[Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [•27 juillet 1791.] toyens âgés de 40 à 60 ans; le service personnel ne P ur serait jamais demandé, c’est-à-dire qu’ils pourraient se faire remplacer tout autant de fois qu’ils lu jugeraient à propos. Bien entendu que les fonctionnaires qui sont obligés de requérir la force publique, pourl’exer-cice de leurs fonctions, seraient exempts de tout service et de tout remplacement, ainsi que les veuves, les tilles et les vieillards. Toute réquisition pure et simple de la force publique n’obligerait à marcher que la première classe. Si l’autorité civile voulait requérir la totalité de la gar >e, elle le déclarerait expressément : il en serait de même si elle ne voulait que les deux premières classes. Il me semble que de telles dispositions pourvoiraient à tout. Les pères de famille ne seraient pas dérangés de leurs affaires, et leurs enfants supporteraient d’autant mieux la charge qui leur serait imposée, que leurs pères leur en auraient donné l’exemple. Dans un cas d’alerte , on pourrait n 'employer que la jeunesse, et l’on ne s’exposerait pas à dépeuplertoute une commune. Les citoyens délibérants ne seraient pas liés à l’institution militaire assez étroitement pour faire craindre qu’ils en prissent trop l’esprit ; ils contiendraient, d’un autre côté, la première classe, par leur sagesse et surtout par le désir que lui donnerait leur exemple d’arriver enfin à l’honneur de participer à tous les droits de la cité. Au reste, je ne demande pas des exercices trop multiples. Que les gardes nationales soient organisées par canton seulement, parce que la mesure des districts est trop inégale et que les masses, d’ailleurs, ne seront pas aussi fortes ; qu’ils s’exercent tous les dimanches pendant 6 mois de l’année; qu’il y ait des temps indiqués pour fournir des corps de garde, dans les campagnes par exemple, avant les récoltes; dans les petites villes, aux moments où la police est difficile, et dans les grandes villes enfin, dans tous les temps de l’année. Que ce service soit combiné de manière à ne demander que 3 ou 4 jours de garde par année à chaque citoyen. Je ne vois plus, avec de tels arrangements, quelle objection Ton peut faire contre mon système. le terminerai mon opinion par une observation fort importante. Si nous voulons régénérer les mœurs, il nous faut des fêtes, des spectacles multipliés où viennent se faire sentir le grand intérêt national ; des jeux, comme dit Rousseau, où la bonne mère patrie se plaise à voir jouer ses enfants. Eh bien 1 les exercices de la garde nationale seront propres à remplir une partie de ce but. C’est en préparant leur arme que nos jeunes gens seront distraits des occupations dangereuses qui les précipitaient autrefois dans tous les désordres ; c’est en se montrant jaloux des regards de leurs concitoyens, qu’ils apprendront à rechercher l’estime publique. Les spectateurs, de leur côté, ne seront pas insensibles à ces exercices intéressants ; le grand but qu’ils y trouveront leur élèvera Tâme et, d’ailleurs, ce seront des pères, des enfants, des époux, des amis qu’on aura devant soi : toutes les passions privées et publiques, si je puis m exprimer ainsi, tous les sentiments généreux et louables, trouveront dans un tel spectacle un aliment continuel. Qui peut calculer les effets d’une si belle institution ? C'est d’après ces principes, et dans des vues qui m’ont paru d’une aussi grande utilité, que je vous demande, Messieurs, de vous lire une série 7(1 d’articles que je regarde en les joignant à ceux qui sont déjà décrétés, comme les buses de l’organisation des gardes nationales, et sur lesquelles il est nécessaire, à ce qu’il me semble, de statuer avant tout. Projet de décret. « Art. 1er. Les citoyens auront à leur entière disposition leur uniforme et leurs armes. « Art. 2. Les marques distinctives du commandement seront les mêmes pour les gardes nationales que pour les troupes de ligne. « Art. 3. La garde nationale sera organisée par cantons : elle sera divisée en légions, bataillons, compagnies, pelotons et escouades. «Art. 4. Les officiers et sous-officiers ne seront élus que pour un an; ils ne pourront être réélus qu’après un intervalle d’une année de service comme soldats. « Art. 5. Il y aura tous les dimanches des exercices delà garde nationale, pendant six mois de Tannée, par légions, bataillons ou compagnies, etc. Il sera de plus fourni des corps de garde et de patrouilles, soit pendant un certain temps de Tannée, soit dans tous les temps, suivant l’étendue des lieux, de manière toutefois que chaque citoyen ne soit tenu qu’à 4 gardes pendant chaque année. « Art. 6. La garde nationale sera réunie sous les mêmes drapeaux et le même uniforme; mais elle sera divisée, pour la prestation du service, en trois classes : la première comprendra les jeunes gens, depuis 18 ans jusqu’à 25 ; la deuxième, les citoyens âgés de 25 a 40 ans; la troisième, ceux qui seront âgés de 40 à 60. La première classe devra son service personnel, sans pouvoir se faire remplacer; la seconde pourra se faire remplacer de trois fois Tune; la troisième ne sera tenue qu’au service de remplacement. « Art. 7. Nul ne pourra servir l’Etat de ses conseils et de son suffrage, s’il ne Ta premièrement servi de ses bras. En conséquence, tous les citoyens parvenus à l’âge de 25 ans seront tenus de rapporter la preuve qu’ils ont rempli les obligations qui leur sont imposées par l’article précédent, avant d’être inscrits sur le rôle des citoyens actifs. « Art. 8. Toute réquisition des autorités civiles qui ne voudra faire marcher que la première classe des gardes nationales, sera pure et simple ; si elle demande le service de la seconde classe en concurrence avec la première, elle l’exprimera formellement : il en sera de même si elle appelle la totalité de la garde. » ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DEFERMON. Séance du mercredi 27 juillet 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. le Président fait donner lecture d’une lettre de M. de La Roche, commandant du bataillon des Feuillants, qui fait part à l’Assemblée des (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . 712 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [n juillet 1791.] actes de patriotisme de quelques volontaires de son bataillon, dont les affaires et l’état ne leur permettent pas d’aller aux frontières, et qui veulent néanmoins contribuer aux dépenses de la nation. Suit la teneur de cette lettre : « Paris, le 27 juillet 1791. £« Monsieur le Président, « J’ai cru qu’il était de mon devoir de ne pas laisser ignorer à l’Assemblée nationale les actes de patriotisme de quelques volontaires de mon bataillon, dont les affaires et l’état ne leur permettent pas d’aller aux frontières, et qui veulent néanmoins contribuer aux dépenses de la nation. « M. Rondonneau, garde des archives du ministère de la justice, s’est engagé à payer une somme de 300 livres en trois payements. « M. Dumont, galerie du Louvre, a souscrit pour celle de 400 livres payable à volonté. « M. Augustin Monneron, inspecteur du tabac, hôtel Longueville, s’est soumis à nourrir et entretenir un volontaire tout le temps que la nation en aura besoin. « Je supplie l’Assemblée nationale de me permettre de lui faire connaître les citoyens qui, à l’exemple de ces braves amis de la Révolution, donneront des preuves de leur patriotisme et de leur amour pour la Constitution. « Je suis, avec respect, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur. « Signé : de la Roche, Commandant du bataillon des Feuillants. » (L’Assemblée ordonne l’insertion de cette lettre dans le procès-verbal. M. le Président fait donner lecture par un MM. les secrétaires des adresses suivantes : « Adresse des amis de la Constitution de hongwy . « Nous reconnaissons, disent-ils, que vous êtes investis du pouvoir constituant; nous vous regardons comme les pères de la patrie. Notre confiance en vous égale votre civisme et vos travaux; nous continuerions de vous bénir en silence, de vous récompenser seulement par notre inviolable amour de la loi, si les circonstances ne nous semblaient exiger une adhésion formelle et publique à tous vos décrets, et notamment à celui du 15 de ce mois. « En vous abstenant dans ce doute, vous avez suivi le conseil du sage, et vous avez sauvé l’Etat. Vous vous êtes montrés dignes de donner des lois à des hommes libres; et les Français se montreront dignes de leurs législateurs ; ils payeront l’impôt, et, quelle que soit leur opinion individuelle, ils défendront la Constitution. Les citoyens les plus soumis aux lois, sont ceux sur lesquels on devra le plus compter, tant qu’il s’agira de mourir pour les défendre; vous ne ouvez plus douter du vœu général. Toute la rance en armes vient de donner à votre immortel ouvrage, cet assentiment majestueux et spontané, auquel nos ennemis sont forcés de croire. < Vous avez senti qu’il était juste d’admettre à la défense de l’Empire les pauvres et vertueux citoyens qui, dans le danger public, ont renforcé les bataillons des gardes nationales. Ne ferez-vous pas un pas de plus, en les admettant à l’exercice des droits politiques, et en les faisant participer à une souveraineté que leur courage saura bien maintenir? Abolissez, nous vous en supplions, au nom de la patrie reconnaissante, ce décret du marc d’argent que vous avez porté dans un temps où il pouvait être dangereux d’ouvrir la carrière de la législature à des citoyens sans propriété. L’homme sans richesse et sans vertu ne réussirait pas à se faire élire ; mais, s’il a du mérite sans fortune, doit-il être exclu des emplois ? La nation doit-elle être privée de ses talents? « En élevant la voix en faveur de nos frères, nous soumettons cependant ce désir, peut-être précoce, à votre sagesse, persuadés que ceux pour qui nous sollicitons respecteraient votre refus que l’intérêt de l’Etat aurait dicté. On connaît le vrai citoyen à son dévouement aux lois qu’il n’a pas individuellement consenties. Avec quelle satisfaction n’avons-nous pas vu MM. Pé-tion, Vadier, Grégoire, protester de leur entière obéissance au décret qu’ils avaient combattu. Cette démarche civique nous rappelle qu’à la fin de la Constitution américaine, tous les membres opposants renoncèrent au congrès, qu’après avoir fait tous leurs efforts pour donner à leur pays des lois qu’ils avaient supposées les meilleures, ils allaient prêcher à leurs concitoyens l’amour de celle qu’avait rendue la sage majorité. Puisse cet exemple éclairer nos dissidents conduits par l’intérêt particulier! Puissent-ils imiter cette grandeur d’âme à laquelle l’Amérique doit une partie de sa gloire et toute sa tranquillité ! S’ils pouvaient penser à la modération noble avec laquelle vous avez usé de la victoire, ils sentiront que vous méritez de triompher. (L’Assemblée applaudit à l’expression des sentiments contenus dans cette adresse.) Adresse des administrateurs du directoire du département de l'Yonne. * La journée du 14 juillet 1789, disent-ils, a fait la [Révolution. C’est de c< tte époque glorieuse que date Père de la liberté : la journée du 15 juillet 1791 assure à jamais son triomphe et sa durée. Par votre décret, vous avez terrassé les factieux et les despotes, vous avez étouffé tous les germes de discorde civile, vous avez consacré le gouvernement monarchique, seul compatible avec l’étendue du territoire et l’immensité de la population française. Quand vous avez déclaré la monarchie héréditaire et le monarque inviolable, ce n’est pas pour lui, c’est pour la nation. « Une classe d’hommes pervers abusent sans cesse les citoyens qu’ils portent à l’oubli de la loi. Ils ont toujours à la bouche le saint nom de la liberté, comme ils auraient eu celui de la religion, il y a deux siècles. « Pour nous, qui ne connaissons que la loi, qui, lorsqu’elle a parlé, ne savons que la respecter et lui assurer l’obéissance, nous jurons de défendre celle du 15 juillet comme toutes celles émanées de votre sagesse; et de combattre également ceux qui veulent le despotisme, et les factieux qui veulent l’anarchie. » Adresse du directoire du district de Montdidier , département de la Somme , qui remercie l’ Assemblée d’avoir sauvé la France. « Notre sécurité n’a pas été trompée, disent-ils, la France continuera d’être une monarchie libre et nous ne serons pas exposés aux discordes civiles et à la guerre étrangère. » Adresse des membres du directoire du district