668 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1790.J tion d’armement dans la lettre ! On y parle d'éviter le contre-coup , on y dit que la mine se charge; M“® de Persan était donc sur le foyer de la mine ? ..... J’appuie l’amendement de M. Martineau. M. Prieur. Le comité ne dit pas dans son projet de décret par qui l’information sera faite. Je propose de rédiger ainsi cette partie du décret : « Le Châtelet sera tenu d’informer dans le jour; Mm*de Persan ne pourra s’éloigner de Paris sans avoir fait sa déposition, et sera tenue de se représenter, s’il y a lieu, dans le cours de la procédure. Cet amendement est adopté, et le décret est rendu en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des recherches, décrète que son président se retirera devers le roi, pour le prier de donner des ordres au Châtelet de Paris d’informer dans le jour contre le sieur Henri Cordon, ci-devant comte de Lyon, comme prévenu d’un plan de conspiration contre la liberté publique, et contre les auteurs, fauteurs, complices et adhérents dudit plan. « Ordonne que la lettre signée le comte Henri, commençant par ces mots : Il est impossible , •madame la marquise , et finissant par ceux-ci, ne vous est plus sincèrement attaché que le comte Henri; ensemble les déclarations dont le comité des rechercbes a rendu compte, seront remises au procureur du roi du Châtelet, pour la conduite de l’instruction criminelle; « Et cependant que la dame de Persan ne pourra s’éloigner de Paris, qu’après avoir fait sa déposition, et à la charge en outre de se présenter pour la suite de la procédure, s’il y a lieu. » M. le Président lève la séance à quatre heures, et indique celle de ce soir à l’heure ordinaire. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE JESSÉ. Séance du jeudi 9 septembre 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires donne lecture des pétitions et adresses suivantes : Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la société des amis de la Constitution, établie récemment à Toulon. Adresse des habitants marins de Leucate, qui se soumettent avec transport à servir dans les vaisseaux au premier signal : bien loin de regarder la loi des classes comme un attentat à la liberté, ils la chérissent au contraire comme un moyen de signaler le courage patriotique dont ils" se sentent animés. Ils font en même temps plusieurs demandes relativement à leurs droits de pêche et à l’organisation de la marine. Adresse de félicitation et de dévouement des citoyens composant la garde nationale de la ville d'Auch. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . Adresse de M. Paris, de l’Oratoire, et de plusieurs académies et sociétés littéraires, lequel fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage, dont il est l’auteur, intitulé : Projet d’éducation nationale. Adresse de la garde nationale de Cognac, qui offre en don patriotique une somme de 672 livres. Adresse des sous-ofliciers, brigadiers et cavaliers du régiment Royal-Etranger, détachés à Mar-cigny, qui, après avoir obtenu de leur commandant la permission de s’assembler dans les formes prescrites par les décrets de l’Assemblée nationale, lui promettent de persévérera se conduire d’après les mêmes principes que lui ont manifestés leurs camarades composant le régiment Royal-Etranger, en quartier à Dôle. Adresse du comité militaire de la ville de Paris, qui sollicite avec instance une organisation définitive des gardes nationales. M. Alexandre de Lameth. Je mets sous vos yeux l’adresse des négociants de la ville de Bordeaux, dont je vous ai parlé à la séance de ce matin, concernant la proposition faite à l’Assemblée nationale de rembourser en assignats-monnaie la dette exigible de l’Etat : ils demandent : 1° que le remboursement total de la .dette exigible se fasse en assignats forcés, sans intérêts, ayant pour gage et pour amortissement, la vente des biens nationaux ; 2° que l’émission desdits assignats n’ait lieu qu’au 15 avril prochain, époque à laquelle écherra le premier[coupoo d’in-têrêt des 400 millions circulants, lequel sera acquitté, et les deux autres annulés, pour ne plus faire qu’un seul et même service avec les nouveaux ; 3° qu’à compter du jour du décret les créances exigibles commenceront à être remboursées parle moyen des promesses d’assignats au 15 avril prochain, lesquelles promesses seront dès à présent reçues pour l’acquisition des biens nationaux seulement; 4° qu’il soit créé et mis de suite en circulation la quantité estimée nécessaire de petits assignats, depuis 12 livres jusqu’à 100 livres. Les heureux effets de cette bienfaisante opération, ajoutent les négociants de Bordeaux, dureront autant que la Constitution, dont elle deviendra le nouveau garant, et l’Assemblée nationale aura sauvé encore une fois la France. L’Assemblée nationale ordonne l’impression de cette adresse. ( Voir ce document annexé à la séance de ce jour, p. 671.) M. de ftjameth fait part également d’une adresse de la société des amis de la Constitution, de la ville de Bordeaux : ils n’ont pu voir avec indifférence l’assemblée générale du Commerce agiter la question de l’extinction de la dette exigible, au moyen d’une émission d'assignâts-mon-naie ; son zèle pour le bien public lui a fait un devoir de s’occuper aussi de cet objet important, et déterminée par les mêmes considérations, elle est arrivée aux mêmes résultats que l’assemblée du commerce. On annonce une députation de la garde nationale de Versailles ; elle est reçue à la barre, et prononce le discours suivant : « Messieurs, un projet patriotique vient d’éclore au milieu de nous : proposé par un seul (1), (1) L’idée d’abord proposée par M. Belier, sergent de la compagnie Duprelle, est devenue, d’après l’amendement de M. de Hillerin, secrétaire général, le projet de toute l’assemblée. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1790.1 669 il a d’abord été vivement senti par tous, et bientôt un arrêté, pris à l’unanimité dans notre assemblée, nous a fait une loi de l’apporter, de le soumettre et d’en demander l’exécution aux pères de la patrie. « Le maintien de la Constitution, l’observation de la loi, le rétablissement de l’ordre, l’exécution de vos décrets appellent nos frères aux portes de Nancy, et ils y scellent de leur sang le serment qu’ils avaient solennellement prêté, il y a peu de jours, de mourir fidèles à la nation, à la loi et au roi. « Combattre et mourir à côté d’eux eût été notre devoir le plus sacré ; rendre à leurs mânes le juste tribut d’bommages qu’ils méritent, est en ce moment le sentiment le plus pressant de nos cœurs; consacrer à leur mémoire un monument durable de notre vénération et de notre estime, est notre vœu le plus ardent. « Une pyramide simple et majestueuse élevée à l’une des portes de Nancy. « Sur cette pyramide, une inscription qui porterait : Ici sont morts pour la patrie, tant de soldats citoyens, le deuxième mois de V an second de la liberté française (1). * Tel est, Messieurs, le monument que nous demandons pour des Français généreux, que l’amour du devoir a impérieusement dominés. Si des épouses, des enfants, des pères dont ils étaient le bonheur et le soutien, peuvent voir tarir les justes larmes qu’ils donnent à leurs cendres, ne sera-ce pas par l’acte religieux que la patrie consacrera à leur gloire ? « Le mode, la forme et les détails qui sont relatifs à ce projet, votre sagesse, Messieurs, vous les suggérera. » Signé : Berthier, commandant de la garde nationale; Devilliers lils, capitaine ; Lainé, de Hille-rin, secrétaire général, et Belier. Par arrêté pris à l’unanimité, le 6 septembre 1790, en l’assemblée générale de la garde nationale de Versailles. Signé : DE HlLLERIN, secrétaire général. M. le Président répond : « Le vœu que vous venez de manifester devant les représentants de la nation est, à la fois, l’accent du courage et celui du civisme: vous déposez des guirlandes funéraires sur la pierre qui couvre les héros qui sont tombés pour la patrie. Ils ont eu le bonheur de sceller de leur sang, et presque sans délai, le serment qu’ils avaient fait de mourir fidèles à la Constitution; vos regrets sont aussi mâles que touchants : citoyens-soldats, vous savez que la vie du brave est courte, mais qu’elle est pleine, et que sa perte est compensée par la louange de ceux qui sont dignes de lui ressembler. Vous consolez dans leurs tombeaux les mânes de ces hommes généreux : ils vivront éternellement pour la gloire, car ils sont morts pour la liberté; ils sont morts pour l’assurer à nous et à nos descendants. Leur sang fécond va procréer une race d’hommes amis des lois, terribles à leurs infracteurs, redoutables aux ennemis du dehors. Que ces ennemis, s’il en est, voient avec sollicitude quels hommes sont ces Français, qui, passant de leurs tranquilles foyers dans le champ de la guerre, armés par la loi, pour la défense de la loi, ont vaincu et étonné de (1) Le procès-verbal de l’inauguration du monument suppléerait au laconisme de cette inscription leur courage ces vieilles bandes, pour qui les dangers ont le charme du devoir et de l’habitude. Vous demandez un monument! L’éternel monument qui leur est décerné, c’est la Constitution française qu’ils ont défendue, qu’ils ont sauvée peut-être; c’est la vénération due aux hommes énergiques et bons. Le inarbre et l'airain seront dispersés; mais le souvenir des grandes actions sera durable comme le sentiment et la vertu mêmes. L’Assemblée voit avec satisfaction l’enthousiasme rapide qui vous fait honorer des frères que vous imiteriez; elle prendra en considération l'objet de votre pétition, et vous accorde les honneurs de la séance. » (L’Assemblée décide que le discours de la garde nationale de Versailles et la réponse de M. le président seront insérés au procès-verbal.) M. le Président quitte l’Assemblée pour porter des décrets à la saaction. M. de Menou, ex-président, occupe le fauteuil* M. Oossin, rapporteur du comité de Constitution, propose deux décrets relatifs : le premier, à la délibération des électeurs de Monthivilliers, concernant le chef-lieu de leur district ; le second, à la fixation du chef-lieu de l’administration du département de l’Ardèche. Les deux décrets sont adoptés en ces termes : PREMIER DÉCRET. « L’Assemblée nationale confirme la délibération des électeurs de Monthivilliers, et décrète que cette ville est définitivement le siège de l’administration de ce district. » DEUXIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale décrète que Privas est définitivement chef-lieu de l’administration du département de l’Ardèche. » M. JLe Chapelier. Le comité de Constitution m’a chargé de vous rendre compte d’une adresse des protestants de la Confession d’ Augsbourg (Voir cette adresse aux annexes de la séance, p. 673.) qui habitent quatre terres de Franche-Comté; ce sont celles de Blamont, Clémont, Héricourl et Ghâ-telot. Elles appartenaient jadis au duc de Wirtem-berg, et ont été réunies par louis XIV, eu 1707. Le roi conserva les habitants dans leurs droits, et les stipulations qui les concernent ont été souvent renouvelées depuis. En ce moment; ils réclament ce que vous avez accordé aux protestants d’Alsace, la contin uaiion d’exercice publicde leur culte; vous ne pouvez le leur refuser. Ils se plaignent en outre de diverses usurpations, de spoliations de biens : cette dernière partie de leur pétition a paru à votre comité devoir être renvoyée au département. Voici un projet de décret eu conséquence. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de Constitution ; « Considérant que les protestants de la Confession d’Augsbourg, habitant les quatre terres de Blamoul, Clémont, Héricourt et Ghâtelot, situées dans la ci-devant province de Franche-Comté, et dépendantes aujourd’hui des départements du Doubs et de la Haute-Saône, ont toujours eu l’exercice public de leur culte, avec églises,