{Couvention natiouale.] AUCH1VES PARLEMENTAIRES. } î'nSveSr*6 &59 loi aussitôt que je l’aurais désiré, parce que Bourzolles n’était plus dans la maison d’arrêt, vous en connaîtrez bientôt les motifs et l’auteur. En conséquence, je donnai sur-le-champ un réquisitoire au commandant de la gendarmerie pour l’arrêter et le conduire provisoirement dans les prisons de cette ville, comme aussi pour mettre les scellés sur ses papiers. « Je vous transmets, citoyen ministre, copie de mon réquisitoire et du procès-verbal de la gendarmerie. Le lieutenant m’ayant rendu compte de sa mission avant-hier au soir 28 du courant, à 6 heures, et m’ayant dit qu’on croyait que cet individu était du côté d’Agen, département du Lot-et-Garonne j’écrivis de suite à l’accusateur public de ce département, our l’inviter à faire faire perquisition de cet omme dont je lui envoyai le signalement, et de le faire traduire dans nos prisons s’il parve¬ nait à le faire arrêter. Je ne puis savoir encore quel sera le fruit de ses recherches, mais je vous en instruirai d’abord que j’en aurai eu connais¬ sance. « Quant aux renseignements que vous me de¬ mandez dans votre lettre, voici comment j’ai procédé : j’ai attendu que la gendarmerie fût partie avant de parler de rien, afin que personne ne pût avertir cet accusé du décret lancé contre lui, avant que la gendarmerie l’eût arrêté, s’il était possible; quand j’ai cru que cela devait être fait, j’ai alors fait enregistrer le décret au tribunal criminel et je me suis ensuite rendu au département. J’ai présenté aux administra¬ teurs les observations et les questions que vous verrez dans mon écrit ci-joint, en date du 28e jour du courant, et qui me paraissent rem¬ plir le but du décret et du vôtre. Je viens de recevoir la réponse des administrateurs avec les pièces qu’ils ont produites à son appui. Il serait inutile de vous faire des observations sur cela, parce que vous verrez facilement celles qui se présentent. Voilà les seules que je crois devoir vous faire, parce qu’elles tombent sur des faits : « Bourzolles ayant été mis dans la maison d’arrêt sur une première dénonciation, m’a longtemps harcelé pour le faire sortir, ce que j’ai toujours refusé, et ce que je devais refuser sous tous les rapports. Ne pouvant pas réussir auprès de moi, il fit des tentatives vis-à-vis du citoyen Lagrimadie, officier municipal et chargé de la police des prisons; il prétexta quelque ma¬ ladie, et il paraît même par les pièces que je vous envoie, qu’il parvint à obtenir un certificat de l’officier de santé. L’officier municipal, sur ce certificat, fruit de la surprise, le laissa sortir, comme vous le verrez par l’ extrait du livre de la geôle ci-joint. Cet accusé, bien loin de demeu¬ rer caché, comme il aurait dû le faire, s’il eût voulu qu’on ajoutât foi à sa feinte maladie, se promena sur toutes les places publiques, et eut même l’audace de venir souvent aux séances publiques du département. Les administrateurs témoignèrent hautement leur indignation de ce scandale, ils en parlèrent à l’officier de police des prisons; mais Bourzolles n’en resta pas moins en liberté. « Sur ces entrefaites, un des administrateurs fait une seconde dénonciation contre lui; le département s’occupait d’y donner suite quand un courrier de la Vendée arriva porteur de mau¬ vaises nouvelles et demandant des renforts. L’administration laisse cet objet de côté pour s’occuper de l’autre, dont le résultat fut la levée d’un escadron de gendarmerie qui partit bientôt après, ainsi que quelques bataillons d’infante¬ rie. Les occupations que donnèrent ces levées lui firent perdre de vue la seconde dénonciation pour quelques jours; mais les citoyens Treilhard et Mathieu, commissaires de la Convention, en ayant été instruits, ramenèrent l’attention du département sur cette dénonciation qui me fut renvoyée par un de ses arrêtés. Je fis procéder sur-le-champ à l’interrogatoire de l’accusé et des témoins (deux gendarmes) qui devaient partir le lendemain pour la Vendée, et comme le tri¬ bunal criminel, était incompétent pour con¬ naître d’une accusation pour fait de contre-révolution, sur mon réquisitoire, le tribunal ren¬ voya à son tour la dénonciation au département pour être par lui procédé conformément à la loi du 10 mars 1793 et autres subséquentes. Le département renvoya à son tour devers la mu¬ nicipalité de Périgueux pour faire l’instruction qu’elle devait faire, comme chargée des fonc¬ tions de la police de sûreté générale. « Les choses restèrent dans cet état jusqu’au moment qu’en conformité du premier décret rendu sur cette affaire, je retirai les pièces pour vous les faire parvenir, de manière que je crois que la municipalité n’a fait aucune poursuite. Quand j’eus reçu cette seconde dénonciation, je demandai à l’officier de police des prisons où était Bourzolles, le prévenant que si je ne le trouvais pas dans la maison d’arrêt lorsque je voudrais le faire interroger, je ne m’en pren¬ drais qu’à lui. Il parvint à faire réintégrer la prison à Bourzolles, qui en sortit pour la seconde fois dès que le tribunal criminel se fut déclaré incompétent. Rien ne constate sur le livre de la geôle ni la réintégration ni la seconde sortie; mais le concierge m’a dit que c’était le même officier de police qui l’avait fait sortir. « Voilà tout ce que je puis vous en dire, et tous les renseignements que j’ai pu me procu¬ rer. Si vous croyez que je puisse faire autre chose, veuillez me faire part de vos observations, et croyez que mon zèle secondera toujours le vôtre. Je vais m’occuper de la levée des scellés appo¬ sés sur les papiers de cet homme. Si je trouve quelque chose d’intéressant, je vous le ferai par¬ venir tout de suite. Je vais aussi écrire à Bor¬ deaux pour tâcher de découvrir si cet accusé n’y serait pas réfugié. Enfin, vous pouvez être assuré que je ne négligerai rien pour parvenir à l’arrestation de cet individu. i Pièce n° 4. Copie de la lettre adressée au ministre de la jus¬ tice par le citoyen Lalande, commissaire procu¬ reur général syndic du département de la Dor¬ dogne, le 2e jour du 2e mois de la République française (1). « Citoyen ministre, « Aussitôt que le département a eu connais¬ sance par l’accusateur public près le tribunal criminel, du décret de la Convention qui frappe le ci-devant comte Coustain -Bourzolles, et de votre lettre à lui écrite pour la traduction de ce conspirateur au tribunal révolutionnaire, il (1) Archives nationales, carton F74613, dossier Bourzolles. »6Q [Convention nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES, } f‘ brumaire an-H 1 j i. t novembre 1793 s’est empressé de recueillir et de procurer à ce fonctionnaire public tous les renseignements qu’il était en son pouvoir de lui fournir sur ce mauvais citoyen. Le rapport et l’arrêté ci-joints vous; donneront une preuve satisfaisante de cette vérité,, en même temps qu’ils vous con¬ vaincront de l’activité qu’a toujours mise l’ad¬ ministration dans la poursuite du jugement de cet anti-républicain. Ils vous instruiront égale¬ ment que si, en vertu des décrets des 11 et 27 mars, la procédure instruite contre ce contre-révolutionnaire, ne fut pas envoyée au tribunal extraordinaire, c’est que le 10 avril suivant, époque où ces décrets parvinrent officiellement au département de la Dordogne, les pièces avaient été envoyées à la Convention, confor¬ mément, à l’article 6 de la loi du 11 août 1792. » III. Discours prononcé par le citoyen David (1), DANS LA SÉANCE DU 17 BRUMAIRE, L’AN II de la République. (Imprimé par ordre , de la Convention: nationale) (2). Les rois, ne pouvant usurper entièrement dans les temples la place delà Divinité, s’étaient emparés de leurs portiques; ils y avaient placé leurs orgueilleuses effigies, sans doute afin que les adorations des peuples s’arrêtassent à eux avant d’arriver jusqu’au sanctuaire. C’est ainsi qu’accoutumés à tout envahir, ils osaient dis¬ puter à Dieu même les vœux et l’encens. Vous avez renversé ces insolents usurpateurs; ils gisent en ce moment étendus sur la terre qu’ils ont souillée de leurs crimes,, objets de la risée des peuples enfin guéris d’une longue superstition. Citoyens, perpétuons ce triomphe de la raison sur les préjugés; qu’un monument élevé; dans l’enceinte de la commune de Paris, non loin de cette même église dont ils avaient fait leur pan¬ théon, transmette à nos neveux le premier tro¬ phée élevé par le peuple souverain de son immor¬ telle victoire sur les tyrans ; que les débris tron¬ qués de leurs statues, confusément entassés, forment un monument durable de la gloire du peuple et de leur avilissement., Que le voyageur qui parcourra cette terre nouvelle, reportant dans sa patrie des leçons utiles au peuple, dise : « J’avais vu dans Paris des rois, objets d’une avilissante idolâtrie; j’ai repassé, ils n’y étaient plus (3). Je propose de placer ce monument, composé des débris amoncelés de ces statues; sur la place dû Pont-Neuf, et d’asseoir au-dessus V image du peuple géant, du peuple français*. Que cette image imposante par son; caractère de force et de simplicité porte écrit en gros caractères sur son front lumière; sur sa poitrine, nature, vérité; ( 1 ), Le discours de David n’est-pas mentionné au procès-verbal de la séance du 17 brumaire an II; mais on en trouve de longs extraits, quand on ne le trouve pas en entier, dans les comptes, rendus de cette séance publiés par les divers journaux de l’époque, (2) Bibliothèque nationale i 3 pages in-8° LersS, n° 554; Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 415, p. 243). (3) Applaudissements, d’après le Moniteur uni¬ versel [n° 49 du 19 brumaire an II (samedi 9 no¬ vembre 1793), p. 200, col. 1]. sur ses. bras, force; sur ses mains, travail. Que, sur l’une de ses mains, les figures de la liberté et de l’égalité, serrées l’une contre d’autre, et prêtes à parcourir le monde, montrent à tous qu’elles ne reposent que sur le génie et la. vertu du peuple. Que cette image du peuple debout tienne dans son autre main cette massue ter¬ rible et réelle, dont celle de T Hercule ancien ne fut que le symbole. De pareils monuments sont clignes de nous ; tous les peuples qui ont adoré la liberté, en ont élevé de pareils : ils gisent encore non loin du champ de bataille de Granson, les ossements des esclaves et des tyrans qui voulurent étouffer la liberté helvé¬ tique; ils sont là élevés en pyramide, et mena¬ cent les rois téméraires qui oseraient violer le territoire des hommes libres (I). Ainsi dans Paris les effigies que la royauté et la superstition ont imaginées et déifiées pen¬ dant quatorze cents ans seront entassées et formeront une montagne qui servira de pié¬ destal à l’emblème du peuple., Compte rendu du Moniteur universel (2). David. Les rois ne pouvant usurper dans; lest temples la place de la. Divinité, etc. (Suit un long extrait du discours que nous reproduisons ci-dessus d'après le document im¬ primé par ordre de la Convention. ) David lit un projet de décret conforme aux vues développées dans son discours. (1) Voy. ci-contre, note 3. (2) Moniteur universel [n° 49 du 19 brumaire an II (samedi 9 novembre 1793), p. 200, col. 1]. D’autre part, Y Auditeur national [n° 412 du 18 bru¬ maire' an II (vendredi 8 novembre 1793), p. 6] et le Mercure universel [18 brumaire an II (vendredi 8 novembre 1793), p, 125, col. 2] rendent compte du discours de David dans les termes suivants ! I. Compte rendu de V Auditeur national. Sur le rapport dé David, fait au nom du comité d’instruction publique, la Convention a rendu un décret portant : « 1° Que la victoire du peuple sur les tyrans sera consacrée par un monument colossal; « 2° Que ce monument sera placé sur le Pont-Neuf, à la; pointe où se fait, la réunion des deux bras de rivière; « 3° Que les débris des statues des rois serviront de piédestal au peuple qui les écrasera ; « 4° Que le peuple français sera représenté par une statue colossale en bronze, qui portera sur son front le mot lumière, sur sa poitrine, vérité, susses bras, force et courage. » II. Compte rendu du Mercure universel . David fait un rapport sur l’érection d’un colosse représentant le peuple français géant, monté sur les débris des tyrans et de la superstition. Deux de ces colosses seront dressés dans Paris, l’un sur le Pont-Neuf et l’autre à la pointe de l’ île Saint-Louis. Sur le front de la statue seront écrits ces mots en gros caractères : lumière, sur ses bras, force et courage, et sur son estomac, nature et vérité. Dans une de ses