506 [États gén. 1789 Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Calais et Ardres. subvention ecclésiastique soit payée au Roi chaque année et non par anticipation. • Que le clergé pour la passation des baux soit assimilé aux deux autres ordres du royaume. Que les frais de scellé des registres à la mort des curés ne soient pas supportés par leurs héritiers, sauf au gouvernement à prendre dans ce cas les mesures nécessaires pour la sûreté des actes publics qu’ils contiennent. Que si le vœu général pour le reculement des barrières n’était point exaucé, les ecclésiastiques employés dans les ministères ne soient point assujettis pour leurs meubles, lors des changements ordonnés par leurs évêques, au payement des droits de transit de province à autre dans le même diocèse. Le député assurera Sa Majesté et nosseigneurs des Etats généraux que le clergé, dont il est le représentant, consent volontiers, pour l’extinction de la dette nationale, à contribuer, proportionnel» lement aux facultés de chacun de ses membres, aux besoins de l’Etat, sauf toutefois le privilège de voter ses subsides et de répartir lui-même sa cotisation, avec les modifications relatives à l’organisation de ses assemblées. Il exprimera les vœux de tout l’ordre pour la rédaction d’un cadastre exact de tous les biens des trois Etats du royaume. Il assurera l’assemblée que les membres du clergé sont convenus d’adopter toutes les dispositions, projets, plaintes et doléances tendantes au bien général et commun aux deux autres ordres, notamment leur désir pour le retour périodique des Etats généraux au plus court délai possible, en un mot, toutes les remontrances de messieurs de la noblesse et du tiers-état, lesquels ne sont point contraires aux privilèges et observations particulières du clergé. Enfin il laissera aux lumières et au zèle de l’assembléé la décision de la question et la manière d’y opiner. Remontrances et demandes du clergé régulier. Le clergé régulier, qui adhère avec joie à toutes les demandes et déclarations du clergé séculier ci-devant énoncées, prend la liberté de remontrer que, contribuant à toutes les charges du clergé et s’occupant, avec l’agrément des évêques, des principales fonctions du ministère ecclésiastique, il paraît juste qu’il ait ses députés en nombre compétent dans les assemblées tant générales que diocésaines du clergé, et qu’il n’y soit plus représenté par des abbés eommendataires ou autres ecclésiastiques dont les intérêts ne sont pas toujours d’accord avec ceux des religieux. Il demande que, conformément aux décisions des conciles généraux et des souverains pontifes, au Concordat , semblable en ce point à la pragmatique sanction, et pour obvier à une multitude de procès et de dissensions scandaleuses, les abbayes et les prieurés ne soient dorénavant conférés" qu’à des réguliers choisis selon les canons, parmi les religieux du monastère dépourvu de supérieur ; et comme ce n’est ni la cupidité ni l’avarice qui le guide dans cette pétition, mais le désir de voir les choses rentrer dans l’ordre, il fait connaître qu’il souhaiterait que le bien des abbayes continuât d’être partagé en trois portions : la première serait destinée à l’entretien des religieux, y compris l’abbé ; la seconde aux réparations des bâtiments, aux dépenses éventuelles et inattendues, et au soutien des pauvres du lieu ; la troisième au soulagement des monastères ou communautés pauvres, des hôpitaux, écoles pies, curés hors d’état de continuer leurs fonctions, vicaires de campagne et prêtres habitués des villes auxquels le nécessaire manque souvent. Le clergé régulier désirerait qu’on employât aussi aux mêmes usages les prieurés simples qui ne dépendent d’aucun monastère actuellement existant. Pour entrer dans les vues des fondateurs, il demande qu’on ait soin que le bien des abbayes, prieurés, etc., ne sorte du district oit du diocèse où les bénéfices sont situés. Demandent, en outre, les religieuses bénédictines de la ville d’ Ardres, qu’au cas où Sa Majesté acquiesce à la pétition du tiers-état de cette ville touchant ses fortifications, elle veuille bien dans cette concession arrêter qu’il sera restitué à ladite commune une portion de terrain égale à celle qu’elle a cédée ci-devant de ses propres pour les besoins de la ville ou le service du Roi. Arrêté en l’assemblée tenue à Calais le 23 mars 1789, en présence et du consentement unanime de tous les membres du clergé des villes et gouvernement desdits Calais et Ardres, connus et mentionnés en notre procès-verbal dudit jour, par nous président et commissaires soussignés ; ont aussi signé Chavam , curé doyen de Calais ; Antoine Fasquel,curé d’Ardres; Riccaille, curé deFrethun; Délatre,curé deNielle-les-Ardres; Pirou ; Faudier, prêtre secrétaire, et Chavain, ne varietur. Collationné et délivré la présente expédition par nous, greffier de la justice générale de Calais, soussigné, audit Calais, le 6 avril 1789. Signé François. Nous, Eustache-Antoine Richard de Béhague, écuyer, seigneur deRocmontCroixi, et autres lieux, conseiller du Roi, président lieutenant général et seul commissaire au siège de la justice générale de Calais et pays reconquis, certifions à tous qu’il appartiendra que Me François, qui a collationné et délivré l’expédition ci-dessus, est greffier en chef de cette juridiction et qu’aux actes qu’il collationne signe et délivre en cette qualité, foi est et doit être ajoutée, tant en jugement que dehors, en témoin de quoi nous avons signé ces présentes, icelles fait contre-signer par ledit greffier et sceller du sceau de cette justice, audit Calais le 13 avril 1789. Signé Béhague. Par mondit sieur, signé François. CAHIER De l’ordre de la noblesse du Calaisis et de l’Ardré -> sis (1). Du 23 mars 1789. Ce jourd’hui23 mars 17 89, huit heures du matin, les membres de la noblesse de la justice générale de Calais, pays conquis et reconquis, du bailliage secondaire de la ville d’Àrdres et de l’Ardrésis, étant assemblés en l’hôtel commun dudit Calais, sous la présidence de messire Antoine Charles Jacomet de Bienassise, chevalier, maréchal des camps et armes du Roi, sous-lieutenant commandant des villes, forts, citadelle de Calais et en second dans la province du Calaisis, pays conquis et reconquis, assisté de messire Louis-Marie Blan-quart de Sept-Fontaines, écuyer, procureur syndic de la noblesse de l’assemblée du département de Calais, Montreuil et Ardres, secrétaire nommé par délibération du 11 du présent mois, MM. Delabou-lie, Dalantum, Filley de Labarre, Blanquart de Bailleul, de LaGorgue de Rony, commissaires choi-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Cakis et Ardres.] §07 sis pour la rédaction du cahier de l’ordre de la noblesse, ont présenté ce qui suit : Le député déposera aux pieds du trône les vœux que la noblesse des gouvernements de Calais et de l’Ardrésis forme pour la prospérité de la maison régnante et les assurances de son profond respect, de son amour, de sa fidélité et de son dévouement pour l’auguste prince qui gouverne aujourd’hui la France. Appelé à l’emploi glorieux mais pénible de seconder les vues bienfaisantes du monarque, de répondre aux grandes espérances de la nation en coopérant à l’extinction des abus et au rétablissement de l’ordre, il s’occupera, de concert avec les autres députés, à raffermir les bases de notre constitution, et il avisera aux moyens les plus sûrs de garantir la liberté, la vie, l’honneur et les propriétés de tous les individus de l’ordre social. A cet effet il demandera : Que la loi ne puisse être que l’énonciation de la volonté générale de la nation exprimée par ses représentants et sanctionnée par le Roi revêtu de toute la puissance exécutive. Que les Etats généraux qui sont la seule voie d’empêcher le retour des maux actuels du royaume, soient convoqués tous les deux ans, en un certain lieu et à une époque déterminée. Que dans la prochaine tenue, l’organisation des assemblées subséquentes soit fixée conformément aux intérêts des différents ordres , de manière à opérer la représentation la plus légale et la plus régulière, et à cet effet le député proposera d’accorder à tout citoyen la faculté de nommer immédiatement les représentants aux E tats gén éraux , d’en fixer le nombre dans la proportion d’un pour l'ordre du clergé, de deux pour l’ordre de la noblesse et de trois pour la commune. 11 demandera que les suffrages soient comptés par tête et non par ordre ; Qu’avant de se dissoudre, l’assemblée arrête le terme où elle devra de nouveau se convoquer, non pas individuellement, mais en procédant à sa composition dans la forme qui aura été déterminée ; Que, dans les bureaux particuliers qui pourront être établis, il ne soit rien statué sur les objets qui seront soumis à leur examen, et que le principe qui interdit au délégué le droit de déléguer à son tour, soit rigoureusement observé. La liberté étant de tous les droits le plus précieux à L’homme, le député ne perdra point de vue les atteintes qui depuis si longtemps y sont portées ; appuyé de ses collègues, il ne cessera d’insister, jusqu’à ce que, par une loi formelle, rendue fondamentale, il soit établi qu’à l’avenir et sous quelque prétexte que se soit, aucun Français ne puisse, en tout ou en partie, être privé de sa liberté soit par lettre de cachet ùont le nom doit être à jamais proscrit, soit par ordre supérieur ou tout autrement. Il demandera que les prisons d’Etat, monuments de l’abus du pouvoir et des vengeances ministérielles, soient détruites. Que nulle personne ne soit arrêtée que par ordonnance de son juge compétent, ou que dans les cas extraordinaires le citoyen arrêté soit remis à l’instant même entre les mains du juge naturel. Que, dans toutes les circonstances, il soit interrogé dans les vingt-quatre heures et élargi avec ou sans caution, s’il n’estpas violemment soupçonné d’un crime punissable de peines afflictives. Le député demandera que cette liberté s’étende au pourvoir de faire imprimer ce que l’on jugera à propos, sauf à punir, après l’impression, les auteurs des écrits que la loi aura déclarés criminels, en évitant toujours les décisions arbitraires. Que les abus de confiance si révoltants et si inutiles qui se commettent journellement aux dépôts des lettres, soient défendus sous des peines très-sévères et que tous écrits ou correspondances particulières soient déclarés sacrés et inviolables. La vie, l’honneur et la fortune des citoyens placés sous la sauvegarde des lois , n’avant que trop souvent été les victimes de leur imperfection, le député demandera qu’elles soient réformées, et à cet effet il proposera : Qu’il soit fait un code aussi doux et aussi précis qu’il sera possible. Que les tribunaux soient composés de juges éclairés et non suspects, sans que l’autorité puisse en donner de §on choix, ni établir aucune commission. Qu’afîn de procurer à l’innocence toutes les ressources pour se défendre , les charges soient communiquées aux accusés, qu’il leur soit donné un conseil et que l’instruction soit publique. 11 proposera de réunir les lois civiles en un seul code; de simplifier la procédure et de ne lui laisser des anciennes formes que ce qu’il en faut pour conserver à chacun ses droits. De supprimer la vénalité des charges ainsi que les offices municipaux non rachetés parles villes; il demandera que les officiers ne soient pourvus que sur la représentation des justiciables. Il demandera que la justice soit administrée promptement et gratuitement à tous par juges compétents et non suspects. Que l’usage des commissions extraordinaires et des évocations soit entièrement aboli. Qu’aucune autorité ni aucune force ne puisse enlever même au plus faible des citoyens, sa propriété mobilière ou immobilière quelle qu’en soit la nature, si ce n’est pour les services absolument nécessaires à l’Etat et jugés tels, à la charge d’estimer en ce cas au plus haut prix, et de payer comptant au propriétaire la chose dont il faudra qu’il se prive, à la charge encore que sa position n’en souffre aucun préjudice ou détérioration. Qu’à l’avenir aucune personne ne pourra être destituée de son emploi, office ou charge civile et militaire, qu’au préalable il ne lui ait été fait son procès par un tribunal compétent, à moins que l’on ne soit pourvu que par une simple commission et que l’on ne puisse en la perdant être soupçonné d’avoir manqué à l’honnenr, à la probité et à la délicatesse. Tels sont les moyens généraux d’assurer au citoyen la conservation de sa liberté, de sa vie et de ses biens ; en échange et pour prix de ces avantages, il est juste qu'il contribue à l’entretien du corps politique, mais à ce sacrifice il a le droit incontestable de mettre des conditions. Le député demandera donc : 1° Que tous les principes de la législation et de la constitution nationale soient avant tout décrétés par les Etats généraux et sanctionnés par le Roi; 2° Qu’il en soit de même aux Etats généraux postérieurs dans lesquels on commencera par rétablir les peuples dans leurs droits et privilèges s’ils en ont perdu aucun. Concurremment avec les autres députés, il vérifiera ensuite l’état des finances, constatera la dette nationale et la consolidera de manière à affermir le crédit public. Avant d’octroyer aucun impôt, il obtiendra toutes les suppressions et économies possibles. 508 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Calais et Ardres. A cet effet il demandera la suppression des gouvernements généraux et particuliers des commandants de provinces , des chefs divisionnaires, des états-majors de l’armée, des commissaires des guerres, celle des grandes charges militaires, civiles, de la marine, enfin celle de toutes les places , emplois et commissions ou de luxe ou inutiles et dont le service peut se suppléer; Que toutes les pensions accordées, quelle que soit leur dénomination, et les fonds sur lesquels elles sont affectées, soient réunies dans un même état, qu’il soit fait un examen des motifs qui les ont fait accorder, que toutes celles qui n’ont pas des services réels pour objet soient supprimées, et notamment celles des ministres qui ne sont plus en place ; Que le total de l’état des pensiçns soit fixé à ..... millions, et que jusqu’à ce qu’il soit réduit à cette somme, il ne soit accordé de pension que le quart des extinctions annuelles ; Que le Roi soit supplié de rendre publique tous les six mois par la voie de l’impression la liste des dons, gratilications, pensions, offices et places accordés pendant chaque semestre et les noms des personnes qui les ont obtenus, et pareillement de rendre public tous les ans le tableau ou compte général et détaillé des finances, recettes et dépenses de l’année; Que les dépenses de chaque département soient réduites et arrêtées , Que le nombre des officiers généraux soit réduit à celui nécessaire pour le commandement des armées, en augmentant celui des officiers inférieurs et des bas officiers ; Qu’il soit fait une réforme dans l’armée quant au nombre des troupes stipendiées en temps de paix ; Que ceux des évêchés et archevêchés dont les revenus sont excessifs soient réduits. Le député demandera pareillement qu’il soit procédé à la révision des accensements etéchanges des biens domaniaux depuis l’avénernent du Roi au trône ; Que ceux faits contre l’intérêt de l’Etat soient annulés ; Que les Etats généraux déterminent sur l’administration et la disposition des biens du domaine, le parti qu’ils jugeront le plus favorable, et que s’ils le croient utile ils fassent même l’aliénation perpétuelle des biens domaniaux, aux conditions et pour les destinations qui leur paraîtront les plus avantageuses, à l’exception toutefois des bois et forêts de Sa Majesté; Que dans ce cas le Roi soit supplié de fixer la dépense et l’entretien de sa maison, avec la magnificence qui convient au plus puissant monarque de l’Europe. Il demandera la suppression des annates, qui font passer au delà des monts des sommes considérables, et celle des ordres religieux, dont les maisons ne sont plus propres aujourd’hui qu’à former de gros bénéficiers, et à nourrir une foule d'ecclésiastiques pour la plupart étrangers aux soins des âmes et aux fonctions de leur ordre. Le crédit national une fois rétabli par la reconnaissance solennelle de la dette publique et des droits constitutionnels du royaume , il est un moyen d’augmenter les richesses de l’Etat, d’en améliorer les finances et de ménager les peuples, moyen que nos voisins emploient avec les plus grands succès, et qui peut-être est aujourd’hui le seul capable de réparer les maux que des administrations meurtrières ont faits à la France : cette voie qui nous est ouverte est la création d’une banque nationale formée du consentement et sous l’inspection directe et immédiate des Etats généraux et sanctionnée de l’autorité royale. Le député proposera donc cet établissement, et si les avantages en sont reconnus, l’on prendra toutes les précautions que la sagesse humaine peut indiquer pour le consolider et lui donner un régime tout opposé au malheureux système de la régence. Toutes les économies et les retranchements épuisés, les dépenses fixées, les moyens de restauration et îes bonifications calculés en vertu du droit qu’a la nation de consentir et d’octrover l’impôt, de répartir l’impôt, de lever et de percevoir l’impôt, Le député se réunira aux autres députés pour examiner ceux déjà subsistants, et à leur égard il demandera : 1° Que les impôts qui frappent sur le tiers seul soient supprimés; 2° Que cette sujipression s’étende à tous ceux destructifs de l’industrie et du commerce ; 3° Que les barrières et douanes intérieures qui gênent la circulation entre les provinces, soient reculées aux frontières ; 4° Que les frontières où la culture du tabac est permise cessent de jouir de ce privilège; ' 5° Que si, malgré ie vœu des commettants, la gabelle subsistait, il soit arrêté que la perception de cet impôt se fasse à la sortie des lieux où le sel se fabrique ; le député insistera sur ces derniers articles, dont un des moindres avantages est de rendre à des professions utiles une armée d’employés et une multitude de contrebandiers. Il demandera que l’établissement du contrôle n’ait à l’avenir d’autre objet que de constater la date des différents actes, sans qu’ils puissent donner lieu à des perceptions devenues insupportables par leur énormité ; qu’il en soit de même des droits d’insinuation. Il demandera la suppression de l’office de juré-priseur, et la faculté à tout officier public de procéder aux ventes, aux conditions les plus agréables aux particuliers. Ces articles préalablement arrêtés, le député s’occupera de Rétablissement des impôts, pour remplacer ceux qui auront été détruits, et il demandera qu’il y soit procédé de la manière la moins onéreuse, partie sur les propriétés, partie sur les facultés personnelles, partie sur les consommations. il demandera qu’aucun impôt ou contribution personnelle, réel ou sur les consommations, direct ou indirect, manifeste ou déguisé sous quelque forme que ce puisse être, même sous prétexte de police, ne puisse être établi, levé et perçu dans aucun lieu du royaume, qu’en vertu de l’octroi libre et volontaire de la nation assemblée, sans qu’aucun corps de province, Etats provinciaux, assemblées provinciales, villes ou communautés puissent jamais donner leur consentement à -aucune levée de deniers ou contributions quelconques. Qu’aucun emprunt manisfeste ou déguisé, aucun papier circulant, aucun office ou commission de quelque nature qu’ils soient, ne puissent être établis et créés que par la volonté ou consentement de la nation réunie. Que nul impôt ou contribution ne puisse être établi qu’à temps et prorogé trois mois au delà du terme fixé pour la prochaine tenue des Etats généraux, qui, comme on l’a dit, ne doivent jamais être entre eux à plus de deux années d’intervalle, (Étais géfi. 1789. Gàhiets.] ARCHIVÉS PÀRLEMËNtAlRËS. [Bailliage de Càlais et Ardres.] 509 Il demandera que tous les citoyens de tout ordre, rang et dignité supportent, proportionnellement à leurs biens et facultés, la totalité des charges, impôts et contributions de toute nature, et que tout privilège relatif à cet objet soit aboli et qu’il n’y ait qu’un rôle unique. Que la levée et perception des impôts se fassent aux moindres frais et avec moins de rigueur qu’il sera possible. Que la répartition, assiette et perception des impôts octroyés par les Etats généraux, payements des dépenses locales, ainsi que de la portion de la dette nationale que les Etats généraux assigneront à chaque province, ne puissent être faites que par le receveur et préposés qu’auront choisis, sous l’autorité des Etat généraux , les administrations générales et particulières des provinces, auxquelles ils seront tenus de rendre compte et , de qui ils recevront les ordres, sans que jamais aucune autre personne puisse s’immiscer dans lesdites fonctions en vertu de quelque commission que ce puisse être. Que la totalité des impositions soit versée dans les trésors de l’Etat par les Etats provinciaux, à l’exception toutefois des sommes destinées pour les dépenses des provinces, lesquelles se prendront sur celles provenant des impositions. Que les receveurs et préposés soient déclarés coupables de crime capital, s’ils continuent la perception des impôts et contributions passé le jour indiqué par les Etats généraux, et avant que lesdits Etats en aient autrement ordonné; que ceux même des contribuables qui auront volontairement payé soient poursuivis comme infracteurs des droits, franchises et libertés de la nation. Tous les articles qui précèdent traitant d’objets essentiellement liés aux droits des citoyens et des peuples, fixant la limite du pouvoir respectif du monarque et de la nation, il est de la sagesse des Etats généraux de prévenir désormais la violation de ces droits sacrés. Or, unetriste et longue expérience nous instruisant que, de tous les chocs que peut éprouver le système de l’administration, les plusredoutables viennent delà grande autorité ministérielle, il est indispensable d’arrêter que les ministres chargés d’une partie d’administration soient désormais responsables aux Etats généraux de toute infraction aux lois, dèsprévaricatiqnsou fautes notables qu’ils auraient commises, et de désigner des tribunaux devant lesquels ils soient cités par la nation et punis des peines qui seront portées contre chaque espèce de contravention, sans que la puissance royale puisse les soustraire à la condamnation. Après s’être livré aux objets qui appartiennent au régime général du gouvernement, le député s’occupera de ceux qui concernent les administrations partielles. A cet effet, il demandera qu’il soit établi pour la province de Picardie des Etats provinciaux à l’instar de ceux du Dauphiné, sauf les changements que le local rendrait nécessaires ; Que les Etats soient indépendants des commissions départies ; Qu’ils aient la direction et l’inspection générale de tous les travaux publics de la province, de quelque espèce qu’ils soient. Il demandera qu’il soit sursis à ceux entrepris pour le dessèchement du Calaisis et de l’Ardrésis, jusqu’à ce que leur utilité ou leurs inconvénients aient été reconnus par des commissaires des deux pays ; Que désormais les propriétaires des biens ruraux cessent, pour ces mêmes biens, de contribuer en rien à la confection des ouvrages relatifs aux villes. Dans le cas où l’aliénation des domaines n’aurait pas lieu, le député demandera que les arpentages et bornages des biens limitrophes avec les domaines du Roi, lorsqu’ils seront nécessaires, se fassent partie aux dépens du domaine, partie aux dépens des propriétaires voisins. Le député accédera aux doléances du tiers-état du bailliage de Calais, relatives au tirage de la milice dans l’Ardrésis et des gardes-côtes dans le Calaisis, ainsi qu’au commerce, et il insistera principalement : Sur la suppression des franchises des ports, comme destructives des manufactures nationales, du commerce des villes voisines et des droits du fisc. Il demandera encore que tout privilège exclusif pour une branche de commerce ou de navigation quelconque, tant par mer que par les rivières ou canaux, soit supprimé ; Que l’importation des objets de première nécessité, tels que graines, bois, charbon de terre, soit affranchie de tous les droits qui pourraient la gêner, et qu’à cet égard tout privilège particulier soit anéanti; Que, pour les objets susceptibles de’payer quelques droits, il soit dressé un tarif exact et précis où d’un coup d’œil on puisse voir ce qui est légitimement dû, et que le receveur qui abuserait de l’ignorance du payeur pour outre-passer la perception fixée soit poursuivi extraordinairement et puni comme concussionnaire. 11 demandera encore que le traité de commerce avec l’Angleterre soit soumis à l’examen des Etats généraux, et qu’il soit pris tous les moyens possibles pour en diminuer les funestes effets. Le député demandera qu’il soit formé des établissements d’éducation nationale proportionnés aux besoins de chaque canton du royaume; qu’il soit pourvu à ce que tous les moyens d’instruction y soient répandus. L’intérêt général étant à la fois d’empêcher la capitale d’attirer à elle tous les revenus des provinces et de diminuer son immense population, il est important d’obliger à une résidence constante les évêques et les archevêques qui d’ailleurs se doivent aux soins de leurs diocésains, A leur égard, il serait encore utile d’établir un synode annuel par diocèse où chaque ordre pourra porter ses griefs, un concile national tous les trois ans, ainsi qu’un règlement général sur le traitement des pasteurs, règlement qui, leur assurant un revenu suffisant, les mette à portée d’exercer dans toute son étendue la sainteté de leur ministère. Le député demandera une nouvelle ordonnance militaire, claire, précise, dérogeante à toute ancienne, s’il y a lieu, et dont l’esprit pour les exercices, pour les devoirs, pour les récompenses et pour les peines, soit puisé dans le génie bien connu de la nation. 11 demandera une amnistie générale pour tous les déserteurs. Le député ne bornera pas son zèle à faire reconnaître les droits des individus qui peuplent la France, et se rappellera que dans un autre hémisphère, il est plusieurs Centaines de milliers d’hommes qui, sous l’autorité des lois et sous l’empire du monarque des Francs, gémissent dans les fers de l’esclavage éternel et réclament en vain, depuis deux siècles, la jouissance du premier bienfait de la nature, de la liberté ; justement indigné dé cet outrage fait aux droits de l’humanité, il demandera qu’il soit établi une commis- 510 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Calais et Àrdres. sion chargée d’examiner les moyens de proscrire la traite des nègres et de préparer la destruction de l’esclavage dans nos colonies. Avant de terminer les instructions dont les objets ne sont pas tous d’une égale importance, il est essentiel de recommander encore au député qui sera choisi, de n’accéder à aucune demande d’impôt et d’emprunt, qu’au préalable et avant tout il n’ait été arrêté et statué : lo Que l’assemblée sera déclarée constitutionnelle ; 2° Que les Etats généraux s’assembleront à terme certain et périodique ; qu’ils détermineront leur organisation et fixeront, avant de se dissoudre, le temps et le lieu où ils devront de nouveau se convoquer ; 3° Que la loi n’est que l’expression de la volonté générale sanctionnée par le Roi, sans que rien puisse suppléer le consentement de la nation ; 4° Que la liberté individuelle de chaque citoyen sera sous la sauvegarde des lois, sans qu’aucune autorité puisse arbitrairement l’attaquer ; 5° Que la nation a seule le droit d’établir, d’asseoir et de lever l’impôt ; 6° Qu’elle seule a la faculté de faire des emprunts ; 7° Qu’enfin elle pourra désormais citer à son tribunal les ministres prévaricateurs. Tous les membres qui composent cette assemblée, se confiant à la grandeur d’âme de leur prince, se flattent avec le reste du royaume qu’il écoutera favorablement les justes plaintes qui vont lui être adressées ; que, dédaignant le dangereux attrait de régner sur les débris des lois politiques, il érigera lui-même le monument de la liberté française et-posera la limite salutaire où s’arrête le pouvoir souverain, se réservant alors de sa puissance seulement la portion qu’il doit en conserver pour la félicité de ses sujets et qu’il est si digne d’exercer. Louis XVI, l’exemple et l’admiration de tous ceux que le ciel destine à porter le sceptre, adoré de sa nation dont il aura fondé le bonheur, obtiendra le titre glorieux et non mérité jusqu’à lui de restaurateur des droits et des privilèges de ses peuples. Ce qui a été reçu et arrêté du consentement unanime de tous les membres de l’assemblée, lesquels, avec le président, commissaire et secrétaire susdits, ont signé sur la minute du présent cahier. qui servira d’instruction au député qui sera choisi. Ainsi signé Jacomet, de Bienassise, Laboulie, de Rony, Daiantum, Filley de Labarre, Blanquart de Bailleul, le comte de Calonne-Courtebonne, Gui-selin fils, Du Tremblay, Deguiselin-Grandmaison, Guiselin-Bienassise, baron de Colbert, le chevalier d’Essaux, Dutremblay fils, le comte Amédée Decourtebonne, le chevalier de Fienne, le chevalier de Foucault, de La Gorsière, Raoult de Chantraine, BoucheldeMerenvue de Camyn,Demagrats, Desessarts, le chevalier d’Arnaud, Dereynaud d’Arnaud, Hobacq, Erendale Delarouville, Bourdin de Fremois, baron de Moyceque, Raoult de Rudeval, d’Aix de Bignopré, le vicomte de La Cressonnière, Bodart de Buire, Delabarre, de Sept-Fontaines, le vicomte des Andronins et Jacomet de Bienassise. Paraphé ne varietur , signé Béhague. Collationné et délivré la présente expédition conforme à la minute déposée au greffe de la justice générale de Calais , par nous, greffier de ladite justice, soussigné, audit Calais, le 6 avril 1789. Signé François. Nous, Eustache-Antoine Richard de Béhague, écuyer, seigneur de Rocmont, Groixi et autres lieux, conseiller du Roi, président, lieutenant général et seul commissaire au siège de la justice générale de Calais et pays reconquis, certifions à tous qu’il appartiendra que M. François qui a collationné et délivré l’expédition ci-dêssusest greffier en chef de cette juridiction, et qu’aux actes qu’il collationne, signe et délivre en cette qualité, foiestdueet doit être ajoutée tant en jugement que dehors. En témoin, à Calais, le 17 mars 1789. Signé François. CAHIER GÉNÉRAL. Bu tiers-état des bailliages de Calais et Ardres (1). Ce jourd’hui 16 mars 1789, le ti.ers-état du Ca-laisis et de l’Ardrésis, assemblé par ses députés en l’hôtel-de-ville de Calais, a réuni, comme il suit ses remontrances et doléances. Les députés déposeront dans le cœur de Sa Majesté les vœux de son tiers du Calaisis et de l’Ardrésis, l’expression de sa fidélité, de son amour et de sa confiance. Animés de l’esprit de leurs commettants, chargés spécialement de concourir aux vues bienfaisantes du Roi, de répondre aux grandes espérances de la nation, ils pourvoiront à la restauration de la chose publique, à la consolidation de la dette nationale et à l’établissement d’un ordre qui assure la liberté et le bonheur de tous. A cet effet, pour leur servir d’instruction, il a été convenu et arrêté : PREMIÈRE PARTIE. Principes généraux. Que le gouvernement français est un gouvernement monarchique ; Que les lois obligent et le monarque et ses sujets ; Que leur observation fait le bonheur du souverain et la prospérité des peuples; Qu’à la nation seule appartient le droit de consentir et d’octroyer l’impôt ; Qu’à la nation seule appartient le droit de répartir l’impôt ; Qu’à la nation seule appartient le droit de lever et percevoir l’impôt. Leurs députés demanderont, pour sauvegarde de la constitution, que les ministres soient comptables de leur conduite à la nation ; Que leur pouvoir soit limité , et qu’ils ne puissent, en vertu d’ordres particuliers, imposer aucunes charges aux villes ni aux provinces. Ils s’uniront aux autres représentants pour exposer que les tenues d’Etats généraux sont le seul moyen de prévenir le retour des maux actuels de la nation; Ils demanderont que leur convocation soit à terme fixe, et qu’elle ne puisse être reculée au delà de trois ans ; Que, pour faciliter celles subséquentes, leur organisation soit déterminée de manière à opérer la représentation la plus régulière ; Que l’égalité des réprésentants entre les deux premiers ordres et le tiers demeure irrévocablement fixée; Que les suffrages soient comptés par tête et non par ordre. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat.