228 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 janvier 1 790.J M. Muguet de Üanthou, qui avait le plus fortement soutenu, sans cependant parler à la tribune, que cette motion devait être adoptée, propose de la rejeter par la voie de la question préalable. M. Duport s’écrie que la question préalable n’est pas proposable contre une motion à laquelle il a été ajouté deux amendements décrétés par l’Assemblée. M. Gaultier de Biauzat demande que le membre qui a proposé la question préalable soit invité à la motiver à la tribune. M. Muguet de Hanthou dit que sa réponse est courte, mais décisive. Tous les peuples du royaume ont donné des preuves de patriotisme ; en conséquence, il ne saurait convenir à l’Assemblée nationale de reconnaître cette vertu particulièrement dans le peuple de Toulon. La question préalable est rejetée et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale a chargé son président de transmettre àM d’Albert de Rioms le décret du 16 de ce mois, et de lui témoigner l’estime qu’elle n’a jamais cessé d’avoir pour un guerrier dont les services ont si dignement soutenu la gloire de la nation. » Elle le charge en même temps d’un témoignage honorable pour MM. les officiers de marine impliqués dans l’affaire de Toulon ; charge de plus son président de témoigner la satisfaction de l’Assemblée sur les sentiments patriotiques que les officiers municipaux et la garde nationale de Toulon n’ont cessé de témoigner dans toutes les circonstances. » M. le chevalier de Boufflersjit ensuite les adresses et les offres de dons patriotiques, ainsi qu’il suit : Adresse des officiers municipaux de la ville de Luxeuil en Franche-Comté, remise par M. de Fer-rier, maréchal-de-camp, député extraordinaire de ladite ville; ils se répandent en éloges les plus flatteurs sur les religieux bénédictins de cette ville; ils annoncent qu’ils ont envoyé à la monnaie de la capitale l’argenterie la plus précieuse de leur église, du poids de 234 marcs 2 onces. Dans le cas que des circonstances impérieuses exigent] la suppression de cette célèbre abbaye, ils supplient l’Assemblée de daigner, dans sa sagesse, y substituer un établissement également utile dans lequel la plupart de ces dignes religieux s’empresseraient à montrer le même zèle pour le bien public, en se consacrant à l’éducation de la jeunesse et au soulagement des pauvres. Adresse de félicitations, remerciements et adhésion de la ville de Mont-Louis; elle justifie qu’elle s’est toujours empressée d’exécuter les décrets de l’Assemblée, notamment ceux relatifs au maintien de l’ordre et de la tranquillité publique. Adresses du même genre de la ville de Provins, de celle de Semur en Auxois, et de celles de Valabrègues et Florac en Languedoc; ces deux dernières demandent que la ville de Nîmes soit le siège d’un tribunal supérieur; la ville de Florac fait le don patriotique du produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés. Adresses du même genre des villes de Barjols et de Tarascon en Provence, de la ville d’Aigues-Mortes en Languedoc, de celle de Tarbes, capitale du Bigorre, de celles de Garnache, d’Aisnai, de Tiffauges, de Montaigu, et de vingt-quatre paroisses voisines de cette dernière en Poitou ; toutes ces villes demandent chacune d’être chef-lieu de district et le siège d’une justice royale. La ville de Barjols fait offre du moins imposé en faveur des anciens taillables. Adresse de cinq religieux d’un couvent de Pontoise, qui approuvent le projet sur les religieux proposé par le comité ecclésiastique. Adresse du chapitre de l’église royale et collégiale de Notre-Dame de Gusset, qui adhère avec une respectueuse admiration aux décrets de l’Assemblée nationale, et notamment à ceux concernant les biens ecclésiastiques. Adresses des comités et municipalités de Di-goin en Bourgogne, Dion-sur-Loire, Dompierre Baulon, Pierrefitte, Scey, Ghassenard, Molinet, Coulanges, Gilly-Patay, Thiet, Garnat, Cindré, Bon-cès et Montaigu en Bourbonnais, qui adhérent avec reconnaissance et soumission aux décrets de l’Assemblée nationale, et la supplient avec instance de conserver le célèbre monastère de Sept-Fonts, encore plus austère que celui de la Trappe. Adresse du bataillon des chasseurs de Roussillon, en garnison au Saint-Esprit, et de 6,000 gardes nationales de différentes villes et communautés du Languedoc, Provence et Dauphiné, autorisées par leurs municipalités, qui se sont réunies sous les murs du Saint-Esprit et les armes à la main, avec la plus grande solennité possible, ont juré d’être à jamais fidèles à la nation, au Roi et à la loi, et de sacrifier leurs biens et leurs vies pour la gloire et le bonheur de notre auguste monarque, et l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale. Cette fédération a nommé des commissaires pour correspondre avec celles de l’Etoile, Montélimart et Saint-Paul-Trois-Châteaux. Adresse des corps des ferblantiers, fripiers, ta-bletiers, tourneurs et faiseurs de chaises de la ville de Marseille, qui présentent à l’Assemblée nationale l’hommage de leur soumission respectueuse à ses décrets, et la supplient d’ordonner la plus prompte exécution de celui qui renvoie la procédure prevôtale à la sénéchaussée de cette ville. Les ferblantiers et fripiers font le don patriotique de tout ce qui leur est dû par le gouvernement en capital et intérêts. Adresse des corps des tanneurs, corroyeurs, blanchers, marchands, revendeurs de cuirs de la ville d’Aix, qui font le don patriotique d’un capital de 1750 livres 10 sols, qui leur est dû par Sa Majesté, ainsi que des arrérages d’intérêts. Délibération de la communauté de Baume, bailliage de Poligny, qui, indépendamment de la contribution patriotique, offre le produit du moins imposé au profit des anciens taillables. Adresse de la communauté de Sillans en Provence, qui fait le don patriotique de la somme de 600 livres. Adresse de la ville de Charlieu en Lyonnais portant l’offre de 33 marcs 5 onces 3 gros provenant de la fonte de l’argenterie de leur église, et en outre, du produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés; elle insiste pour obtenir d’être chef-lieu de district et le siège d’une justice royale. Adresse des officiers municipaux de la petite ville de Marennes en Saintonge, portant l’assurance d’une pleine et entière adhésion de leur oart à tous les décrets de l’Assemblée nationale, a suppliant de regarder la conservation des co-onies françaises, et celle du commerce maritime, comme deux moyens inséparables de pros- 229 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 janvier 1790.] périté pour l’Etat, et de subsistance pour le tiers de ses habitants. Ils annoncent à l'Assemblée nationale que les délibérations enregistrées de la contribution du quart du revenu, par les habitants de Marennes, s’élevaient, le premier de ce mois, à 48,000 livres., somme inférieure à ce qu’aurait désiré leur patriotisme, mais infiniment supérieure à ce que leur permettaient leurs moyens. Arrêté de la ville et communauté de Rennes, portant adhésion aux décrets du 11 et ordonnant que le discours prononcé dans cette occasion par M. Le Chapelier, soit transcrit sur les registres de la ville et communauté. M. le Président fait lecture d’une lettre de M. de Briel, capitaine au régiment de Navarre, et commandant actuellement ce régiment, en réponse à celle adressée à ce régiment par l’Assemblée nationale ; et cette expression des plus nobles sentiments patriotiques et militaires a mérité les applaudissements de l’Assemblée. Le district et le bataillon des Petits-Pères ont apporté leur offrande, et y ont joint l’expression de leur reconnaissance pour le décret de l’Assemblée qui constitue Paris et sa banlieue en département. M. le Président témoigne la satisfaction de l’Assemblée aux députés de l’assemblée partielle et du bataillon des Petits-Pères. M . de Colbert Saignelay , membre de l’Assemblée, a présente un don patriotique au nom ducol-iège de Rhodez; et ce membre a été autorisé à témoigner à ces jeunesélèves la satisfaction de l’Assemblée. La ville du Havre a offert un don patriotique de 42,197 livres: savoir 3,257 livres données par les commis des négociants; 4,940 livres par les capitaines de navires, et 34,0001ivres par la généralité des habitants, laquelle somme a été versée dans la caisse nationale. M. le Président a fait ensuite lecture de la lettre ci-après deM.deGhoiseul-Gouffier ambassadeur à Constantinople ; elle porte un don patriotique de 12,000 livres, offert par les négociants français établis dans cette ville; 1. l’ambassadeur ajoute, pour son compte, un tribut égal à celui des négociants de Constantinople ; et le sieur Pierre Fonton, chancelier de cette échelle, y joint pour lui personnellement une somme de 600 livres. Mais ce qui, aux yeux de l’Assemblée, a paru ajouter plus de prix encore à un hommage aussi patriotique et aussi bien exprimé, c’est la liberté du seul captif français qu’on ait pu découvrir dans la ville de Constantinople, racheté aux frais communs de M. l’ambassadeur et des négociants. Suit la teneur de ladite lettre : A Constantinople, le 30 novembre 1789. « Monsieur le Président. » « Les négociants français, établis à Constantinople, oublient l'état alarmant de leur commerce pour ne voir que les besoins de la patrie. Ils viennent de m’apporter une somme de 12,000 livres pour la faire parvenir à l’Assemblée nationale. Ils espèrent qu’elle voudra bien ne pas rejeter ce léger tribut, cette faible expression des sentiments dont ils sont pénétrés, et dont ils pie permettent d’être aujourd’hui le garant et l’interprète. « En votant cette contribution par un transport unanime, ils n’ont fait, Monsieur, que partager l’enthousiasme commun à tous les Français; mais peut-être trouverez-vous qu’ils ont un mérite particulier à ne s’êlre laissé décourager ni par la modicité de leur offrande, ni par le grand éloignement, qui pourra, malgré eux, la faire paraître tardive et en diminuer ainsi le prix. « Un de leurs concitoyens, que nul ne surpassera jamais en patriotisme et en dévouement, s’empresse d’égaler leurs efforts, et de joindre à leur tribut celui d’une pareille somme de 12,000 livres, sans préjudice des contributions déjà décrétées par l’Assemblée, et de toutes celles qu’elle pourra juger utiles à la prospérité de la nation, et à la gloire du Roi, qui en est inséparable. Heureux ce citoyen, Monsieur, si un zèle sans bornes peut suppléer aux talents que sa position rendrait nécessaires, et s’il peut encore continuer de défendre avec honneur la dignité du nom français, son influence politique, et avec elle le riche tribut que ce vaste empire, malgré les événements d’une guerre malheureuse, ne cesse de payer à l’industrie de nos commerçants ! « Le sieur Pierre Fonton, chancelier de cette échelle, dont la famille estimable a toujours rendu, et rend aujourd’hui plus que jamais, a’im-portaDts services à l’Etat, verse aussi dans la caisse nationale la somme de 600 livres. « Enün, Monsieur, pour nous consoler de n’avoir pu présenter des dons plus proportionnés à notre zèle, et pour être du moins certains d’offrir à la nation un hommage digne d’elle, nous avons tous voulu nous réunir pour racheter le seul esclave français que non s ayons pu découvrir en ce moment ; il est libre, et sera renvoyé jusque dans le lieu de sa naissance pour y joiïir du bonheur que la France devra aux vertus de Louis XVI et aux lumières des représentants de la nation. » « Je suis avec respect, « M. Le Président, « Votre très humble et très obéissant serviteur. « Choiseul-Gouffier. » L’Assemblée nationale décrète qu’il sera fait une mention honorable du zèle empressé de ces négociants à taire parvenir leur tribut, ainsi qu’une réponse à M. l’ambassadeur, dans laquelle M. le président est chargé de témoigner la satisfaction de l’Assemblée. M. Ramel-Nogaret rapporte le procès-verbal de la formation de la municipalité de Ris, près Paris, qui a été fait sur papier timbré et contrôlé. Il propose d’exempter du papier timbré et du contrôle les actes et délibérations qui vont être le résulta�des nouvelles élections municipales et administratives. 11 dit que l’ancien gouvernement en avait donné l’exemple lors des élections qui ont précédé l’Assemblée nationale. M. Populus demande que l’exemption proposée soit étendue à toutes les délibérations des corps administratifs. M. llalès voudrait les soumettre à la formalité du contrôle pour une plus grande véracité, mais en les exemptant des droits.