[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [â(L décembre 1789.] Pour Genève une source continuelle d’agitations et de troubles depuis 1738 ; Pour la France une série de bévues, de fautes, d’actes qui déshonoreraient la nation, si nous pouvions être comptables de ce que nos ministres ou leur plats commis faisaient en son nom quand elle n’était rien. Cet odieux tissu d’intrigues et d’injustices tôt ou tard vous sera soumis, et vous déciderez si de telles garanties sont conformes à la morale et aux droits des nations. C’est à vous à évaluer maintenant et la grandeur et la nature du don qui vous est offert, et la pureté des vues qui ont déterminé à vous l’offrir. Je propose l’arrêté suivant : Qu’il sera répondu par M. le président au ministre des finances : « Que l’Assemblée nationale, vivement touchée de l’état de détresse où se trouvent les arts, le commerce et les manufactures de la ville de Genève, ainsi que de l’énorme cherté du prix du blé, dont il est fait mention dans la lettre que le ministre lui a communiquée, estime que les 900,000 livres qui lui sont offertesdans cette lettre seront appliquées d’une manière plus convenable, si on les emploie au soulagement des Genevois eux-mêmes, et qu’en conséquence elle a arrêté de n’en pas accepter la proposition. » (De nouveaux applaudissements se font entendre.) M. l’abbé Maury dit que les Genevois, comme créanciers de l’Etat, peuvent sous ce rapport être assimilés aux propriétaires français, quoique non résidant en France. Cette comparaison déplacée a excité quelques murmures, et la fin du discours de l’orateur, qui s’est très-adroitement retourné, lui a mérité les plus grands applaudissements. Il établit que la France ne pouvait pas accepter une offre qui pouvait humilier sa dignité : dans ses malheurs, dit-il, il est permis de se souvenir de sa gloire. Les malheurs de la France recevront un nouveau lustre par son courage à les supporter et sa constance inépuisable à les réparer. La question mise aux voix, l’Assemblée décide qu’elle n’acceptera pas l’offre faite par les Genevois, et que M. le président fera part du présent décret au ministre des finances. M. le Président lit une lettre de M. Bertrand, inspecteur général des ponts et chaussées, qui fait à la nation l’offre d’un don patriotique de 2,802 livres en une quittance à valoir sur M. Thoi-net, trésorier général des ponts et chaussées. M. Hébrard,sau nom du comité des rapports, fait le rapport de l'affaire de Bélesme. Les conclusions du comité sont qu’il n’y a pas lieu à délibérer. M. Bailleul résume les griefs des habitants de Bélesme contre l’intendant d’Alençon et contre son subdélégué le sieur Bayard de La Yingtrie. M. le comte de Puisayë veut profiter de l’occasion pour faire rendre un décret général contre les procédures prévôtales et faire aunuler celles dirigées contre les habitants de Bélesme. M. ümmery observe que la lenteur extrême des accusations formulées contre Bayard de la Yingtrie les rend singulièrement défavorables. Enfin après différents débats sur les deux procédures prévôlale et présidiale qui ont eu lieu en cette affaire, l’Assemblée prononce le décret suivant : « Sur la discussion élevée entre M. de La Ving-trie, subdélégué deM.l’intendant d’Alençon, et les citoyens de Bélesme, l’Assemblée nationale a décrété que la question serait ajournée, et que M. le président se retirerait par devers le Roi pour supplier sa Majesté d’ordonner : « 1° L’apport des deux procédures, l’une prévo-tale et l’autre présidiale, qui ont été commencées sur cette affaire. « 2° La suspension de toute procédure prévô-tale. » M. le Président lève la séance et l’ajourne à demain, 9 heures du matin. [ANNEXES à la séance de l'Assemblée nationale du 29 décembre 1789. lra ANNEXE. TABLEAU de la situation actuelle des colonies présentée à l'Assemblée nationale (1). Messieurs, lorsque vous avez tracé les éléments de la législation de l’empire français, vous n’avez pas cru qu’ils fussent également applicables à toutes les parties qui le composent ou qui y correspondent ; et, en décrétant qu'il n'y avait pas lieu à la formation d'un comité colonial, vous avez reconnu que les colonies avaient le droit de faire elles-mêmes leur constitution.Celle de Saint-Domingue, qui doit être maintenant assemblée, se livre à ce travail important; bientôt sans doute ses députés le présenteront à la sanction de la métropole j et cet acte solennel consolidera à jamais une union d’où résultera leur prospérité mutuelle. Mais, en attendant ce jour désiré de tous les bons citoyens, il est des maux pressants dont l’idée seule effraie l’imagination, dont les suites seraient incalculables, et que votre sagesse, nous osons dire plus, que votre justice peut et doit prévenir. Vous connaissez, Messieurs, cette doctrine répandue par quelques hommes qui ne paraissent animés que des plus purs motifs. Mais la vertu et l’humanité ont aussi quelquefois leur fanatisme, et il est d’autant plus dangereux, qu’il se présente sous les couleurs de ce qu’il y a de plus respectable sur la terre. Le choix du moment a dû favoriser leur entreprise; et c’est lorsque le mot de liberté est dans toutes les bouches et retentit dans tous les cœurs, qu’on a cru devoir solliciter avec ardeur l’affranchissement des nègres et l’abolition de la traite. Votre opinion, Messieurs, est sûrement déjà fixée sur cette grande question, ou du moins vous avez suspendu un jugement qui doit être éclairé par les réclamations des colons et du commerce. Qu’il nous soit permis cependant de relever quelques contradictions palpables dans le système de nos adversaires, adopté par quelques écrivains très-connus. Il est en effet bien extraordinaire que les mêmes écrivains qui (1) Ce document n'a pas été inséré an Moniteur.