364 [Assemblée nationale.] M. Fréteau-Saint-Just. Monsieur le Président, il est 11 heureset nous ne sommes ici qu’une poignée alors que l’Assemb'ée devrait être complète, et que nous devrions être tous à notre poste; et même dans ce petit nombre que nous sommes nous ne pouvons pas obtenir de silence lorsqu’il s’agit des intérêts capitaux de la patrie, lorsqu’il s’agit de savoir si nous serons libres ou non : Je demande que le plus grand silence règne, et que quand l’Assemblée sera complète, vous vouliez bien répéter, au nom de l’Assemblée, à tous ses membres qui ont retardé l’exécution de leur service, qu’ils doive; t à la société entière, qu’ils doivent aux corps administratifs et aux tribunaux, l’exemple de cette ponctualité au service, de cette fermeté dans leurs fonctions. {Applaudissements.) M.Ie Président. Quand l’Assemblée sera complète, je l’invitera', par ordre de l’Assemblée elle-même, à être plus exacte à l’heure. Un membre : Il y a un député à l’Assemblée nationale qui s’est principalement rendu coupable dans la circonstance actuelle. M. Boery. Si dans cette circonstance quelque député s’est rendu coupable, c’est sur lui premièrement que doit s’appesantir le glaive de la loi. J’ai appris, messieurs, et des députés de l’Assemblée nationale ont été témoins qu’hier, au s ortir de la séance, dans une certaine société, présidée par un membre de l’Assemblée nationale, il a été fait la motion de ne pas reconnaître le roi et que cette motion avait été adoptée. On m’a dit aussi, que ceux des membres de l’Assemblée présents à cette réunion n’avaient pas voulu prendre part à la délibération. Je demande que les différents membres de l’Assembh e qui étaient présents à cette séance soient tenus, en leur honneur, de rendre hommage à la vérité et de donner connaissance des faits qui s’y sont passés. {Mouvement.) M. Prieur. Je demande la parole. Plusieurs membres : Le voilà le président des Jacobins! {Mouvement prolongé.) M. Prieur. Je n’y étals pas, moi, Messieurs. A gauche : 11 faut donc dénoncer les 290. M. d’André. Défendons-nous de toute espèce de chaleur et d’exagération; le véritable courage est calme et tranquille. Aussi, Messieurs, écartons de nous toutes les idées personnelles. Si des membres de cette Assemblée avaient eu le malheur de se laisser aller, hors de cette Assemblée, à des démarches contre les lois, de nature à troubler l’ordre public, ce serait aux tribunaux à informer contre eux, et à nous rendre ensuite compte de leur information; vous feriez ensuite ce que vous devriez faire. Si ces mêmes manoeuvres se pratiquaient dans le sein même de l’Assemblée, ce serait à vous à les punir comme vous le jugeriez convenable. Ainsi donc la motion du préopinant est hors de l’ordre du jour, et je demande qu’on s’en tienne à ce que j’ai eu l’honneur de proposer tout à à l’heure. {Applaudissements.) J’ai d’ailleurs rédigé vos propositions; les voici : « L’Assemblée nationale décrète : 1° Qu’il sera rédigé, séance tenante, une adresse [16 juillet 1791.] aux Français pour leur exposer les principes qui ont dicté le décret rendu hier, et les motifs qui doivent déterminer les amis de la Constitution à se réunir autour des principes constitutionnels. « 2° Que la municipalité sera mandée pour qu’il lui soit enjoint de seconder le zèle de la garde nationale... » Si j’ai mis: pour seconder le zèle de la garde nationale, c’est parce qu’en effet la garde nationale a déployé dans tous les temps et principalement hier et aujourd’hui un courage, une fermeté, une sagesse, une modération digne de tous les éloges ; et qu’hier, lorsque le peuple égaré — j’ai tort de dire le peuple — lorsque quelques personnes, 30 peut-être, allaient se porter pour faire fermer les spectacles, la garde de l'Opéra a présenté une résistance si sagement combinée, que les efforts des malintentionnés ont été vains; et qu’ils ont été obligés de se retirer. J’ai donc cru devoir dire dans mon projet de décret : «... Pour qu’il lui soit enjoint de seconder le zèle de la garde nationale et de donner des ordres pour veiller avec soin à la tranquillité publique ; « 3° Que les 6 accusateurs publics de la ville de Paris seront mandés et qu’il leur sera enjoint, sous leur responsabilité, de faire informer sur-le-champ contre tous les infracteurs des lois et les perturbât urs du repos public; « 4° Que les ministres... » — car les ministres étant le pouvoir exécutif, ce sont eux tous que nous devons mander — «... seront appelés pour leur ordonner de faire observer exactement, et sous peine de responsabilité, le présent décret. » {Applaudissements .) Plusieurs membres: Aux voix ! aux voix ! Un membre : Il faut décréter que l’adresse sera envoyée dans les départements par des courriers extraordinaires. {Oui! oui!) M. d’André. Je le mettrai dans le décret. M. Oiabroud. En ce qui concerne la garde nationale, je sms de l’avis de M. d’André, et je suis persuadé qu’on ne saurait lui décerner trop (déloges ; mais j’observerai que de la façon dont il a rédigé S( n décret, il semble adresser un reproche à la municipalité. Pourquoi lui ferait-on des reproches? je ne crois pas qu’elle les ait mérités. M. Einmery. Nous le croyons tous. {Oui! oui1) M. Chabroud. Mais je suppose que dans l’opinion de l’Assemblée la municipalité ait encouru des reproches, je dis que dans ce cas l’Assemblée nationale doit franchement s’exprimer et ne doit pas avoir recours à une circonlocution. Je crois que si la municipalité de Paris n’a pas rempli son devoir, il faut franchement l’en avertir; mais il ne faut pas dire qu’elle est invitée à seconder le zèle de la garde nationale. Je suis donc d’avis en ce cas que l’on donne à la garde nationale les éloges qu’elle mérite ; je suis d’avis après cela qu’on avertisse la municipalité, si l’Assemblée, la trouve dans son tort; mais il me semble qu’il est contraire à la Constitution même de dire que la municipalité secondera le zèle de la garde nationale. M. d’André. J’adopte l’observation de M. Chabroud. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juillet 1791. J M. l'adier. Je suis entièrement de l’avis du préopiaant, les mesures qu’il nropose me paraissent sag. s et nécessaires. J’ui été d’un avis conlraire à celui des comités ; j’ai développé mon opinion avec le courage d’un homme libre avant que la loi fut rendue; car j’ai cru que l'inviolabilité absolue du monarque pouvait être funeste à la liberté. Mais je n’en dét este pas moins le système républicain, je le crois subversif et inconciliable avec notre situation politique; mais aujourd’hui que la loi est rendu1, et quoique je n’aie pas été d’avis de l’inviolabilité absolue du roi, je déclare qu’autant j’ai mis de zèle à soutenir mon opinio i avant le décret, autant j’en emploierai aujourd’hui à en maintenir l’exécution et s’il faut sacrifier ma vie pour le défendre en bon citoyen, je la sacrifierai de grand cœur. {Vifs applaudissements.) M. GoupiI-i*réfeln. J’observe à l’Assemblée que M. le mai e et deux officiers municipaux étaient hier, en écharpe aux portes de la salle. Ils s’y étaient transportés pour dissiper les attroupements : cette sollicitude de leur part, conforme d’ailleurs aux règles de leur devoir, me paraît engager l’Assemblée à ne pas leur exprimer de mécontentement. M. Emrnery. Hier, Messieurs, la garde nationale avait an été, dans la cour du manège, un étranger que plusieurs citoyens avaient déclaré distribuer de l’argent, et ameuter le peuple contre les décrets de l’Assemblée nationale. La municipalité, l’on ne sait trop pourquoi, l’a fait relâcher. C’est aussi un officier municipal qui, au théâtre de la rue Feydeau, est monté sur le théâtre, et a dit à l'assemblée que le peuple allait se porter à ce spectacle et qu’il valait mieux désemparer que de l’attendre. Ainsi, comme vous voyez, Messieurs, loin d’opposer de la résistance, ce sont les officiers municipaux qui aident au contraire et en encouragent les factieux. Plusieurs membres : Il faut les mander à la barre. _M. Emrnery. Je ne compromets personne, je dis simplement les faits : qu’on les appelle et qu'on les interroge. (Murmures.) M. �Srelet de fiScauregard. Comme je suis convaincu que les désordres sur lesquels nous gémissons sont entièrement étrangers aux habitants de Pans, qu’ils sont commis par de vils stipendiés des puissances étrangères, je demande, lorsque MM. les officiers municipaux seront à la barre, qu’il leur soit enjoint demett e, le plus tôt possible, à exécution les trois premiers articles du décret que vous avez rendu sur la police municipale, lesquels obligent les officiers municipaux à dresser un état des citoyens de chaque commune avec l'indication des moyens de subsistance de chacun d’eux. M. I&egnaud (de Saint-Jean d'Angëly). Je n’ai qu’un mol à dire, il s’agit d’une addition au projet de M. d’André. Vous savez, Messieurs, que la responsabilité doit toujours remonter et nou descendre. C’est donc au corps le plus près de vous, c’est à l’autorité constituée la plus rapprochée que vous devez rappeler les devoirs que ses fonctions lui imposent. Il est donc important, qu’en même temps que vous appellerez la municipalité, vous appeliez aussi le département au-365 quel est confié le devoir de surveiller la municipalité, de veiller à l'exécution delà loi etd’assurer la tranquillité publique. M. d’André. J’ea avais fait la motion, et je crois que cela se trouve dans mon projet , en tout cas je l’y ajoute. Voici ma rédaction définitive en tenant compte des observations qui ont été présentées. « L’Assemblée nationale décrète : « leQu’il sera rédigé, séante tenante, une adresse aux Fiançais, pour leur exposer les principes qui ont dicté le décret rendu hier, et les motifs qu’ont tous les amis de la Constitution de se réunir auto ir des principes constitutionnels, et que cette adresse sera envoyée par des courriers extraordinaires ; « 2° Que le département et la municipalité de Paris seront mandés, pour qu’il leur soit enjoint de donner des ordres pour veiller avec soin à la tranquillité publique ; « 3° Que les 6 accusateurs publics de la ville de Paris seront mandés, et qu’il leur sera enjoint, sous leur responsabilité, de faire informer sur-le-champ contre tous les infracteurs des lois et les perturbateurs du repos public; « 4° Que les ministres seront appelés pour leur ordonner de faire observe r exactement, et sous peine de responsabilité, le prés nt décret. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. le Président. L’Assemblée m’autorise-t-elle à lui proposer des commissaires pour la rédaction de l’adresse? (Oui! oui!)... Eli bien! je propose MM. Chabroud, Barnave, Le Chapelier et Salle. Plusieurs membres : Et M. d’André! M. le Président. M. d’André s’y est refusé, mais on pourra l’adjoindre. Un membre : M. Barnave n’est pas ici, pourquoi le nomme-t-on? Un membre : M. Salle non plus. M. le Président. Gomme MM. Barnave et Salle n’y sont pas, je propose MM. Emrnery et Fréteau. (L’Assemblée décide que MM. Chabroud, Le Chapelier, Fréteau-Saint-Just et Emrnery seront chargés de la rédaction de l’adresse.) M. le Président. Je m’en vais immé liatement donn r les ordres nécessaires à l’exécutioa du décret que vous venez de rendre. (Approbation.) M. Bloiission. Il a été fait tout à l’heure une motion relativement à la surveillance des étrangers; j’insiste pour qu’elle soit mise a ex voix, car ce sont toujours des étrangers qui échauffent le peuple et se mettent à sa tète. M. Emrnery. J’appuie de tout mon pouvoir la proposition qui a été faite par M. de Beauregard. Nous savons tous, et cela est malheureusement trop clair et trop évident, que notre peuple est égaré par les in-inuations des étrangers, par l’argent qu’ils distribuent pour exciter des soulèvements à la loi. Neus avons pris des précautions, des mesures sages par le décret porté sur la police municipale; ce décret n’est pas encore publié. Q i empêche que, lorsque les officiers municipaux seront à votre barre, vous leur com-