de commerce du royaume un état de tous les capitaines de navire, reçus au grand cabotage et au loug cours dans chaque port. En marge de cet état, il serait fait mention de l’ancienneté, du mérite, de la nature des campagnes de chacun, s’ils sont à la mer ou à terre ; et, de tous ces états particuliers, serait formé un état général sur lequel seraient apostillés ceux qui auraient été jugés propres à être emp loyés sur les vaisseaux du roi, avec indication des parties du monde où chacun aurait le plusvoyagé et acquis le plus de connaissances, pour les y employer de préférence. Certes, des officiers ainsi formés et instruitspar l’expérience vaudraient bien des jeunes gens pris au hasard et par faveur ; ils seraient employés en qualité d’officiers surnuméraires, concurremment et sans distinction avec les lieutenants de vaisseau de la seconde classe. Ainsi, et d’après les états annuels des chambres de commerce, lorsque la guerre viendrait à se déclarer, on commanderait à l’instant les capitaines de navires marchands, portés sur la liste d’emploi . ce ne serait qu’alors que l’Etat les solderait. A la paix; ils retourneraient à leurs fonctions; il leur serait décerné les récompenses qu’ils auraient méritées ; et ceux d’entre eux qui se seraient distingués resteraient à la solde de l’Etat, Si l’on adopte ce projet qui, sous tous les rapports, me paraît utile et avantageux, en ce qu’il honore le commerce, en fait une école de navigation pour la marine militaire, et tendà n’avoir que des officiers expérimentés, les 450 sous-lieutenants de nouvelle création deviennent inutiles. On peut, dès ce moment, en leur laissant le tiers de leurs appointements, les dispenser de tout service dans les ports; en conséquence, leur donner la permission de naviguer pour le commerce, où ils continueront de s’instruire, jusqu’à ce que la guerre oblige de les rappeler au service de FEtat. Gomme ils coûtent 450,000 livres environ, ce serait une économie de 300,000 livres. On observe ici que le service des canonniers militaires se faisait auirefois par des canonniers bourgeois classés, dont la marine a toujours été très satisfaite. C’était une pépinière précieuse d’excellents marins que l’ordonnance de 1786 a détruite, et qu’on ne cesse de regretter. Il paraît bien difficile de suppléer avantageusement pour l’Etal à cette classe d’hommes distingués, chers à la marine sous tous les titres, réputés les premiers canonniers de l’Europe qui, de retour d’une campagne, rentraient dans leurs foyers, ne coûtaient rien au gouvernement et étaient toujours prêts à marcher au besoin. On croit donc qu’il serait intéressant de les rétablir. Pourquoi, en effet, ne se rapprocherait-on pas de l’ancienne forme pour rendre au service ces hommes précieux, en réduisant en proportion le corps d’infanterie des canonniers-matelots ? Le corps des officiers de port, rendu sédentaire depuis l’ordonnance de 1786, ne partageant plus le service de mer, est trop nombreux; il peut être réduit de moitié dans les grades de lieutenant et sous-lieutenant : ils sont 48; ce serait 12 dans chaque grade à supprimer. Peut-être, cependant, serait-il plus juste et plus convenable de traiter en tout les sous-lieutenants de port comme les sous-lieutenants de vaisseau, avec qui ils ont rapport ; en conséquence, de leur accorder le même sort, c’est-à-dire la permission de naviguer sur les bâtiments de commerce, en conservant le tiers de leurs appointements jusqu’à ce qu’il y ait lieu à leur remplacement. La partie des officiers d’administration pour la comptabilité est encore susceptible de réduction, particulièrement dans les chefs. Les intendants généraux des armées navales, des fonds, des classes et pêches, toutes places de résidence à Paris, d’une très grande dépense pour l’Etat, sans utilité réelle, ne peuvent jamais échapper à la réforme. De simples chefs de bureau suffisent dans chaque partie, sans qu’il soit besoin d’intermédiaires pour les comptes à rendre au ministre; et l’économie résultant de leur suppression pourra procurer à la marine un bâtiment de plus tous les ans, ce qui est préférable et vaut infiniment mieux. Les intendants des ports et arsenaux et des places de commerce peuvent et doivent être supprimés, comme à charge et inutiles. Il y a un intendant et un commissaire général dans chaque port de département, faisant les mêmes fonctions en l’absence l’un de l’autre; c’est un double emploi. L’intendant peut être supprimé, et le commissaire général, qui coûte moitié moins, et qui d’ailleurs ne parvient à ce rang que par ancienneté et une longue expérience, doitêtre conservé. Il sera chargé, à ce titre seulement, de toutes les fonctions d’intendant auxquelles il est habitué; et en cas d’absence, il sera suppléé par le plus ancien commissaire. 11 en coûtera moitié moins en appointements et traitements. Les places de commerce de Bordeaux, du Havre, de Lorient, de Dunkerque, etc., ont chacune un commissaire général qui a le titre d’intendant, et, pour celte seule cause, un supplément considérable qui double ses appointements. L’ordonnance n’en comporte pas, et elles n’en ont pas besoin, puisque Marseille, qui n’est pas moins important, n’en a point; ce sont des grâces purement ministérielles : il ne faut pas même de commissaire général, un commissaire ordonnateur suffit pour Lorient, et de simples commissaires en chef pour les autres places. Les inspecteurs généraux et particuliers de la marine militaire doivent subir la même réforme que les intendants généraux et particuliers. Il n’est pas besoin d’inspecteurs en titre ; ces sortes de places ne doivent avoir de durée que le terme de leur utilité. Lorsqu’une tournée sera jugée nécessaire et qu’il sera question défaire une inspection ou vérification des troupes, des classes, etc., il sera nommé instantanément des officiers généraux ou commissaires, qui seront payés seulement pour le temps de leurs tournées, et dont le 114 janvier 1791. J |Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 243 titre, les fonctions et les traitements cesseront à la fois (1). Les officiers de la marine, fixés aux classes, devraient avoir ces places pour retraite, de même que les officiers du service de terre ont les majorités; mais on leur donne d’abord leur retraite, et ensuite, par supplément, les appointements attachés aux inspections et chefferies des classes : c’est un abus. Si les chefferies des classes ne paraissent pas suffisamment payées pour tenir lieu de retraite, et qu’il soit jugé utile de les conserver, il faut les augmenter; il en coûtera beaucoup moins que d’accorder la retraite, plus, ces places en sus. L’administration des colonies est encore susceptible d’une grande réforme; le pouvoir des intendants, leur traitement, celui des gouverneurs, doivent être réduits, et les frais de bureau d’une extension arbitraire, absolument fixés. La meilleure administration, d’une surveillance facile, est la plus uniforme ; c’est celle dont toutes les parties s’enchaînent mutuellement; et l’on ne voit pas, dans l’administration générale des colonies, cette unité si désirable qui annonce l’esprit d’ordre, et qui peut seule prévenir une infinité d’abus. Les chefs et presque tous les individus soudoyés par l’Etat dans toutes les parties civiles et militaires, quoiqueayant la même surveillance, le même travail, que leur existence soit peu variée, y sont payés différemment, sans qu’on puisse apercevoir d’autre cause dans cette différence que le vice d’un régime arbitraire. Les intendants sont payés depuis 40 jusqu’à 80,000 livres; les gouverneurs, depuis 24 jusqu’à 100,000, livres ; les commissaires, depuis 6 et au-dessous jusqu’à 16,000 livres. Le titre d’intendant, au surplus, n’y paraît pas plus nécessaire que dans les ports de département, et partout ailleurs où il vient d’être supprimé. Des commissaires généraux pour les colonies les plus importantes, telles que Saint-Domingue, la Martinique et l’Ile-de-France, et des commissaires ordonnateurs en chef, ou de simples commissaires pour les autres suppléeraient avantageusement les intendants. Il en résultera une grande économie et un meilleur ordre de comptabilité (2). Ces officiers d’administration secondaires, étant généralement plus instruits, choisis par ancienneté de service dans leurs corps, sont formés par une longue habituded’ex-périence, qui aide l’esprit de toutes les connaissances locales ; leur nombre serait fixé et réduit; ils seraient payés en raison de leurs occupations et de l’importance des lieux. La différence des traitements est abusive, lorsqu’elle n’est pas l’objet d’une plus grande étendue de travail. Le traitement des gouverneurs doit être également déterminé sur l’importance de la colonie ; ces places ne doivent plus être à l’avenir un objet de spéculation pour y relever ou y faire sa fortune. Ils seraient suffisamment payés, dans les principaux établissements, en fixant la totalité de leurs appointements et traitements depuis (1) L’inspecteur général des classes jouit, outre les appointements de songrade, de 12, 000 livres de supplément pour son inspection, sans comprendre les frais de bureau. L’inspecteur, général des troupes, de même. (2) Il faut quitter cette routine de forme, à laquelle on met beaucoup trop d’importance ; rendre la comptabilité la plus simple possible, surtout rapprocher les termes des payements arriérés qui favorisent les erreurs et doubles emplois. 50,000 livres et au-dessus. Il vaut mieux qu’ils représentent par leur surveillance, leur activité, leurs soins, que de tenir table ouverte. Les commandants en second et particuliers, dont la plupart ne sont pas obligés à la représentation, peuvent et doivent être également réduits, ainsi que les chefs des différentes parties civiles et militaires ; tels que ceux des corps d’artillerie, du génie, les officiers des états-majors, etc. L’extrême facilité avec laquelle on a multiplié toutes les places et les postes soldés sont les principales causes auxquelles on peut attribuer l’accroissement successif des dépenses de la marine, qui n’ont jamais eu de fixité. Les Anglais, avec une marine plus considérable, ont un moindre nombre d’agents d’administration, et ils suffisent. Voici comment je réglerais les appointements et traitements de tous les officiers civils : A chacun des commissaires-généraux de Brest et de Toulon, pour appointements et frais de bureau ........................... 15,000 liv. Au commissaire - ordonnateur de Lorient, pour idem ................ 10,000 Aux commissaires en chef de Bordeaux, du Havre, de Marseille, Dunkerque, Cherbourg, pour idem , chacun .............................. 7,000 Aux trois commissaires généraux des colonies, pour appointements, traitements et frais de bureau ..... 25,000 A celui de Saint-Domingue, à cause de l’étendue de sa juridiction, pour les frais de déplacement ............ 30,000 Au commissaire-ordonnateur de la Guadeloupe et ses dépendances, appointements et frais idem .......... 18,000 Aux commissaires en chef des autres colonies, telles que Sainte-Lucie, Tabago, Cayenne, File Bourbon, Pondichéry, à chacun .............. 10,000 Nos autres établissements de peu d’importance n’ont besoin que d’anciens commis faisant les fonctions d’écrivains principaux, à qui il suffirait de donner 3 à 4,000 livres, excepté pour le Sénégal, mais qui est régi par une compagnie, chargée de toutes les dépenses, et dont l’économie peut servir de modèle pour nos moindres établissements. Les commissaires ordinaires dans les colonies, comme ailleurs, ne sont pas trop payés, mais ils sont trop nombreux, et leur nombre doit être réduit de concert avec le ministre, de même que celui des écrivains principaux et ordinaires. Toutes ces réductions seraient un objet d’économie de plus de 400,000 livres. Voici également ce que j’estimerais devoir être accordé, pour traitements, aux gouverneurs et commandants particuliers, en suivant la même proportion dans la réduction des sous-ordres : Aux commandants de la marine de Brest et de Toulon , pour tout généralement quelconque, appointements, traitements et frais de bureau, à chacun .......................... 20,000 liv. Au commandant de Lorient, pour idem ............................ 12,000 Au gouverneur de Saint-Domingue, pour idem .................. 50,000 Au commandant en second, pour idem ............................ 15,000 Aux gouverneurs de la Martinique et de l’Ile-de-France, à chacun ..... 40,000 (Il n'y a que la colonie de Saint- 244 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 janvier 17êl.J Domingue, qui, par son étendue, soit susceptible d’un commandant en second.) Au gouverneur de la Guadeloupe et ses dépendances ................ 30,000 Aux commandants particuliers de Sainte-Lucie, Cayenne, l’îie Bourbon, à chacun ................... 15,000 Pondichéry a été évacué ; il n’y a plus de troupes, par conséquent point de commandant militaire. Tous les autres lieux de peu d’importance n’ont besoin que d’un capitaine de détachement, et un petit supplément d’appointements, proportionné à la valeur du lieu, suffit. Il doit en être de même de l’article des consulats, A l’énormité du traitement d’un grand nombre de consuls, chargés d’affaires, agents généraux et particuliers, se joignent l’inutilité de plusieurs, et une disparité injuste dans leurs traitements, à laquelle il est impossible d’assigner d’autre cause que l’arbitraire ministériel. Les consuls de Cadix, Lisbonne, Gênes, Naples et Amsterdam (ici c’est un commissaire général, mais le titre n’y fait rien, puisque ses fonctions sont celles d’un consul), Saint-Pétersbourg , Maroc, Bassora, sont payés comme des ambassadeurs; et à Madrid, outre l’ambassadeur, on y tient un agent chargé des affaires de la marine et du commerce, qui reçoit 24,000 livres de traitement, et 6,000 livres qu’on lui rembourse pour les présents - annuels. Ceux de l’Amérique septentrionale reçoivent également des sommes énormes pour les lieux qu’ils habitent. Le commerce ne rend pas, dans la plupart, ce qu’il coûte en représentation. L’Angleterre ne paye pas de frais de consulat en France, ou du moins peu de chose ; et nous tenons chez eux des agents qui sont payés jusqu’à 20,000 livres, et dans des ports où l’on ne voit pas quatre bâtiments français paraître dans l’année. Dans la plupart des lieux, un simple agent, pris parmi les négociants français qui y sont établis, peut tenir lieu de consul, et en remplir les fonctions avec un simple traitement de 2,000 livres, plus ou moins, selon l’importance des relations et du commerce de l’endroit. Il y a donc bien évidemment une forte réduction à faire sur cette partie. Ainsi le chargé des affaires de la marine et du commerce à Madrid est inutile ; l’ambassadeur peut faire l’un et l’autre sans intermédiaire: ce n’est pas un port de mer où les affaires sont minutieuses et journalières. Un consul à qui l’on payerait, à cause de l’importance du lieu, pour ses appointements et traitement, 10,000 livres, au lieu de 24,000 livres qu’on lui donne, suffirait. Lisbonne, qui est un des grands ports que nous fréquentons le moins, et où nous tenons un ambassadeur, n’a pas besoin d’un vice-consul, et encore moins d’un juge conservateur et d’un hôpital. Un consul payé 6,000 livres, au lieu de 1 6,000 que celui actuel reçoit,- sera bien traité. (Nous admettons ici un consul avec l’ambassadeur, parce que c’est un port de mer; mais nous retranchons la représentation, qui ne convient qu’à l’ambassadeur.) A Livourne, 4,000 livres au lieu de 8,000. Naples, 6,000 livres au lieu de 15,000. Amsterdam, 6,000 livres au lieu de 15,200. Hambourg, 6,Ô00 au lieu de 8,500. Stockolm, Elseneur, Saint-Pétersbourg, 6,000 livres au lieu de 8, 9 et 17,000. Boston, Baltimore, Richemont, New -York, Charles-Towo, Philadelphie, Portsmouth, (dans l’Amérique septentrionale), à chacun 6,000 livres au lieu de 8, 12 et 20,000. Wilmingstown (Amérique), 4,000. Maroc, 10,000 livres au lieu de 19,000. Bassora, 8,000 livres au lieu de 14,000. Londres, 10,000 livres au lieu de 20,000. Dublin, 8,000 livres au lieu de 16,000. Bristol, Edimbourg, Liverpool et Cork, 4,000 livres au lieu de 8 et de 9,000. (Tous les frais de consulat des ports du commerce du Levant et des côtes de Barbarie, dans la Méditerranée, sont à la charge de la chambre de commerce de Marseille.) Quant aux autres ports inférieurs, et à tous ceux où nous avons peu de relations de commerce, il faut y retrancher le titre de consul ; de simples agents, payés depuis 2,000 jusqu’à 3,000 livres, selon l’importance du commerce, suffisent ; et partout où il y a un consul, un vice-consul n’est pas absolument nécessaire; un négociant désigné suppléera le consul, en cas d’absence ou de maladie. L’Angleterre, dont le commerce est beaucoup plus étendu que le nôtre, emploie fort peu d’agents telle ne fait pas sur cet objet, en Europe, la sixième partie de notre dépense. Nos consuls et agents dans la majeure partie des lieux, surtout dans ceux où nous avons un ambassadeur, peuvent se dispenser de la représentation; elle n’est pas utile à l’objet de leur mission. Un nouvel objet de suppression a dû encore, depuis longtemps, frapper l’attention du gouvernement. Le port de Rochefort, construit avec faste par Louis XIV, malgré toutes les difficultés que la nature y opposait, et dont le séjour malsain, pestilentiel, occasionné par les marais qui l’entourent, a fait périr et nous fait perdre encore chaque année des milliers d’hommes, n’est point du tout propre à former un département, d’autant que les vaisseaux qui y sont renfermés ne peuvent y être entièrement armés, que la rivière n’a pas assez de fond pour leur tirant d’eau, qu’on est obligé de les descendre de la rivière sans leur artillerie, par conséquent sans défense; de sorte qu’en temps de guerre (nous l’avons vu dans celle de 1744 et la suivante) un seul vaisseau ennemi, en station à File d’Oléron, a pu et peut encore empêcher tous les vaisseaux renfermés dans ce port d’en sortir. Il est donc non seulement inutile, mais à charge et dangereux ; il coûte des sommes immenses en entretien, et la nature y a constamment surmonté l’art et les dépenses qu’on y a faites. Il n’est personne qui, connaissant sa situation, ne sente l’avantage de sa suppression. On peut le réunir à ceux de Brest et de Lorient ; ce qui ajouterait à plusieurs avantages celui bien important de rapprocher l’ensemble de nos forces dans l’Océan, dont la disjonction nous a été si souvent funeste. Cette suppression, impérieusement exigée sous tous les rapports, nous conduirait encore à une grande économie. Le commandant de ce département, l’intendant, les directions, toute l’administration de comptabilité deviendraient inutiles, puisque les ports de réunion désignés ont l’ensemble des officiers nécessaires dans toutes les parties, qu’un plus grand nombre de vaisseaux n’oblige pas de les augmenter. Enfin, un article qui peut offrir le plus d’économie, c’est l’appro- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 janvier 1791.] visionnement des ports. Ce sont toujours les mêmes personnes qui, par une prédilection qui suppose la faveur, obtiennent les adjudications des fournitures des arsenaux; tout cela s’arrange de manière que nul autre ne se présente pour les rabais, parce qu’on sait que c’est une sorte de succession, qui tient à des arrangements, à des motifs intéressés que l’habitude et le temps ont presque passés en loi. Le nouveau fournisseur craint la rigidité, les difficultés des recettes et les retards des payements ; tous moyens faciles à employer, qui l’empêchent de se mettre en concurrence. Qu’on détruise cet usage ; que les entreprises ne soient plus des successions pour des particuliers favorisés ; que la concurrence soit admise ; que chacun puisse se présenter aux enchères ; que les adjudications soient annoncées, publiées, affichées dans fous les lieux qui seront jugés nécessaires, trois mois à l’avance, et faites au jour fixe sans nulle préférence ; que l’exactitude des payements soit assurée; que les époques en soient déterminées six mois après les fournitures faites et passées en recette dans les ports ; qu’il suffise à l'adjudicataire de donner caution valable de remplir ses engagements, de satisfaire à toutes les clauses et conditions de son adjudication, alors il se présentera des concurrents aux adjudications, et le bénéfice des rabais deviendra incalculable (1). L’on pense encore qu’il ne faudrait pas comprendre le fret des approvisionnements dans le prix des achats; le transport en serait fait, pour les objets qui en sont susceptibles, par les flûtes du roi. Ou y trouverait l’avantage de joindre l’économie à l’instruction des officiers, en les faisant ainsi naviguer dans les mers du Nord, qu’ils connaissent peu ; d’employer et de former un plu3 grand nombre de matelots : on épargnerait un fret qu’il faut payer aux Hollandais, Suédois, Danois, que les fournisseurs emploient de préférence, parce qu’ils coûtent moins, en ce qu’ils naviguent avec plus d’économie. Quand même le fret coûterait plus, en employant les flûtes du roi aux transports des approvisionnements, l’argent nous resterait ; et nous formerions des officiers et des matelots. D’ailleurs, comme on est obligé d’armer des bâtiments, et uniquement pour faire naviguer et former des officiers, on en armera moins. Par ce moyen, ce que l’on dépenserait plus, d’un côté, serait regagné avantageusement de l’autre. D’après ces observations, on est donc autorisé à croire que la dépense de la marine, eu égard à ses forces actuelles, peut encore être réduite. Une simple comparaison va en établir l’évidence. La marine de France est à celle d’Angleterre, à peu près comme deux sont à cinq. Les bâtiments légers ne sont même guère que dans la proportion d’un à cinq, parce que le commerce de cette île étant considérable pour les comestibles qui lui sont nécessaires et qui sont chargés de droits, elle a besoin d’avoir continuellement des flottilles en station et d’être armée contre la contrebande. Elle a toujours vingt mille matelots en activité ; à peine en avons-nous la moitié. Sa marine coûte 54 millions, par conséquent la dépense de (1) On observe que la régie des vivres, dont le bail va finir, présente encore l’occasion d’une grande économie. La ration qu’elle fournit aux gens de mer revient à près de 18 sous ; et il semble possible de traiter à de meilleures conditions, à 16 sous au plus. m la nôtre, portée dans ce moment au-dessus de 46 millions, compris l’extraordinaire, est donc proportionnellement trop forte. Dans ces circonstances, et où l’Assemblée nationale jugerait à propos d’adopter les réductions et réformes qu’on vient de lui soumettre, voici le projet de décret que je proposerais : PROJET DE DÉCRET. L’Assemblée nationale considérant que, dans l’ordre social et politique, l’arbitraire laissé aux agents du pouvoir est une source intarissable d’abus de toute espèce, d’insouciance et de mépris pour les lois, d’injustices et de faveurs dans la distribution des places, d’intrigues et de corruption pour les obtenir, de désordre dans la dépense ; Considérant qu’il ne peut y avoir de bonne Constitution que celle dont les lois reposent sur les bases fixes et immuables, commandent impérieusement à ceux qui sont chargés de leur dépôt, en règlent la conduite, les placent dans l’heureuse impuissance de ne pouvoir impunément y substituer leur volonté; Considérant qu’un tel ordre de choses, si désirable dans les toutes parties qui constituent un grand Empire, t’est surtout dans celles établies pour sa conservation et qui constituent sa force et sa prospérité ; que sous ce rapport et celui de l’économie politique, il devient essentiel de fixer irrévocablement tout ce qui tient au régime et à l’organisation de la marine ; de substituer un ordre fixe et durable à l’arbitraire ministériel qui a régné jusqu’à présent ; de retrancher, supprimer les grades, places, pouvoirs, autorités et objets inutiles ; d’établir une telle fixité dans toutes les parties, que la dépense comme l’ordre de la comptabilité deviennent invariables, a décrété et décrète ce qui suit : Art. 1er. Les forces navales du royaume seront et demeureront fixées à 81 vaisseaux de ligne, divisés en 9 escadres de 9 vaisseaux chacune, ainsi qu’il est porté par l’ordonnance du mois de janvier 1786. Art. 2. Le nombre d’officiers militaires de tous les rangs et de tous les grades sera et demeurera irrévocablement fixé ainsi qu’il suit : Deux vice-amiraux. Huit lieutenants généraux. Quatorze chefs d’escadre. Cent capitaines de vaisseau, dont les quarante premiers seront chefs de division. Cent majors de vaisseau. Cinq cents lieutenants de vaisseau. Douze lieutenants de port. Douze sous-lieutenants, idem. Sans que ce nombre puisse en aucun cas être augmenté, même eu qualité de surnuméraire. (1) Art. 3. Il sera incessamment pourvu à la retraite de deux vice-amiraux, huit lieutenants généraux, vingt-sept chefs d’escadre, trente capitaines de vaisseau et douze lieutenants de port, qui se trouvent en supplément et au delà du nombre fixé par l’article précédent. Art. 4. Les officiers qui se retireront dorénavant du service ne pourront plus prétendre à un grade supérieur à celui qu’ils occuperont lors de leur retraite. (1) Les directeurs et sous-directeurs des ports et arsenaux sont compris dans le nombre des capitaines et majors de vaisseau. [14 janvier 1791.] 246 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Art. 5. Les cinq cents lieutenants de vaisseau seront divisés en deux classes : la première, ayant 1,600 livres d’appointements et le rang de major d’infanterie ; la seconde, ayant 1,050 livres et le rang de capitaine d’infanterie. Art. 6. Les sous-lieutenants de vaisseau� du nombre des huit cent quarante créés par l’ordonnance susénoncée, qui se trouvent portés sur la liste d’activité, ainsi que les douze sous-lieutenants de port de supplément, cesseront d’y être employés. Ils seront et demeureront dispensés de tout service dans les ports; il leur sera permis de naviguer pour le commerce, où ils continueront de s’instruire jusqu’à ce que les circonstances exigent ou permettent de les remettre en activité, leur laissant cependant le tiers de leurs appointements, et le temps de leur service continuant de leur compter. Art. 7. A l’avenir, en cas de guerre qui nécessitera le besoin d’un supplément d’officiers, ce supplément sera pris parmi les capitaines les plus expérimentés des navires marchands ; en conséquence, au mois de janvier de chaque année, il sera fourni au ministre de la marine, par toutes les chambres de commerce du royaume, un état de tous les capitaines de navire reçus au grand cabotage et au long cours dans chaque port. Cet état, divisé en plusieurs colonnes, fera mention de l’ancienneté, du mérite, de la nature des campagnes de chaque capitaine, s’ils sont à la mer ou à terre ; et de tous ces états particuliers sera formé un état général, sur lequel seront inscrits ceux des capitaines qui auront été jugés propres à être employés sur les vaisseaux du roi, avec indication des parties du monde où chacun d’eux aura le plus voyagé et acquis le plus de connaissances. Art. 8. Lorsque les circonstances l’exigeront, ceux des capitaines de navires marchands, portés sur la liste d’emploi, seront commandés; ils serviront en qualité d’officiers surnuméraires, concurremment et sans distinction avec les lieutenants de la seconde classe. Et lorsque leur service cessera d’être utile, ils retourneront à leurs fonctions ; mais ceux d’entre eux qui se seront distingués continueront d’être employés et resteront à la solde de l'Etat. Art. 9. Les maîtres seconds et aides-canonniers des classes sous le titre de canonniers-bourgeois, supprimés par l’effet de l’ordonnance de 1786, seront et demeureront rétablis sur le même pied où ils étaient auparavant ladite ordonnance, et il sera fait une réduction proportionnée à ce remplacement, dans lecorps royal descanonniers-matedots. Art. 10. Le traitement personnel de table des officiers commandant à la mer, ainsi que des passagers à leur bord au compte du roi, sera et demeurera dorénavant fixé, pour tous les rangs et grades généralement quelconques, aux trois quart® de ce qui leur est accordé par l’ordonnance de 1786 ; en conséquence, le décret provisoire du 26 juillet restera définitif. Art. 11. Les intendants généraux des colonies, des armées navales, des fonds, des classes et des pêches; les intendants des ports et arsenaux, des places de commerce, soit en exercice ou ayant seulement le rang; ensemble les intendants particuliers des colonies, les inspecteurs généraux et particuliers de la marine militaire et des classes, sont et demeureront supprimés: il sera pourvu incessamment à leur retraite, s’il y a lieu. Art. 12. Les intendants particuliers des ports et colonies seront remplacés, savoir : dans les deux grands ports de Brest et de Toulon, par deux commissaires généraux; dans le port de Lorient, par un commissaire-ordonnateur; dans les ports de commerce de Bordeaux, du Havre, de Dunkerque, Cherbourg et Marseille, par de simples commissaires en chef. Dans les colonies importantes de Saint-Domingue, la Martinique, l’Ile-de-France, par des commissaires généraux. Dans celle de la Guadeloupe et ses dépendances, par un commissaire-ordonnateur. Dans toutes les autres, par de simples commissaires en chef. Les traitements desquels commissaires seront réglés en raison de l’importance du lieu de leur emploi, et fixés avec le ministre du département, ainsi que les traitements et le nombre des commissaires ordinaires et écrivains. Art. 13. Le traitement des gouverneurs, commandants en second et particuliers, des officiers des états-majors, des chefs des corps du génie et d’artillerie ; celui des officiers d’administration civils et militaires, des consuls, chargés d’affaires, agents généraux et particuliers, et leur nombre, seront réduits et invariablement fixés d’après l’importance des lieux et des relations. Art. 14. Lorsqu’il sera jugé nécessaire de faire une inspection ou vérification des troupes, des classes, etc., il sera nomma instantanément des officiers généraux, ou commissaires, qui seront payés seulement pour le temps et la durée de leurs fonctions. Art. 15. Lorsqu’il sera question de l’approvisionnement des ports pour toutes les fournitures des arsenaux, les adjudications ne pourront être faites qu’au rabais ; toute personne y sera admise en donnant caution valable; et elles seront annoncées, publiées et affichées trois mois à l’avance, dans tous les lieux qui seront jugés nécessaires. Les époques des payements seront déterminées, et les payements faits dans les six mois des fournitures passées en recette dans les ports; et il en sera fait mention dans les publications et affiches. Art. 16. Le fret des approvisionnements ne sera pas compris dans le prix des achats; le transport en sera fait, pour les objets qui en sont susceptibles, par les Bûtes du roi. Art. 17. Le port de Rochefort est et demeure supprimé et réuni à ceux de Brest et de Lorient. Il sera en conséquence donné des ordres et pris les mesures nécessaires pour opérer et consommer très incessamment ces suppressions et réunions. Telles sont les réformes, suppressions, réductions et économies que j’ai cru pouvoir s’opérer par la nouvelle organisation de la marine. Il en est encore beaucoup d’autres qui se remarquent facilement d’après le rapport des dépenses du département de la marine, fait à l’Assemblée nationale par le comité des finances, mais qui n’auront certainement pas échappé au comité de marine, ou qu’il suffit de lui indiquer pour qu’il en fasse le sujet de ses délibérations. Ainsi l’article de dépense des gardiens, portiers, rondiers, pour les vaisseaux et magasins, canotiers et gabariers, porté pour 424,808 livres, est si considérable, qu’il est difficile qu’il ne renferme pas d’abus. Le détail sur cet objet est nécessaire; on est fondé à croire qu’il peut être réduit de 150,000 livres au moins. La mauvaise régie des hôpitaux est sensible; la plus simple comparaison suffit pour couvaiucre lAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 janvier 1791.J que les administrateurs en usent mal; que la surveillance est trop négligée ; que ceux qui en sont chargés ne la font pas, ou la font mal ; qu’il faut changer entièrement le régime de cette administration, fixer ce qu’il convient de payer pour chaque malade, sous une inspection rigoureuse, attentive et surveillante. On remarque, à cet égard, que les hôpitaux confiés aux femmes sont les mieux administrés, pour l’économie, la propreté et les foins. Les frais de régie des vivres, portés à 624,500 livres, sont énormes et paraissent susceptibles d’une forte réduction. Il est d’autant plus nécessaire de détailler cet article que cette partie est grevée de pensions qu’il convient d’examiner. L’article des conseils supérieurs et justices subalternes paraît encore excessivement cher. Les sièges et les officiers sont trop nombreux. On compte jusqu’à trois substituts du procureur général. Les gardes-magasins et receveurs des domaines sont également nombreux et susceptibles d’être réduits. Les ateliers entretenus par le roi dans nos colonies ne sont avantageux qu’aux particuliers qui les dirigent. Il est nécessaire de les faire surveiller par des personnes qui ne soient pas soumises à l’administration. On voit, dans l’îie de Tabago, une commission établie depuis la paix pour liquider les dettes de l’Etat, qui coûte près de 19,000 livres chaque année. Cette somme est peut-être au-dessus de l’intérêt du principal que l’on ne paye pas. Le commissaire -ordonnateur, le gouverneur, ou quelques principaux agents de l’administration pouvaient être chargés de ces objets, sans qu’il eût été besoin d’établir cette singulière commission. En général la dépense de l’état militaire de cette colonie et de toutes les parties de son administration est au-dessus de son importance actuelle. Mais on ne doute pas qu’à l’avenir le gouvernement ne donne une attention particulière à ces différents objets. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. EMMERY. Séance du samedi 15 janvier 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier qui est adopté. M. d’Allarde, rapporteur du comité des finances. Messieurs, vous avez rendu un décret, le 28 juillet dernier, qui ordonne aux receveurs particuliers des décimes du clergé de cesser leurs payements à l’époque du 1er septembre, d’envoyer au 1er octobre l’état de leur situation et de verser dans la caisse générale les sommes dont ils pouvaient se trouver débiteurs à celte époque. Votre comité des finances ayant nommé des commissaires pour recevoir ses comptes, le receveur du clergé leur a dit qu’un grand nombre de (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 247 receveurs des décimes n’avait point encore envoyé leur état de situation ; votre comité a pensé alors qu’il convenait de leur écrire une lettre circulaire pour les déterminer à envoyer leurs comptes et cela dans le délai d’un mois. 11 leur avait donné jusqu’au 15 décembre; nous voilà au 15 janvier, et un grand nombre de ces receveurs n’ont pas encore exécuté votre décret. Il est donc temps, Messieurs, d’en ordonner l’exécution, etc’est pour y parvenir que votre comité vous propose le décret suivant. M. d’AIlarde, rapporteur, donne lecture d’un projet de décret. M. Bouche. Je demande qu’on accorde quinze jours pour tout délai. (Cet amendement est adopté.) Le projet de décret est adopté dans ces termes : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er < Les receveurs particuliers des décimes, qui n’auront pas fourni et soldé leurs comptes dans quinze jours, à compter de la publication du présent décret, et qui n’auront pas satisfait à ce qui est prescrit par l’article 4 du décret du 18 juillet dernier, seront déclarés débiteurs personnels des sommes dont les diocèses sont en retard envers la caisse générale du ci-devant clergé, sauf à eux à en faire le recouvrement sur les contribuables. Art. 2.