[Assemblée natioeale.] ARCHIVAS PARLEMENTAIRES. [14 octobre 1790.] 'aide de cette invention, il a fait remonter la Moselle à un grand bateau chargé. Appelé par M. Malouet à Toulon, il l’a employée avec succès au curementdu bassin. Il a depuis, et par ordre du gouvernement, donné à sa machine une plus grande perfection. Dans toutes les circonstances, ses expériences, ses travaux, ses voyages ont été à ses frais. Sa fortune n’était pas considérable : il a trouvé des amis et des secours ; sa famille l’a cautionné; enfin sa dépense s’élève à 200,000 livres. Vous lui avez déjà accordé une gratification provisoire de 3,000 livres. Votre comité se borne à vous proposer d’ordonner que cette machine sera gravée, et laisse à votre sagesse à déterminer la somme queM. l’abbé de Mandre est endroit d’obtenir de votre justice. M. l’abbé Grégoire. Je propose d’allouer une indemnité de 90,000 livres à M. de Mandre. M. Rewbell. La première chose à faire serait, je crois, de s’assurer de l’utilité de la découverte. M. Camus. J’observe qu’il n’y a d’affecté aux gratifications qu’un crédit de 2,000,000, sur les-uels les veuves et les enfants des citoyens tués evant Nancy, les vainqueurs de la Bastille et autres ont des droits. Je propose donc de renvoyer M. l’abbé de Mandre au comité des pensions en lui accordant une nouvelle provision de 3,000 livres. jSft. Dionfs propose un projet de décret qui est «adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale a décrété que la machine du sieur abbé de Mandre sera renvoyée à l’académie des sciences pour eu constater la nouveauté et l’utilité ; que le rapport de l'académie des sciences sera remis an comité des pensions, et que cependant il sera accordé au sieur abbé de Mandre une nouvelle provision de 3., 000 livres. » M. le Président. M. de Menou a la parole pour rendre compte de l’affaire de quatre officiers du régiment de Bretagne. M. de Ifenou, au nom du comité militaire. Au mois d’août 1789 une chanson courut parmi les officiers du régiment de Bretagne, en garnison à Briançon. 11 s’agissait d’une aventure galante. M. Morel, sous-lieutenant, se crut désigné par cette expression géant informe. Le lendemain il trouva des vers significatifs sous sa serviette. Il s’en plaignit. M. de Coëtlosquet, colonel, assembla les officiers, fit déclarer la chanson déshonorante et exigea ce serment : « Je jure par l’honneur, et par le respect qu’on doit aux dames, que je ne suis pas l’auteur de la chanson. » On découvrit que M. d’Honières l’avait faite. Le colonel lui demanda sa démission et lui fit donner sa parole d’honneur de ne pas dire la cause de sa retraite et de ne pas se venger de M. Morel. M. d’Honiè-r,es se retira. Une correspondance, violée pendant Amp maladie très dangereuse, apprit le secret qu’il avait juré de garder, et les lieutenants de-rnandèrent que cet officier �entrât au régiment. JLe colonel punit cette demande, en faisant enfermer au secret MM. Roubens et Bol lard frères, lieutenants. L’un de MM. Bollard était depuis longtemps malade, le chirurgien-major lui ordonna des bains de rivière : le colonel fit jeter M. Bollard dans un cachot. Après une détention de neuf mois, ces trois officiers obtinrent leur liberté en donnant leur démission. Tels sont les faits de cette affaire. Je ne me permettrai aucune réflexion ; j’observerai seulement que si la force publique repose sur la subordination, les chefs qui abusent de leur autorité ne vous paraîtront pas exempts de reproches. Le comité militaire vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que le roi sera prié d’ordonner la formation d’une cour martiale, qui entendra les réclamations des sieurs Michel Bonnard, Gabriel Bonnard, Raphaël Rou-bin et Alexandre d’Honières, officiers au régiment d’infanterie de Bretagne, et les jugera suivant les nouvelles formes décrétées pour les délits militaires. » {Adopté.) M, Gosstn, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance du mercredi 13 octobre ru soir. Un membre observe que le premier des articles décrétés dans cette séance, sur les indemnités dues aux propriétaires laies des dîmes inféodées , n’est point exactement rédigé, et qu’il s’y trouve une disposition au delà 4e cc qui a “été décrété. M. Chasset, rapporteur du comité ecclésiastique, rend compte de cette circonstance, et l’Assemblée nationale, après avoir entendu la discussion des dispositions additionnelles, les adopte, «t ordonne que l’article sera définitivement rédigé dans les terjnes suivants : Art. 1er. « L’indemnité due aux propriétaires laïcs des dîmes inféodées, français ou étrangers, sera réglée sur le pied du denier vingt-cinq de leur produit pour celles en nature, et sur le pied du denier vingt pour celles réduites en argent par des abonnements irrévpcahles. m M. le Président, L'ordre du jour est la suite de la discussion dy projet de décret sur les biens nationaux à vendre ou à conserver , sur leur ad ■ ministration et sur l'indemnité de la dîme inféodée. M. Chasse*, rapporteur, donne lecture dés articles 5 à 1 7, du titre Y, qui sont adoptés, après une courte discussion, dans les termes suivants : Art-5. « Ceux à qui il appartiendra des dîme3 ecclésiastiques, qu'eux ou leurs auteurs auraient légalement acquises, et dont le prix aurait tourné au profil de l’église, auront droit à l’indefli nité. Art. 6. u Les propriétaires remettront dans le mois, à compter de la publication du présent décret, sous le récépissé du secrétaire, au secrétariat du district où se percevait la majeure partie de leurs dîmes, leurs baux et leurs titres de propriété; au surplus, les dispositions des articles 3, 6, 7 et 8 du titre JII du décret sur les droits féodaux auront leur exécution pour les dîmes inféodées. Art. 7. v S’il n’existe aucun bail aux termes de l’article 5, ils remettront, avec leurs titres de propriété, un état des pièces de terres produisant des fruits décimables, en les indiquant par tenants et aboutissants, et en dénommant les possesseurs. 616 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 octobre 1790.] [Assemblée nationale.] Art. 8. Lorsqu’il y aura des baux semblables à ceux ci-devant mentionnés, le directoire du district prendra les observations des municipalités, donnera son avis; ensuite, le directoire du département statuera ce qu’il appartiendra; le tout se fera dans deux mois après l'expiration du délai ci-devant fixé. Art. 9. « Dans le cas où il n’y aurait aucuns baux, tels que celui ci-devant mentionnés, il sera procédé à une estimation par experts, conformément aux articles 13, 14, 15, 16 et 17 du décret du 3 mai, concernant les droits féodaux; pour cette estimation, un des experts sera choisi par le procureur-syndic du district, et l’autre par le propriétaire; s’il est besoin d’un tiers expert, il sera choisi par le directoire du département. L'estimation faite, le directoire du district prendra les observations des municipalités, donnera son avis, et le directoire du département statuera ce qu’il appartiendra. Art. 10. « Lors du règlement de ladite indemnité, déduction sera faite sur la valeur de la dîme du capital de la portion congrue, même de ce qui est payable pour cette année dans les six premiers mois de 1791 ; savoir : jusqu’à concurrence de 1,200 livres pour les curés, et de 700 livres pour les vicaires actuellement existants. 11 sera pareillement fait déduction du capital et de toutes les autres charges actuelles relatives au culte divin, même des réparations; mais ces déductions n’auront lieu que dans le cas où les dîmes inféodées étaient tenues de ces charges subsidiairement, et ar insuffisance de celles ecclésiastiques et des iens qui y étaient sujets, ou lorsqu’elles les supportaient concurremment, soit avec celles-ci, soit avec lesdits biens. Les mêmes déductions n’auront lieu que jusqu’à concurrence de ce dont les dîmes inféodées auraient pu être tenues après avoir épuisé les dîmes ecclésiastiques et lesdits biens. Art. 11. « Ceux auxquels il a été fait des abandons de biens-fonds, à condition d’acquitter la portion congrue, ou d’autres charges relatives au service divin, en tout ou en partie, ou de payer quelques redevances ou réfusions, verseront dans trois mois, dans la caisse du district, le capital de ce dont ils étaient tenus ; savoir : sur le pied du denier vingt pour ce qu’ils devaient en argent, et pour ce qu’ils devaient en denrées sur le pied denier vingt-cinq, suivant l’estimation qui sera faite pour ces derniers objets ; ou bien ils seront tenus de renoncer auxdits biens-fonds; ce qu’ils opteront dans le mois, à compter de la publication du présent décret; à défaut de quoi lesdits biens seront dès lors déclarés nationaux, et mis en vente sans délai . Art. 12. « A l’égard de ceux auxquels il a été fait des abandons de dîmes aux conditions mentionnées dans l’article précédent, ils seront tenus de déduire sur leur indemnité le capital des charges qui leur auront été imposées sur le même pied que ci-dessus. Art. 13. « Il ne sera accordé aucune indemnité pour les I dîmes insolites dont les propriétaires ne justifieraient pas d’une possession de 40 ans. Art. 14. « Dans les dîmes inféodées dont l’indemnité doit être acquittée des deniers au Trésor public, ne sont point comprises celles qui, quoique tenues en foi et hommage, seraient justifiées par titres être dues comme le prix de la concession du fonds; en ce cas, les redevables seront tenus de les racheter eux-mêmes, suivant le mode et le taux réglés pour le champart par le décret du 3 mai dernier, concernant les droits féodaux; et jusqu’au rachat, ils seront tenus de les payer. Art. 15. « Les propriétaires des dîmes inféodées qui prétendraient être autorisés à percevoir des droits casuels lors des mutations des héritages sujets à la dîme, ne pourront les faire entrer dans leur indemnité; mais ils continueront de les percevoir, le cas échéant, contre les redevables de la dîme, sauf à ces derniers leurs exceptions et défenses au contraire, et sauf à eux à racheter lesdits droits, en cas qu’ils y fussent assujettis. Art. 16. « Les ci-devant propriétaires de fiefs qui étaient autorisés par la loi, ou par titres, à percevoir des droits casuels en cas de mutation de la propriété de la dîme inféodée, seront indemnisés de ces droits par les propriétaires de la dime, suivant le taux et le mode réglés, et en se soumettant à tout ce qui est prescrit par le décret du 3 mai dernier, concernant les droits féodaux. Art. 17. « Si la dîme a été cumulée avec le champart, le terrage, l’agrier ou autres redevances de cette nature, ces droits fonciers ne seront dorénavant payés qu’à la quotité qu’ils étaient dus anciennement : en cas qu’on ne puisse découvrir l’ancienne quotité, elle sera réduite à celle réglée par la coutume ou l’usage des lieux. » M. le Président lève la séance à près de dix heures du soir. ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 14 OCTOBRE 1790. Nota. Nous annexons à la séance de ce jour, ainsi que cela a été fait dans les procès-verbaux de l’Assemblée nationale, le document qui suit : Rapport de MM. DuvEYRIER et B.-G. Cahier, commissaires nommés par le roi , pour V exécution des décrets de l'Assemblée nationale , relatifs aux troubles de Nancy, remis à M. de La Tour-du-Pin, ministre de la guerre, le jeudi 14 octobre 1790. (Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale.) au roi. Sire, Chargés par Votre Majesté de l’exécution des