75 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 février 1791.] tant des pièces qu’ils occupent et de leur distribution, que du surplus de l'édifice et dépendances; et ils joindront un état détaillé de la dépense totale de rétablissement. Art. 2. « Si l’édifice est national, sans être de la nature de ceux mentionnés dans l’article 4 du décret du 16 octobre 1790, et qu’ils n’aient point encore été autorisés à l’acquérir ou à le louer, ils seront tenus de former leur demande pour l’un ou l’autre cas. Ils produiront à l’appui, avec la description ci-dessus exigée, un procès-verbal d’estimation de l’édifice, et un devis estimatif de la dépense que nécessitera leur établissement. Art. 3. <- Les mémoires, procès-verbaux, devis, plans et descriptions des directoires de district, seront visés par les directoires de département, qui les adresseront, avec leur avis, à l’Assemblée nationale. Art. 4. « Il ne poura plus être fait par les corps administratifs aucun emprunt, être établi aucune imposition sur les administrés, ni être employé aucun denier de la recette des trésoriers de district pour les frais d’établissement des corps administratifs et d> s tribunaux, sans l’autorisation spéciale du Corps législatif, conformément aux décrets des 14 et 22 décembre 1789, et 3 décembre 1790, à peine d’en répondre en leur propre et privé nom. « Un membre fait lecture de la lettre suivante adressée à l’Assemblée par M. Lalande, prêtre de l’Oratoire et professeur do théologie ; « Messieurs, j’ai toujours cru que la constitution civile du clergé n’aurait que des partisans et des admirateurs. Le fanatisme, l’ignorance et l’intérêt personnel s’agitent et font tous leurs efforts pour faire des dupes et égarer l’opinion publique. « C’est pour tâcher d’apporter un remède à ces maux, vraiment déplorables, que j’ai composé l’ouvrage que j’ai l’honneur de vous présenter et qui a pour titre : Apologie des décrets de l'Assemblée nationale sur la constitution civile du clergé , à M. le curé de ***, et d’offrir à l’Assemblée nationale, comme une marque de mon sincère dévouement à la sagesse de ses lois, qui ne so -t propres qu’à faire le bonheur de la France, à bannir du sanctuaire les nombreux abus qui s’y étaient introduits, et à rendre à la religion sa primitive pureté. » (L’Assemblée décrète qu’il sera fait mention honorable de cet ouvrage dans le procès-verbal.) M. Ramel-Mogaret. Messieurs, les administrateurs du district de Montpellier, par une lettre adressée à l’Assemblée nationale, annoncent des adjudications de biens nationaux faites dans ce district. « Cette mesure, disent-ils, nous a paru propre à soutenir de plus en plus la confiance, et à convaincre les détracteurs de l’aliénation du mauvais succès de leurs manœuvres. Il résulte de notre état que les biens déjà veudus dans le district� de Montpellier, estimés ou évalués 1,305,772 livres 7 sols 6 deniers, ont produit 2,040,190 livres. . « Dans cette même séance, à laquelle les citoyens s’étaient portés en foule, le greffier du district a présenté au directoire pour 145,000 livres d’assignais biffés et annulés, provenant du. premier payement fait par les adjudicataires. Nous les avons nous-mêmes montrés au public; nous avons annoncé qu’ils allaient être envoyés à la caisse de l’extraordinaire pour être brûlés. a On nous a répondu par les plus vifs applaudissements ; et nous reportons aux augustes représentants de Ja nation cet hommage de leur sagesse et de leur loyauté. » M. de Tracy. Messieurs, il y a plusieurs parties du royaume où les ventes de biens nationaux sont arrêtées par l’ajournement ordonné sur les biens affectés à des fondations. Je demande que l’Assemblée ordonne au comité d’aliénation de lui pré enter incessamment le moyen de faire acquitter ces fondations. M. Treilliard. Le comité ecclésiastique s’occupe de l’acquit de toutes les fondations ; nous ne pouvons cependant pas nous dissimuler les retards que cela occasionne dans la vente des objets qu’on prétend grevés de fondations et qui, dans le fond, ne le sont pas. Je demande, non pas que cet objet soit renvoyé au comité, mais que vous décrétiez provisoirement le principe de la vente de ces biens, alors même qu'ils seraient grevés de fondations dans les paroisses, à la charge qu’il sera tenu compte, à ceux qui en jouissent en ce moment, de l’intérêt du prix à 4 0/0. M. Martineau. Il y a des biens grevés de fondations, qui appartiennent à des fabriques, lesquelles acquittent ces fondations ; certainement, Messieurs, vous ne pouvez pas vendre ces biens. Il y en a d’autres qui appartiennent à des curés ; comme je ne vois pas pourquoi, après avoir conservé à ces curés et à d’autres ecclésiastiques la jouissance et la possession de ces biens, on les leur ôterait, je demande le renvoi au comité. M. Ifcegnaud (de Saint-Jean-d' Angêly). Je suis d’avis des principales dispositions ; mais je demande que le comité ecclésiastique nous apporte demain matin, car l’objet est urgent, les atticies du décret. (L’Assemblée ordonne le renvoi au comilé ecclésiastique, pour présenter demain matin un projet de décret). M. le Président. Messieurs, je viens de recevoir une lettre infiniment intéressante et que la suscnptbm rend bien touchante : Lettre sauvée du naufrage de Z’Amphitrite, sur la côte de Penmarch , près Quimper. Cette lettre est adressée à M. le Président de l’Assemblée nationale de l’Empire français par les gai des nationales de l’ile de France; sous tous les rapports, elle intéressera votre patriotisme. La voici : (1) « De la colonie de l’ile de France, le 30 juillet 1790. « Nos Seigneurs, c’est au milieu de l’océan Indieu, c’est d’une île éloignée de 5,000 lieues de l’Empire français, où le cri de la liberté s’est fait entendre; c’est enfin d’un nouvel hémisphère que nous venons vous offrir des bénédictions et (1) Ce document n’est pas inséré au Moniteur. 76 Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. notre juste tribut de reconnaissance, de respect et de dévouement. « Les citoyens français de nie de France, jadis victimes déplorables ü’un despotisme d’autant plus affreux, que sa force vnxatoire semblait croître en raison de son éhignemeut du centre, auraient pu tenter de briser leurs fers ; mais leur position était d’autant plus triste, que les tyrans trompaient la religion du meilleur des rois, et que l’amour pour leur prince, qui fait l’essence de tout Français, s’opposait à leur juste vengeance. Tout à coup la nouvelle heureu-e de la régénération française frappe nos oreilles; dès lors il n’v a qu’un cri, qu’un sentiment, et tout respirera liberté. La cocarde patriotique devient le signe du ralliement, et ne forme à l’instant, de tous les Français de cette co’onie, qu’un peuple de frères et de héros de la liberté. « Le despotisme en pâlit; bientôt il se rassure, et les cabales les plus sourdes et les plus infernales deviennent son unique occupation. L’on abuse de l’knorance et de la bonne foi, et l’on sème dans toute la colonie des divisions intestines avec une rapidûé et une scélératesse incroyables. Les moteurs criminels de ces complots pervers, vils agents subalternes de l’ancien despotisme ministériel, se fout connaître par la joie impie que leur inspirent leurs coupables succès; l’insurrection est subite; le créole s’élève contre l’Européen, le frère contre son frère, le fils contre son père. Les horreurs d’une guerre civile menacent nos têtes, et les tyrans sourient avec complaisance. Us avaient convoqué la colonie ; ils donnent conirc-ordre et attendent, dans un coupable sil. nce, l'affreux résultat de leurs noirceurs infernales. Heureusement l’illusion est de cour'e durée; les citoyens séduits et abusés reviennent de leur erreur, le masque tombe; l’amour de la liberté, l’horreur de la tyrannie réunissent tous les cœurs, et la consternation rentre dans l’âme des despotes, qui seuls devaient éprouver ce sentiment, au cri de la liberté et de la régénération française. « Terrassez une seconde fois les ennemis de la chose publique; tramant encore contre la liberté, ils cherchent à intimider les bons citoyens par des bruits criminels adroitement semés fils alarment les espri!s timides par des réflexions coupables. C’est une masse de 50,000 esclaves à contenir; ce sont des troupes réglées, presque égales en nombre au reste des citoyens. « Vains efforts d’un despotisme effrayant! les Français ont toujours rejeté avec horreur un soupçon si coupable; ils n’ont vu dans les soldats que des frères, des citoyens et des soldats patriotes; ils n’ont jamais pu penser que les braves défenseurs du Cap et de Pondichéry, que les terribles et fameux héros du 13 juillet, dans l’Inde, pussent jamais songer à combattre contre la liberté de leur patrie, qu’ils avaient su défendre si glorieusement. Notre espoir n’a pas été trompé : les braves guerriers qui s’étaient tous montrés des héros contre les ennemis de l’Etat, se sont tous montrés citoyens au milieu de leurs frères. C’est avec uoe douce satisfaction que nous rendons ici un hommage pur et sim ère à leur héroïsme et à leur dévouement à la patrie. « Les citoyens se forment en gardes nationales; et ne faisant qu’un corps et qu’une âme avec les bons militaires qui les entourent, ils dissipent les nouveaux complots du despotisme, dont le foyer était toujours le même. Leur fermeté et leur courage, secondés par l’heureuse arrivée de votre sage décret du 8 mars, leur 19 février 1791.] obtiennent un triomphe complet, et d’autant plus flatteur, qu’il n’a été accompagné d’aucune effusion de sang. « Les gardes nationales de File de France se flattent que leur conduite ferme et sage, qui leur permet de vous offrir les palmes non sanglantes de la liberté, sera applaudie dans le sanctuaire auguste des représentants de la nation et do l’humanité. « L’amour des Français pour la liberté ne tient ni aux climats, ni aux lieux qu’ils habitent, mais au sang qui coule dans leurs veines. Rien ne peut altérer en nous uu sentiment si précieux. Que cette terre soit plutôt la proie de l’Océan, si telle devait être son iniluence éternelle! « Les gardes nationales, pénétrées de reconnaissance et de vénération pour vos sages décrets, ne cesseront jamais de vous bénir p ur le bienfait inestimable qu’elles doivent à vus lumières, à votre sagesse, à votre courage, et à votre dévouement héroïque à la patrie; elles adhèrent avec transport à vos aogusies decisions, et font entre vos mains le serment d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi; de maintenir de tout leur pouvoir, sur la réquisition des corps municipaux et administratifs, la Constitution du royaume; de prêter main-forte pour l’exécution de leurs règlements, ainsi que pour celle des décrets de F Assemblée nationale acceptés ou sanctionnés par le roi. « Tels sont les sentiments purs et sacrés des gardes nationales de cette colonie. Elles vous supplient, pères de la patrie, de prendre sous votre protection immédiate des Français transplantés au milieu de l’océan Indien, dont la reconnaissance et le dévouement patriotique ne peuvent être égalés que par le profond respect avec lequel nous sommes, etc. » (L’Assemblée ordonne l’impression de cette lettre et sou insertion dans le procès-verbal.) M. Merlin, au nom du comité de féodalité. Messieurs, vous avez commencé le 30 janvier et le 3 de ce mois, un décret relatif aux droits féodaux; il n’est encore composé que de cinq articles (\). Votre comité féodal vient vous proposer d’en ajouter six autres; ils ont trait au droit seigneurial des troupeaux à part, supprimé comme les autres droits seigneuriaux. M. Merlin, rapporteur , donne lecture des articles présentés par le comité. Plusieurs membres présentent sur le même objet des projets de décret particuliers, dont ils donnent lecture. Une discussion s’engage sur ces divers projets. Un membre demande la priorité pour le projet du comité. (Cette motion est décrétée.) Plusieurs membres proposent divers amendements qui sout écartés parla question préalable. Après quelques modifications de texte, le projet du comité est décrété comme suit, : (1) Voir Archives parlementaires, tome XXII, séance du 30 janvier 1791, page 582, et séance du 3 février 1791, page 721.