ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790.] 200 [Assemblée nationale.] ]a Haute-Garonne, qui s’élève avec la plus grande force contre les arrêtés ou protestations de la chambre des vacations du ci-devant parlement de Toulouse. Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de la Société des amis de la Constitution de Buxi, chef-lieu de canton du district de Chalon-sur-Saône. Adresse du corps électoral du district de Lan-nion, rassemblé pour la nomination des juges, qui envoie à l’Assemblée nationale le procès-verbal de cette nomination, et lui présente en même temps le tribut de son admiration et de son dévouement. Adresse des grenadiers du régiment de Bassi-gny qui jurent de soutenir la Constitution au péril de leur vie. Hommage d’un écrit intitulé : Traité important sur Les quatre matières de première nécessité our la subsistance, par les sieurs Chantrelle de eaumont et Langlois Beauregard. Un membre demande que l’Assemblée nationale donne quelques témoignages de satisfaction aux auteurs de cet utile traité. L’Assemblée ordonne qu’il sera fait, dans le procès-verbal, une mention honorable du patriotisme des sieurs Ghan-trelle de Beaumont et Langlois Beauregard. 11 est donné lecture d'une lettre de M. Désilles père, dans laquelle il présente à l’Assemblée nationale les sentiments de sa vive reconnaissance pour l’intéiêt qu’elle a daigné prendre à la mort de son fils. Le comité des finances demande à faire un rapport sur la confection des rôles de la commune de Chinon. M. Vernier, rapporteur. Le département d’In-dre-et-Loire a rendu la municipalité de Chinon solidairement responsable de l’exécution de l’ancien rôle de cette commune pour l’année 1790, et l’a condamnée à payer à ses frais les deniers que la mauvai-e formation d’un rôle nouveau, dressé par elle, pourra faire perdre à l’Etat. Adopterez-vous en entier ou en partie les conclusions du directoire? Tel sera le résultat du rapport dont j’ai l’honneur de vous faire au nom du comité des finances. La ville de Chinon payait des droits sur les vins et sur les boucheries. La municipalité a pris une délibération tendant à annuler l’ancien tarif, à rejeter tout impôt sur les consommations. Cinq officiers municipaux sur neuf ont signé le nouveau rôle, dont les vices sont frappants. On n’y reconnaît ni la nature, ni l’objet de l’imposition; à peine désigne-t-on ceux qui doivent être soumis à la contribution. En proscrivant l’ancien mode, on n’a pas même adopté le nouveau. Chaque article est ainsi conçu; Monsieur... payera tant", tel champ, telle maison payera tant , sans aucunei; dicalton des motifs de cette fixation, malgré le décret qui ordonne l’énonciation de ces motifs. Le district de Chinon a donné son avis : il estime que ce rôle doit être annulé, et que la municipalité doit demeurer solidairement responsable du recouvrement de l’impôt de 1790. Le directoire du département a ordonné qu’il serait dressé Un nouveau rôle, en présence de tous les officiers municipaux assemblés, sous . peine de demeurer responsables des suites de leur négligence, mais sauf par eux à percevoirensuite sur les derniers deniers les avances qu’ils auraient été obligés; de faire. Cette affaire a été portée à l’Assemblée nationale de la part du maire et de plusieurs officiers municipaux, du nombre de ceux qui n’ont pas donné leur démission. Le comité des finances est d’avis que l’Assemblée ne doit pas se saisir de cette affaire et qu’il n’y a pas lieu de délibérer. Qu’il me soit permis de vous présenter mon opinion personnelle. Il n’est pas vrai qu’il faille appliquer à une erreur commise dans l’exécution d’un rôle la même peine que celle que vous avez prononcée contre les municipalités qui seraient en retard par l’effet d’uue négligence marquée. Je crois que l’Assemblée pourrait annuler le rôle de la municipalité, comme l’a fait le directoire, mais lui accorder un certain temps pour rectifier l’erreur qu’elle a commise et dresser un nouveau rôle. L’avis du comité, me dira-t-on, est dans la rigueur de la règle; oui, mais je soutiens que, quand on introduit une nouveauté, et surtout une nouveauté d’une exécution difficile, c’est un abus, que d’exiger dès les premiers instants, la rigueur de la règle. (Le côté droit applaudit.) M. de Folleville. Les officiers municipaux ne devaient pas imposer les ci-devant privilégiés d’une manière aussi exorbitante qu’ils l’ont fait ; les lois à cet égard étaient faciles à saisir. Je crois donc que la moindre punition qu’exigent le bon exemple et l’ordre public est de leur laire payer les frais du nouveau rôle. M. Gauthier. Je crois qu’il est bon de vous exposer e i quoi consiste l’erreur des officiers municipaux. L’imposition de la taille accessoire était autrefois assez généralement considérée comme un impôt personnel. Il y avait un mode général dans la province pour la répartition de cet impôt. En 1767, la ville de Chinon représenta que ce mode d’imposition était très incommode pour elle, en ce qu’elle contenait beaucoup de négociants et d’autres individus vivant rie leur industrie; elle en obtint la conversion en un droit sur l’entrée des boissons et sur les boucheries. La municipalité a détruit, de sa propre autorité, cette imposition qu’elle avait demandée. Je crois qu’à cet égard elle est très coupable; car il n’y avait qu'un décret sanctionné qui pût l’y autoriser. Le rôle doit être annulé, parce qu’il est en effet inexécutable, et que chaque article donnerait lieu à un procès. Je conclus à ce que l’avis du département soit exécuté, et que l’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer. M. Guillaume défend la municipalité et demande une improbation contre le département. M. Bouche. L’intention de l’Assemblée n’a jamais pu être que les officiers municipaux de Chinon fissent l’impossible; or, il leur a été impossible de faire mieux. Le fait est qu’ils ne pouvaient avoir que trois bases pour leur impôt : les aides, les droits sur les boucheries, et la contribution réelle ou mixte; les deux premières leur ont manqué : la commune assemb ée a refusé le payement des droits et des aides sur les boucheries; i) a donc fallu qu’elle eût recours à la troi-.. sième. Mais cette base ne suffisait pas; elle a trouvé le complément de son impôt, qui devait être de 13,000 livres, dans l’imposition des privilégiés, que je soupçonne très fort d’avoir un peu intrigué dans cette affaire. (U Assemblée et les tribunes applaudissent.) Mon jugement peut être erroné, mais c’est un sentiment qui m’oppresse, et que je ne puis m’empêcher d’exprimer. Je pense que les officiers municipaux de Chinon, loin d’ê- 201 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790.] tre punis, doivent être remerciés du zèle qu’ils ont témoigné. Je vous prie d’observer qu’ils entrent pour la première fois dans la carrière de vos lois. Il ne serait pas étonnant qu’ils fissent des fautes, bien pardon nab'es quand elles sont commises par les bons citoyens. M. Vernier. Mon avis personnel est que vous ordonniez l’exécution du jugement du directoire du département, mais que vous accordiez à la municipalité un sursis de deux mois, pour qu’elle puisse dresser un nouveau rôle. Cette dernière proposition obtient la priorité sur l’avis du comité. — Elle est décrétée, sans amendement, à une grande majorité en ces termes : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, ordonne que l’arrêté du département d’Indre-et-Loire, en date du 21 septembre 1790, sera exécuté; que, sans avoir égard au projet de rôle, présenté par les officiers municipaux de la ville de Ghinon, ils seront tenus de procéder, dans deux mois pour tout délai, à compter de la notification du présent décret et de l’installation des nouveaux officiers municipaux et notables, et aux frais de la commune, à la confection d’un nouveau rôle sur les trois bases fixées et éterminées par le département; et pondant ledit délai de deux mois, il sera sursis contre eux à toutes poursuites. » M. le Président. Le rapporteur du comité des rapnoris va rendre compte de l 'affaire de la municipalité d’ Hagueneau. M. Régnier, rapporteur. Messieurs, la ville d’Hagueneau, agitée depuis un an nar des troubles intérieurs, attend sa tranquillité du decret que vous allez porter. Voici les faits sur lesquels vous avez à prononcer. 11 s’est formé, il y a un an, dans cette ville, une garde nationale; mais a même moment a éclaté une division imtre les citoyens. Plus eurs ont refusé de se faire inscrire, jusqu’au 15 juin 1790, temps auquel il fut, question de célébrer, à Strasbourg, une confédération générale du département. L�s bons citoyens ont fait à cette époque cesser la division. On s’est incorporé; un detacheuu nt est parti pour Strasbourg. Plusieurs officiers municipaux, et notamment M. Westermann, ont vu avec peine cette reunion à laquelle ils s’étaient longtemps opno-sés. M. Westermann a commencé à faire des difficultés à M. Berquemm, et s’est oimoséàce qu’il entrât dans la ville. Il est vérifié que l\1. Westermann est considéré comme l’auteur de l’insurrection du 15 ou du 16 juin 1790. Quoi qu’il en soit, il a été député, vers la fin de juin, à l’A-semblée nationale pour se plaindre des excès commis à Hagueneau, et de la formation prétendue d’une seconde garde nationaleinconstitution-neile, et entièrement séparée de la première. L’Assemblée a rendu un décret par lequel elle a ordonné qu’il serait informé contre les auteuo des violences et voies de fait que M. Westermann disait avoir été commises contre les officiers municipaux, ainsi que du pillage du greffe qu’il prétendait égalent nt avoir eu lieu. Vous avez en même temps ordonné l’incorporation de la seconde garde nationale. Ce décret avait été exécuté avant d’être rendu, puisqu’il n’était pas vrai qu’il se fût formé une secondegarde nationale, puisque la procédure de Strasbourg constate que le greffe n’a point été pillé. Le 14 juillet arrivant, il s’agissait de prêter le serment civil. Les officiers municipaux prétendirent que l’incorporation, s’étant faite avant le décret de l’Assemblée, était nulle, et que la garde nationale ne pouvait être admise à prêter le serment: ils portèrent une ordonnance pour en différer la cérémonie au 28. Le comité de la garde nationale délibéra qu’elle se ferait le 14. Le commandant particulier de la ville, M. Bonne, le directoire du département, l< s commissaires du Bas-Rhin envoyés à Hagueneau, ont été du même avis. La municipalité a rendu une S' conde ordonnance, pour que la cérémonie se fît sans armes, en bourgeois actifs , et sans uniforme. C’est après cette époque qu’il est parvenu au comité des rapports plusieurs réclamations contre le décret surpris par les officiers municipaux, et contre les obstacles apportés par eux à la consommation de la céi émonie du serment. Le comité crut devoir employer les voies de la douceur et écrivait aux ofliciers municipaux la lettre suivante : « Le comité, instruit que, dans plusieurs circonstances importantes, le corps munieipil s’est trouvé dispersé de manière à ce pouvoir exercer les fonctions importantes qui lui étaient confiées (effectivement M. Westermann, secrétaire-greffier, M. Àldermann, et antres officiers municipaux, s’étaient retirés dans une abbaye avec ces mêmes papiers qu’ils prétendaient avoir été pillés par leurs ennemis), le comité, instruit en outre que la municipalité s’est refu-ée, malgré les instances de M. Dietrich, commissaire, à convoquer la garde nationale pour la nomination des députés à la fédération de Paris, a pensé que, pour vous épargner un jugement sévère de la part de l’Assemblée nationale, il lui suffirait de vous rappeler les principes qui devaient diriger votre conduite, >'tC. » Cette lettre est datée du 23 juillet; c’est le 24 qu’< st arrivé à Haeue eau le fait le plus désastreux. Profitant de l’entrée que faisait à Hague-nean le régiment de Picardie, et craignant qu’une garnison nuisît à leurs projets, les officiers municipaux ameutèrent les paysans des campagnes et vinrent à leur tête à la rencontre du régiment. L s’engagea un combat, dans lequ l mx citoyens furent tués et plusieurs blessas. M. Westermann et ses confrères n’en restèrent pas moins à Hagueneau. Le 29, ils dressèrent un acte qu’tl est important de mettre sous vos yeux. « La municipalité, considérant tue a conduite indecente delà maréch lussée, qui refuse d’entendre les témoins indiqués, et entend les ennemis de la municipalité et les complices des crimes contre lesquels il faut informer, ne lui permet plus de rétablir le cal ne : considérant que le commandant pour le oi est à la tête des rebelles, et que le comité les rapports lui-même improuve sa conduite, en alléguant des pièces faites dans les ténèbres par des aristocrates, déclare qu’elle donnera sa démission entre les mains des trois commissaires etc. » Les officiers municipaux l’ont en effet donnée te même jonr; mais les commissaire*, persuadés de l’illégalité de ci tte démission combinée, ne l’ont point acceptée. Quelque temps après, le comité des rapports reçut une pétition signée par un assez grand nombre de citoyens d’Hagueneau, qui prétendaient qu’il importait infiniment que les officiers municipaux conservassent b urs fonctions, et que l’Assemblée nationale les invitât à les reprendre, Le comité s’occupait de l’examen des pièces qui lui avaient été envoyées contre C' s olficters lorsqu’il survint une nouvelle réclamation des pre-