138 (Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. | brumaire ?n !( J 113 novembre 1/93 veux 'pas qu'il te soit fait. Je crois que les rois sont aussi nuisibles et aussi contraires au bien et aux intérêts des peuples que les prêtres; je crois que les prêtres ne peuvent se régénérer dans la société qu’en quittant le célibat; je crois que tout individu qui fuit le mariage est un égoïste, est l’ennemi et des mœurs et de sa patrie; je crois que la société ne peut, et ne doit ni reconnaître, ni protéger un être sem¬ blable. Vive la République / Je dépose sur le bureau mes lettres de bache¬ lier, de prêtrise et je donne la démission de ma cure. Sonnet. Procès-verbal (1). District de OJiolet, canton de Montfaucon, muni¬ cipalité de Montfaucon, Procès-verbal de prise de possession de M. le curé de Montfaucon. Aujourd’hui dimanche, quatre juin mil sept cent quatre-vingt-douze, à dix heures du matin. Nous maire, officiers municipaux et notables de la paroisse de Montfaucon, prévenus par M. Sonnet, prêtre, nommé à la cure de cette paroisse, vacante par la démission de M. Chau¬ veau, ci-devant curé et dernier titulaire de la susdite paroisse, par le refus qu’il a fait de prêter le serment requis par le décret du 27 no¬ vembre dernier, sanctionné par sa majesté, ainsi qu’il résulte du procès-verbal de l’élec¬ tion dudit sieur Sonnet, en date du 25 mars, que ledit sieur était dans l’intention de prendre possession de la susdite cure et d’y faire les fonctions pastorales, pourquoi il nous aurait requis de nous réunir ce jour, heure de grande messe dans l’église paroissiale de ce lieu, à l’effet de recevoir son serment tel qu’il est pres¬ crit par l’article 38 du décret du 13 juillet, et le mettre en possession de ladite cure, conformé¬ ment à l’article 39 du même décret ; f§ Nous sommes réunis dans l’église paroissiale au devant de l’autel, où étant en présence du peuple et du clergé assemblés dans ladite église pour assister à la célébration de la grand’messe, avons donné lecture à haute voix du procès-verbal de l’élection et de la procla¬ mation dudit sieur Sonnet dudit jour 25 mars 1791, ensemble de ses lettres d’institution et visa qui lui ont été accordées par M. l’évêque du département, le vingt -quatrième jour du mois de mai, lesquels actes seront inscrits au long, à la fin du présent procès-verbal, ensuite nous avons reçu dudit sieur Sonnet son serment solennel par lequel ledit sieur Sonnet, la main levée, a prononcé et juré hautement de veiller avec soin sur les fidèles de la paroisse qui lui est confiée, d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout son pouvoir la Constitu¬ tion décrétée par l' Assemblée nationale et acceptée par le roi. Le serment ainsi prononcé d’une manière claire et intelligible, la messe paroissiale célébrée par ledit sieur Sonnet, nous en avons rédigé le présent procès-verbal, pour lui servir d’acte de prise de possession, conformément au susdit (1) Archives nationales , carton C 280, dossier 770. article 39 du décret sur la constitution civile du clergé. Fait et arrêté le présent procès-verbal sur le registre de notre municipalité, lesdits jour et ah que dessus, sur l’heure de dix du matin, et a, ledit sieur curé, signé avec nous. Claude -Germain Sonnet, curé de Montfaucon; Dupotjet, maire; Pierre Merand; Gau-tret, procureur de la commune ; Michelet, secrétaire. Le citoyen Curion (Carion), maire d’Isly, dé¬ partement de Saône-et-Loire, vient manifester la même abjuration du titre de prêtre. Il ne faut plus, dit-il, d’intermédiaire entre l’homme et l’auteur de la nature; son culte est dans la pra¬ tique des vertus, et son temple est dans nos cœurs (1), Suit V abjuration du citoyen Carion (2) : Le citoyen Carion, curé et maire d'Issy-V Evêque, à la Convention nationale. « Citoyens législateurs, « Il ne faut plus d’intermédiaire entre l’homme et la divinité, le temps est venu où elle nous parle elle-même et se manifeste à nos regards. Son langage est celui de la raison, son culte est dans la pratique des vertus et son temple est dans nos cœurs. Cette vérité, légis¬ lateurs, n’est plus un mystère, consacrez-la par un décret, et dès ce jour tous les Français n’auront qu’un même culte; la religion natu¬ relle succédera aux religions factices des prêtres et la divinité sera honorée d’une manière digne d’elle sur toute la terre do la liberté. « Législateurs, je renonce au culte romain dont j’ai été ministre jusqu’à ce jour; je ne professerai jamais d’autre culte que celui de la religion naturelle. Je crois à l’existence de la divinité, je sens que j’existe par elle et ce sen¬ timent fait mon bonheur : voilà toute ma pro¬ fession de foi. « Au lieu de mes lettres de prêtrise qui sont perdues il y a longtemps; j’offre à la patrie deux écus qui portent l’effigie du traître Louis seize. La destruction des portraits du tyran et la refonte du métal pour lui donner l’em¬ preinte de la liberté serviront plus utilement la chose publique que la brûlure de lettres vaines et inutiles. « Je ne puis abdiquer la prêtrise sans renoncer au traitement que je reçois de la nation; elle est juste et généreuse, elle aura soin des pa¬ triotes et pourvoira aux besoins de tous ceux qui n’ont pas des moyens d’existence; je suis de leur nombre. « Législateurs, j’ai deux choses à vous de¬ mander au nom de la commune d’Issy, dont je suis l’envoyé, l’une que vous vouliez bien changer le nom d 'Issy -l'Evêque en celui d'Issy-la-Montagne et l’autre que vous fassiez finir l’affaire de la municipalité d’Issy contre les administrateurs du district de B elle vue -les - (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 196. (2) Archives nationales, carton F'6 875, dossier Carion, [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I 23 brumaire an II 139 Bains qui est depuis cinq mois à votre comité de sûreté générale. « Cakion, maire et député de la commune d’Issy. « Paris, 23 brumaire de l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. » Le citoyen Gibey, curé de Perrigny (1), dis¬ trict de Tonnerre, vient aussi répudier un titre que la raison d’un peuple libre ne peut admettre. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2). Suit V abjuration du citoyen Gibey (3) : Edme Gibey, curé de Perrigny, district de Ton¬ nerre, département de V Yonne, envoyé de la société populaire de Montbard, à la Convention nationale. « Paris, 23 brumaire de l’an II de la République française, une et indivi¬ sible. « Citoyens représentants du peuple, « Entraîné par une autorité à laquelle je n’ai pas su résister dans ma jeunesse, faute d’expé¬ rience et de lumières, victime en un mot du despotisme paternel, j’ai courbé la tête sous le joug avilissant du sacerdoce. Éclairé par l’âge, la raison et la philosophie, je me suis bientôt aperçu que cet état violait en moi les droits et les principes naturels, mais, sous un régime des¬ potique, sous l’atroce gouvernement des rois et des évêques, ces liens étaient de feu. « Grâces immortelles te soient rendues, Mon¬ tagne à jamais célèbre, tu les as enfin rompus ces liens honteux et pesants, en confondant les rois féroces et tous leurs vils satellites, en, éteignant la torche du fanatisme : acceptes aujourd’hui l’hommage de ma reconnaissance; bientôt tous les peuples éclairés et libres par tes soins, te béniront à leur tour. Permets qu’en ta présence et dans le sanctuaire de la liberté, je renonce à une profession qui dégrade l’homme ; permets que devant toi je prenne l’engage¬ ment solennel de n’enseigner à mes semblables que l’amour de la patrie, l’obéissance aux lois, le culte de la raison et de la liberté. « Gibey, ci-devant curé de Perrigny. » Des députations de la commune du vieux Cor-beil (4), de la commune et de la Société populaire de Thiais, de la commune de Gennevilliers, dis¬ trict de Franciade; de celle, de Chantilly (Châ-tillon), district du bourg l’Égalité; de la com¬ mune de Jagny et celle de la Ferté-Alais, district d’Etampes; de la commune d’Hier (d’Yerres), canton de Brunoy, de la commune de Fontenay-sous-Bois, viennent successivement offrir à la Convention le spectacle intéressant d’hommes régénérés qui, ne croyant plus aux jongleries sacerdotales, ont brisé les idoles vermoulues de ( 1 ) Perrigny-sur-Armahçon. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 196. (3) Archives nationales, carton G 280, dossier 770. (4) Aujourd’hui Saint-Germain-lès-Corbeil. la superstition : ils amènent avec eux leurs anciens pasteurs, qui abjurent les momeries sa¬ crées dont ils étaient les instruments. Les signes et décorations, la liturgie romaine servent d’aî-fublement pittoresque; les individus de tout âge et de tout sexe formant les diverses députations, s’étaient fait un divertissement de se revêtir de ces guenilles mystiques, pour les jeter ensuite avec mépris au pied du bureau; ils y joignent les métaux précieux qui meublaient leurs églises pour en imposer aux simples, et qui seront mieux employés en servant à terrasser les tyrans. La Convention reçoit avec enthousiasme les trophées de la philosophie et de la raison; elle en décrète la mention honorable et l’insertion au « Bulletin » (1), ( Suivent divers documents se rapportant à ces manifestations . ) I. Discours de la municipalité et de la Société populaire de Thiais (2). Représentants, La municipalité et la société populaire de Thiais, département de Paris, vous annonce que leur commune est entièrement guérie du mal fanatique et de la superstition et, à cet effet, elle offre à la patrie tout ce qui servait à leur église en argenterie, cuivre et ornements. L’argent servira à faire de la monnaie pour payer les défenseurs de la République, les orne¬ ments à leur faire des doublures de vêtements, et le cuivre servira à faire des canons qui lan¬ ceront la foudre sur les troupeaux d’esclaves aveuglés qui, sous les ordres des tyrans coa¬ lisés, veulent nous ravir notre liberté, mais leurs entreprises ne serviront qu’à les couvrir de honte, car, dans peu, leurs trônes serviront de marchepied à la sans-culotterie, et ils font contre nous les derniers efforts de la tyrannie aux abois, car bientôt les peuples fixeront sur nous leurs regards. Comme nous, ils s’armeront de la foudre; comme nous, ils briseront les couronnes, et leurs abominables suppôts, et la liberté triomphante n’aura plus que le monde entier pour écho. Oui, son triomphe est certain, tandis que nos armées terrassent les machines mouvantes des rois, nous nous occupons, à votre exemple, à démasquer les traîtres qui, sous des dehors trompeurs et un républicanisme affecté, subti¬ lisent la confiance des hommes de bonne foi afin de les réenchaîner de nouveau, et les offrir en holocauste aux brigands armés contre nous. Leur cœur est un arsenal de crimes et de contre-révolution, c’est le rendez-vous des mé¬ ditations perfides que la rage leur fait enfanter, mais nous sommes à leur poursuite et le peuple éclairé sur leur compte saura distinguer quels sont vraiment ses amis, et qui veulent de bonne foi son bonheur, et pour récompense sa félicité. L’heure de la raison est sonnée, son flambeau a pénétré à travers le nuage épais du fanatisme et de la royauté qui, tous deux, ont fait les (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 197. (2) Archives nationales, carton C 280, dossier 770,