[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES-gbrumalre 35 ' 1 î 99 op.tnhrA 1793. sous le nom d’institutions, de sociétés révolu¬ tionnaires, etc. Les coryphées de ces institutions ne sont point des mères de famille, mais des es¬ pèces de chevaliers errants, des filles émancipées, des grenadiers femelles qui se mêlent partout et causent des troubles. Je demande : 1° Que nul de l’un ou l’autre sexe ne puisse, sous peine d’être poursuivi comme perturbateur du repos public, contraindre un citoyen ou une citoyenne à se vêtir de toute autre manière que bon lui semble; 2° que le comité de Sûreté générale nous fasse un rapport sur les sociétés révolutionnaires de Paris. Ces propositions sont vivement applaudies. Les pétitionnaires s’écrient : « A bas les bon¬ nets ronges! A bas les sociétés de femmes ! Vive la Convention! etc. » V n membre. Le vœu de Fabre d’Églantine a été devancé par le comité de Sûreté générale. Instruit de ce qui s’est passé cette nuit, à Saint - Eustache, il a débbéré et Amar doit vous faire un rapport séance tenante. Fabre d’Églantine insiste pour que ses deux propositions soient mises aux voix. Elles sont adoptées sans qu’il soit néanmoins en rien dérogé aux décrets sur la cocarde na¬ tionale, le costume ecclésiastique et les tra¬ vestissements. Y. Compte rendu du Mercure universel (1). Des citoyennes de Paris sont admises. Elles demandent que la Convention réprime la société révolutionnaire des femmes qui prétendaient hier forcer les autres citoyennes à porter un bonnet rouge et des pantalons. Fabre d’Églantine. Le but de ces femmes révolutionnaires n’est pas ce qu’il paraît. Le fait est qu’après avoir obtenu le bonnet rouge, il y a une ampbation de demandes. Elles voudront obtenir la ceinture rouge et les pistolets, et ensuite, elles iront au pain comme on va à la tranchée. . Nos ennemis sont adroits et ce sera toujours aux femmes qu’ils s’adresseront pour fomenter des troubles. J’ai observé que ces femmes pertur¬ batrices ne sont point mères de famille; ce sont des chevalières errantes, des grenadiers femelles. Je demande qu’on ne puisse forcer qui que ce soit à se coiffer autrement qu’il le veut, sous peine d’être traité comme perturbateur du repos public. Basiré. Hier, il y eut du bruit à ce sujet dans l’église Saint -Eustache. Le comité de Sûreté générale s’occupe de cette affaire et Amar fera séance tenante un rapport à ce sujet. La Convention a décrété le principe proposé par Fabre, sauf rédaction. Une des 'pétitionnaires demande l’abolition des sociétés de femmes. C’est une femme, dit-elle, qui a fait le malheur de la France, et il ne faut point de femmes en société. (1) Mercure universel [9e jour du 2e-mois de l’an II (mercredi 30 octobre 1793), p. 477, col. 2]. Un membre demande le renvoi de cette péti¬ tion au comité de Sûreté générale comme me¬ sure de police. (Adopté.) AXXEXE %<> 2 A la séance de - la Convention nationale dn 8 brumaire an II (mardi 19 octobre 1903). Compte rendu, par divers journaux, de la discussion à laquelle donna lieu la pétition de la Société des Amis de la Eiberté et de l’Égalité, séant aux Ja¬ cobins (1). I. Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets (2). Le Président annonce qu’une députation de la société des amis de la liberté et l’égalité, séante aux Jacobins, demande à être admise à la barre pour entretenir la Convention d’un objet de la plus haute importance. L'orateur. Citoyens représentants, toutes les fois que la société des amis de la liberté et l’éga-lité éprouve des alarmes, elle vient les déposer dans votre sein. Ne vous en étonnez pas. Depuis que les traîtres n’ont plus d’agents parmi vous* nous sommes ici au müieu des vrai ; amis de la liberté. Vous avez fait tomber la tête du tyran, ses compbces ont scellé de leur sang impur l’unité, l’indivisibilité de la Eépubbque; vous avez créé un tribunal révolutionnaire et les cons¬ pirateurs ont frémi. Ce n’est point assez. Vous avez voulu que d’une main il dévoilât le crime et que, de l’autre, il le frappât du glaive de la loi. Cependant, des formes inutiles l’arrêtent* embarrassent sa conscience, et les traîtres res¬ pirent ; ils sont impunis, et le sang de nos frères égorgés, et la guerre civile qu’ils ont fomentée appellent la vengeance nationale sur leur tête. Nous demandons : 1° de débarrasser le tribu¬ nal révolutionnaire des formes qui entravent sa marche; 2° d’ajouter à l’organisation de ce tri¬ bunal la faculté qu’auront le'S jurés de faire cesser les débats dès que leur conscience aura acquis la conviction intime du fait. Les pétitionnaires sont admis aux honneurs de la séance. Leur pétition est convertie en motion par un membre de la députation de l’Ile-de-France. On demande le renvoi pur et simple de la pé¬ tition aux comités de Salut public et de législa¬ tion réunis. Ossçlin s’y oppose. Cette pétition, dit-il, a deux objets bien distincts ; le premier peut et doit être renvoyé à l’examen du comité de légis¬ lation; à l’égard du second, c’est différent, et voici comment. En créant le tribunal révolutionnaire, vous n’auriez point atteint votre but; ce tribunal serait vain si les instructions dont il est chargé, très importantes par leur nature, étaient entra-(1) Voy. ci-dessus, même séance, p. 22, le compte rendu de la même discussion d’après le Moniteur. (2) Journal des Débats el des Décrets (brumaire an II, n° 406, p. 118 et 120). 36 ■ [Convention nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 8 brumaire anl K ' 1 ) 99 np.t.ohrr» \ 799 vées de formes ridicules autant qu’inutiles. Je demande donc que vous décrétiez en principe que les jurés pourront, dès qu’ils auront l’intime conviction du fait, demander la clôture des dé-Jbats et passer au jugement. Sergent appuie cette proposition. Mais quel sera le mode de déclaration, de¬ mande un membre ? Et il propose le renvoi au comité de législation, au moins pour la fixation du mode. On s’oppose généralement au renvoi. Bourdon {de l’Oise). Observez, citoyens, que c’est une équivoque qu’on a donnée pour motif du renvoi à votre comité de législation. Beau¬ coup de citoyens ne font pas une distinction essentielle entre le mot de juré, qui désigne un ■“individu, et celui de jury, qui désigne une col¬ lection de jurés. Que vous a proposé la Société des amis de la liberté et de l’égalité? Ce n’est pas de faire fermer la discussion sur la demande d’un juré, mais sur la déclaration du jury que sa conscience est parfaitement éclairée. « Aux voix! » s’est-on écrié de toutes parts. Le renvoi est rejeté. La proposition d’Osselin est décrétée. Le rapport sur le second objet de la pétition sera fait dès demain. Osselin. Je demande maintenant que le dé¬ cret soit expédié sur-le-champ et envoyé au président du tribunal révolutionnaire. Cette motion est vivement applaudie et dé¬ crétée. Osselin présente la rédaction de sa motion. Robespierre. Le décret tel qu’il est rédigé ne me paraît pas suffisant. Il faut que votre loi mette le jury à portée de s’expliquer sur sa conviction. On peut décréter, par exemple, que quand un procès aura duré pendant trois jours, le président du tribunal criminel révolutionnaire ouvrira la séance suivante en demandant au jury s’il est suffisamment éclairé. Si la déclara¬ tion est négative, l’instruction se continuera jusqu’à ce qu’il intervienne une déclaration contraire rendue dans la même forme. Si vous ne vous exprimez pas avec cette précision, vous n’atteignez pas le but que vous vous proposez. Si vous rendez la loi dans ce sens, vous sauvez tous les droits des accusés et vous conciliez ce que vous devez à l’intérêt public, avec tous les scrupules que peuvent inspirer les accusés. On demande d’aller aux voix sur la proposi¬ tion de Robespierre. Osselin. Je renouvelle l’observation qui a été faite, que ce n’est pas la déclaration d’un juré qui ferme la discussion; mais celle du jury en masse. J’ajoute qu’il y a dans la motion de Robespierre une sorte de provocation laissée à la disposition du tribunal; et je remarque que ce sont les présidents des tribunaux cri¬ minels qui prolongent les débats. Laissez faire le jury; il saura bien rappeler à l’ordre le tri¬ bunal qui s’en écarterait. J’insiste sur la rédac¬ tion que j’ai proposée. Bai’ère. J’appuie la demande de Robespierre, et je crois que nous devons laisser au juge l’ac¬ tion de la procédure. Le jury reste assez libre en adoptant la motion de Robespierre. Il saura bien dire, sur la demande du président du tri¬ bunal, s’il est suffisamment instruit ou s’il ne l’est pas. Dans l’institution du jury, l’action procédurière est toute laissée au président, et vous devez conserver cette marche. Il en sera là comme à la Convention quand votre Prési¬ dent demande si l’on veut fermer la discussion. D’ailleurs, comment voudriez-vous introduire cette nouvelle formalité qu’un jury s’assemble¬ rait au milieu d’une salle pour discuter s’il est instruit ou s’il ne l’est pas. J’ajoute qu’il n’y a point de provocation, comme on vous l’a dit; mais seulement l’action nécessaire de la procédure dans la demande sui¬ vante faite par le président du tribunal : La reli¬ gion du jury est-elle suffisamment éclairée? Je vote de même que Robespierre. Osselin adopte ces observations et il présente une rédaction conforme. Elle est adoptée. II. Compte rendu de Y Auditeur national (1). Une députation de la Société des Jacobins est admise à la barre. L’orateur.. Toutes les fois que la Société des Amis de la liberté et de l’égalité connaît des alar¬ mes, elle vient les déposer dans votre sein. Ne vous en étonnez pas. Depuis que cette enceinte a vomi les ennemis du peuple, nous sommes ici au milieu des amis de la liberté et de l’égalité. Vous avez créé un tribunal révolutionnaire; vous l’avez chargé d’étouffer tous les partisans de la tyrannie; vous avez pensé que ce tribunal découvrirait d’une main et punirait de l’autre le crime; mais il se trouve assujetti à des formes interminables qui étouffent la conviction des jurés et paralyse les juges. Quand la vue d’un cadavre, percé de coups, imprime dans notre âme l’idée d’un assassinat, pourquoi n’en se¬ rait-il pas de même dans les crimes d’Etat. N’avons-nous-nous pas vu la dévastation portée dans toutes les parties de la France, la famine se traînant sur notre territoire, les villes détruites, les citoyens égorgés, la France opposée à la France? Tous ces délits ont-ils besoin d’être prouvés? Attend-on que les conspirateurs soient noyés dans le sang des patriotes? Le jour qui éclaire un crime d’Etat ne doit plus luire pour ceux qui en sont les auteurs. Vous avez le maxi¬ mum de l’opinion qui s’est prononcée. Si nous eussions succombé sous les efforts des conspirateurs, savez-vous quel sort on nous préparait? Jamais la foudre n’accompagna de plus près l’éclair. Nous demandons : 1° que vous débarrassiez le tribunal révolutionnaire des formes qui l’empêchent d’agir dans le sens ré¬ volutionnaire et qui étouffent la conviction; 2° que les jurés puissent faire cesser l’instruction, lorsqu’ils le jugeront à propos, en déclarant que leur conscience est suffisamment éclairée. Osselin convertit en motion la seconde de¬ mande des pétitionnaires et demande le renvoi de la première aux comités réunis de législation et de Salut public, pour en faire un rapport de¬ main. (1) Auditeur national [n° 403 du 9e jour du 2e mois de l’an II [mercredi 30 octobre 1793), p. 3].