|Assembléô oaiionale.| ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 avril 1791.] 357 « Le Corps législatif pourra présenter au roi telle déclaration qu’il jugera convenable sur Ja conduite des ministres, et même lui déclarer qu’ils ont perdu la cou fiance de la nation. » Cette rédaction est celle que vous avez adoptée dans une des précédentes séances. Votre comité vous propose de substituer au mot déclaration celui d’observation et de dire : « Le Corps législatif pourra présenter au roi telle observation qu’il jugera convenable sur la conduite des ministres, et même lui déclarer qu’ils ont perdu la confiance de la nation. » (Cette moditicaiiou est décrétée.) M. Démeunier, rapporteur. Voici en conséquence l’ensemble du projet de décret sur l’organisation du ministère. Organisation du ministère. Art. 1er. « Au roi seul appartiennent le choix et la révocation des ministres. Art. 2. « Il appartient au pouvoir législatif de statuer sur le nombre, la division et la démarcation des départements du ministère. Art. 3. Nul ne pourra exercer les fonctions de ministre, s’il ne réunit les conditions nécessaires à la qualité de citoyen actif. Art. 4. « Les ministres exerceront, sous les ordres du roi, les fonctions déterminées ci-après, et seront au nombre de 6 ; savoir : le ministre de Injustice, le ministre de l’intérieur, le ministre des contributions et revenus publics, le ministre de la guerre, celui de la marine et celui des affaires étrangères. Fonctions des ministres. Art. 5. « Les fonctions du ministre de la justice seront : « 1° De garder le sceau de l’Etat, et de sceller les lois, les traités, les lettres patentes de provisions d’offices, les commissions, patentes et diplômes du gouvernement; « 2° D’exécuter les lois relatives à la sanction des décrets du Corps législatif, à la promulgation et à l’expédition des lois; « 3° D’entretenir une correspondance habituelle avec les tribunaux et les commissaires du roi; « 4° De donner aux juges des tribunaux de district, et des tribunaux criminels, ainsi qu’aux juges de paix et de commerce, tous les avertissements nécessaires, de les rappeler à la règle, et de veiller à ce que la justice soit bien administrée ; « 5° De soumettre au Corps législatif les questions qui lui seront proposées relativement à l’ordre judiciaire, et qui exigeront une interprétation de la loi ; 6° De transmettre au commissaire du roi près le tribunal de cassation les pièces et mémoires concernant les affaires qui lui auront été déférées. et qui seront de nature à être portées à ce tribunal; d’accompagner ces pièces et mémoires des éclaircissements et observations dont il les croira susceptibles ; 7° De rendre compte à la législature, au commencement de chaque session, de l’état de l’administration de la justice, et des abus qui auraient pu s’y introduire. Art. 6. « Il y aura près du ministre de la justice trois gardes et un officier, qui veilleront sur le sceau de l’Etat. « Les secrétaires du roi du grand collège sont supprimés. « Sont pareillement supprimés les officiers en chancellerie, à l’exception de 2 huissiers, lesquels serviront, près la personne du ministre, à l’audience du sceau et pourront exercer auprès du tribunal de cassation. Art. 7. « Le ministre de l’intérieur sera chargé : « 1° De faire parvenir toutes les lois aux corps administratifs ; « 2° De maintenir le régime constitutionnel et les lois touchant les assemblées de commune par communautés entières, ou par sections, les assemblées primaires et les assemblées électorales, les corps administratifs, les municipalités, la constitution civile du clergé et, provisoirement, l’instruction et l’éducation publique, sans que de la présente disposition on puisse jamais induire que les questions sur la régularité des assemblées et la validité des élections, ou sur l’activité ou l’éligibilité des citoyens, puissent être soumises au jugement du pouvoir exécutif; « 3° Il aura la surveillance et l’exécution des lois relatives à la sûreté et à la tranquillité de l’intérieur de l’Etat; « 4° Le maintien et l’exécution des lois touchant les mines, minières et carrières, les ponts et cnaussées, et autres travaux publics, la conservation de la navigation et du flottage sur les rivières, et du halage sur leurs bords ; ce 5° La direction des objets relatifs aux bâtiments et édifices publics, aux hôpitaux, établissements et ateliers de charité, et à la répression de la mendicité et du vagabondage; « 6° La surveillance et l’exécution des lois relativement à l’agriculture, au commerce de terre et de mer, aux produits des pêches sur les côtes et des grandes pêches maritimes; à l’industrie, aux arts et inventions, fabriques et manufactures, ainsi qu’aux primes et encouragements qui pourraient avoir lieu sur ces divers objets; « 7° Il sera tenu de correspondre avec les corps administratifs, de les rappeler à leurs devoirs, de les éclairer sur les moyens de faire exécuter les lois, à la charge de s’adresser au Corps législatif, dans tous les cas où elles auront besoin d’interprétation ; « 8° De rendre compte tous les ans, au Corps législatif, de l’état de l’administration générale et des abus qui auraient pu s’y introduire. Art. 8. « Il soumettra à l’examen et à l’approbation du roi les procès-verbaux des conseils des départements, conformément à l’article 5 de la section du décret sur les assemblées administratives. Art. 9. >. Le ministre des contributions et revenus publics sera chargé : 358 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]27 avril 1791.] « 1° Du maintien et de l’exécution des lois touchant l’assiette des contributions directes, et leur répai'tition ; « Touchant le recouvrement dans le rapport des contribuables avec les percepteurs, et dans le rapport de ces derniers avec les receveurs de district ; « Touchant la nomination et le cautionnement des percepteurs et du receveur de chaque district ; « 2° La surveillance tant de la répartition, que du recouvrement et de l'application des sommes dont la levée aura été autorisée par la législature, pour les dépenses qui sont ou seront à la charge des départements ; < 3° Le maintien et l’exécution des lois touchant la perception des contributions indirectes, et l’inspection des percepteurs de ces contributions ; « 4° L’exécution des lois et l’inspection relativement aux monnaies et à tous les établissements, baux, régies ou entreprises qui rendront une somme quelconque au Trésor public; « 5° Le maintien et l’exécution des lois touchant la conservation ou administration économique des forêts nationales, domaines nationaux et autres propriétés publiques, produisant ou pouvant produire une somme quelconque au Trésor public ; « 6° Sur la réquisition des commissaires de la trésorerie, il donnera aux corps administratifs les ordres nécessaires pour assurer l’exactitude du service des receveurs ; « 7° Il rendra compte au Corps législatif, au commencement de chaque année, et toutes les fois qu’il sera nécessaire, des obstacles qu’aura pu éprouver la perception des contributions et revenus publics. Art. 10. « Le ministre de la guerre aura : « 1° La surveillance et la direction des troupes de ligne et des troupes auxiliaires qui doivent remplacer les milices; « 2° De l’artillerie, du génie, des fortifications, des places de guerre et des officiers qui y commanderont, ainsi que de tous les officiers qui commanderont les troupes de ligne et les troupes auxiliaires ; « 3° Il aura également la surveillance et la direction du mouvement et de l’emploi des troupes de ligne contre les ennemis de l’Etat, pour la sûreté du royaume, ainsi que pour la tranquillité intérieure, mais en se conformant strictement, dans ce dernier cas, aux règles posées par la Constitution; « 4° Il aura, en outre, la surveillance et la direction de la gendarmerie nationale, mais seulement pour les commissions d’avancement, la tenue et la police militaires; « 5° Il sera chargé du travail sur les grades et avancements militaires, et sur les récompenses dues, suivant les lois, à l’armée, ainsi qu’aux employés de son département; « 6° 11 donnera les ordonnances pour la distribution des fonds de son département, et il en sera responsable; « 7° Il présentera, chaque année, à la législature, l’état détaillé des forces de terre et des fonds employés dans les diverses parties de son département, li indiquera les économies et les améliorations dont telle partie serait susceptible. Art. 11. « Le ministre de la marine et des colonies aura : « 1° L’administration des ports, arsenaux, approvisionnements et magasins de la marine, et dépôts des condamnés aux travaux publics, employés dans les ports du royaume ; « 2° La direction des armements, constructions, réparations et entretien des vaisseaux, navires et bâtiments de mer ; « 3° La direction des forces navales et des opérations militaires de la marine; <■ 4° La correspondance avec les consuls et agents du commerce de la nation française, au dehors ; « 5° La surveillance de la police qui doit avoir lieu dans le cours des grandes pêches maritimes, à l’égard des navires et équipages qui y seront employés, ainsi que l’exécution des lois“sur cet objet ; « 6° II sera chargé de l’exécution des lois sur les classes, les grades, l’avauceraent, la police et autres objets concernant la marine et les colonies ; « Les directoires de département correspondront avec lui en ce qui concerne les classes et la police des gens de mer ; « 7° Il aura la surveillance et la direction des établissements et comptoirs français en Asie et en Afrique ; « 8° Il aura en outre, conformément à ce qui sera statué sur le régime des colonies, et sauf la surveillance et l’inspection des tribunaux des colonies, qui pourront être attribuées au ministre de la justice, l’exécution des lois touchant le régime et l’administration de toutes les colonies dans les îles et sur le continent d’Amérique, à la côte d’Afrique, et au delà du cap de Bonne-Espérance, et nommément à l’égard des approvisionnements, des contributions, des concessions de terrains et de la forcé publique intérieure des colonies et établissements français; « 9° Il surveillera et secondera les progrès de l’agriculture et du commerce des colonies ; « 10° Il rendra compte, chaque année, au Corps législatif, de la situation des colonies, de l’état de leur administration, ainsi que de la conduite des administrateurs, et en particulier de l’accroissement ou du décroissement de leurs cultures et de leur commerce ; « 11° Il donnera les ordonnances pour la distribution des fonds assignés à son département, et il en sera responsable ; « 12° Il sera chargé du travail sur les récompenses dues, suivant les lois, à l’armée navale et aux employés de son département ; « 13° Chaque anné -, il présentera à la législature un état détaillé de la force navale et des fonds employés dans chaque partie de son département, et il indiquera les économies et améliorations dont telle partie se trouverait susceptible. Art. 12. « Le ministre des affaires étrangères aura : t° la correspondance avec les ministres, résidents ou agents que le roi enverra ou entretiendra auprès des puissances étrangères ; « 2° Il suivra et réclamera l’exécution des traités ; >< 3° Il surveillera et défendra au dehors les intérêts politiques et commerciaux de la nation française; [27 avril 1791. 359 | Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. >< 4° Il sera tenu de donner au Corps législatif les instructions relatives aux affaires extérieures, dan3 les cas et aux époques déterminés par la Constitution, et notamment par le décret sur la paix et la guerre. « 5° Conformément au décret du 5 juin 1790, il rendra, chaque année, à la législature, un compte détaillé, et appuyé de pièces justificatives, de l’emploi des fonds destinés aux dépenses publiques de son département. Art. 13. « Tous les ministres seront membres du conseil du roi et il n’y aura point de premier ministre. Art. 14. > Les ministres feront arrêter au conseil les proclamations relatives à leur département respectif, savoir : « Celles qui, sous la forme d’instructions, prescriront les détails nécessaires soit à l’exécution de la loi, soit à la bonté et à l’activité du service ; >< Celles qui ordonneront ou rappelleront l’observation des lois, en cas d’oubli ou de négligence; » Celles qui, aux termes du décret du 6 mars dernier, annuleront les actes irréguliers ou suspendront les membres des corps administratifs. Conseil d'Etat . Art. 15. « 11 y aura un Conseil d’Etat, composé du roi et des'ministres. Art. 16. « Il sera traité, dans ce conseil, de l’exercice de la puissance royale donnant son consentement, ou exprimant le refus suspensif sur les décrets du Corps législatif, sans qu’à cet égard le contreseing cle l’acte entraîne aucune responsabilité. « Seront pareillement discutés dans ce conseil, « 1° Les invitations, au Corps législatif, de prendre en considération les objets qui pourront contribuer à l’activité du gouvernement, et à la bonté de l’administration ; « 2° Les plans généraux des négociations politiques ; « 3° Les dispositions générales des campagnes de guerre. Art. 17. « Seront aussi au nombre des fonctions du Conseil d’État : « 1° L’examen des difficultés, et la discussion des affaires dont la connaissance appartient au pouvoir exécutif, tant à l’égard des objets dont les corps administratifs et municipaux sont chargés sous l’autorité du roi, que sur toutes les autres parties de l’administration générale; « 2° La discussion des motifs qui peuvent nécessiter l’annulation des actes irréguliers des corps administratifs, et la suspension de leurs membres, conformément à la loi; « 3° La discussion des proclamations royales; <- 4° La discussion des questions de compétence entre les départements du ministère, et d" toutes autres qui auront pour objet les forces ou secours réclamés d’une section du ministère à l’autre. Art. 18. « Si, après la délibération du Conseil et l’ordre du roi, un ministre voit du danger à concourir, par les moyens de son département, à l’exécution des mesures arrêtées par le roi à l’égard d’un autre département, après avoir fait constater son opinion dans le registre, il pourra procéder à l’exécution sans en demeurer responsable, et alors la responsabilité passera sur la tète du ministre requérant. Art. 19. Un secrétaire nommé par le roi dressera le procès-verbal des séances, et tiendra registre des délibérations. Art. 20. Le recours contre les jugements rendus en dernier ressort, aux termes de l’article 2 du décret du 7 septembre 1790, par les tribunaux de district, en matière de contributions indirectes, devant être porté au tribunal de cassation, ne pourra, eu aucun cas, être porté au Conseil d’Etat. Art. 21. Les actes de la correspondance du roi avec le Corps législatif seront contresignés par un ministre. Art. 22. « Chaque ministre contresignera la partie de ces actes relative à son département. Art. 23. « Quant aux objets qui concernent personnellement le roi et sa famille, le contreseing sera apposé par le ministre de la justice. Responsabilité. Art. 24. « Aucun ordre du roi, aucune délibération du conseil ne pourront être exécutés s’ils ne sont contresignés par le ministre chargé de la division à laquelle appartiendra la nature de l’affaire. « Dans le cas de mort ou de démission de l’un îles ministres, celui qui sera chargé des affaires par intérim répondra de ses signatures et de ses ordres. Art. 25. « En aucun cas, l’ordre du roi, verbal ou par écrit, non plus que les délibérations du Conseil, ne pourront soustraire un ministre à la responsabilité. Art. 26. « Au commencement de l’année, chaque ministre sera tenu de dresser un état de distribution par mois, des fonds destinés à sou département, et de communiquer cet état au comité de trésorerie, qui le présentera au Corps législatif avec ses observations. Cet état sera arrêté par le Corps législatif, et il ne pourra plus y être fait de changement qu’en vertu d’un décret. Art. 27. « Les ministres seront tenus de rendre compte, en ce qui concerne l’administration, tant de leur conduite que de l’état des dépenses et affaires, toutes les fois qu’ils en seront requis par le Corps législatif. Art. 28. « Le Corps législatif pourra présenter au roi 360 [Assemblée nationale-! ARCHIVES PARLEMENTAIRES, telles observations qu'il jugera convenables sur la conduite des ministres, et même lui déclarer qu’ils ont perdu la conliancede la nation. Art. 29.