SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N°s 12-15 239 refusoient d’agir ou agissoient en sens contraire ! ce seroit la fable des membres et de l’estomac. Nous ne savons qu’obéir et obéir en hommes libres : comme vous, nous voulons l’extinction des haines et l’abolition des partis, aux diatribes calomnieuses lancées contre, nous répondons par nos principes et aux agitations de la malveillance nous n’opposons que le mépris : les gens de bien, les hommes sincèrement vertueux, voilà nos amis ; paix aux bons citoyens, guerre aux despotes, mort aux conspirateurs, soumission à la Convention nationale ; telle est l’expression de nos sentiments républicains. Salut et fraternité. Suivent 30 signatures. 12 Le conseil général de la commune de Bayonne [Basses-Pyrénées] témoigne sa satisfaction, que le règne des lois et de la justice ait succédé à celui de la terreur et de la tyrannie ; il demande que la Convention nationale maintienne le gouvernement révolutionnaire dans ce sens, qu'il s’accorde avec les principes de la liberté et de l’égalité, et proteste de son parfait attachement à la Convention nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (43). 13 Un secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance du 11 brumaire, la rédaction en est adoptée (44). 14 Sur la proposition d’un membre [ESCHASSERIAUX jeune], au nom de la commission chargée de la révision de la loi sur les émigrés, la Convention nationale rapporte son décret du 22 brumaire présent mois, relatif à la fixation de la date sur la loi des émigrés (45). 15 Le même membre [ESCHASSERIAUX jeune] propose ensuite et la Convention (43) P.-V., XLIX, 173. (44) P.-V., XLIX, 173. (45) P.-V., XLIX, 173. Rapporteur Eschasseriaux jeune selon C* II, 21. nationale adopte le décret suivant : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de la commission chargée de la révision des lois sur les émigrés, décrète ce qui suit (46) : Titre premier De l’émigration et de sa complicité. Section première. De l’émigration. Article premier. - Sont émigrés : 1°. Tout Français qui, sorti du territoire de la République depuis le premier juillet 1789, n’y étoit pas rentré au 9 mai 1792. 2e. Tous Français qui, absens de leur domicile, ou s’en étant absentés depuis le 9 mai 1792, ne justifieroient pas dans les formes ci-après prescrites, qu’ils ont résidé sans interruption sur le territoire de la République depuis cette époque. 3°. Toute personne qui, ayant exercé les droits de citoyen en France, quoique née en pays étranger, ou ayant un double domicile, l’un en France et l'autre en pays étranger, ne constateroit pas également sa résidence depuis le 9 mai 1792. 4°. Tout Français convaincu d’avoir, durant l’invasion faite par les armées étrangères, quitté le territoire de la République non envahi, pour résider sur celui occupé par l’ennemi. 5°. Tout agent du gouvernement qui chargé d’une mission auprès des puissances étrangères, ne seroit pas rentré en France dans les trois mois du jour de son rappel notifié. 6e. Ne pourra être opposée pour excuse la résidence dans les pays réunis à la République pour le temps antérieur à la réunion proclamée. Exceptions : Art. U. - Ne seront pas réputés émigrés : 1°. Les enfans de l’un et de l’autre sexe qui, au jour de la promulgation de la loi du 28 mars 1793, n’étoient pas âgés de quatorze ans, pourvu qu’ils soient rentrés en France dans les trois mois du jour de ladite promulgation, et qu’ils ne soient pas convaincus d’ailleurs d’avoir porté les armes contre la patrie. 2e. Les enfans de l’un et de l'autre sexe qui ayant moins de dix ans à l’époque de la promulgation de la loi du 28 mars 1793, seront rentrés en France dans les trois mois du jour où ils auront atteint l’âge de dix ans accomplis. 3°. Les Français chargés de mission par le gouvernement dans les pays étrangers, leurs épouses, pères, mères, enfans, les personnes de leur suite et celles attachées à leur service, sans que celles-ci puissent (46) Tous les articles sur les émigrés, décrétés dans les séances précédentes, sont réunis pour ne former qu’une seule loi, datée du 25 brumaire an III, retranscrite en entier dans le procès-verbal de ce jour. P.-V., XLIX, 174-213. 240 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE être admises au-delà du nombre que chacun de ces fonctionnaires en emploie habituellement. 4°. Les négocians, leurs facteurs et les ouvriers notoirement connus pour être dans l’usage de faire, en raison de leur commerce ou leur possession, des voyages chez l’étranger, et qui en justifieront par des certificats authentiques des conseils généraux des communes de leur résidence, visés par les directoires de district, et vérifiés par les directoires des départemens, les épouses et enfans desdits négocians demeurant avec eux, leurs commis et les personnes employées à leur service dans le nombre que chacun d’eux en entretient habituellement, à la charge par ceux qui sont sortis de France depuis la loi du 9 février 1792 de justifier de passeports dans lesquels les épouses, enfans, commis et personnes employés à leur service auront été dénommées et signalées. 5°. Les Français qui n’ayant aucune fonction publique, civile et militaire, justifieront qu’ils se sont livrés à l’étude des sciences, arts et métiers, qu’ils ont été notoirement connus avant leur départ, pour s’être consacrés exclusivement à ces études et ne s’être absentés que pour acquérir de nouvelles connoissances dans leur état. Ne seront pas compris dans la présente exception ceux qui n’ont cultivé les sciences et les arts que comme amateurs, ni ceux qui, ayant quelque autre état, ne font pas leur profession unique de l’étude des sciences et arts, à moins que, par des arrêtés des conseils généraux des communes de leur résidence, visés et vérifiés par les directoires de district et de département antérieurement au 10 août 1792, ils n’eussent été reconnus être dans l’exception portée par l’article VI de la loi du 8 avril 1792, en faveur des sciences et des arts. 6°. Les enfans que leurs parens, leurs tuteurs ou ceux qui en sont chargés ont envoyés en pays étranger pour apprendre le commerce ou pour leur éducation, à la charge de fournir des certificats délivrés par les conseils généraux des communes de leur résidence visés et vérifiés par les directoires de district de ce département, lesquels constateront qu’il est notoirement connu que lesdits enfans ont été envoyés pour le commerce ou leur éducation. 7°. Les Français établis ou naturalisés en pays étranger antérieurement au premier juillet 1789. Mais ils sont assujetis, pour ce qui concerne les biens qu’ils possèdent en France, aux dispositions des décrets relatives aux différentes nations chez lesquelles ils résident. Art. III. - Quant aux Français absens avant le premier juillet 1789, et n’ayant point d’établissement en pays étranger antérieurement à cette époque, qui n’étoient pas rentrés en France au 11 brumaire, deuxième année, leurs propriétés sont mises sous la main de la nation; il leur est défendu de rentrer en France tant que durera la guerre, à peine d’être détenus, par mesure de sûreté, jusqu’à la paix. Ils seront néanmoins assimilés aux émigrés, ainsi que ceux désignés dans le paragraphe précédent, s’ils se sont retirés, depuis les hostilités commencées, sur le territoire des puissances en guerre contre la France, ou si n’ayant point, avant l’époque desdites hostilités, habité d’autre territoire que celui des puissances en guerre avec la France, ils se sont retirés depuis dans les électorats et évêchés du Rhin, dans les cercles intérieurs de l’empire, ou dans le cercle de Bourgogne. Art. IV. - Sont exceptés des dispositions de l’article précédent, relativement à leurs biens, les Français absens depuis plus de dix ans avant le premier juillet 1789, dont l’existence étoit ignorée avant cette époque et a depuis continué de l’être. Art. V. - Les Suisses et leurs alliés composant la confédération hélvétique, ne sont point compris dans les dispositions de la présente loi. Section II. De l’émigration dans les pays réunis à la République. Art. VI. - Sont émigrés : Département du Mont-Blanc. l°-Tous ci-devant Savoisiens qui, domiciliés dans le département du Mont-Blanc, en sont sortis depuis le premier août 1792, et n’étoient pas rentrés sur son territoire ou tout autre partie de la République, au 27 janvier 1793. Département des Alpes-Maritimes. 2°- Tous citoyens domiciliés dans le ci-devant comté de Nice, qui en sont sortis depuis le 27 septembre 1792, et dans la ci-devant principauté de Monaco, qui s’en sont absentés depuis le 30 décembre de la même année, s’ils ne justifient qu’ils étoient rentrés sur leurs territoires respectifs, ou sur toute autre partie de celui de la République, savoir, ceux domiciliés dans le ci-devant comté de Nice, au 25 mars 1793, et ceux dans la ci-devant principauté de Monaco, au premier avril de la même année. Département du Mont-Terrible. 3°-Tous citoyens domiciliés dans la ci-devant Rau-racie, qui sortis de son territoire depuis le 23 mars 1793, n’étoient pas rentrés sur celui de la République au 23 mai suivant. Autres pays réunis à la République. 4e-Tous citoyens domiciliés dans les pays réunis à la République, autres que ceux dénommés ci-dessus, qui en étoient sortis depuis l’émission du voeu des habitans pour leur réunion, n’y sont pas rentrés dans le délai de trois mois à compter du jour où le décret de ladite réunion à la République a été proclamé. SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N° 15 241 Art. VII. - Les exceptions prononcées en faveur des Français compris dans les dispositions de l’article II du présent titre, sont applicables aux citoyens des pays réunis à la République, qui justifieront être dans les mêmes circonstances. Art. VIII. - Quant aux citoyens des pays réunis à la République, absens avant l’époque de leurs révolutions respectives, et non établis en pays étranger antérieurement à cette même époque, qui n’étoient pas rentrés sur le territoire de la République au premier messidor deuxième année, ils sont assimilés aux Français en ce qui concerne les dispositions de l’article III du présent titre; leurs biens sont également mis sous la main de la nation, et il leur est défendu de rentrer sur le territoire de la République tant que durera la guerre, à peine d’être détenus jusqu’à la paix, ou traités comme les émigrés, s’ils ont participé à leurs complots, ou portés les armes contre la République depuis la réunion de leurs pays respectifs. Section III. Complices des émigrés. Art. IX. - Sont réputés complices des émigrés, ceux qui seront convaincus d’avoir, depuis le 9 mai 1792, 1°. Favorisé les projets hostiles des émigrés; 2e. De leur avoir fourni des armes, des chevaux, des munitions, ou toutes autres provisions de guerre, ou des secours pécuniaires ; 3°. D’avoir envoyé leurs enfans ou soudoyé des hommes sur terre étrangère; 4°. D’avoir provoqué à l’émigration et fait émigrer des citoyens par séduction, promesses ou sommes données; 5°. D’avoir sciemment recelé des émigrés ou facilité leur rentrée sur le territoire de la République. 6°. D’avoir fabriqué de faux certificats de résidence pour les émigrés. Titre II Des certificats de résidence. Section première. Des certificats de résidence des non prévenus d’émigration. Article premier. - Tout citoyen non prévenu d’émigration, absent de son domicile, justifiera légalement de sa résidence sur le territoire de la République, en produisant au directoire du district dudit domicile un certificat revêtu des formes qui vont être prescrites, et dont le modèle sera joint à la présente loi. Sont exceptés de la disposition du présent article les représentans du peuple, qui demeurent dispensés de rapporter des certificats de résidence pour prouver leur non émigration, pendant la durée tant de la session de la Convention nationale que de celle de l’assemblée Législative. Art. II. - Le certificat exigé par l’article précédent, sera délivré par le conseil général de la commune ou par l’assemblée de section de la résidence à certifier, sur l’attestation de trois témoins domiciliés dans ladite commune ou section. Il désignera le lieu de la résidence, et spécialement la maison où le certifié demeure ou aura demeuré; il contiendra en outre les nom, surnom, prénom, profession et signalement dudit certifié. Art. III. - Le certificat sera signé, ainsi que les registres sur lesquels il sera inscrit, par les attestans et le certifié, au moment où celui-ci se présentera pour l’obtenir. Si le certifié, les attestans ou quelques-uns d’eux ne savent pas signer, il en sera fait mention sur le certificat et sur les registres. Le certificat ne sera délivré par la municipalité ou assemblée de section, qu’après avoir été publié et affiché pendant trois jours à la porte de la maison commune. Il sera visé par le directoire du district et soumis à l’enregistrement dans la décade du visa. Art. IV. - Les certificats dont peuvent avoir justifié les citoyens non prévenus d’émigration, d’après les formes déterminées par les lois précédentes, vaudront pour parfaire la continuité de la résidence exigée par la loi. Art. V. - L’absence pour voyage dans l’intérieur de la République n’interrompra pas la continuité de résidence, pourvu qu’elle soit justifiée par des passeports visés par les municipalités. Section II. Des certificats de résidence des prévenus d’émigration. Art. VI. - Les prévenus d’émigration seront tenus, pour justifier de la résidence exigée par la loi, de représenter les certificats de huit citoyens domiciliés dans la commune de la résidence à certifier, y compris le propriétaire ou le principal locataire de la maison dans laquelle le certifié demeure ou aura demeuré. A défaut du propriétaire ou du principal locataire, le certifié pourra y suppléer par le témoignage de deux citoyens domiciliés dans ladite commune, lesquels, ainsi que les autres attestans, excepté les propriétaires ou principaux locataires, ne seront ni parens, ni alliés, ni fermiers, ni créanciers, ni débiteurs, ni agens des certifiés, ni employés à leur service. Art. VII. - Le certificat contiendra les mêmes désignations que celles exprimées à l’article II du présent titre, et sera soumis, ainsi que les registres, quant à la signature, aux formalités prescrites par l’article III suivant. Il sera publié et affiché pendant six jours, tant dans la commune de la résidence à certifier, que dans 242 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE le chef-lieu du canton dans l’arrondissement duquel se trouve ladite commune, et ne pourra être délivré que cinq jours après lesdites publication et affiche. Art. VIII. - La signature du certifié sur les registres des municipalités ou sections, et sur les certificats, est de forme essentielle. Il ne pourra y être dérogé que dans les cas ci-après déterminés. Art. IX. - Dans les communes où il existe des assemblées de section, le certificat sera délivré dans l’assemblée générale de la section de la résidence à certifier; il sera visé et vérifié par le conseil général de la commune, le directoire du district et l’administration du département; il sera signé par six membres au moins, tant de l’assemblée générale de la section que du conseil général de la commune et par deux membres au moins du directoire du district et de l’administration du département, sans qu’aucune signature, même celle du secrétaire, puisse être supplée par une griffe. Ledit certificat devra, pour valoir, être enregistré dans la décade du visa du département. Le visa de l’administration du département suffira provisoirement pour valider les certificats de résidence délivrés par les assemblées de section de Paris. Art. X. - Les certificats délivrés jusqu’à présent, d’après les formes prescrites par la loi du 28 mars 1793, aux citoyens portés sur les listes des émigrés ou dont les biens ont été séquestrés, seront valables pour constater leur résidence. Art. XI. - A l’avenir, les prévenus d’émigration qui auroient produit des certificats depuis le 9 mai 1792, ne seront tenus de constater leur résidence, ainsi qu’il est prescrit par la présente section, que pour le temps qui se sera écoulé depuis l’époque où ils auront obtenu le dernier certificat, pourvu d’ailleurs que la continuité de leur résidence antérieure ait été justifiée d’après les dispositions des lois alors existantes. Art. XII. - Les certificats pour les prévenus d’émigration seront faits conformément au modèle qui sera joint à la présente loi. Section III. Des certificats de résidence des membres de la Convention nationale , des fonctionnaires publics et des militaires . Art. XIII. - Les certificats délivrés aux membres de la Convention nationale par le président et les secrétaires, portant qu’ils sont à leur poste, suffiront pour constater leur résidence, et leur tiendront lieu, dans tous les cas, de tous autres certificats. Art. XIV. - La résidence des fonctionnaires publics nommés par le peuple ou par le gouvernement, sera constatée par un certificat du conseil général de la commune où ils exercent leurs fonctions. Le certificat indiquera leurs nom, prénom, signalement, et l’époque depuis laquelle ils ont résidé dans ladite commune comme fonctionnaires publics. Il sera visé par le directoire du district et soumis à l’enregistrement dans la décade du visa. Art. XV. - Tout militaire employé dans les armées de la République sera admis à justifier de sa résidence sur le territoire français, pour le temps de son activité de service, par un certificat du conseil d’administration du bataillon ou corps militaire dans lequel il sert ou a servi précédemment. Art. XVI. - Ce certificat contiendra, avec son signalement, ses nom, prénom, âge, grade, domicile et l’époque depuis laquelle il est entré dans ledit bataillon ou corps militaire ou depuis laquelle il en est sorti, et sera visé par le commissaire des guerres. Art. XVII. - Le certificat de résidence sera délivré aux officiers de l’état msqor, ainsi qu’à ceux qui ne tiennent à aucun corps particulier, par deux membres de l’état-major, en chef, ou le général de division, ou le général de brigade, et par le commissaire des guerres. Art. XVIII. - Quant aux citoyens attachés aux différons services de l’armée, leur résidence sera attestée tant par le chef sous lequel ils sont immédiatement employés, que par quatre citoyens faisant le même service. Le certificat sera visé par un commissaire des guerres. Art. XIX. - Le fonctionnaire public, le militaire ou le citoyen attaché au service de l’armée, porté sur la liste des émigrés, qui seroit dans la nécessité de constater sa résidence pour un temps antérieur à son activité de service, fera présenter, par un fondé de pouvoirs, le certificat qui lui a été délivré d’après les dispositions des articles précédens, au conseil général de la commune, ou assemblée de section de la résidence à certifier. Art. XX. - Sur la déclaration du fondé de pouvoirs et de quatre autres citoyens domiciliés dans la commune ou section, que la personne désignée dans le certificat représenté est la même que celle dont ils attestent la résidence, le conseil général ou l’assemblée de section, délivrera au certifié entre les mains de son fondé de pouvoirs, et d’après les formes prescrites par l’article III du présent titre, un certificat pour le temps qu’il aura résidé dans ladite commune ou section. Section IV. Des certificats de résidence dans le cas d’impossibilité de déplacement. Art. XXI. - Tout citoyen, autre que les fonctionnaires publics et les militaires, qui se trouvera dans l’impossibilité absolue de se transporter dans la commune de la résidence à certifier, pour être présent à la délivrance du certificat, et signer le registre, présentera ses motifs au direc- SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N° 15 243 toire du district, qui les jugera d’après les observations de la municipalité de sa résidence actuelle. Art. XXII. - Si la réclamation est reconnue légitime, la municipalité, sur la présentation de l’arrêté qui l’aura admise, délivrera au réclamant une attestation d’impossibilité de transport, qui contiendra, avec son signalement, ses nom, prénom, ci-devant qualité ou profession, et l’indication de son domicile actuel. Elle sera signée par le réclamant et inscrite sur le registre de la municipalité. Art. XXIII. - Cette attestation sera présentée, l’identité affirmée et le certificat de résidence délivré ainsi qu’il est prescrit par les articles XIX et XX du présent titre. Le nombre des attestans sera dans la proportion indiquée par l’article II ou VI de ce même titre, selon que le réclamant sera ou non prévenu d’émigration. Art. XXIV. - A l’égard des détenus, l’extrait de leur écrou, auquel sera joint leur signalement, signé par eux et le concierge, et visé par la municipalité du lieu de la détention, suppléera à l’attestation prescrite par l’article XXII. Section V. Dispositions générales concernant les certificats de résidence. Art. XXV. - Tous citoyens tenus de justifier de leur résidence, aux termes de l’article premier du présent titre, répéteront l’envoi de leurs certificats, tous les trois mois, au directoire du district de leur domicile seulement. Art. XXVI. - Il sera tenu note, sur un registre particulier, de ces certificats, qui resteront déposés au bureau de l’administration, le directoire du district n’en délivrera de récépissé qu’après avoir examiné s’ils sont conformes à la loi, et il en sera fait mention sur ledit récépissé. Art. XXVII. - Les citoyens qui auront acquis un nouveau domicile depuis six mois, ne seront plus tenus de justifier de leur résidence au directoire du district de celui qu’ils avoient précédemment, après qu’ils auront rapporté au directoire du district de leur nouveau domicile, des certificats en règle, constatant la continuité de leur résidence sur le territoire de la République depuis le 9 mai 1792, et déclaré à celui de leur domicile antérieur le lieu où ils ont fixé leur domicile actuel. Cette déclaration sera certifiée par la municipalité ou section, et visée par le directoire du district du lieu de la nouvelle résidence. Art. XXVIII. - Les conseils généraux des communes ou sections se borneront à la délivrance des certificats de résidence pour le temps qu’elle a eu lieu dans leur arrondissement, sans exiger la preuve de la résidence dans les autres municipalités. Art. XXIX. - Pourront néanmoins les conseils généraux de commune ou les sections, faire à la suite de leurs certificats mention de ceux qui leur seroient représentés par les certifiés, constatant leur résidence antérieure dans d’autres communes, mais le temps de cette résidence ne sera compté, pour lesdits certifiés, qu’autant que les certificats par lesquels il en est justifié, seront vérifiés et jugés conforme à la loi par les directoires de district, qui les exprimeront dans leur visa. Art. XXX. - Les maires, les officiers municipaux et tous les membres des conseils généraux ou des assemblées générales de sections, sont garans des faits relatifs au domicile et à la résidence des certifians. Art. XXXI. - Les assemblées générales des sections auront la faculté de rejeter le témoignage des certifians; mais elles ne pourront le faire, ni refuser des certificats à ceux qui leur en feront la demande, sans donner leurs motifs. Les directoires de district prononceront dans les huit jours, sur les réclamations qui leur seront présentées à cet égard. Art. XXXII. - S’il s’élève quelque doute ou quelques difficultés sur la forme des certificats, leur validité sera jugée par les directoires de district. Art. XXXIII. - Les témoins qui, dans les certificats de résidence auront attesté des faits faux, seront condamnés à six années de gêne; ils seront en outre solidairement responsables, sur tous leurs biens, des pertes que le faux aura occasionnées à la République. Art. XXXIV. - Les agens nationaux et les directoires de district seront tenus, sur leur responsabilité, de dénoncer aux accusateurs publics des tribunaux criminels les fraudes et les faux relatifs aux certificats de résidence, aussitôt qu’ils seront parvenus à leur connoissance, pour qu’il soit procédé, sans délai, contre les prévenus, d’après les formes prescrites par la loi. Art. XXXV. - Les frais d’expédition et de délivrance des certificats de résidence seront à la charge des certifiés. Il sera payé dix sols par certificat, et quinze sols pour l’enregistrement. Section VI De la vérification des certificats délivrés aux prévenus d'émigration. Art. XXXVI. - Tous citoyens qui ont été portés jusqu’à présent sur les listes des émigrés du district de leur domicile, seulement les militaires et les fonctionnaires publics exceptés, seront tenus de rapporter à l’administration de ce même district, dans le délai de trois mois, à compter de la publication de la présente loi, une attestation des municipalités dont ils ont représenté les certificats, pour justifier de leur résidence, et être rayés desdites listes, 244 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE laquelle énoncera que lesdits certificats leur ont été réellement délivrés et indiquera en même temps, avec leur date, le temps de la résidence qu’ils certifient. Art. XXXVII. - Dans le cas où les registres des municipalités, sur lesquels les certificats ont été inscrits, auroient été enlevés ou incendiés, le directoire du district aux bureaux duquel ont dû être déposés les certificats, les enverra sans délai, sur la demande des certifiés, aux municipalités qui les ont délivrés, pour qu’elles les reconnoissent et les vérifient. Art. XXXVIII. - Il est défendu aux citoyens dont les certificats de résidence doivent être vérifiés d’aliéner leurs biens pendant le délai fixé par l’article XXXVI; les municipalités sont chargées de dénoncer les infractions de la loi à cet égard aux directoires de district, ainsi que les dilapidations qui pourroient être commises par les propriétaires, sur ces mêmes biens. Art. XXXIX. - Il sera procédé à l’égard de ceux qui n’auront point satisfait aux dispositions de l’article XXXVI ci-dessus, comme envers les prévenus d’émigration. Titre III. Des listes des émigrés. Section première. De la formation des listes des émigrés de district. Article premier. - Les directoires de district sont spécialement et exclusivement chargés de la formation des listes des émigrés. Art. II. - Aussitôt la réception de la présente loi, et successivement tous les trois mois, les municipalités formeront un état des citoyens absens, dont le domicile ou les biens peuvent se trouver dans leur arrondissement, avec désignation de leur nom, prénom, surnom, ci-devant qualité ou profession, et de l’époque de leur absence; elles seront tenues de le faire parvenir, dans la décade, aux directoires du district. Art. III. - Ne seront point compris dans ledit état, à raison de leur domicile, les citoyens reconnus par les municipalités pour être fonctionnaires publics ou attachés au service militaire de la République, ou à raison de leurs biens, ceux qui le seront pour être domiciliés dans l’étendue du district ou des districts voisins. Art. IV. - Les administrations de département feront également passer dans la décade de la publication de la présente loi, aux directoires de district, les pièces qu’elles pourroient avoir concernant la résidence des citoyens de leurs arrondis-semens respectifs. Art. V. - Les directoires de district dresseront de suite et ainsi successivement, d’après les états et renseignemens mentionnés ci-dessus, la liste de ceux qui se trouveront prévenus d’émigration pour n’avoir pas justifié de leur résidence aux termes de la loi. Art. VI. - Cette liste contiendra les mêmes désignations que celles exprimées à l’article II du présent titre, avec indication de la situation des biens des prévenus d’émigration. La commission des revenus nationaux en adressera le modèle aux directoires de district. Art. VII. - Ladite liste sera imprimée, publiée et affichée dans le délai d’une décade, à dater du jour où elle aura été arrêtée. Les directoires de district seront tenus d’en adresser, dans le même délai, deux exemplaires certifiés à la commission des Revenus nationaux. Ils en feront également passer à l’administration de leur département un nombre suffisant pour être affichés et publiés dans les chefs-lieux de canton des districts de son arrondissement. Art. VIII. - Tous les citoyens pourront dénoncer les émigrés omis sur les listes aux directoires de district, qui seront tenus de statuer sur la dénonciation et de faire réparer l’omission, s’il y a lieu. Section II. Formation de la liste générale des émigrés. Art. EX. - La commission des revenus nationaux formera successivement et arrêtera, tous les mois, une liste générale, par ordre alphabétique, des émigrés de toute la République, d’après les listes particulières qui lui seront transmises par les directoires de district. Art. X. - Le nombre des exemplaires de cette liste générale est fixé à cinq mille. Il en sera remis une quantité suffisante à chacune des commissions exécutives, pour être, par elles, adressés aux corps administratifs, aux autorités constituées et aux agens qui leur sont respectivement subordonnés dans l’exercice du pouvoir qui leur est confié. Art. XI. - Il en sera distribué un exemplaire à chaque député à la Convention nationale. Art. XII. - La commission des Revenus nationaux est spécialement chargée d’envoyer cette liste générale aux directoires de district, aussitôt qu’elle aura été imprimée. Art. XIII. - Les directoires de district ne feront point imprimer la liste générale des émigrés, mais ils seront tenus d’en annoncer, par voie de proclamation, le dépôt au secrétariat de leur administration, avec l’indication des lettres initiales des noms des émigrés qui s’y trouveront compris, dans la décade du jour où ils l’auront reçue, afin que les citoyens puissent en venir prendre communication. Ils adresseront à la commission des Revenus nationaux un exemplaire certifié de ladite SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N° 15 245 proclamation, dans les trois jours où elle aura été publiée. Section III Des réclamations contre l’inscription sur les listes des émigrés. Art. XIV. - Aucun citoyen ne pourra être porté par la suite sur la liste des émigrés d’un district autre que celui du lieu de son domicile; ses biens ne pourront également y être séquestrés, que dans les cas prévus par les articles suivans. Art. XV. - Les directoires de district formeront un état des personnes absentes, possessionnées dans leur arrondissement, sans y être domiciliées, d’après celui qui doit leur être transmis, aux termes de l’article II du présent titre, par les municipalités. Ils compareront cet état avec les listes générales des émigrés, aussitôt qu’elles leur seront parvenues. Si les personnes portées sur ledit état se trouvent comprises sur ces listes, leurs biens seront de suite mis sous la main de la nation. Art. XVI. - Pourra néanmoins le séquestre être apposé sur les biens de ces mêmes personnes, avant la réception des listes générales des émigrés, d’après les preuves que les directoires de district pourraient se procurer de la non justification de leur résidence sur le territoire de la République. Art. XVII. - Les citoyens portés sur les listes des émigrés du district du lieu de leur domicile, qui n’auront pas réclamé dans le délai de cinq décades, à compter du jour de la publication de ladite liste, seront présumés émigrés. Art. XVIII. - Il en sera de même de ceux qui, ayant réclamé à l’avenir en temps utile, ne justifieront pas dans le mois, à partir du jour de l’expiration du délai fixé par l’article précédent, de la continuité de leur résidence sur le territoire de la République, depuis l’époque fixée par la loi. Art. XIX. - Dans le cas où un citoyen porté sur la liste des émigrés serait décédé sur le territoire de la République avant d’avoir pu justifier de sa résidence, les municipalités sont autorisées à délivrer un certificat pour le temps que le décédé, prévenu d’émigration, a demeuré dans leur arrondissement, d’après les formes légales, à la charge, par les parties intéressées qui réclameront ce certificat, de signer, tant sur les registres, que sur ledit certificat et de se conformer, d’ailleurs, au délai prescrit par la loi. Art. XX. - Il ne pourra être procédé à la vente des meubles ou immeubles des citoyens portés sur les listes des émigrés, avant l’expiration des délais prescrits par les articles précédens ou jugement définitif de leurs réclamations faites en temps utile, mais seulement aux recouvremens qui écherront, et au renouvellement des baux expirés ou expirans. Les frais du séquestre seront à la charge des prévenus d’émigration. Art. XXI. - Les directoires du district prononceront sur les réclamations des prévenus d’émigration, dans la quinzaine, à compter du jour où les pièces auront été déposées au bureau de leur administration, et lorsqu’il s’agira de justification de résidence, dans la décade, au plus tard, de l’expiration du délai fixé par la loi. Art. XXII. - Les arrêtés des directoires de district ne seront que provisoires. Le comité de Législation est chargé de prononcer définitivement, d’après lesdits arrêtés, sur les réclamations contre les listes et toutes celles concernant le personnel des émigrés. Il lui sera adjoint, à cet effet, cinq nouveaux membres. Art. XXIII. - Les arrêtés qui auront rejeté les réclamations des prévenus d’émigration, seront adressés au comité de Législation dans les trois jours où ils auront été pris. Ceux, au contraire, qui leur auront été favorables, ne lui seront envoyés qu’après que l’agent national du district se sera procuré des renseigne-mens ultérieurs sur les prévenus d’émigration, de la part des communes et des administrations de département et de district où les certificats de résidence leur auront été délivrés, ce qu’il sera tenu de faire dans le mois, à compter de la même époque. Art. XXIV. - Aussitôt le mois expiré, le directoire du district prononcera sur les dénonciations ou réclamations qui pourraient lui être parvenues à la charge des prévenus d’émigration; dans le cas où il n’en existerait pas, il en adressera une déclaration pour être jointe à ses arrêtés, qu’il enverra de suite au comité de Législation. Art. XXV. - Sont exceptés de cette dernière disposition les arrêtés concernant les réclamations des fonctionnaires publics et des militaires, et des citoyens employés dans le service des armées de la République, lesquels seront transmis de suite au comité de Législation. Art. XXVI. - Les décisions du comité de Législation seront exécutées sans recours, soit qu’elles ordonnent la radiation sur les listes générales des émigrés, soient qu’elles renvoient aux tribunaux criminels des départemens, pour les cas qui seront susceptibles de l’application des peines portées par la loi, ou qu’elles rejettent les demandes en exceptions qui ne seraient pas fondées. Art. XXVII. - Le comité de Législation, aussitôt qu’il aura prononcé, transmettra ses décisions aux directoires de district : celles favorables aux prévenus d’émigration, seront publiées à la diligence de l’agent national, dans les communes de leur domicile et de la situation de leurs biens. 246 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Art. XXVIII. - L’état de ceux qui auront obtenu la radiation de leurs noms sur la liste des émigrés, . sera imprimé à la suite des listes générales supplémentaires des émigrés de la République. Le comité de Législation fera passer, à cet effet, à la commission des revenus nationaux, l’extrait sommaire des arrêtés qui auront prononcé cette radiation. Art. XXIX. - Les arrêtés des directoires de district, sur les réclamations tendantes à obtenir la main levée du séquestre, quoique le prévenu d’émigration ne soit pas porté sur la liste des émigrés, ne seront aussi que provisoires; ils devront, dans ce cas, être également soumis à la décision définitive du comité de Législation. Des réclamations des prévenus d’émigration portés actuellement sur les listes des émigrés. Art. XXX. - Les administrations de département remettront, dans la décade de la publication de la présente loi, aux directoires de district de leur arrondissement, les réclamations et les pièces à l’appui des prévenus d’émigration, qu’elles peuvent avoir dans leurs bureaux, afin qu’il y soit statué, ainsi qu’il vient d’être prescrit : elles feront parvenir, de suite, au comité de Législation, celles sur lesquelles elles pourroient avoir prononcé. Art. XXXI. - Ceux qui, étant actuellement en réclamation, soit auprès de la Convention nationale, soit auprès des corps administratifs ou du ci-devant conseil exécutif, contre leur inscription et les listes des émigrés ou le séquestre de leurs biens, n’auroient pas joint ou ne join-droient pas à l’appui de leurs mémoires, dans le délai de quatre décades, à compter de la publication de la présente loi, sauf les cas d’impossibilité constatés, les certificats en règle qui attestent leur résidence sur le territoire français, seront déchus de leurs réclamations et réputés émigrés. Art. XXXII. - Seront également réputés émigrés ceux qui, portés sur les listes des émigrés, dans les cinq décades qui ont précédé la promulgation de la présente loi, n’auront pas réclamé, dans cinquante jours, à compter de celui de la publication desdites listes, ou qui, ayant réclamé dans ce délai, n’auront pas par suite justifié de leur résidence dans quatre décades, à partir du jour où ledit délai sera expiré. Art. XXXIII. - Les prévenus d’émigration mentionnés en l’article XXXI ci-dessus, qui auront légalement justifié de leur résidence, même ceux qui n’auroient réclamé que postérieurement aux délais fixés par les lois antérieures, seront réintégrés dans leurs propriétés, à la charge par eux de payer les frais du séquestre. Art. XXXIV. - Les ventes néanmoins des biens de ceux qui n’auront point réclamé ou constaté leur résidence en temps utile, aux termes de la loi du 28 mars 1793, seront maintenues en faveur des acquéreurs, sauf le droit des ci-devant propriétaires au remboursement du capital, d’après les conditions desdites ventes. Art. XXXV. - Tous arrêtés pris en faveur des prévenus d’émigration, qui auront été exécutés sans avoir été préalablement soumis à la décision du ci-devant conseil exécutif, sont nuis. En conséquence, il est ordonné aux corps administratifs de les transmettre dans le mois de la publication de la présente loi, au comité de Législation. Les prévenus d’émigration, dans ce cas, seront tenus de donner caution de la valeur de leur mobilier et ne pourront aliéner leurs immeubles jusqu’au jugement définitif de leur réclamation. Art. XXXVI. - Le comité de Législation référera à la Convention nationale tant pour ce qui concerne les réclamations actuelles que celles à venir, des cas sur lesquels la loi n’aura pas spécialement prononcé. Titre IV. Peines contre les émigrés et leurs complices. Section première. Article premier. - Les émigrés sont bannis à perpétuité du territoire français et leurs biens sont acquis à la République. Art. II. - L’infraction de leur bannissement sera punie de mort. Art. III. - Les enfans émigrés qui seraient rentrés ou rentreraient sur le territoire de la République après les délais fixés par la loi pour leur rentrée, seront déportés s’ils n’ont pas atteint l’âge de 16 ans et punis de mort s’ils enfreignent leur bannissement après être parvenus à cet âge. Art. IV. - Ceux qui, domiciliés dans les pays réunis à la République, ne sont rentrés dans ces mêmes pays ou sur toute autre partie du territoire français, que postérieurement aux époques après lesquelles ils ont dû être considérés comme émigrés, seront tenus d’en sortir dans les deux décades de la publication de la présente loi, à peine d’être traités comme les émigrés qui ont enfreint leur bannissement ou déportés dans le même délai s’ils sont actuellement en état de détention. Art. V. - Les complices des émigrés, désignés dans les paragraphes I, II, III, IV de l’article IX du titre premier de la présente loi, seront punis de la même peine que les émigrés. Art. VI. - Seront condamnés à dix années de fers, ceux qui auront fabriqué de faux certificats de résidence pour les émigrés, et à quatre années de la même SÉANCE DU 25 BRUMAIRE AN III (SAMEDI 15 NOVEMBRE 1794) - N° 15 247 peine, ceux convaincus d’avoir sciemment recelé des émigrés ou facilité leur rentrée sur le territoire français; ils seront en outre responsables, sur leurs biens, des dommages que leur délit aura pu occasionner à la République. Section II. Peines contre ceux qui ne sont rentrés en France que depuis le 9 février 1792 au 9 mai suivant. Art. VII. - La disposition de l’article XXIV de la loi du 8 avril 1792 qui soumet au paiement d’une indemnité équivalente au double de leurs impositions foncières et mobiliaire pour 1792, ceux qui ne sont rentrés sur le territoire de la République que dans l’intervalle du 9 février de la même année au 9 mai suivant, est maintenue. Titre V. Jugemens et condamnation des émigrés et de leurs complices. Section première. Jugemens des émigrés. Article premier. - Tout émigré qui rentrera ou sera rentré sur le territoire de la République, contre les dispositions de la loi, sera conduit devant le tribunal criminel du département, qui le fera traduire dans la maison de justice. Art. II. - Si le département dans l’étendue duquel l’émigré aura été saisi, est celui de son domicile ordinaire, l’accusateur public sera tenu de faire reconnoitre, sans délai, si la personne du prévenu est la même que celle dont l’émigration est constatée par les listes des émigrés. Art. III. - Il fera citer à cet effet des citoyens d’un civisme reconnu au moins au nombre de deux, résidant dans la commune du domicile du prévenu, ou, à leur défaut, dans les communes circonvoisines ; le prévenu comparoîtra devant eux à l’audience, où ils seront entendus publiquement et toujours en présence de deux commissaires du conseil général de la commune où le tribunal est établi. S’ils affirment l’identité, les juges prononceront contre l’émigré la peine de mort ou de déportation, aux termes des articles II et III du titre IV de la présente loi. Art. IV. - Le jugement sera exécuté dans les vingt-quatre heures, sans qu’il puisse y avoir lieu à aucun sursis, recours ou demande en cassation. Art. V. - Dans le cas où le prévenu d’émigration prétendroit être encore dans le délai de justifier de sa résidence sur le territoire français ou de faire valoir en sa faveur quelques dispositions de la loi, le tribunal le fera retenir à la maison de justice, et enverra sur le champ sa réclamation au directoire du district. Celui-ci prononcera dans les trois jours du renvoi et transmettra de suite son arrêté au comité de Législation. Art. VI. - Les émigrés arrêtés dans un département autre que celui de leur domicile, pourront être jugés par le tribunal criminel de ce même département, s’il y a contre eux des preuves de conviction; mais s’il est nécessaire de constater l’identité, ou s’ils ont des réclamations à faire valoir, ils seront de suite conduits, sous sûre escorte, dans la maison de justice du département de leur dernier domicile. Art. VII. - Tous les Français émigrés qui seront pris faisant partie des ras-semblemens armés ou non armés, ou ayant fait partie desdits rassemblemens ; ceux qui ont été ou seront pris, soit sur les frontières, soit en pays ennemi, ou dans celui occupé par les troupes de la République, s’ils ont été précédemment dans les armées ennemies ou dans les rassemblemens d’émigrés; ceux qui auront été ou se trouveront saisis de congés ou de passeports délivrés par les chefs français émigrés, ou par les commandans militaires des armées ennemies, sont réputés avoir servi contre la France. Ils seront en conséquence jugés dans les vingt-quatre heures par une commission militaire, composée de cinq personnes nommées par l’état major de la division de l’armée dans l’étendue de laquelle ils auront été arrêtés. Art. VIII. - Aussitôt après le jugement qui les aura déclarés convaincus des crimes énoncés en l’article précédens, ils seront livrés à l’exécuteur et mis à mort dans les vingt-quatre heures. Art. IX. - Il en sera de même de tous étrangers qui, depuis le 14 juillet 1789, ont quitté le service de la République et se sont, après avoir abandonné leur poste, réunis aux émigrés. Art. X. - Les commissions militaires renverront les émigrés qui ne se trouveront pas dans les cas prévus par l’article VII, devant les tribunaux criminels des dépar-temens de leur domicile respectif. Art. XI. - Les procès-verbaux d’exécution seront envoyés dans la huitaine à la commission chargée de l’organisation et du mouvement des armées de terre, qui les fera passer à la Convention nationale. Art. XII. - Les émigrés ne pourront dans aucun cas être jugés par jury. Art. XIII. - Il n’est point dérogé, par la présente loi, à la disposition de celle du 19 floréal, qui autorise le Tribunal révolutionnaire à juger les émigrés concurremment avec les tribunaux criminels. Art. XIV. - Tous citoyens qui auront dénoncé, saisi et arrêté des émigrés, recevront après l’exécution du jugement la somme de 100 L par chaque émigré. 248 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Section II. Jugement des complices des émigrés. Art. XV. - Les complices des émigrés seront jugés par le Tribunal révolutionnaire (47). 16 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de ESCHASSERIAUX jeune] fait au nom de la commission chargée de la révision de la loi sur les émigrés, décrète : Article premier. - Les articles sur les émigrés, décrétés dans les séances de 26 et 28 fructidor, 4, 16 et 26 vendémiaire derniers, 16, 19 et 23 brumaire présent mois, seront réunis pour ne former qu’une seule loi, qui datera du 25 brumaire troisième année de la République, et sera transcrite en entier dans le procès-verbal de ce jour. Art. II. - Les dispositions des lois antérieures qui se rapportent à l’objet de la présente loi, sont abrogées. Art. III. - Seront maintenues néanmoins la loi du 18 fructidor, relative à la résidence des militaires et celle du 4 brumaire troisième année concernant les prévenus d’émigration qui ont obtenu des arrêtés favorables des corps administratifs. Modèle de certificat de résidence des citoyens prévenus d’émigration. Extrait des registres des délibérations de la municipalité de... (ou assemblée de section, si la communauté est divisée en sections). Commune d... Canton d... District d... Département d... Nous soussignés, maire, officiers municipaux et membres du conseil général de la commune d... (ou membres de l’assemblée de la section de ..., si la commune est divisée en sections), certifions sur l’attestation des citoyens (ici les noms des attes-tans), tous domiciliés dans cette commune (ou cette section, si la commune est divisée en sections), que (ici les nom, prénom, âge, ci-devant qualité ou profession et signalement du certifié), réside ou a résidé sans interruption à (ici, le nom de la commune), maison appartenant à ... depuis le ... jusqu’à ... . Certifions, en outre, que les citoyens attestans ne sont, à notre connoissance et d’après leur affirmation, ni parens, alliés, agens, fermiers, créanciers ni débiteurs du certifié, ou employés à son service. (Dans le cas où le propriétaire ou le principal (47) P.-V., XLIX, 173-207. locataire du certifié seroit son parent, son allié, etc.), comme la loi ne le prohibe pas pour cela, il faudra ajouter ces mots, à l’exception de (ici le nom du propriétaire ou principal locataire), lequel nous a déclaré être parent ou allié, etc. dudit certifié. Fait en la maison commune (ou lieu des séances de l’assemblée de section), le ..., an ... de la République française une et indivisible, en présence desdits certifiés et attestans, lesquels ont signé avec nous, tant le registre de nos délibérations, que le présent extrait. Signature du certifié. Signatures des officiers municipaux et membres du conseil général de la commune. Signatures des attestants. Nota. Dans les communes divisées en assemblées de sections, le conseil général de la commune remplira les fonctions de celui de la commune du chef-lieu du canton, en ce qui concerne, tant la publication et l’affiche du certificat, que la délivrance de l’attestation. A Paris, le département suppléera, à cet égard, provisoirement le conseil général de la commune. Attestation de publication et d’affiche du certificat. Nous soussignés, maire, officiers municipaux et membres du conseil général de la commune de ... attestons que le certificat ci-dessus a été publié et affiché pendant six jours, tant dans cette commune, que dans celle du chef lieu du canton, ainsi qu’il résulte de l’attestation du conseil général de ladite commune, déposée dans nos archives. Fait en la maison commune, à ..., le ..., an ... de la République française une et indivisible. Signatures des officiers municipaux et membres du conseil général de la commune. Nota. Le certificat ne pourra être délivré qu’en présence de trois des citoyens qui ont attesté la résidence du certifié et qui reconnoîtront son identité. Délivrance du certificat. Le certificat ci-dessus a été délivré au citoyen (ici le nom du certifié), que les citoyens (ici les noms de trois attestans) reconnoissent pour être le même que celui dont ils ont attesté la résidence à la commune de ..., le .... Signatures des attestans. Signature du secrétaire greffier. Nota. Même forme pour le visa de l’administration du département.