ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790]. *258 [Assemblée nationale.] M. le Président lève la séance à minuit et demi. ANNEXES A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 17 JUIN 1790. ANNEXE N° 1. Adresse de la municipalité de la ville de Paris sur l'aliénation et la vente des biens ecclésiastiques et domaniaux (1) . Messieurs, les officiers municipaux de la ville de Paris se trouvent dans une position infiniment délicate, et sur laquelle ils croient devoir recourir à votre sagesse. Le n mars dernier , l’Assemblée nationale a décrété : « 1° Que les biens domaniaux et ecclésias-« tiques, dont elle a précédemment ordonné la « vente, par son décret du 19 décembre, jusqu’à « concurrence de 400 millions, seront incessam-« ment vendus et aliénés à la municipalité de « Paris et aux municipalités du royaume aux-« quelles il pourrait convenir d’en faire l’acqui-« sition ; « 2° Qu’il sera nommé, à cet effet, par l’Assem-« blée nationale, douze commissaires pris dans « toute l’Assemblée, pour aviser, contradictoire - « ment avec les membres élus par la municipalité « de Paris, au choix et à l’estimation desdits « biens, jusqu’à concurrence de 200 millions, de-« mandés par ladite municipalité ; que l’aliéna-« tion définitive desdits 200 millions de biens « sera faite aux clauses et conditions qui seront « définitivement arrêtées, et, en outre, etc. » Il paraît résulter de ces décrets, Messieurs, et de tous ceux qüe vous avez portés sur cette matière, que l’Assemblée nationale a voulu rendre les municipalités du royaume les instruments nécessaires et immédiats de cette importante opération ; et la formule de soumission que vous venez de décréter pour toutes semble en offrir une nouvelle preuve. Cependant, Messieurs, les sections de la capitale ont nommé des électeurs qui, tous réunis, ont choisi douze commissaires pour traiter, avec ceux de l’Assemblée nationale, de toutes les conditions préliminaires à l’acquisition proposée par la ville de Paris. Les officiers municipaux, toujours animés du désir de conserver la concorde et l’union dans la commune, ont alors cru devoir s’abstenir de nommer des commissaires, et ils ont laissé agir ceux des sections, qui, aux termes de leurs pouvoirs, ne doivent s’occuper que des opérations préparatoires, ainsi qu’ils viennent de le reconnaître eux-mêmes, en rendant compte de leurs travaux à leurs commettants. Mais, Messieurs, à la suite de ce compte, et après avoir annoncé que leurs pouvoirs étaient épuisés, ces commissaires ont dit qu’il était nécessaire d’en donner de nouveaux pour mettre la dernière main à l’œuvre; et, le 5 juin, les soixante sections ont été convoquées, avec invitation de donner à ces mêmes commissaires toutes les autorisations dont ils avaient besoin pour consommer l’opération et à l'effet de réaliser la proposition faite par la ville de Paris. Ces pouvoirs ont été accordés par la majorité des sections. Cependant, Messieurs, il est un fait qui a pu produire quelque incertitude dans l’esprit de plusieurs personnes, et notre devoir est de le placer sous vos yeux. On lit, dans Y Instruction pour lavente des biens domaniaux , que vous avez décrétée, le 14 mai . « Quant à la commune de Paris, dont la muni-« eipalité n’est pas formée , les experts seront « nommés, l’un par les commissaires des sec « tions, l’autre par l’Assemblée nationale, etc. » Cette phrase, Messieurs, qui contient sans doute un vice de rédaction, a peut-être fait croire à quelques personnes que l’Assemblée nationale ne reconnaissait point la municipalité actuelle. Mais cette erreur ne peut exister que pour ceux qui ne savent pas qu’après avoir permis à cette même municipalité de vous présenter, le 10 mars dernier, un projet d’aliénatiou des biens domaniaux et ecclésiastiques, l’Assemblée nationale a dit, dans son décret du 17 du même mois : « qu’il « serait vendu et aliéné pour 200 millions de biens * à la municipalité de Paris, et que les commis-« saires de l’Assemblée nationale aviseraient, « contradictoirement avec les membres élus par « ladite municipalité , au choix et à l’estimation « desdits biens, etc. ». Enfin, Messieurs, si, malgré le texte formel de vos décrets, quelqu’un avait pu douter encore que l’existence de la municipalité actuelle ne fût avouée et reconnue par l’Assemblée nationale, tous ses doutes auraient été détruits par votre décret du 8 de ce mois, où vous avez dit : « que « la municipalité actuelle ou la municipalité qui « sera établie conformément au règlement dé-« crété par l’Assemblée nationale, est autorisée « à remplir provisoirement, par rapport aux biens « ecclésiastiques situés dans ses murs, les fonc-« tions attachées aux administrations de dépar-« tements et de districts ou à leurs directoires ». Vous voyez. Messieurs, par cet exposé, que si la municipalité provisoire consulte la lettre et l’esprit de vos décrets, elle doit s’occuper de toutes les opérations relatives à l’acquisition proposée par la ville de Paris ; Que si elle consulte au contraire le vœu de la majorité des sections, elle doit s’en abstenir et laisser agir leurs commissaires. La municipalité craint, d’un côté, qu’en s’abstenant de cette opération importante et délicate, on ne lui reproche un jour l’oubli de vos décrets, et qu’on ne s’en fasse un prétexte contre la légalité de l’acquisition. D’un autre côté, la municipalité se trouverait heureuse de ne porter aucun obstacle aux dispositions et aux vœux de ses commettants. Dans cette position, Messieurs, elle vient vous exposer les faits, vous présenter avec confiance ses inquiétudes, ses embarras, et vous supplier de lui tracer ses devoirs. Prononcez, Messieurs; et quelle que soit votre décision, elle remplira tous les désirs de la municipalité. Signé : Bailly, maire ; Daugy, président ; De Joly, membre et secrétaire du conseil de ville. (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur.