<5030 [Assemblée nationale.] ARCHIVES .PARLEMENTAIRES . [14 septembre 1791.] 1Æ. lie Chapéller. Messieurs, les comités de Constitution et de jurisprudence criminelle ont (été dhargés par vous hier de présenter aujourd’hui <à ï’Assemblée ses vues sur Y amnistie demandée •par te Toi et de lui apporter, à cet effet, un projet de décret ; je n’en suis pas porteur en ce moment, parce que comme le comité de jurisprudence n’y était pas, il n’a pu préparer son travail ; mais je prie l’Assemblée de me prêter un moment d’attention pour que je lui rende compte de la députation qu’elle a envoyée hier auprès du roi. Messieurs, Nous avons remph auprès du *r©i émission, 'que vous nous aviez donnée, de porter à Sa Majesté le décret que vous venez de prononcer. En lui remettant ce décret, nous avons rendu au roi le sentiment qu’avait excité dans l’ Assemblée nationale le message qu’il lui avait envoyé. Nous avons dit au roi ce peu de mots : « Sire, l’Assemblée nationale a entendu la lecture du message que Votre Majesté lui a adressé ; elle a souvent interrompu cette lecture par des applaudissements répétés, seuls capables d’exprimer ee sentiment auquel le peuple français a, dçpuis longtemps, accoutumé ses rois. « L’Assemblée nationale, partageant les désirs de Votre Majesté, d’éteindre toutes les haines, de finir toutes les dissensions, et voulant marquer cette grande époque par tout ce qui peut la rendre solennelle, s’est empressée de prononcer un décret qui efface toutes les traces d’une Révolution désormais finie : elle nous a chargés d’apporter ce décret à Votre Majesté. » Nous avons lu au roi votre décret. Le roi, d’un ton de sensibilité très remarquable, a répondu à peu près en ces termes : « Je me ferai toujours un plaisir et un devoir de suivre la volonté de la nation, quand elle me sera connue. Je suis bien sensible à l’empressement qu’a eu l’Assemblée nationale de déférer au désir que je lui ai témoigné de faire un acte de bienfaisance. « Ce jour sera mémorable; je souhaite qu’il mette fin à la discorde, qu’il réunisse tout le monde, et que nous ne soyons qu’un. » ( Vifs applaudissements.) Le roi a ajouté : « Je suis instruit que l’Assemblée nationale a rendu ce matin un décret relativement au cordon bleu. Cette décoration n’avait d’autre prix pour moi que de pouvoir la communiquer. Je suis déterminé à quitter le cordon bleu; je vous prie de faire part de ma résolution à l’Assemblée. » ( Applaudissements .) La reine et les enfants du roi se montraient à la porte de la chambre du conseil, où votre députation était reçue par Sa Majesté. Le roi s’est tourné vers eux, en disant: « Voila la reine et ma famille qui partagent mes sentiments. » Ra reine, s’avançant vers nous avec empressement, a dit : « Nous accourons tous; mes enfants et moi nous partageons tous les sentiments du roi. » ( Applaudissements .) (L’Assemblée ordonne que ce compte rendu sera inséré dans le procès-verbal.) M. -le Président. Je reçois à l’instant la lettre' que voici ; . « Monsieur de Président. « J’ai l’honneur de vous prévenir qu’une dé-Eutation composée de 24 membres de l’assem-lée électorale doit se rendre ce matin àd’As-semblée nationale pour lui communiquer un objet de la plus haute importance. « Je vous envoie, Monsieur le Président, copie d’une adresse qui sera présentée à l’Assemblée nationale. » Voici cette adresse : « Messieurs, un grand attentat a été commis hier contre la liberté publiqme.JIn huissier s’est introduit dans le sein électoral du département de Paris pour mettre à exécution un décret de .prise de eorps rendu contre -un 1 de ses membres, ■attisera même de nos bureaux ; il s’est permis ■de consulter le président sur les moyens de remplir sa mission. Si un électeur à son poste est troublé dans ses fonctions et arraché du milieu d’une assemblée nommée pour élire les représentants du peuple, les droits de la souverai-netèsont violés. « Nous vous dénonçons cet attentat. . . » M. sLanjuinaSs. La question se réduit à savoir si un huissier peut exercer ses fonctions dans une assemblée électorale. Je demande le renvoi au comité de Constitution. (Ce renvoi est décrété.) L’ordre du jour est la suite de la discussion de l’affaire d' Avignon et du Comtat Venaissin (1). M. Pétion. Messieurs, il est temps de mettre fin à une affaire qui occupe depuis longtemps l’Assemblée nationale. Il est temps de mettre fin à des exeès qui désolent Avignon et le Comtat, et ne nous le dissimulons pas, Messieurs, toute espèce de parti qui ne serait pas absolu, qui ne serait pas définitif, ne tendrait qu’à perpétuer les troubles et la guerre civile dans ces contrées. Il est donc indispensable que l’Assemblée prenne dans le moment actuel une résolution définitive. Vous étiez, Messieurs, sur le point de prendre cette décision, lorsqu’un des préopinants est venu faire un incident qui ne tend à rien moins qu’à rendre l’affaire interminable. Il n’a pu se déguiser à lui-même que la décision du fond de l’affaire se trouvait éloignée, si l’on entrait dans la discussion d’un incident qui lui est si étranger, et qui, j’ose le dire, n’n été imaginé que pour éluder un parti définitif; mais sans doute l’Assemblée ne donnera pas dans le piège qui lui a été tendu. Vous avez tous entendu les déclamations de M. l’abbé Maury ; vous avez vu que ses inculpations scandaleuses ont été repoussées avec autant d’énergie que de vérité par les commissaires médiateurs. Ces allégations étaient absolument vagues. On vous a présenté des faits qui n’avaient d’autre authenticité que des gazettes, gazettes qui étaient vendues au parti antirévolutionnaire. Je vais plus loin : il ne serait pas surprenant que M. l’abbé Maury, même sur certains faits, eût eu des indices dont il n’avait pas pu juger. Carne nous dissimulons pasque, dans un pays divisé en deux partis, on doit nécessairement s’attendre que ceux qui sont opposés au parti dominant font tous leurs efforts pour faire échouer tout ee que veut le parti dominant; mais en tout la majorité veut être .consultée, et on vous a remis les pièces authentiques qui re-� poussent, de la manière la plus victorieuse, toutes les allégations qui ont été faites dans cette tribune. Aucune des communes n’a réclamé, et (1) Voir ci-dessus, séance du 13 septembre 1791, p. 610.