[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* (13 août 1791.] 413 Gomment voulez-vous concilier l’inviolabilité du roi avec le commandement dans l’armée ? Si le roi commande l’armée, personne alors n’est responsable, personne alors ne peut vous garantir que cette armée ne sera pas tournée contre nous. D’un autre côté, cette question est déjà résolue par l’Assemblée nationale, car il y a dans le décret sur la régence un article qui porte que le roi ne pourra s’éloigner de plus de 20 lieues du Corps législatif, lorsqu’il tiendra ses séances. Le roi n’est pas seulement chef de l’armée ; il est chef suprême de l’administration de toutes les branches du gouvernement. 11 est très intéressant pour le succès du gouvernement que les rois ne changent pas trop souvent et nous ne devons pas les exposer à faire le dangereux métier de la guerre. J’appuie donc, d’après ces observations, le renvoi aux comités de Constitution et de révision. M. de Custine. Je demande la question préalable sur cette proposition. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer et ordonne le renvoi de l’article (5 et de la proposition de M. d’Aiguillon aux comités.) M. Démeunier, rapporteur. Voici l’article 7 .• Art. 7. « Si le roi sort du royaume, et si, après avoir été invité par une proclamation du Corps législatif, il ne rentre pas en France, il sera censé avoir abdiqué.» M. de Lia Rochefoucauld. Ledélai est indispensable à fixer là. Plusieurs membres : Non 1 non 1 C’est renvoyé aux comités. (L’article 7 est mis aux voix et adopté.) Art. 8. « Après l’abdication expresse ou légale, le roi sera dans la classe des citoyens, et pourra être accusé et jugé comme eux, pour les actes postérieurs à son abdication. » {Adopté.) M. Prieur. J’ai un article additionnel à proposer. Plusieurs membres : Non ! non ! aux comités 1 aux comités ! M. Prieur. Soit, je le présenterai aux comités. Art. 9. « Les biens particuliers que le roi possède à son avènement au trône sont réunis irrévocablement au domaine de la nation : il a la disposition de ceux qu’il acquiert à titre singulier ; s’il n’en a pas disposé, ils sont pareillement réunis à la fin du règne .» (Adopté.) Art. 10. « La nation pourvoit à la splendeur du trône par une liste civile, dont le Corps législatif déterminera la somme à chaque changement de règne, pour toute la durée du règne. » M. Camus. 11 est à propos d’ajouter à cet article que jamais la nation ne payera les dettes du roi. M. Prieur. Oui, ni de personne. ( Applaudis - srements.) M. Rémeunier, rapporteur. Il est impossible de placer ici la disposition proposée par M. Camus; ce sera au chapitre des contributions publiques. M. Camus. Volontiers. ( L’article 10 est mis aux voix et adopté.) M. Démeunier, rapporteur, donne lecture de l’article 11, ainsi conçu : Art. 11. « Le roi nommera un administrateur de la liste civile, qui exercera les actions judiciaires du roi, et contre lequel personnellement les poursuites des créanciers de la liste civile seront dirigées, et les condamnations prononcées et exécutées.» M. Chabroud. La disposition de l’article est insuffisante; il autorise en effet l’administrateur de la liste civile à exercer les actions judiciaires du roi; il faut en sens inverse autoriser ceux qui auront des actions contre le roi à les poursuivre dans la personne de l’administrateur de la liste civile. L’article tel qu’il est rédigé n’autorise que les actions qui pourront être intentées par les créanciers de la liste civile et non celles auxquelles les propriétés personnelles du roi pourraient donner lieu de la part des particuliers. M. Démeunier, rapporteur. Ce que demande le préopinant est décrété dans le complément des articles sur l’organisation des corps administratifs. Nous n’avons pas cru nécessaire de l’insérer dans l’acte constitutionnel, c’est à l’Assemblée à en juger. M. Chabroud. Je n’ai pas été entendu : outre les propriétés nationales dont le roi aura la jouissance, il pourra acquérir des propriétés personnelles indépendantes de celles de la nation ; or, je dis qu’à raison de ces propriétés, il pourra y avoir lieu à des actions de la part des particuliers et l’article ne détermine pas contre qui elles seront dirigées. Par les mêmes raisons que constitutionnellement on règle la manière dont seront exercées les poursuites pour le roi, il faut régler constitutionnellement comment seront réglées les poursuites qui seront dirigées contre lui. M. Duport. J’appuie l’observation de M. Chabroud et j’en demande le renvoi aux comités. M. Démeunier, rapporteur. J’adopte l’amendement de M. Chabroud et je demande qu’il soit mis aux voix avec l’article sauf rédaction. (L’article 11 est mis aux voix avec l’amendement de M. Chabroud et décrété sauf rédaction.) M. Pison du Galand. Il y a une question fort importante : le roi doit-il avoir une garde à sa nomination ? Je crois que c’est là sa place. Je demande le renvoi de cette question aux comités. M. Démeunier, rapporteur. Cette question a déjà été renvoyée à la lin de la révision de l’acte constitutionnel; nous le rapporterons à l’Assemblée et nous lui présenterons un article à insérer dans la Constitution. (La suite de la discussion est renvoyée à demain.) M. le Président fait lecture d’une lettre du ministre de la guerre, par laquelle il annonce à ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [13 août 11910 4�4 [Assemblée nationale.] l’Assemblée nationale le mouvement (le plusieurs troupes, dont le passage aura lieu à trois mille toises de la capitale, et le changement du 54® régiment d’infanterie, en garnison à Versailles, qu’il a remplacé par un bataillon du 88e régiment; il demande l’autorisation de l’Assemblée. (L’autorisation demandée par M. le ministre de la guerre est mise aux voix et décrétée.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de ce soir et invite les membres de l’Assemblée à se retirer dans leurs bureaux respectifs pour procéder à la nomination du président et de 3 secrétaires. La séance est levée à trois heures un quart. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M-ALEXANDRE DE BEAUHARNA1S. Séance du samedi 13 août au soir , 1791 (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du samedi 6 août, qui est adopté, ainsi que des adresses suivantes : Adresse des membres composant le conseil général de la commune de Saint-André de Val-borgne en Cévènes , département du Gard. Adresse des administrateurs du district du Mo-nistrol, département de la Haute-Loire. Adresse de la société des amis de la Constitution de la ville de Lodève, département de l’Hérault, qui remercie l’Assemblée de ses travaux, assuré que les manœuvres des ennemis de la chose publique ont été déjouées, adopte les principes de l’Assemblée relativement au gouvernement monarchique, l'invite à suivre avec constance ses opérations, à faire poursuivre les perfides conseillers qui ont concerté la fuite du roi, et, en rassurant l’Assemblée sur les troubles du fanatisme religieux suscités dans son département, jure, si les despotes ou leurs soldats attaquent leurs foyers, de voler à la défense de la patrie, et de ne pas vaincre ou mourir, mais de revenir vainqueur. (L’Assemblée applaudit à la lecture de ces différentes adresses et ordonne qu’il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.) M. le Président donne lecture’d’une lettre de M. Thévenard, ministre de la marine, qui envoie à l’Assemblée des lettres de Lorient, annonçant le rétablissement de l’ordre dans cette ville, et le succès dont les mesures ordonnées par l’Assemblée nationale ont été suivies. Un de MM. les secrétaires fait lecture des adresses suivantes : Adresses du conseil général de la commune de Bayeux, de la municipalité de Moiremont , district de Sainte-Menehould, du tribunal du district de Bourbon-Lancy , et de la garde nationale de Bal-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. Ion , département de la Sarthe, qui adhèrent, avec une admiration respectueuse, aux décrets rendus les 15 et 16 du mois dernier, qui ont consacré l’inviolabilité du roi, et maintenu le gouvernement monarchique. Adresses des sociétés des amis de la Constitution , séantes à Dieuze, à Bausset, département du Var; à Moulins-en-Gilbert, à Anduse, à Casseneuil, à Saint-Martin, île de Ré; à Mirambeau et à Guitre, département de la Gironde; à Castres , à Limoux , à Sainte-Colombe , à Lodève , exprimant les mêmes sentiments. Adresse de la garde nationale de Thoron, district de Bourganeuf, qui exprime ses regrets de n’avoir pas vu les gardes nationales du département de la Creuse comprises dans la division énoncée au décret du 22 juillet dernier : elle demande qu’au premier signal, elle soit appelée au secours de la patrie. Adresse de l'évêque du département de l'Aude, qui fait hommage à l’Assemblée de sa lettre pastorale au clergé et aux fidèles de son diocèse. Adresse de M. Martin, maire de Montrevault, département de Maine-et-Loire, qui fait l’offre patriotique d’entretenir et solder à ses frais un garde national pendant la durée de la guerre que la France sera dans le cas de soutenir. Adresse de M. Boirot de la Cour, troisième juge au tribunal du district de Montluçon, ci-devant-receveur des gabelles de cette ville , qui, dès le premier signal de la guerre jusqu’à celui ou nos ennemis seront vaincus, se soumet à entretenir et solder 2 gardes nationaux. Adresse de l’assemblée primaire du canton des environs de Villefranche, département de Rhône-et-Loire,et des gardes national Cholet, qui expriment avec énergie les sentiments d’admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elles sont pénétrées pour l’Assemblée nationale. Adresse des secrétaires adjoints, commis et surnuméraires au département de la Sarthe, qui ont obtenu la permission du directoire de choisir deux d’entre eux pour voler au secours de la patrie, et être inscrits dans le nombre de ses plus zélés défenseurs. Adresse de la société des amis de la Constitution ante à Laon, qui s’élève avec force contre la déclaration des 290 membres de l’Assemblée. Lettre signée Robert Samson, de Londres, contenant une déclaration des volontaires et habitant de Velsart, en Irlande, adressée à l’Assemblée nationale, qui constate les vœux ardents d’une partie nombreuse, respectable et éclairée de la nation irlandaise pour le succès de la Révolution française. Procès-verbal de l’arrivée de M. Gausserand, évêque du département du Tarn, dans la ville d’Albi, et de son installation. Adresse de la société des amis delà Constitution séante à Sedan, contenant la soumission patriotique de M. Deliars, juge du tribunal de district, de verser au Trésor public la solde d’un garde I national en activité de service sur les frontières.