474 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { Vdc�mbî" 1793 XIII. Lettre des représentants Monestier, (Sar¬ rau et Pinet aîné par laquelle ils trans¬ mettent DIVERS DONS PATRIOTIQUES ET ANNONCENT LA PRISE DE DEUX NAVIRES, l’un HOLLANDAIS, L’AUTRE ANGLAIS (1). Suit le texte de cette lettre d’après l’original qui existe aux Archives nationales (2). Les représentants du peuple Monestier, Garrau et Pinet aîné, à la Convention nationale. «Bayonne, le 1er nivôse, l’an II de la Répu¬ blique, une et indivisible. « Citoyens collègues, « Nous vous faisons passer quelques dons que le patriotisme a déposés dans nos mains pour être mis sur l’autel de la patrie, En voici la note, ainsi que le nom de ceux qui ont fait les offrandes. « 408 livres en numéraire, données par les chasseurs de Tarbes, actuellement dans la division de Saint-Jean-Pied-de-Port, destinées pour le premier soldat qui entrera dans la ville rebelle de Toulon-« Un jeune enfant, fils du citoyen Ducos, directeur du parc d’artillerie, nous a porté le fruit de ses petites épargnes : j’aime mieux, nom a-t-il dit, me priver de bonbons que de laisser sans secours nos braves soldats, voilà pour le premier brave qui entrera dans Toulon (cet enfant a 7 ans). Il nous a remis un écu de 6 livres, 4 pièces de 30 sols, une de 15 et une pièce espagnole. « Une commune basque, nommée G-arris, nous a fait passer en assignats, 342 liv. 5 s. pour les familles des Français morts dans la guerre de la Vendée. « Nous vous prions, citoyens collègues, de vouloir bien faire insérer dans le Bulletin ces divers dons, la publicité de pareilles offrandes est une douce récompense pour ceux qui les ont faites. « Nous vous envoyons aussi 5 décorations militaires déposées en nos mains par de braves militaires. « Nous faisons tous les jours le coup de fusil avec les Espagnols, le comité de Salut public doit vous avoir fait part des dispositions avan-tageuses que nous avons prises, elles sont de nature à inquiéter vivement nos ennemis et à nous assurer des succès assurés (sic) au prin¬ temps. Dans une de ces actions journalières, dans laquelle nous avons eu, comme à l’ordi¬ naire, l’avantage, nos braves soldats ont enlevé à l’Espagnol, avec leur bravoure ordinaire, un guidon, Vous pouvez compter, citoyens collègues, que l’armée des Pyrénées-Occidenta¬ les est digne de la République et qu’il ne faut, (1) La lettre des représentants Monestier, Garrau et Pinet aîné n’est pas mentionnée au proeès-yerbal de la séance du 9 nivôse an II; mais on en trouve des extraits dans les comptes rendus de cette Séance, publiés par la plupart des journaux de l’époque. (2) Archives nationales, carton G 287, dossier 867 ièce 9. Bulletin de la Convention nationale du nivôse an II (dimanche 29 décembre 1793). pour qu’elle en donne des preuves éclatantes’ qu’une grande occasion. « Nos braves marins, surtout ceux de Chauvin-Dragons (ci-devant Saint-Jean-de-Luz, vieux style calotin), ont voulu se signaler aussi. Ils ne le cèdent en courage ni en amour pour la patrie à leurs frères d’armes qui combattent aux frontières. Quelques voiles ayant été signalées comme ennemies, ils se sont jetés dans des chaloupes et, 4 la barbe des Espagnols, ils se sont emparés de deux navires, l’un hollandais, l’autre anglais, allant en Espagne, chargés de riz, de chanvre, de fer, de tabac et de toile à voile. Ces deux prises sont évaluées 400.000 livres (1). « Salut et fraternité. « Pinet aîné; Monestier (du Puy-de-Dôme). XIV. Lettre du représentant Roüx-Fazillac PAR LAQUELLE IL transmet UN ARRÊTÉ PRIS PAR LUI POUR LA DÉMOLITION DES TOURS, CRÉNEAUX, TERRASSES ET COURTINES DES CHATEAUX (2). Suit le texte de la lettre et de l’arrêté de Boux-Faxillae d'après les originaux qui existent aux Archives nationales (3). Boux-Pazillae, à la Convention nationale. « Périgueux, le 3 nivôse l’an IJ. « Citoyens mes collègues, « Ce département (autrefois le Périgord) était peuplé de petits nobles qui ne savaient pas lire, et hérissé de petits châteaux forts, gothiques et délabrés; les nobles ont disparu, les châteaux vont bientôt disparaître. J’ai longtemps hésité de prendre ce parti, je ne les trouvais pas dan¬ gereux pour notre liberté, elle est trop bien affermie, mais j’ai senti la nécessité d’amuser les Grédules habitants des campagnes, que les hypocrites mariés et non mariés, déprêtrisés et non déprêtrisés travaillent aujourd’hui en tout sens pour leur faire regretter les pasqui-nades et les tours de gobelets; je demande par ce motif que la Convention nationale approuve l’arrêté que j'ai pris à cet égard et dont je lui adresse un exemplaire. (1) Vifs applaudissements, d’après le Journal de Perlel [n° 464 du 10 nivôse an II (lundi 30 dé¬ cembre 1793), p. 235] d’après les Annales patrio¬ tiques et littéraires [n° 363 du 10 nivôse an II (lundi 30 décembre 1793), p. 1639, col. 1] et d’après le Mercure universel [10 nivôse an II (lundi 30 dé¬ cembre 1793), p. 152, col. 1]. (2) La lettre et l’ariêté de Roux-Fazillae ne sont pas mentionnés au procès-verbal de la séance du 9 nivôse an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, on lit) la note suivante : « Renvoyé au comité de Salut public le 9 nivôse an II; Thibaudeau. secrétaire. » (3) Archives nationales, carton AF11 171, pla¬ quette 1403, pièce 18. Aulard : Bccueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 613. [Convention nationale] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { «5 « L’instruction publique fera aussi une diversion favorable; des missionnaires jésuites sollicitaient d’un gouverneur chinois ia per¬ mission de prêcher dans ce vaste empire la religion catholique et romaine : « Qu’enseigne « cette religion? demanda le gouverneur. — Un « Dieu en trois personnes, un homme Dieu né « d’une Vierge, qui cependant n’a pas cessé « d’être Vierge, un homme Dieu, mort, res-« suscité et monté aux cieux. — Allez, prêchez, « repartit le gouverneur, je ne crains pas que « vous fassiez des prosélytes, le peuple chinois « est trop sage pour croire de semblables absur-« dités. » Cette sagesse du peuple est le résultat de l’instruction. J’ai organisé à Périgueux les écoles primaires, je vais les organiser dans tout le département. « Le modérantisme, qui ose encore quelquefois lever la tête dans la Convention, lui avait surpris un décret qui fit sourire les aristocrates, et ranima leurs espérances ; mais sur la proposition de Montant vous rentrâtes à cet égard vingt-quatre heures après dans la route révolution¬ naire, et les hommes riches et inciviques vont continuer de faire ici les frais de toutes les dépenses extraordinaires qu’entraîne l’exécu¬ tion des décrets salutaires sur la mendicité, les secours publics et l’instruction; un million a été imposé et perçu pour cela, la somme sera doublée au besoin, et il n’y aura que les aristo¬ crates qui crieront. Assez et trop longtemps ils se sont engraissés de la substance du pauvre, il faut aujourd’hui que leur superflu lui procure le nécessaire. « Nous sommes toujours ici dans l’extrême embarras des richesses, ne sachant que faire de notre or et de notre argent. Il n’y a pas moyen de payer les dépenses ordinaires avec ces mon¬ naies métalliques, car personne n’en veut, mais qu’en faut-il faire? Que faut-il faire aussi de 10 marcs d’or, 92 de vermeil et 433 marcs d’argent, etc., etc,, qui sont déposés ici chez les receveur du district, et de valeurs encore plus considérables qui sont chez les autres receveurs du département et de la Charente? Si j’avais voulu faire un grand étalage, j’aurais fait un convoi qui eût tenu une demi-lieue de long, mais j’ai voulu attendre les ordres de la Con¬ vention nationale. « Roux-Fazillac. » Arrêté du représentant du peuple Boux-Fazillac, député par la Convention nationale dans le département de la Dordogne et autres circon-voisins, pour la démolition de tous les châteaux forts du département (1). Du 27 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. Citoyens, Des tours menaçantes s’élèvent encore au milieu des maisons et des chaumières, asiles modestes des braves sans culottes cultivateurs. Ces tours qui outragent l’égalité, vous rappellent les honteuses oppressions du système féodal, (I) Archives nationales: carton AFn 171, pla¬ quette 1403, pièce 17. et l’insultant orgueil de ces individus atroces qui, sortant des limites de la nature, osaient se croire plus que les hommes, Oui, ces tours qui maintinrent trop longtemps la servitude ail sein des campagnes, ces manoirs �gothiques, annoncent de toutes parts les signes, les instru¬ ments de la violence, de la terreur, de la des¬ truction de notre liberté. Ah ! ces monuments d’ignominie et de crime, suent encore le sang de nos ancêtres; ils sont encore imprégnés de leurs larmes, ils sont bâtis avec leurs dépouilles sacrées; ils éterniseraient le souvenir doulou¬ reux de leur humiliation et de leurs calamités. Qu’ils disparaissent donc ces châteaux, ces tours autrefois élevées par l’ambition, à la honte et pour l’oppression du genre humain. Al¬ lons, que la hache, le levier, le marteau, la mine même, s’il en est besoin, soient portés à l’instant sur ces édifices exécrables, et que désormais il n’y ait plus dans la nature que ces produc¬ tions qui s’élèvent au-dessus de nos têtes indé¬ pendantes; que tous les Français soient placés sur un même niveau et que le glaive de la loi frappe celui qui osera se prétendre supérieur aux autres. D’après des motifs si conformes à la raison, à la philosophie et à la loi, et après avoir pris l’avis de l’administration du dépar¬ tement et des commissaires réunis des comités révolutionnaires et des administrations des districts, j’arrête les articles suivants t Art. Ier « Chaque administration des districts du département de la Dordogne nommera un commissaire, choisi parmi les membres qui le composent. Art. 2. « Ces commissaires s’adjoindront chacun un membre de la Société populaire du chef-lieu du district. Art. 3. « Une fois d’intelligence, les trois commis¬ saires de chaque district en parcourront tout l’arrondissement; ils prendront une exacte connaissance des tours, créneaux, terrasses et courtines dont les châteaux sont fortifiés; ils en feront un état descriptif, de concert avec les municipalités des lieux, qui seront requises de leur donner tous les renseignements néces¬ saires. Art. 4. « Ces précautions prises, ils ordonneront la démolition de toutes fortifications, ouvrages élevés et tours annonçant la force et la puissance particulières, qui doivent disparaître devant la majesté du peuple. A l’instant même les ouvriers seront appelés pour l’exécution d’une loi uniquement destinée à faire triompher l’égalité; ils n’abandonneront ce travail qu’ après l’avoir achevé. Art. 3. « Les commissaires veilleront spécialement à la conservation de tous les objets qui pourront servir à des établissements utiles; ils réseryprp.nt dans chaque district un château propre à la