20 brumaire an II 10 novembre 1793 710 ' [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j Suit une lettre du général Laroche au ministre de la guerre, datée de Bayonne (I) : Laroche, général de brigade, chef de V état-major de l’armée des Pyrénées -Occidentales, au ci¬ toyen Bouchotte, ministre de la guerre. « Bayonne, le 12e jour du 2e mois de l’an II de la République, une et indivisible. « Citoyen ministre, « Je vous aurais annoncé, par le dernier cour¬ rier, l’arrivée du général Dumas, si je n’eusse été certain des soins des représentants du peuple à cet égard : déterminés par des circonstances très impérieuses dans le moment, ils viennent de prendre un arrêté qui maintient le général Muller dans les fonctions de chef de l’armée. Les connaissances géographiques et topogra¬ phiques de ce militaire, la confiance qu’il a ins¬ pirée, tout concourt à faire désirer qu’il reste dans une place où le général Dumas, avec toutes les connaissances imaginables, ne pourrait le remplacer d’un certain temps. D’ailleurs, ci¬ toyen ministre, rien ne détruit l’émulation du soldat comme cette versatilité dans le choix des généraux. Les changements, lorsqu’ils ne sont point motivés, opèrent toujours des effets très funestes sur son esprit. « L’ordre, la discipline et la bonne tenue com¬ mencent à régner d’une manière satisfaisante; nos braves républicains ont la plus grande envie d’aller au feu; nous les y conduirons, citoyen ministre, et nous vous montrerons que rien ne résiste à notre impétuosité et à notre courage. « Le général Frécheville est également arrivé, on lui a donné le commandement de la division de droite : sa contenance est celle d’un vrai républicain, et je crois que son patriotisme et ses talents militaires répondent à la confiance qu’on a en lui. « Il nous arrive tous les jours un grand nombre de déserteurs; vous en recevrez l’état en même temps que le compte général de l’ar¬ mée, auquel je travaille. « Je suis enfin parvenu, en écrivant à Tou¬ louse, à Mont-de-Marsan et à Dax, à recueillir les listes de tous les déserteurs et prisonniers laits à l’ennemi et par l’ennemi : ce travail m’a donné beaucoup de peine, je le joindrai à l’autre. « La situation actuelle de Bayonne, Saint-Jean-de-Luz et tous les départements qui avoi¬ sinent l’armée, est on ne peut plus satisfaisante; tout y est à la hauteur de la Révolution, grâce aux mesures salutaires de nos braves représen¬ tants qui ont tout régénéré de concert avec les bons sans-culottes qui se sont joints à eux. « Salut et fraternité. « Laroche. » « Je vous remercie bien sincèrement, citoyen ministre, de l’envoi que vous nous avez fait des cartes de Roussel; veuillez, je vous prie, m’envoyer la collection des lois militaires pour le bureau de l’état-major. (1) Archives du ministère de la guerre ; armées des Pyrénées, Compte rendu du Moniteur universel (T). Extrait de la lettre du citoyen Laroche, général de brigade, chef de V état-major des Pyrénées-Orientales, datée de Bayonne, le 12e jour du 2e mois de Van II de la République. « La situation actuelle de Bayonne, Saint-Jean-de-Luz, et de tous les départements qui avoisinent l’armée, est on ne peut pas plus satis¬ faisante; tout y est à la hauteur de la Révolu¬ tion, grâce aux mesures salutaires de nos braves représentants, qui ont tout régénéré de concert avec les sans-culottes qui se sont joints à eux. « Signé : Laroche. » Barère. Le comité a reçu des nouvelles de l’armée qui est à Bayonne; ces nouvelles sont très satisfaisantes; l’armée est tout à fait régé¬ nérée, et à la hauteur des circonstances. Les autorités constituées de Paris se présentent à la barre; le procureur de la commune de Paris [Chaumette] porte la parole, et dit : « Le peuple vient de faire un sacrifice à la « raison dans la ci-devant église métropolitaine; « il vient en offrir un autre dans le sanctuaire « de la loi. Je prie la Convention de l’admettre. » Sur la proposition d’un membre, la Convention décrète l’admission. La marche s’ouvre par un groupe de jeunes musiciens; ils sont suivis de jeunes républicains, des défenseurs de la patrie; ils chantent un hymne patriotique,- répété en chœur, au milieu des plus vifs applaudissements. Un groupe nombreux de républicains, couverts du bonnet de la liberté, s’avancent en répétant les cris de : Vive la République! vive la Montagne! Le peuple et les membres de la Convention mêlent leurs voix à celles de ces républicains. Un nombre prodigieux de musiciens font re¬ tentir les voûtes des airs chéris de la Révolution : un cortège de jeunes républicaines, vêtues de blanc, étant ceintes d’un ruban tricolore et la tête ornée de guirlandes de fleurs, précèdent et entourent la Raison. C’est une femme, image fidèle de la beauté; elle a sur sa tête le bonnet de la liberté; sur les épaules flotte un manteau bleu, et elle tient dans sa main droite une pique sur laquelle elle s’appuie. Assise sur un fauteuil de simple structure, décoré de guirlandes de chêne, elle est portée par quatre citoyens : son attitude imposante et gracieuse commande le respect et l’amour. (1) Moniteur universel [n° 53 du 23 brumaire an II (mercredi 13 novembre 1793), p. 214, col. 3]. D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 418, p. 278) rend compte du rapport de Barère dans les termes suivants : « Barère lit une autre lettre. Elle est datée de Bayonne. Elle annonce que l’état de l’armée est très satisfaisant, et que le pays est entièrement de ni¬ veau avec les circonstances. »