245 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790.] Je demande que l’on donne 2,000 livres au premier vicaire, 1,800 livres au second, et 1,400 livres aux autres. M. Martineau. Les deux premiers vicaires étaient jusqu’à présent les seuls dont le traitement fût considérable. Les autres prêtres, sous le nom d’habitués, n’avaient que 3 ou 400 livres; votre comité leur accorde 100 pistoles ; je ne crois pas qu’ils aient lieu de se plaindre. M. lioys. Je suis aussi surpris que M. l’abbé Grégoire de la disproportion de 100 pistoles à 2,400 livres ; la différence est prodigieuse ; je dis prodigieuse, parce que, dans une ville, 1,000 livres ne suffisent pas pour vivre décemment. Je conclus à ce que le moindre traitement soit fixé à 1,400 livres. M. l’abbé Gibert. Je demande la question préalable sur tous les amendements. 11 semble que plus l’on accorde, plus l’on demande. J’ai été pendant dix ans vicaire à 250 livres, et vous voyez que je n’en suis pas plus maigre. (La discussion est fermée.) Les amendements sont rejetés, et l’article 6 est adopté ainsi qu’il suit: « Art. 6. Le traitement des vicaires sera, savoir : à Paris, pour le premier vicaire, de 2,400 livres; pour le second, de 1,500 livres; et pour tous les autres, de 1,000 livres. « Dans les villes dont la population est de cinquante mille âmes et au-dessus, pour le premier vicaire, de 1,200 livres; pour le second, de 1,000 livres; et pour tous les autres, de 800 livres. « Dans toutes les autres villes et bourgs où la population sera de plus de trois mille âmes, de 800 livres pour les deux premiers vicaires, et de 700 livres pour tous les autres. « Dans toutes les autres paroisses de villes, de bourgs et de villages, de 700 livres pour chaque vicaire. » M. le marquis de Châteauneuf-Randon, député de Mende, demande à interrompre l’ordre du jour pour appeler l’attention de f Assemblée sur un point de cumul que ses décrets n'ont pas encore prévu. H dit (1): Messieurs, j’ai l’honneur de demander la parole pour faire observer à l’Assemblée qu’il me semble qu’elle n’arrête pas assez son attention particulière, ni ses scrupules ordinaires, sur les permissions d’absence que M. le président demande quelquefois pour les honorables membres qui l’en prient. Je fonde, Messieurs, mes observations et mes sollicitations pour que vous vous y attachiez un instant, dans les propres scrupules et dans la sagesse de vos décrets mêmes, pour tout ce qui peut regarder votre intérêt personnel; car, jusqu’à présent, vous vous êtes interdit, par ces décrets, toutes sortes d’avantages individuels ; et certes, ce n’est pas sans jalousie et sans envie que vos ennemis, détracteurs de vos principes et de votre constante fermeté à consolider et à achever le bonheur des Français, ont été forcés de vous admirer dans les plus petites précautions que vous avez prises pour seconder et manifester la pureté de votre désintéressement. Mais, cependant il vous en est échappé une trop essentielle, (1) Le Moniteur ne donne qu’une courte analyse delà motion de M. de Châteauneuf-Randon. dont je sens davantage l’inconvénient depuis que j’ai eu connaissance de la nomination d’un membre de cette Assemblée à la place de procureur-syndic de mon département, qui cause avec raison dans ce moment, l’embarras de Messieurs les commissaires du roi, leur réclamation et celle de plusieurs de mes concitoyens, qu’ils fondent sur les expressions de l’article 3 de votre instruction, sur la formation des assemblées représentatives et des corps administratifs, qui portent eu plusieurs endroits : que le procureur général syndic doit être choisi n’ayant aucun service ou emploi qui puissent distraire des fonctions assidues du syndicat. Leur réclamation donc, l’esprit de vos précédents décrets et le refus que, oonsidérativement, MM. du comité de Constitution ont fait de décider ma proposition, quoiqu’une grande partie l’ait approuvée et m’ait engagé de vous la faire, me forcent de vous observer que vous manquâtes la précaution d’ajouter, lorsque vous décrétâtes, le 14 du mois passé, qu’aucun de vos membres ne pourrait assister, comme électeur, dans les assemblées des districts de département, ce qui ne décidait pas si un de vos membres pourrait être éligible ou ne pas l’être; mais, ce qui cependant, pouvait laisser préjuger qu’ils l’étaient: vous manquâtes, dis-je, d’ajouter dans le cas de l’éligibilité, que vous aurez sans doute entendu laisser, comme je le croîs, aux membres de l’Assemblée, qu’au moins ceux qui seraient choisis par leurs concitoyens, pour maire, administrateur, ou procureur-syndic, ne pourraient quitter l’Assemblée, sous prétexte que ce soit, pour en aller remplir les fonctions, qu’après l’option qu’ils auraient faite. En effet, Messieurs, de ce défaut d’explication et de précautiou de votre part, ne peut-il pas résulter de grands inconvénients? N’en est-il pas même résulté qui occupent dans ce moment votre sollicitude? Et ne se trouve-t-il pas une contradiction manifeste entre l’esprit de vos décrets et la liberté, qu’en cas d’éligibilité, vous laissiez s’accumuler sur vos têtes plusieurs fonctions, incompatibles les unes avec les autres, au préjudice de vos représentés, qui manqueraient nécessairement de l’être dans quelques-unes des parties où ils ont le droit de l’être ? Non, Messieurs, ce n’est pas votre intention, et vous allez sans doute y pourvoir. Il est vrai qu’avec les sentiments qui enflamment les membres de l’Assemblée, vous pouviez vous dispenser de leur faire une loi des devoirs de l'incompatibilité de leurs fonctions, avec celle de toute autre place à laquelle la confiance de leurs concitoyens les appellerait ; car il en est plusieurs qui, honorés du choix de leurs concitoyens dans des places de nouvelles municipalités ou d’administration, se la sont faite à eux-mêmes et n’ont pas cru devoir s’y rendre de peur d’être forcés de s’immiscer dans leurs fonctions, pour ne pas compromettre le caractère de Finviolabilité du représentant de la nation avec la responsabilité de l’administrateur et de l’officier public. D’autres, en ce cas, en ont prévenu l’Assemblée qui, presque dans tous les cas, par son refus, a manifesté son intention, sans rendre de décret positif; mais d’autres ont pu ne pas le faire et après la nouvelle qu’ils ont reçue de leur nomination à la place de procureur-syndic, demander des permissions simples à l’Assemblée, sans la prévenir des motifs, comme d’ordinaire l’ont fait en pareil cas, tous les membres qui les ont de- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 juin 1790.] m mandées, et partir avec, ou sans le projet de commencer leurs fonctions, ainsi qu’avec l’intention de revenir ou de ne pas revenir à l’Assemblée. C’est donc pour détruire et déterminer cette incertitude, que j’ai l’honneur de vous proposer d'ordonner l’option, en cas que les membres élus dans leurs départements veuillent s’absenter par intervalle de l’Assemblée, pour s’y rendre, qu’ils aient ou n’aient pas l’intention de remplir leurs fonctions , car il est impossible que, même en ne voulant pas en remplir, l’on ne s’y immisce point et l’on n’ait pas une influence, qui souvent pourrait être contraire aux vues de l’Assemblée, et de l’étendre même sur ceux qui s’y seraient déjà rendus et qui ne rejoindraient pas l’Assemblée à l’expiration de leur congé, afin que, s’ils optent en faveur de leurs nouvelles élections, ils puissent être remplacées par leurs suppléants, quand ils en ont, par exemple, ainsi qu’en a mon département. Je puis même certifier à l’Assemblée que leurs sentiments et leurs principes sont dignes de mériter place au milieu d’elle. Si je m’élève contre le silence, sans doute involontaire, et le défaut d’option de* membres qui sont partis, qu’il me soit permis de déclarer ici le cas que je fais du talent et du mérite de ceux que je connais, pour les places auxquelles leurs concitoyens viennent de les nommer : et que ceux qui penseraient que j’ai le dessein de les attaquer personnellement, reçoivent ici la déclaration que je fais du contraire, mais celle que je ferai toujours de renoncer à tout intérêt personnel et considératif pour celui de tous mes concitoyens, au nom desquels je réclame, Messieurs, et fonde les motifs du décret qui je vais avoir l’honneur de vous soumettre pour les mettre dans le cas d’être représentés partout où ils ont droit de l’être, sans interruption ni crainte d’accumulation de pouvoirs sur une même tête. Projet de décret. L’Assemblée nationale décrète que tous ceux de ses membres qui auraient pu ou pourraient être élus dans les nouvelles administrations et municipalités de leurs départements, ne pourront uitter l’Assemblée pour se rendre dans l’éten-ue du territoire de leur département, sous quelque prétexte que ce soit, sans avoir préalablement fixé leur choix sur l’une des places qu’ils voudront conserver, notamment de celle de représentant de la nation; pour qu’en cas de démission de celle-ci, ils puissent être remplacés par leurs suppléants, s’ils en ont, et que ceux qui pourraient être partis depuis leur nomination, et qui ne se rendraient pas à l’expiration de leur congé à l’Assemblée, seront tenus de faire l’option sur la première notification du présent décret, qui leur sera faite ou par la municipalité de leur domicile, ou par les commissaires du roi nommés pour la formation du département. M. le Président consulte l’Assemblée qui renvoie ce projet de décret au comité de Constitution. La suite de la discussion sur la constitution civile du clergé est reprise. M. Martineau, rapporteur , lit l’article 7 : « Art. 7. Le synode du diocèse réglera tous les ans les dépenses nécessaires du séminaire, tant pour le traitement des vicaires supérieurs et vicaires directeurs que pour les frais d’éducation des jeunes clercs qui y seront élevés, de npanière cependant que la dépense totale ne puisse pas excéder, pour Paris, la somme de 30,000 livres, et pour chaque autre diocèse, celle 15,000 livres; et tous les ans le cpmpte en sera rendu à l’administration de département. » M. Garat l'alné. Sur quelle base est fondée cette énorme distinction pour la ville de Paris ? Est-ce sur la population ? il n’est pas de diocèse dans lequel elle ne soit aussi étendue-Est-ce sur la cherté des subsistances ? c’est encore une base fausse ; par exemple, si Bordeaux continue d’être diocèse métropolitain, les subsistances y seront beaucoup plus chères qu’à Paris. M. Camus. Je demande l’ajournement de l’article, parce que l’on ne connaît pas assez les divers objets qui y ont rapport. Les dépenses seront bien moins considérables dans les séminaires où il y a beaucoup de bourses que dans ceux où il n’y en a pas. Les conservera-t-on, ou ne les conservera-t-on pas? Il faut que le comité nous présente d’abord ses vues sur cet objet. J’insiste donc sur l’ajournement. (L’ajournement est adopté.) M. Martineau lit l’article 8 qui porte : « Art. 8. Tous les vingt ans, le traitement des ministres de la religion, tel qu’il vient d’être fixé, pourra recevoir une nouvelle augmentation en raison de l’augmentation du prix des denrées. » M. de Beauharnais. Cet article est absolument inutile; je conviens que les principes qu’il renferme sont justes; à mesure que le renchérissement des denrées rendra insuffisant les traitements des curés, il faudra déterminer une augmentation. Mais je ne’vojs pas qu’il soit possible de déterminer cette époque ; d’ailleurs, l’article n’étant pas constitutionnel, il est du ressort des législatures. L’utilité de nous renfermer strictement dans ce qui nous appartient est un motif suffisant pour nous déterminer à rejeter l'article. (L’article est écarté parla question préalable.) Les deux articles suivants sont mis ensemble à la discussion . « Art. 9. Les assemblées administratives feront faire une estimation des biens-fonds qui dépendent de chaque curé, et la jouissance en sera laissée aux curés, jusqu’à concurrence du quart de leur traitement, et en déduction des sommes qui doivent leur être payées. « Art. 10. Dans les paroisses de campagne, où les curés n’ont point de biens-fonds, ou n’en ont pas dans la proportion qui vient d’être fixée, s’il s’y trouve des domaines nationaux, il en sera délivré aux curés, d’après l’estimation qui en sera faite, toujours jusqu’à concurrence et en déduction du quart de leur traitement. » M. l’abbé Simon, député de Dol. Je demande que le traitement des curés soit payé la moitié en biens-fonds. M. l’abbe Gouttes. Ceci est tout à la fois, et dans l’intérêt de la nation, et dans l’intention des curés ; il faut que les pasteurs aient une oc-