416 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. février 1790]. M. le Président, après avoir consulté l’Assemblée, luidojine la parole. M. Durand de Maillane. J’ai demandé la parole pour remplir un devoir douloureux. Les habitants de la ville et territoire des Baux, de la sénéchaussée d’Arles, territoire distant de Marseille de dix-huit lieues, et appartenant à M. de Monaco, viennent de nous apprendre que, dans la nuit du 23 au 24 janvier, le prévôt de Marseille a fait enlever, parla maréchaussée et par un détachement de dragons, M, Servan, ancien conseiller au parlement d’Aix, et le notaire du lieu. Quelque temps avant cet évènement, les habitants de ladite ville des Baux, dans la persuasion que cette terre devait appartenir au Roi, ont arrêté de suspendre le paiement des redevances seigneuriales, jusqu’à ce que la propriété du bourg ait été reconnue faire partie du domaine. Cette délibération a été envoyée à l’Assemblée nationale, et nous étions loin de penser qu’un pareil acte pût donner lieu à une procédure criminelle, bien moins encore à une procédure prévôtale proscrite par vos décrets... M. Durand de Maillane se dispose à entrer dans de plus grands détails. On demande que cette affaire soit envoyée au comité des rapports ; ce renvoi est ordonné. L’ordre du jour appelle la discussion sur la constitution. M. Thouret, au nom du comité de constitution, donne lecture de latin de son rapport relatif à l'ordre judiciaire: Titre XI. De la haute Cour nationale ; Titre XII. Des juges et de la forme de juger en matière criminelle; Titre XIII. Des juges en matière de police ; Titre XIV. Des juges en matière de commerce ; Titre XV. Des juges en matière d’administration et d’impôt ; Titre XVI. De la suppression des offices et tribunaux incompatibles avec la présente constitution judiciaire. (Voy. les titres XI à XVI, insérés dans le tome X des Archives Parlementaires, pages 731 à 734). L’Assemblée ordonne la distribution à domicile de cette partie du rapport. M. Thouret ajoute ensuite : Il devient instant que l’Assemblée s’occupe de l’organisation des corps judiciaires ; le temps de la reunion des dé-îartements est un moment précieux pour établir es nouveaux tribunaux; il ne faut pas prolonger e terme de leur réunion, ni forcer les départements à se rassembler de nouveau. Cette observation frappe vivement l’Assemblée. M. fiïémeunier monte ensuite à la tribune et propose, au nom du comité de constitution, huit articles à ajouter au décret sur l’organisation des municipalités. M. Démeunier. L’organisation des municipalités éprouve de grands embarras dans quelques parties du royaume. Le comité de constitution a reçu un très grand nombre de lettres. Deux ou trois cents questions lui ont été présentées; il les a distinguées et classées, et a répondu individuellement à plusieurs d’entre elles. Sept à huit points principaux demandent un décret. L’Assemblée entend deux lectures successives des articles du projet de décret et passe ensuite à la discussion. M. le Président, lit l’article 1er qui est ainsi conçu : « Dans les assemblées de communauté et dans les assemblées primaires de campagnes, les trois plus anciens d’entre ceux qui savent écrire pourront seuls écrire au premier scrutin, en présence les uns des autres, le bulletin de tout citoyen primaire qui ne pourrait l’écrire lui-même. « 11 ne pourra être reçu aucun bulletin que ceux qui auront été écrits ou par les citoyens primaires ou par les trois plus anciens d’âge. » M. ILanjuinais propose : 1° de retrancher le mot de campagnes après celui d’assemblées primaires ; 2° de mettre dans les assemblées de citoyens actifs , au lieu du mot primaires. M. de Lachèze demande que les trois plus anciens d’âge, qui recevront les scrutins de ceux qui ne savent pas écrire, prêtent le serment préalable de bien et fidèlement remplir leur commission, et de garder le secret. M. Gaultier de Biauzat demande que les personnes, qui seront chargées des fonctions de scrutateurs, pourront seules écrire les noms qui seront déclarés par ceux des électeurs qui ne sauront pas écrire. M. Teliier pense qu’il faut décréter: que chaque électeur sachant écrire sera tenu de se rendre au bureau des scrutateurs pour y écrire le nom de la personne à laquelle il accorde son suffrage, sur un papier paraphé parle président. M. Ijandreau demande qu’on appelle des paroisses voisines des écrivains dans les lieux où il ne se trouverait pas trois personnes sachant écrire. Les amendements de MM. Lanjuinais de Lachèze et Gaultier de Biauzat sont mis aux voix et adoptés. * Les autres amendements sont rejetés par la question préalable. M.Ie Président lit le second article conçu en ces termes : « Lorsque plus de la moitié des membres d’une assemblée de communauté ou d’une assemblée primaire ne saura point écrire, on fera l’élection à haute voix, après avoir constaté la vérité du fait par un procès-verbal. » M. Barnave représente combien il est dangereux pour la liberté des suffrages d’établir le scrutin à haute voix ; que ce serait donner une influence incalculable aux personnes en crédit et que rien ne pourrait balancer cet inconvénient. Plusieurs membres avancent qu’il y a des communautés où tout au plus deux personnes savent lire. M. Baband de Saint-Etienne propose pour amendement de réduire la disposition de l’article proposé par le comité aux assemblées dans lesquelles il ne se trouverait pas trois personnes sachant écrire et faire les fonctions d’écrivains, conformément au précédent article du comité. L’article II et l’amendement sont rejetés par la question préalable.