[Convention nationale,} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Q�ovembre �V1 231 Compte rendu du Bulletin de la Convention ( 1 ). Les trois administrateurs de la fabrication des fusils se sont présentés à la barre. Un des administrateurs a dit : (Suit le texte de V adresse que nous reprodui¬ sons ci-dessus d'après un document des Archives nationales). Les pétitionnaires ont été admis aux hon¬ neurs de la séance. III. PÉTITION DU DIRECTEUR DU JURY D’ACCUSATION DU TRIBUNAL DU 3e ARRONDISSEMENT DE Paris pour demander qu’il soit créé UN JURY SPÉCIAL POUR JUGER LES ACCAPA¬ REURS (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Le directeur du jury du troisième tribunal en¬ voie une pétition, par laquelle il demande qu’il (1) Bulletin de la Convention du 3e jour de la 2e décade du 2e mois de l’an II (dimanche 3 no¬ vembre 1793). D’autre part, le Moniteur universel [n° 44 du 14 brumaire an II (lundi 4 novembre 1793), p. 180, col. 1] et le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 411, p. 183) rendent compte de l’admission à la barre de cette députation dans les termes suivants : I. Compte rendu du Moniteur universel. Une députation des ouvriers dans les manufactures extraordinaires d'armes, établies à Paris, est admise à la barre. Les pétitionnaires présentent chacun un fusil. L'orateur : On ne fabriquait que 50,000 fusils, par an, en France sous le règne des tyrans. (Suit le texte de l'adresse que nous reproduisons ci-dessus, d'après un document des Archives nationales).! On applaudit.) Les pétitionnaires sont admis aux honneurs de la séance, et la Convention ordonne l’impression de leur adresse et l’insertion au Bulletin. IL Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. Une députalion de l' administration des ateliers extraordinaires établis dans Paris pour la fabrication des armes se présente à la barre. L'orateur : On ne fabriquait que 50,000 fusils en France sous le règne des tyrans. (Suit le texte de l'adresse que nous reproduisons ci-dessus, d’après un document des Archives nationales. ) Cette adresse a été souvent interrompue par des applaudissements. Le Président a accordé à la députation les hon¬ neurs de la séance. Il a encouragé les administra¬ teurs et leur a recommandé, au nom de la patrie, de continuer leurs travaux avec la même activité et le même zèle. La Convention décrète l’impression de l’adresse et son insertion au Bulletin. (2) La pétition du directeur du jury d’accusation du tribunal du 3e arrondissement de Paris n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 13 bru¬ maire an II; mais on en trouve un extrait dans les comptes rendus de cette séance publiés par le Moni¬ teur universel et par le Journal des Débats et des Décrets. (3) Moniteur universel [n° 45 du 15 brumaire an II soit créé un jury spécial composé uniquement de sans-culottes, pour juger les crimes d’accaparè-ments; que ce jury ne soit pas pris sur la liste des jurés du département, mais nommé à haute voix dans les sections; que ce jury prononce individuellement et à haute voix dans ses juge¬ ments ; que la Convention complète la loi contre les accapareurs, et enfin que tous ceux qui, ayant été cités devant un tribunal, auront été acquittés, soient compris dans la classe des personnes suspectes. Cette pétition est renvoyée au comité de législation. Suit le texte de la pétition d'après un document des Archives nationales (1) : Le directeur du Jury d'accusation du tribunal du 3e arrondissement du département de Paris, à la Convention nationale. « Représentants du peuple, « Vos lois des 26 juillet et 30 septembre contre les accapareurs ont été reçues avec transport par les amis de la patrie ; elles ont été regardées comme les seuls moyens capables de rendre à la circulation les denrées et marchandises de première nécessité et de les maintenir aux prix raisonnables dont elles n’auraient jamais dû s’écarter. Mais l’exécution de ces lois en a fait reconnaître i’incomplément et même des vices dans plusieurs de leurs dispositions. « D’abord ces lois seront absolument sans effet, tant que leur exécution ne sera pas confiée à des mains pures : il est immoral de faire juger les accapareurs, les égoïstes, les ennemis les plus acharnés de leurs concitoyens, par d’autres accapareurs, par des marchands, par des modé¬ rés, par des êtres qui n’ont que le masque du patriotisme; certes celui qui s’expose à être demain sur la sellette, ne prononce pas d’a¬ vance sa condamnation : et cependant on ren¬ contre ces individus dans toutes les listes des jurés ordinaires, chaque jour on voit des acca¬ pareurs acquittés par ces jurés bénins, et la disette continue à se faire sentir parce que le crime est impuni. « Voilà un des inconvénients de la loi du 26 juillet qui, par son silence sur la composi¬ tion du jury, a laissé aux jurés ordinaires le jugement des accapareurs. « La loi du 30 septembre est tombée dans le même inconvénient, et l’a rendu encore infini¬ ment plus dangereux, en attribuant la connais¬ sance des délits relatifs aux subsistances à des jurés spéciaux formés de la manière prescrite parle titre XII de la 2e partie de la loi du 29 sep¬ tembre 1791. (mardi 5 novembre 1793), p. 183, col. 3]. D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 411, p. 187) rend compte de cette pétition dans les termes suivants : « Le directeur du jury du tribunal criminel du 3e arrondissement de Paris écrit à la Convention pour lui demander que les crimes d’accaparement soient soumis à un jury spécial, composé uniquement de sans-culottes et où l’on n’admettra point de mar¬ chands. « Cette lettre est renvoyée au comité de législa¬ tion. » (1) Archives nationales, carton Dm 257, dossier 3 e arrondissement. 232 {Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J fnSvembre" ms 1 « Et en effet, les articles 4 et 5 de ce titre portent que les jurés spéciaux seront choisis parmi les citoyens ayant les connaissances rela¬ tives au genre du délit : ainsi les accapareurs de subsistances ne peuvent être jugés, d’après la loi du 30 septembre dernier, que par des mar¬ chands de subsistances, leurs dignes confrères et émules. « L’accaparement est non seulement un crime capital, mais un crime contre-révolution¬ naire; les lois qui l’ont défini et qui ont prononcé la peine de mort contre ses auteurs, sont des lois révolutionnaires; ce crime ne peut être jugé que par des jurés vraiment révolutionnaires. « Pour parvenir à composer ce jury, soit d’ac¬ cusation, soit de jugement, conformément au vœu du peuple et du vôtre, législateurs, je demande avec instance que vous en écartiez expressément tous les marchands en gros et en détail, tous les propriétaires de terres et leurs fermiers, et en outre tous les individus dont le patriotisme n’aura pas été prononcé dès 1789 et qui ne se sera pas soutenu sans tache et avec énergie jusqu’à présent; « Que les candidats soient élus dans les sec¬ tions et qu’avant les élections ils passent aux scrutins épuratoires des comités révolution¬ naires et des sociétés populaires de leurs sections ; « Que ces jurés connaissent, seuls, de tous les accapareurs de quelque nature qu’ils soient, sans distinction ni exception; « Qu’ils soient en activité dans la huitaine de la proclamation de la loi et qu’elle soit pro¬ clamée, dans le département de Paris, dès le lendemain qu’elle aura été rendue; « Un juré, ainsi organisé, n’excitera aucunes plaintes raisonnables; l’accusé innocent et le consommateur pauvre seront également tran¬ quilles, la première vertu d’un républicair est d’être parfaitement intègre; or un juré parfaite¬ ment intègre ne condamnera jamais un accusé dont sa conscience lui attestera l’innocence, il ne fera jamais grâce à un accapareur dont le crime lui sera dénoncé. « Quant aux réclamations des coupables et des citoyens exclus de la liste des jurés, on sent bien que je ne brigue pas leurs suffrages. « Je passe à d’autres réflexions. « L’article 6 de la loi du 26 juillet renferme une disposition qu’il faut s’empresser de suppri¬ mer, c’est celle qui n’astreint les marchands tenant en dépôt à déclarer s’ils veulent mettre en vente qu'autant qu’ils en seront interpellés par le commissaire aux accaparements et que cette interpellation sera consignée par écrit. Cette interpellation ne fait que faciliter, aux mar¬ chands tenant en dépôt, les moyens d’accaparer et que leur assurer l’impunité. S’ils sont inter¬ pellés, ils en sont quittes pour faire la déclara¬ tion prescrite par cet article; s’ils ne sont pas interpellés, ils se taisent, leurs marchandises restent en dépôt et sont ainsi éternellement sous¬ traites à la circulation puisqu’il n’y a que l’inter¬ pellation qui puisse les contraindre à les exposer en vente. Et nous n’avons malheureusement que trop d’exemples où, soit par ignorance, soit par connivence, les commissaires aux accapare¬ ments n’ont pas fait cette interpellation aux marchands tenant en dépôt. « Pour éviter ces abus à l’avenir et pour que la loi ne soit pas illusoire, il est indispensable de supprimer la formalité de l’interpellation, d’astreindre les marchands tenant en dépôt à s’expliquer s’ils veulent mettre en vente et à donne* cette explication par leur première dé¬ claration, des marchandises en dépôt sans attendre même la vérification de la municipalité ou section; ils sont suffisamment mis en demeure par le besoin que leurs frères ont de ces mar¬ chandises qu’ils dérobent à la circulation. « L’article 9 delà même loi demande un déve¬ loppement sur les entrepôts et sur les abus qu’ils engendrent, qu’ils multiplient et qu’ils per¬ pétuent. « Personne ne disconviendra que les Messa¬ geries, les rouliers.et les commissionnaires peu¬ vent favoriser, et favorisent en effet, au moins involontairement, les accapareurs; et qu’ils peuvent, dès lors, abusant de leurs qualités, fa¬ voriser volontairement les accapareurs et deve¬ nir eux-mêmes accapareurs. « Ces spéculateurs infâmes sur la misère pu¬ blique, ces monstres qui ne soupirent qu’ après la contre-révolution et qui regardent la disette des subsistances et marchandises comme un moyen assuré pour y parvenir, ces deux races maudites trouvent, dans les bureaux publics de roulage, de messageries et de commissions, des facilités incroyables pour commettre impuné¬ ment le crime d’accaparement. « Et en effet, lorsqu’on apporte des marchan¬ dises dans ces bureaux, les employés ne s’infor¬ ment pas (et la multiplicité de leurs opérations ne leur permet pas de s’informer) de l’existence de l’individu au nom duquel les marchandises sont envoyées ni de l’existence de l’individu auquel elles sont adressées; en conséquence, l’ac¬ capareur envoie ses marchandises dans un de ces bureaux, il les envoie au nom d’un individu qui n’existe pas, il les envoie à un autre individu qui n’existe pas davantage, les marchandises ne sont pas retirées, elles restent dans les bu¬ reaux publics à l’abri de la loi du 26 juillet, et l’accapareur ne se présente et ne revendique que lorsqu’il n’y a pas de contestation sur la pro¬ priété : Premier abus. « Qui empêche le particulier auquel les mar¬ chandises sont adressées, d’user du même stra¬ tagème, de refuser ces marchandises sous un prétexte quelconque et de les retirer à une autre époque que son avidité lui indiquera et en annonçant alors que les obstacles sont levés? Second abus. « Qui empêche les directeurs et chefs de ces bureaux de favoriser ces accapareurs en conser¬ vant les marchandises dans leurs bureaux sous prétexte qu’elles n’ont pas été réclamées, qu’on n’a pas trouvé la personne à laquelle elles étaient adressées ou sous tout autre prétexte ? Troi¬ sième abus. « Qui empêche enfin ces directeurs et chefs de bureaux d’être eux-mêmes impunément accapa¬ reurs, de charger leurs registres de l’envoi de marchandises par un être imaginaire à un être également idéal et de conserver ces marchan¬ dises dans leurs bureaux en alléguant toujours qu’ils ne savent à qui les remettre? Quatrième abus. « J’ai, dans mon tribunal, une affaire qui pré¬ sente peut-être l’exemple de plusieurs de ces abus. Un marchand demeurant à ..... envoie à un autre demeurant à ..... des marchandises par un roulier. Ce roulier, chez lequel ces mar¬ chandises ont été saisies, répond qu’elles ont été déposées par..... pour être remises à ..... mais il ne peut en justifier parce qu’il n’est pas d’usage de prendre des précautions à cet égard; il n’a pas fait de déclaration parce que la loi ne [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. i 13 brumaire an ü 233 f 3 novembre 1793 le lui ordonnait pas comme roulier; et les mar¬ chandises restent chez lui parce qu’elles ne sont pas réclamées et que l’ acheteur ne se trouve même pas. Quel est le coupable dans cette affaire? Est-ce le vendeur? Est-ce l’acheteur? Est-ce le roulier? Et peut-être le sont-ils tous. « Il faut nécessairement parer à ces abus pour l’avenir, et ils ne se renouvelleront plus : 1° si on astreint les rouliers, messagers et com¬ missionnaires à tenir des livres de chargements des marchandises avec indication de leurs qua¬ lités et quantités, des lieux de leurs charge¬ ments et déchargements et des noms des per¬ sonnes qui les auront envoyées et de celles auxquelles elles seront adressées; « 2° Si on les astreint à faire leurs déclara¬ tions de ces marchandises avec les mêmes indica¬ tions que dessus, huitaine après leur arrivée à leur destination dans les cas où elles n’auront pas été retirées par les propriétaires ; « 3° Si, quinzaine ou un mois au plus après ces déclarations et dans le cas de non réclama¬ tion, les commissaires aux accaparements sont autorisés à vendre ces marchandises, les deniers restant déposés dans la caisse de la municipalité à la conservation des droits de qui il appar¬ tiendra, les frais de vente préalablement préle¬ vés sur ces deniers. « L’article 10 de la loi du 26 juillet demande aussi, pour son complément, une disposition additionnelle. Il astreint les négociants et mar¬ chands à mettre, huit jours après la publication de la loi, à l’extérieur de leurs magasins, entre¬ pôts ou boutiques, une inscription qui annonce la nature et la quantité des marchandises et denrées de première nécessité. Mais ces maga¬ sins, entrepôts et boutiques éprouvent journel¬ lement, pour l’entrée et la sortie des marchan¬ dises, des variations en plus ou en moins, en sorte qu’à peine la première inscription est mise qu’on ne peut plus en constater la sincérité. Ne faudrait-il donc pas astreindre les négociants et marchands à renouveler cette inscription au moins tous les mois, sous peine d’être réputés accapareurs? Observations sur la loi du maximum. « Les marchandises de dernière qualité et malsaines sont vendues au maximum du prix déterminé. Pour celles de première qualité, des marchands se permettent même de plaisanter de demander si on veut du maximum et d’attri¬ buer, à la taxe des denrées et marchandises, le déficit des bonnes et la mauvaise qualité de celles qu’ils exposent en vente. « Il est infiniment urgent de mettre un terme à ces brigandages, à ces actes contre-révolu¬ tionnaires. Observations sur quelques articles de la loi rela¬ tive à V institution des jurés. « La liste des jurés de jugement est signifiée à l’accusé, le premier jour de la quinzaine dans laquelle il est jugé. « Il peut exercer 20 récusations sans donner de motif. « Chaque juré fait sa déclaration hors la pré¬ sence du public. « Ces trois dispositions sont trop dangereuses pour pouvoir subsister dans un état républi¬ cain. « L’accusé 'qui connaît ses jurés plusieurs jours avant son jugement a le temps d’employer tous les moyens de séduction, et il n’y a malheu¬ reusement eu que trop d’accusés auxquels ces moyens ont réussi : je voudrais que l’accusé ne connût ses jurés que vingt-quatre heures avant son jugement. L’accusé qui peut exercer 20 récusations sans motif, les exerce toujours sur les citoyens dont l’énergie, l’impassibilité et le patriotisme sont connus; et il parvient ainsi à ne composer le jury que de citoyens faibles ou dangereux : je voudrais qu’il ne pût récuser personne sans motif fondé. « Enfin le juré mal intentionné, qui opine en secret, n’est retenu par aucun frein, je voudrais que les jurés opinassent à haute voix et en pu¬ blic : l’homme, fort de sa conscience, soit qu’il opine en secret, soit qu’il opine publiquement, n’opinera jamais contre le vœu qu’elle aura ma¬ nifesté ; et le respect humain retiendra l’homme mal intentionné, ou il se démasquera et sera proscrit de la société. Observations sur Varticle 10 de la loi du 17 sep¬ tembre contre les gens suspects. « L’article 2 de cette loi ne réputé gens suspects que ceux soupçonnés ou convaincus d’incivisme; quelques personnes, en rappro¬ chant les articles de l’article 10, en consultant la lettre plutôt que l’esprit de la loi, et en con¬ fondant deux articles qui doivent être parfai¬ tement distingués, soutiennent que l’article 10 n’autorise les tribunaux civils et criminels à faire retenir en état d’arrestation, comme gens suspects, que ceux prévenus d’incivisme. « Elles sont évidemment dans l’erreur. « 1° Les tribunaux civils et criminels ordi¬ naires ne connaissent pas, strictement parlant, du civisme des individus : ils ne connaissent que des délits prévus par le Code pénal, par les codes de la police ou par quelques nouvelles lois. « 2° Un prévenu d’assassinat, de vol, d’escro¬ querie, d’accaparement ou de vagabondage est bien au moins dans le cas d’être fortement soupçonné d’incivisme. « Pour faire cesser toutes équivoques, je demande, citoyens représentants, que vous ajoutiez, dans l’article 10, et après ces mots : Les prévenus de délits, ceux-ci : de quelque nature qu’ils soient; et que vous terminiez l’article en vous en rapportant au surplus au patriotisme, à la justice et à l’humanité des juges. « En second lieu, les jugements rendus par les tribunaux civils et criminels seront-ils sujets à l’appel ou au recours au tribunal de cassation? Je ne le pense pas, mais l’article 10 ne s’explique pas sur ce point, et cette explication est indis¬ pensable. Observations pour garantir les directeurs des erreurs involontaires. « Depuis la promulgation du Code pénal, une foule de lois criminelles ont apporté des change¬ ments à ce Code, ou ont réprimé de nouveaux délits qui n’avaient pas été prévus, ou ont elles-mêmes éprouvé des changements, des additions et des interprétations. « Le fonctionnaire public chargé de faire exécuter les lois, doit les avoir toutes sous les yeux pour éviter des méprises funestes, pour ne 234 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j “93* pas prononcer en conformité d’une loi qui aura été révoquée par une loi subséquente, pour ne pas omettre de se conformer à une loi dont il n’aura pas connaissance. « Et il est impossible que les directeurs de jury soient exactement instruits de toutes les lois déjà existantes et de toutes les lois nouvelles. Il n’est guère plus facile que chaque directeur de jury fournisse aux frais d’une collection aussi.immense, surtout lorsqu’il n’est en exercice que pendant six mois. « Je demande donc que le ministre de la jus¬ tice soit tenu d’envoyer, dans le plus bref délai, à chaque directeur de jury, un exemplaire de toutes les lois criminelles qui ont paru depuis le 4 mai 1789 et qui sont encore en vigueur-, « 2° Qu’il soit également tenu de lui envoyer, aussitôt la promulgation, un exemplaire de chaque nouvelle loi criminelle ; « 3° Que cette collection reste dans le cabinet du directeur du jury et que le directeur sortant d’exercice soit tenu de transmettre ce dépôt intact à son successeur et d’en retirer décharge, « Salut et fraternité. « Vivier, membre de là société des J a-co bins. » IV. Pétition des citoyens de Neu ville -sur - Saône pour demander que le district de LA CAMPAGNE DE LYON SOIT DIVISÉ EN DEUX DISTRICTS DONT L’UN AURAIT POUR SIÈGE LA COMMUNE DE NEUVILLE (1) : Suit le texte de cette 'pétition d’après un docu¬ ment des Archives nationales (2). Aux citoyens représentants du peuple. « Citoyens représentants, « Les citoyens patriotes de Neuville, ainsi que ceux de tout le canton, n’ont pu voir sans frémir d’horreur et d’indignation le danger imminent qu’a couru la liberté par la rébellion récente de la ville de Lyon. Aussi, depuis le 29 mai, les patriotes de Neuville ont montré toute l’énergie qu’on pouvait attendre d’un peuple amateur de la liberté, et qui a juré haine et mort à tout ce qui porte l’empreinte de contre-révolution, ne voyant dans nos devoirs que la soumission aux lois. Respect des personnes et des propriétés. Que n’avons-nous pas eu à soutenir! Tout ce que peut imaginer la séduc¬ tion accompagnée des menaces les plus violentes, tout a été mis en jeu pour nous attirer dans un abîme de malheurs. Mais, méprisant souve¬ rainement tous ceux qui employaient de tels moyens, nous les avons toujours vus avec indi¬ gnation, et les avons renvoyés à la vengeance des (1) La pétition des citoyens de Neuville-sur-Saône n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 13 brumaire an II, mais en marge du document des Archives, on lit cette phrase : « Ren¬ voyé au comité de division, le 13 de brumaire, l’an II de la République. » (2) Archives nationales, carton Div bis 88- dos¬ sier Rhône, lois. La journée du 4 août en est une preuve mémorable. La ville de Lyon avait engagé, par des émissaires, la ville de Neuville à recevoir dans son sein une force armée lyonnaise suivie d’un juge civil et d’un agent militaire. L’an¬ cienne municipalité étant assemblée, quelques-uns de ses membres semblaient donner les mains au projet des Lyonnais qui était de faire de Neu¬ ville un poste avantageux et favorable à leurs projets liberticides. Les patriotes, indignés de voir l’abîme qu’on creusait sous leurs pas, se transportèrent sur-le-champ au nombre de 73 au lieu des séances de la commune, et arrêtè¬ rent par leur présence les effets qu’aurait pro¬ duits une connivence aussi criminelle. Aussitôt on tint différentes assemblées entre citoyens pour se préparer à la résistance contre les re¬ belles, et chercher à se mettre sous la protec¬ tion des administrateurs patriotes. On en vint à bout, et la présence de l’armée mit fin à toutes menées. « Les citoyens Dubois-Crancé, Gauthier et leurs collègues, bien convaincus de notre civisme, ne crurent mieux faire qu’en plaçant à Neuville l’administration du district provisoire de la campagne de Lyon. Quelle satisfaction n’éprou¬ vèrent pas les patriotes de Neuville en possé¬ dant dans l’enceinte de leur ville une adminis¬ tration qui servait d’égide et de rempart contre tous les mal intentionnés de l’arrondissement ! Si sa présence fut pour eux un sujet de joie, quelle douleur ne leur a pas fait éprouver son départ subit et inopiné. « Pour l’affermissement de la cause de la liberté, ne serait-il pas à propos, en divisant la force des administrations, d’en augmenter le nombre, ce qui ferait une grande rivalité, en cas qu’il y en eut quelques-unes d’entre elles qui voulussent à l’avenir se porter à des excès liberticides. 123 communes forment le district de la campagne de Lyon, et ces communes, par leur immense population, peuvent devenir un objet formidable par elles-mêmes. Ne serait-il pas convenable que l’administration fût divi¬ sée en deux parties, dont l’une siégerait à Neu¬ ville, et l’autre où il plairait aux représentants du peuple la placer, sous le nom de district de l’endroit où elle tiendrait ses séances. D’ailleurs, les patriotes de Neuville désirent de n’avoir plus aucun rapport avec tout ce qui porte le nom lyonnais. L’administration d’un district serait d’autant mieux placée à Neuville, que tout sem¬ ble y être préparé pour recevoir une administra¬ tion centrale : le local, la salubrité de l’air, l’issue de la rivière, la commodité journalière de plu¬ sieurs diligences, tout enfin semble concourir au bien et à l’avantage des communes qui l’envi¬ ronnent, et dont la population est considérable. Nous laissons le tout au discernement, à la pru¬ dence et sagesse des représentants, qui voudront bien prendre en considération notre demande renfermée dans la présente adresse. La ville de Neuville, naturellement révolutionnaire, renfer¬ mant dans ses murs une administration qui aura les mêmes sentiments, sera le rempart con¬ tre tous les projets des malveillants de l’arron¬ dissement, et ferez justice. « A Neuville-sur-Saône, le 22 octobre 1793, l’an II de la République française, une et indi¬ visible. « Nota. — Si la Convention a égard à la péti¬ tion des Jacobins de Neuville, elle est priée d’ob» server que les communes de Sathonay, Mion-