[CoBYention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 24 brumaire an_ll 189 « Et sur celle d’approuver le nom de Liberté décerné à la citoyenne Goux, un membre [Romme (1)] propose qu’elle soit renvoyée par-devant la municipalité de son domicile actuel pour y déclarer le nouveau nom qu’elle adopte, en se conformant aux formes ordinaires. « Cette proposition est décrétée. « Un autre membre [Merlin (de Thionville) (2)] propose qu’il soit défendu à tout citoyen de prendre pour nom propre ceux de Liberté et d’Égalité. La Convention nationale passe à l’ordre du jour sur cette proposition, motivée sur ce que chaque citoyen a la faculté de se nommer comme il lui plaît, en se conformant aux forma¬ lités prescrites par la loi (3). » Suit la déclaration portée à la barre par la Société populaire de Clermont (4) : Citoyens législateurs, La Société populaire de Clermont (Oise) nous a député vers vous pour présenter à la barre une citoyenne dont le dévouement patriotique lui a mérité la couronne de chêne. Nous avons trouvé la vertu sous le chaume et nous l’avons récompensée. Vous n’entendrez pas sans inté¬ rêt le trait sublime de cette femme. Nommé commissaire pour presser l’arrivage des subsistances destinées à approvisionner et nos frères de Paris et nos frères des armées, je me transporte dans la commune de Méry; je presse les réquisitions, je représente le besoin urgent de nos frères, on s’empresse d’offrir tout ce que l’on a de blé de battu, mais on m’observe qu’on manque de voitures, de che¬ vaux, que tout est aux frontières. La citoyenne Barbier se lève et dit : « Républicain, tu nous as électrisés, nous aimions déjà beaucoup notre patrie et nos frères, tu viens encore d’augmenter en nous ce sentiment; on manque de voitures et de chevaux, eh bien ! mes sœurs, prenons des sacs et allons porter du blé sur notre dos à nos frères de Paris. » Législateurs, cette action sublime a excité notre admiration, et la couronne civique lui a été décernée. Cette circonstance, chère à nos cœurs, a été pour nous l’occasion d’une fête solennelle où nous avons célébré toutes les. vertus civiques, l’apothéose des premiers martyrs de la liberté, Marat et Le Peletier. Le patriote Renouf, commissaire du conseil exécutif, était dans nos foyers, il enflamme les âmes du feu sacré de la liberté; il vote une souscription pour les frais de la guerre, on ap¬ plaudit, et les applaudissements sont suivis de dons abondants. Renouf propose que la fête se termine par la représentation de Vode à la liberté. Une jeune personne belle et ci-devant religieuse est choisie pour représenter cette déesse; elle avait la main appuyée sur la femme Barbier, pour annoncer au peuple, par cet em¬ blème, que la liberté est toujours appuyée sur la vertu. Le ministre du culte de Mouy est témoin de l’attitude fière et républicaine qu’elle (1) D’après les journaux de l’époque. (2) Ibid. (3) Procès-verbaux de la Convention , t. 25, p. 215. (4) Archives nationales, carton C 278, dossier 745. garde à cet instant, il est informé que ses sen¬ timents sont conformes à son costume. Rempli d’estime, il lui propose sa main et l’épouse. Législateurs, nos commettants ne vous invi¬ tent point à rester à votre poste, ils pensent que les montagnards, fondateurs de la liberté française ne peuvent le quitter que quand les tyrans coalisés contre elle seront exterminés. Les Sociétés populaire de Clermont (Oise) Liancourt et Mouy ont chargé la citoyenne Barbier d’une mission particulière dont elle va s’acquitter. Citoyens, les sans-culottes de Liancourt abhor¬ rent ce nom à cause de l’infâme qui le porte. Us demandent, en conséquence, qu’il leur soit permis de le changer en celui de l’ Unité de l'Oise. La plus grande partie des dons que nous venons déposer sur l’autel de la patrie sont les hochets ou joyaux de nos femmes; ils précèdent ceux de la superstition et du fanatisme qui ne tarderont pas à arriver. Us consistent, etc. (Pièces annexes.) A. Procès-verbal de la fête civique de Clermont-Oise (1). Ce jourd’hui, dixième jour de brumaire, l’an II de la République française, une, indivisible et impérissable, la Société républicaine de Cler¬ mont, département de l’Oise, au milieu d’un concours immense de citoyens du district, a célébré une fête en l’honneur de la liberté, l’égalité, l’union et toutes les vertus civiques. La Société républicaine de l’ Unité de VOise invitée à cette fête, une députation de celle de Clermont se rendit au-devant d’elle; un des membres dit : « Citoyens frères et amis, nous honorons en vous les vertus civiques dont vous venez célé¬ brer la fête avec nous. » Arrivées sur la route de Paris, lieu de la réu¬ nion, le citoyen Sceflier, juge de paix et membre delà Société populaire de la commune de Cler¬ mont, dit au peuple assemblé : « Citoyens, je vous présente la femme Barbie» qui, lorsque je fus à Méry pour les subsistances, prononça ces paroles que vous n’entendrez pas sans émotion : « Républicain, tu nous as électrisés, nous aimions déjà beaucoup notre patrie et nos frères, tu viens encore d'augmenter en nous ce sentiment ; on manque de voitures, eh bien ! mes sœurs, prenons des sacs et (faisant un geste expressif ) allons porter du blé sur notre dos à nos frères de Paris. » Citoyens, cette action sublime a excité notre reconnaissance, et la couronne civique lui a été décernée. Une députation des Sociétés populaires, accompagnée de Renouf, commissaire du con¬ seil exécutif, s’est rendue à Méry pour couronner cette femme vertueuse qui, recevant l’accolade fraternelle, nous dit : De tout mon cœur, â douce fraternité, l'on ne se connaît pas, cependant on s'aime de toute son âme, dès lors qu’on est pa¬ triote. Renouf a peint la sublimité de cette action dans les termes les plus énergiques : Citoyens, (1) Archives nationales, carton C 278, dossier 745.