384 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Dès lors on ne peut raisonnablement penser que le comité ait eu l’intention de présenter dans une loi de rigueur une mesure qui en paralyserait l’exécution; cependant il faut avouer que la rédaction de l’article XXXI a pu induire en erreur les administrations de département et de district. En effet, cet article porte : «Les détenteurs de domaines et droits domaniaux mentionnés, etc., sont tenus d’en faire la déclaration, etc., d’ici au premier jour de ventôse, ou dans la décade de la sommation qui leur en sera faite par l’administration de l’enregistrement et des domaines, etc. » Par cette rédaction on a pu croire que l’administration était tenue de faire la sommation, et que le détenteur pouvait l’attendre pour faire sa déclaration dans les dix jours après cette sommation; car si on eût voulu laisser la faculté à l’administration de faire ou de ne pas faire la sommation, on aurait dit : « Dans les dix jours de la sommation qui leur serait faite » : mais le texte de la loi semble impératif (qui leur sera faite). Si donc les administrations elles-mêmes ont pu être induites en erreur par ce vice de rédaction, si elles l’ont été en effet, et si, consultées par leurs administrés, elles ont propagé cette erreur, le peuple, je le répète, ne doit point en être la victime. Il le serait si la Convention laissait subsister la partie du décret rendu hier, « qui charge l’administration des « domaines de poursuivre l’exécution de la loi « du 10 frimaire contre tous détenteurs qui « n’auraient pas fait leur déclaration au 1er ven-« tose dernier ». La Convention, qui, dans toutes ses lois, n’a pour but que l’intérêt du peuple, ne souffrira pas que des malheureux soient privés des exceptions prononcées par la loi du 10 frimaire parce que, trompés par la rédaction même de l’art. XXXI de cette loi ou par la fausse interprétation que lui ont donnée plusieurs administrations, ils ont retardé leurs déclarations jusqu’à la sommation qu’ils croyaient devoir leur être faite. Je propose, en conséquence, de rapporter la partie du décret rendu hier, « qui « charge l’administration des domaines de pour-« suivre l’exécution de la loi du 10 frimaire « contre tous détenteurs qui n’auraient pas fait leurs déclarations au 1er ventôse... » et d’y substituer l’article suivant : « Et cependant, considérant qu’il serait injuste de rendre le peuple victime de l’erreur de ses administrateurs, proroge jusqu’au 1er prairial prochain le délai fixé pour faire la déclaration prescrite par l’article XXXI de ladite loi. » (1) . Après quelques discussions, la proposition est renvoyée aux comités des finances et domaines réunis (2). (1) Mon., XX, 322; J. Sablier, n° 1282; J. Mont., n° 164; Débats, n° 584, p. 88; M.U., XXXIX, 107. (2) P.V., XXXVI, 154. 26 Un membre [MARIBON-MONTAUT] expose que certaines administrations exigent encore des citoyens pourvus des places de receveur, des cautionnemens, sous prétexte que le décret qui les supprime n’est pas encore publié. Il demande que le décret du 14 pluviôse, qui abolit lesdits cautionnemens, soit inséré au bulletin, que l’insertion tienne lieu de publication, et que ledit décret ait son exécution à compter du 14 pluviôse dernier. Toutes ces propositions sont décrétées. Suit la teneur du décret : « Veauthier, nommé receveur du district de la Montagne-sur-Aisne par les représentans du peuple, écrit à la Convention qu’il lui est impossible d’offrir le cautionnement exigé par la loi. « La Convention nationale décrète qu’il ne sera plus exigé de cautionnement, et charge son comité des finances de lui présenter, sur cet objet un projet de décret » (1). 27 Un membre observe que le maire de la municipalité de Soissons a déposé hier sur le bureau de la Convention, la somme de 12,000 liv. en or, provenant d’une fouille faite chez un fabricateur de faux assignats, traduit au tribunal criminel du département de Paris : il demande que cette somme et les pièces qui y étoient jointes soient envoyées par le receveur des dons patriotiques à l’accusateur public, pour servir de pièces de conviction. La proposition est décrétée (2). 28 La commune de Paris envoie le détail des détenus dans les diverses maisons d’arrêt : le nombre se porte à 6,874 (3). [Commune de Paris, 7 flor. II. Etat des détenus au 6 flor.] (4), Noms des prisons Nb. de détenus Conciergerie. Grande-Force .......................... 734 Petite-Force ............................ 314 Irlandais, rue du Cheval-Vert ........... 10 (1) P.V., XXXVI, 134. Minute de la main de Maribon (C 301, pl. 1017, p. 40). Décret n° 8942. Reproduit dans Bin, 7 flor.; mention dans J. Sablier, n° 1282; Mon., XX, 321; Feuille Ré p., n° 288; J. Paris, 482; Sans-Culotte, n° 437; Audit, nat., n° 581; J. Mont., n° 165; M.U., XXXIX, 122; Mess, soir., n° 617; Rép., n° 128. Montagne-sur-Aisne = Ste-Menehould, Marne. (2) P.V., XXXVI, 154. (Cf., n» 41, séance du 6 flor.) : Mess, soir, n° 617. (3) P.V., XXXVI, 155. (4) C 302, pl. 1094, p. 14. Signé : Teurlot, Quenet. 384 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Dès lors on ne peut raisonnablement penser que le comité ait eu l’intention de présenter dans une loi de rigueur une mesure qui en paralyserait l’exécution; cependant il faut avouer que la rédaction de l’article XXXI a pu induire en erreur les administrations de département et de district. En effet, cet article porte : «Les détenteurs de domaines et droits domaniaux mentionnés, etc., sont tenus d’en faire la déclaration, etc., d’ici au premier jour de ventôse, ou dans la décade de la sommation qui leur en sera faite par l’administration de l’enregistrement et des domaines, etc. » Par cette rédaction on a pu croire que l’administration était tenue de faire la sommation, et que le détenteur pouvait l’attendre pour faire sa déclaration dans les dix jours après cette sommation; car si on eût voulu laisser la faculté à l’administration de faire ou de ne pas faire la sommation, on aurait dit : « Dans les dix jours de la sommation qui leur serait faite » : mais le texte de la loi semble impératif (qui leur sera faite). Si donc les administrations elles-mêmes ont pu être induites en erreur par ce vice de rédaction, si elles l’ont été en effet, et si, consultées par leurs administrés, elles ont propagé cette erreur, le peuple, je le répète, ne doit point en être la victime. Il le serait si la Convention laissait subsister la partie du décret rendu hier, « qui charge l’administration des « domaines de poursuivre l’exécution de la loi « du 10 frimaire contre tous détenteurs qui « n’auraient pas fait leur déclaration au 1er ven-« tose dernier ». La Convention, qui, dans toutes ses lois, n’a pour but que l’intérêt du peuple, ne souffrira pas que des malheureux soient privés des exceptions prononcées par la loi du 10 frimaire parce que, trompés par la rédaction même de l’art. XXXI de cette loi ou par la fausse interprétation que lui ont donnée plusieurs administrations, ils ont retardé leurs déclarations jusqu’à la sommation qu’ils croyaient devoir leur être faite. Je propose, en conséquence, de rapporter la partie du décret rendu hier, « qui « charge l’administration des domaines de pour-« suivre l’exécution de la loi du 10 frimaire « contre tous détenteurs qui n’auraient pas fait leurs déclarations au 1er ventôse... » et d’y substituer l’article suivant : « Et cependant, considérant qu’il serait injuste de rendre le peuple victime de l’erreur de ses administrateurs, proroge jusqu’au 1er prairial prochain le délai fixé pour faire la déclaration prescrite par l’article XXXI de ladite loi. » (1) . Après quelques discussions, la proposition est renvoyée aux comités des finances et domaines réunis (2). (1) Mon., XX, 322; J. Sablier, n° 1282; J. Mont., n° 164; Débats, n° 584, p. 88; M.U., XXXIX, 107. (2) P.V., XXXVI, 154. 26 Un membre [MARIBON-MONTAUT] expose que certaines administrations exigent encore des citoyens pourvus des places de receveur, des cautionnemens, sous prétexte que le décret qui les supprime n’est pas encore publié. Il demande que le décret du 14 pluviôse, qui abolit lesdits cautionnemens, soit inséré au bulletin, que l’insertion tienne lieu de publication, et que ledit décret ait son exécution à compter du 14 pluviôse dernier. Toutes ces propositions sont décrétées. Suit la teneur du décret : « Veauthier, nommé receveur du district de la Montagne-sur-Aisne par les représentans du peuple, écrit à la Convention qu’il lui est impossible d’offrir le cautionnement exigé par la loi. « La Convention nationale décrète qu’il ne sera plus exigé de cautionnement, et charge son comité des finances de lui présenter, sur cet objet un projet de décret » (1). 27 Un membre observe que le maire de la municipalité de Soissons a déposé hier sur le bureau de la Convention, la somme de 12,000 liv. en or, provenant d’une fouille faite chez un fabricateur de faux assignats, traduit au tribunal criminel du département de Paris : il demande que cette somme et les pièces qui y étoient jointes soient envoyées par le receveur des dons patriotiques à l’accusateur public, pour servir de pièces de conviction. La proposition est décrétée (2). 28 La commune de Paris envoie le détail des détenus dans les diverses maisons d’arrêt : le nombre se porte à 6,874 (3). [Commune de Paris, 7 flor. II. Etat des détenus au 6 flor.] (4), Noms des prisons Nb. de détenus Conciergerie. Grande-Force .......................... 734 Petite-Force ............................ 314 Irlandais, rue du Cheval-Vert ........... 10 (1) P.V., XXXVI, 134. Minute de la main de Maribon (C 301, pl. 1017, p. 40). Décret n° 8942. Reproduit dans Bin, 7 flor.; mention dans J. Sablier, n° 1282; Mon., XX, 321; Feuille Ré p., n° 288; J. Paris, 482; Sans-Culotte, n° 437; Audit, nat., n° 581; J. Mont., n° 165; M.U., XXXIX, 122; Mess, soir., n° 617; Rép., n° 128. Montagne-sur-Aisne = Ste-Menehould, Marne. (2) P.V., XXXVI, 154. (Cf., n» 41, séance du 6 flor.) : Mess, soir, n° 617. (3) P.V., XXXVI, 155. (4) C 302, pl. 1094, p. 14. Signé : Teurlot, Quenet. SÉANCE DU 7 FLORÉAL AN II (26 AVRIL 1794) - N° 29 385 Sainte -Pélagie .......................... Madelonnettes .......................... Montprin, rue N° Dme des Champs ..... Abbaye ................................. Bicêtre .................................. A la Salpêtrière ........................ Chambres d’arrêt, à la Mairie .......... Termes ................................. Luxembourg ............................ Maison de suspicion, rue de la Bourbe . . Brunet, rue de Buffon ................... Les Picpus, fauxbourg S. -Antoine ....... Réfectoire de l’abbaye .................. Caserne des Petits Pères ................. Les Angloises, rue Saint-Victor ......... Picquenot, rue et à Bercy ............... Les Angloises, rue de Loursine ........ Caserne rue de Vaugirard .............. Les Carmes, rue de Vaugirard ......... Les Angloises, fauxbourg St-Antoine .... Coignard à Picpus n° 6 ................. Ecossois, rue des fossés Saint-Victor .... Saint Lazare, fauxbourg Saint-Lazare . . . Mahay, rue du Chemin-Vert ...... ) Maison Escourbiac, rue S. -Antoine, j La Chapelle, rue de la Folie-Renaud .... Belhomme, rue Charonne, n° 70 ........ Bénédictins anglois, rue de l’Observatoire 257 292 50 109 904 523 173 33 653 494 49 206 118 47 140 35 119 97 368 72 41 102 670 30 30 100 114 Total général ........ 6,874 29 La section de Marat est admise à la barre, et offre à la Convention trois cavaliers armés et équipés (1) L’ORATEUR de la députation : Représentons du peuple français, Vous voyez la section de Marat qui vient elle même vous rendre grâce des bienfaits renaissans que vous ne cessez chaque jour de répandre sur la patrie, et vous offrir trois cavaliers armés, montés et équipés et prêts à voler aux frontières pour fondre sur les tyrans et pour les terrasser. Ils vous attestent par ma voix que deux d’en-tre-eux, Laporte, Winant, un autre nommé [blanc] cavalier de notre société populaire de l’Ami du peuple sont trois des réfugiés de Liège que leur tyran prélat avait précipité dans ses cachots, et qui n’en sont sortis que délivrés par nos défenseurs républicains; ceux-ci forcés de sortir de Liège par la trahison de l’infâme Dumouriez, ont emmené avec eux ces jeunes braves républicains qui brûlent comme cavaliers de concourir avec nous à délivrer Liège de leur tyran et à faire partie, au sein du lieu qui les a vu naître, de notre République immortelle et victorieuse. Vous avez accueilli avant hier un de leurs camarades avec bonté comme réfugié liégeois venu parmi nous, comme eux par la haine qu’ils ont tous vouée à leur tyran et à la tyrannie et par amour pour notre République et pour la Convention nationale. Quel plaisir eut-ce été pour moi de vous présenter en même temps cinq cavaliers dévoués comme autant de De-cius à la patrie et à la section de Marat, l’ami du peuple que j’ai défendu seul et nourri 3 jours contre une foule de ses persécutés armés jusqu’aux dents contre lui. Je l’avais caché 3 jours dans une des cellules des Cordeliers. 3 de ces cavaliers pour la section de Marat, dont un le citoyen Comtesse est un de nos braves de l’Alsace, un autre de la société populaire de Marat, et un cinquième, le citoyen Eglin, de 22 ans et de près de sept pieds de haut l’un des liégeois que notre dévouement aux ordres de la Convention ne nous a pas permis de vous présenter en même temps au nom du bataillon des vétérans, que j’ai créé dans le district des Cordeliers de l’aveu des 59 autres. O Montagne sacrée, jette un coup d’œil vivifiant sur ces braves cavaliers de la section de Marat et sur le vieillard qui te parle. Nous sommes tous prêts à voler pour te défendre et à aller jusques dans la nouvelle Carthage arborer le tricolore et y présenter le bonnet de la liberté (1) . (Applaudissements.) Réponse du PRESIDENT : Le héros, dont vous vous honorez de porter le nom, fut pendant toute sa vie la terreur des esclaves et l’effroi de tous les conspirateurs que son génie lui faisait découvrir sous quelques masques qu’ils aient cherché à se cacher. Les vils satellites des despotes n’ayant pu corrompre l’ami du peuple, l’ont fait assassiner; mais ils n’ont pu malgré toute leur scélératesse, assassiner son esprit et son courage, qu’ils nous a laissés pour héritage. C’est l’héritage de la vertu; la vertu seule a le droit exclusif de le réclamer et de le recueillir. Vous, généreux défenseurs de la patrie, vous qui allez, sous les 'auspices de Marat, combattre ses ennemis, souvenez-vous qu’il fut l’ami du peuple et le défenseur incorruptible de ses droits, et qu’il est mort pour les faire triompher. Voilà, citoyens, quelles que soient nos fonc-tios respectives, voilà les devoirs que l’ombre de Marat qui plane au milieu de nous, nous impose à tous l’obligation de remplir; voilà le modèle que nous devons tous nous empresser de retracer; et vous surtout, soldats de la patrie, montrez-vous dignes de la section qu’habitait Marat, et qui vous procure aujourd’hui l’honneur d’aller sur les frontières venger la mort de ceux de nos frères qui ont eu le glorieux avantage d’arroser de leur sang les lauriers dont se couvrent partout les armées de la République. Mourez pour elle, s’il le faut, comme l’immortel ami du peuple, votre glorieux patron, et comme lui, vous vivrez à jamais dans la mémoire des républicains reconnaissans que vous laisserez après vous pour recueillir le fruit de vos travaux guerriers. La Convention reçoit avec satisfaction l’hommage que vous venez de lui offrir de 3 cavaliers armés et vous accorde les honneurs de la séance (2) . (1) P.V., XXXVI, 155. Bin, 8 flor.; J. Perlet, n° 582; M.U., XXXIX, 92; Mon., XX, 322; J. Univ., n° 1625. (1) C 303, pl. 1106, p. 13; M.U., XXXIX, 124; Ann. patr., n° 481; J. Mont., n° 165. (2) Débats, n° 586, p. 113. 28 SÉANCE DU 7 FLORÉAL AN II (26 AVRIL 1794) - N° 29 385 Sainte -Pélagie .......................... Madelonnettes .......................... Montprin, rue N° Dme des Champs ..... Abbaye ................................. Bicêtre .................................. A la Salpêtrière ........................ Chambres d’arrêt, à la Mairie .......... Termes ................................. Luxembourg ............................ Maison de suspicion, rue de la Bourbe . . Brunet, rue de Buffon ................... Les Picpus, fauxbourg S. -Antoine ....... Réfectoire de l’abbaye .................. Caserne des Petits Pères ................. Les Angloises, rue Saint-Victor ......... Picquenot, rue et à Bercy ............... Les Angloises, rue de Loursine ........ Caserne rue de Vaugirard .............. Les Carmes, rue de Vaugirard ......... Les Angloises, fauxbourg St-Antoine .... Coignard à Picpus n° 6 ................. Ecossois, rue des fossés Saint-Victor .... Saint Lazare, fauxbourg Saint-Lazare . . . Mahay, rue du Chemin-Vert ...... ) Maison Escourbiac, rue S. -Antoine, j La Chapelle, rue de la Folie-Renaud .... Belhomme, rue Charonne, n° 70 ........ Bénédictins anglois, rue de l’Observatoire 257 292 50 109 904 523 173 33 653 494 49 206 118 47 140 35 119 97 368 72 41 102 670 30 30 100 114 Total général ........ 6,874 29 La section de Marat est admise à la barre, et offre à la Convention trois cavaliers armés et équipés (1) L’ORATEUR de la députation : Représentons du peuple français, Vous voyez la section de Marat qui vient elle même vous rendre grâce des bienfaits renaissans que vous ne cessez chaque jour de répandre sur la patrie, et vous offrir trois cavaliers armés, montés et équipés et prêts à voler aux frontières pour fondre sur les tyrans et pour les terrasser. Ils vous attestent par ma voix que deux d’en-tre-eux, Laporte, Winant, un autre nommé [blanc] cavalier de notre société populaire de l’Ami du peuple sont trois des réfugiés de Liège que leur tyran prélat avait précipité dans ses cachots, et qui n’en sont sortis que délivrés par nos défenseurs républicains; ceux-ci forcés de sortir de Liège par la trahison de l’infâme Dumouriez, ont emmené avec eux ces jeunes braves républicains qui brûlent comme cavaliers de concourir avec nous à délivrer Liège de leur tyran et à faire partie, au sein du lieu qui les a vu naître, de notre République immortelle et victorieuse. Vous avez accueilli avant hier un de leurs camarades avec bonté comme réfugié liégeois venu parmi nous, comme eux par la haine qu’ils ont tous vouée à leur tyran et à la tyrannie et par amour pour notre République et pour la Convention nationale. Quel plaisir eut-ce été pour moi de vous présenter en même temps cinq cavaliers dévoués comme autant de De-cius à la patrie et à la section de Marat, l’ami du peuple que j’ai défendu seul et nourri 3 jours contre une foule de ses persécutés armés jusqu’aux dents contre lui. Je l’avais caché 3 jours dans une des cellules des Cordeliers. 3 de ces cavaliers pour la section de Marat, dont un le citoyen Comtesse est un de nos braves de l’Alsace, un autre de la société populaire de Marat, et un cinquième, le citoyen Eglin, de 22 ans et de près de sept pieds de haut l’un des liégeois que notre dévouement aux ordres de la Convention ne nous a pas permis de vous présenter en même temps au nom du bataillon des vétérans, que j’ai créé dans le district des Cordeliers de l’aveu des 59 autres. O Montagne sacrée, jette un coup d’œil vivifiant sur ces braves cavaliers de la section de Marat et sur le vieillard qui te parle. Nous sommes tous prêts à voler pour te défendre et à aller jusques dans la nouvelle Carthage arborer le tricolore et y présenter le bonnet de la liberté (1) . (Applaudissements.) Réponse du PRESIDENT : Le héros, dont vous vous honorez de porter le nom, fut pendant toute sa vie la terreur des esclaves et l’effroi de tous les conspirateurs que son génie lui faisait découvrir sous quelques masques qu’ils aient cherché à se cacher. Les vils satellites des despotes n’ayant pu corrompre l’ami du peuple, l’ont fait assassiner; mais ils n’ont pu malgré toute leur scélératesse, assassiner son esprit et son courage, qu’ils nous a laissés pour héritage. C’est l’héritage de la vertu; la vertu seule a le droit exclusif de le réclamer et de le recueillir. Vous, généreux défenseurs de la patrie, vous qui allez, sous les 'auspices de Marat, combattre ses ennemis, souvenez-vous qu’il fut l’ami du peuple et le défenseur incorruptible de ses droits, et qu’il est mort pour les faire triompher. Voilà, citoyens, quelles que soient nos fonc-tios respectives, voilà les devoirs que l’ombre de Marat qui plane au milieu de nous, nous impose à tous l’obligation de remplir; voilà le modèle que nous devons tous nous empresser de retracer; et vous surtout, soldats de la patrie, montrez-vous dignes de la section qu’habitait Marat, et qui vous procure aujourd’hui l’honneur d’aller sur les frontières venger la mort de ceux de nos frères qui ont eu le glorieux avantage d’arroser de leur sang les lauriers dont se couvrent partout les armées de la République. Mourez pour elle, s’il le faut, comme l’immortel ami du peuple, votre glorieux patron, et comme lui, vous vivrez à jamais dans la mémoire des républicains reconnaissans que vous laisserez après vous pour recueillir le fruit de vos travaux guerriers. La Convention reçoit avec satisfaction l’hommage que vous venez de lui offrir de 3 cavaliers armés et vous accorde les honneurs de la séance (2) . (1) P.V., XXXVI, 155. Bin, 8 flor.; J. Perlet, n° 582; M.U., XXXIX, 92; Mon., XX, 322; J. Univ., n° 1625. (1) C 303, pl. 1106, p. 13; M.U., XXXIX, 124; Ann. patr., n° 481; J. Mont., n° 165. (2) Débats, n° 586, p. 113. 28