SÉANCE DU 22 FRUCTIDOR AN II (8 SEPTEMBRE 1794) - N° 44 365 Guy et Comèse, la somme de 50 L, à titre de secours et d’indemnité. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (83). d La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Jean-Louis Gautherot, peintre, domicilié à Barsy, département de la Nièvre, lequel, après environ trois mois de détention, a été acquitté et mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 4 thermidor; Décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera audit Gautherot la somme de 300 L, à titre de secours et indemnité, et pour l’aider à retourner à son domicile. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (84). e La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Joseph-Honoré Valant, domicilié à Paris, lequel, après dix mois et demi de détention, a été mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 4 fructidor; Décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera audit Valant une somme de 1 050 L. à titre de secours et d’indemnité. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (85). f La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des Finances [présenté par Ramel], l’autorise à fixer les sommes à allouer aux dénonciateurs de faux assignats, et à en faire ordonnancer le paiement par la commission des revenus nationaux, sur les fonds mis à sa disposition. Le présent décret ne sera point imprimé (86). 44 Un membre [Delmas], au nom du comité de Salut public, présente, et la Convention nationale décrète les nominations suivantes : (83) C 318, pl. 1 284, p. 37, Décret n° 10 799. Rapporteur : Roger Ducos. Bull., 22 fruct. (suppl.). (84) C 318, pl. 1 284, p. 38, minute de la main de Roger Ducos, rapporteur. Décret n° 10 798, Bull., 22 fruct. (suppl.). (85) C 318, pl. 1 284, p. 39, minute de la main de Roger Ducos, rapporteur. Décret n° 10 797, Bull., 22 fruct. (suppl.). (86) P. V., XLV, 156-158. C 318, pl. 1 284, p. 40, minute de la main de Ramel, rapporteur. Décret n° 10 802, Moniteur, XXI, 704. Ann. R. F., n° 281; J. Fr., n° 714. La Convention nationale, sur la proposition du comité de Salut public, nomme aux vingt-huit emplois vacants dans l’armée, et qui sont à son choix, les citoyens ci-après, SAVOIR : 1) A celui de sous-lieutenant dans la qua-rante-unième demi-brigade, François Ins-tamont, soldat au trente-huitième régiment d’infanterie. Etant prisonnier chez les ennemis, il engage sept de ses camarades à fuir; ils parviennent à s’échapper et arrivent près de Sedan; il falloit passer une rivière, et aucun d’eux ne savoit nager; Instamont transporte leurs habits et les siens sur l’autre bord, revient ensuite les chercher l’un après l’autre, et parvient, après plusieurs voyages, à les mettre tous sur le rivage. 2) A celui de sous-lieutenant dans la cinquante-unième demi-brigade, David, sergent des grenadiers de Bressuire. Dans l’affaire du 10 septembre 1792, il reçoit une balle à l’estomac, l’arrache avec son couteau, en charge son fusil et fait mordre la poussière à un brigand. 3) A celui de lieutenant dans la cent soixante-dixième demi-brigade, Sebastien Leroy, lieutenant au premier bataillon d’Indre-et-Loire. Son bataillon ayant été presque détruit, un arrêté des représentants du peuple l’autorisa à se retirer dans ses foyers, jusqu’à ce que le ministre eut disposé une place en sa faveur. Impatient de servir, il réclame le grade qu’il occupoit et dont il a toujours rempli les fonctions avec un zèle et un civisme constant; ce qui est attesté par des représentants du peuple. 4) A celui du capitaine au deuxième bataillon du trente-deuxième régiment, Fourcade, sous-lieutenant de grenadiers du dix-neuvième bataillon des Volontaires nationaux. Lors de la levée du pont de Monceau, ce brave officier, voyant le citoyen Senarmont, capitaine de la cinquième compagnie d’ouvriers, rester presque seul, lui dit : « Citoyen, la patrie nous a confié ce poste : j’y mourrai avec vous, ou nous le sauverons ». Cet acte d’intrépidité, en effrayant les esclaves, sauva la vie à un grand nombre de nos défenseurs. 5) A celui de lieutenant au même bataillon, Nicolas Germain, sous-lieutenant dans les chasseurs francs de la légion de Mayence. Il a toujours combattu avec bravoure. Il est couvert de blessures. La Convention nationale, par son décret du 7 germinal, a ordonné qu’il seroit pourvu à son avancement. 6) A celui de lieutenant au même bataillon, Collin, chef du deuxième bataillon du Calvados, suspendu de ses fonctions pour défaut de capacité par le représentant du peuple Isoré, qui est cependant d’avis qu’il soit employé comme lieutenant. 366 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 7) A celui de sous-lieutenant au même bataillon, Toustaint, grenadier de la garde nationale de Bressuire. A la journée du 10 septembre 1793, une pièce de canon alloit être prise par les rebelles. Toustaint, secondé par ses camarades, court à la pièce, la ramène et rentre triomphant dans la ville. 8) A celui de sous-lieutenant au troisième bataillon de la Haute-Loire, Legros, volontaire dans la quatorzième demi-brigade d’infanterie légère. Dans une affaire, cet intrépide guerrier a fait lui seul mettre bas les armes à quatre esclaves qu’il a ramené prisonniers. 9) A celui de lieutenant au troisième bataillon de l’Ain, Boivinet, instructeur. Les représentants du peuple, témoins de sa bonne conduite et de son civisme, en rendent le meilleur témoignage; c’est à son activité, ses soins et surtout ses talents militaires, que le bataillon de Compïègne doit d’avoir été instruit en aussi peu de temps. 10) A celui de lieutenant au même bataillon, Gendreau, porte-drapeau de la garde nationale de Bressuire. Il reçoit une blessure profonde le 10 septembre 1793. A peine a-t-il été pansé, qu’il retourne au combat, plein du désir de venger la patrie, sans que les efforts de sa fille et de ses parents puissent l’arrêter. 11) A celui de sous-lieutenant au même bataillon, Macuy, sergent major au deuxième bataillon de la quatorzième demi-brigade d’infanterie légère. Il s’est distingué dans la journée du 25 messidor par sa bravoure et son courage héroïque. 12) A celui de sous-lieutenant au même bataillon, Serret, grenadier au troisième bataillon dans la cent vingt-neuvième demi-brigade. Dans une affaire qui eut lieu, le 25 thermidor, au col de Frenu-morte, il s’avança jusqu’à quinze pas des pelotons ennemis, et leur tua de suite un capitaine et un sergent dont il rapporta l’armement. 13) A celui de capitaine au huitième bataillon de la Côte-d’Or, Chamorin, sous-lieu-tenant au sixième bataillon de l’Hérault. Quoique blessé grièvement à la prise de Montesquieu, le 11 floréal, il remonta à la redoute avec le même sang froid qu’aupara-vant et continua son service, sans vouloir quitter le camp pour se faire panser. 14) A celui de capitaine au bataillon de Marat, Bertrand, ci-devant adjudant-général de l’armée. Réformé de l’état major de l’armée de l’Ouest, parce qu’il étoit marié dans l’arrondissement de cette armée. 15) A celui de capitaine au douzième régiment de cavalerie, Cottin, lieutenant au vingt-sixième régiment de cavalerie. Il a fait le service d’adjoint à l’état-major des Pyrénées-Orientales, et fut nommé inspecteur d’un escadron, dans lequel il obtint le grade de capitaine, par les représentants du peuple, lors de la levée des trente mille hommes, et y resta jusqu’à l’incorporation de cet escadron dans le quinzième régiment de dragons. Il n’a point été compris dans l’état des officiers du corps, et est sans emploi. 16) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Girot, gendarme dans la trente-unième division. La Convention nationale a applaudi au zèle et au dévouement de ce brave militaire dans la nuit du 9 au 10 thermidor, et a ordonné qu’il serait pourvu à son avancement. 17) A celui de capitaine au huitième régiment de dragons, Joubert, adjoint à l’état-major de l’armée des Alpes. Il a reçu une blessure au siège de Commune-Affranchie, pendant le traitement de laquelle il a été remplacé au troisième bataillon de l’Isère où il étoit adjudant-major. Le général en chef et d’autres attestent son civisme constant. 18) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Tournier, cavalier au treizième régiment de cavalerie. Envoyé en ordonnance, le 7 floréal, par le général Chapuy, il fut rencontré par un peloton ennemi, dont le commandant le somma de se rendre et de lui communiquer ses dépêches : il ne lui répondit qu’en lui donnant la mort et à plusieurs des brigands; il fut délivré par ses camarades qui le trouvèrent blessé de sept coups de sabre et de plusieurs coups de feu. La Convention nationale, par son décret du 23 messidor, a ordonné qu’il serait pourvu à son avancement. 19) A celui de capitaine au deuxième régiment de chasseur à cheval, Levasseur, aide-de-camp du général Jourdan. Dans une charge qui eut lieu le 18 messidor, un dragon du douzième régiment à son cheval tué sous lui, et se trouve enveloppé par six hussards ennemis. Levasseur voit le danger que court ce brave homme, se précipite sur les esclaves, les étonne par son audace, parvient à donner à ce dragon le temps de monter un cheval qu’il venoit de prendre des mains de l’ennemi, et le ramène au milieu de ses frères d’armes. 20) A celui de lieutenant au même régiment, Keiffer, maréchal des logis en chef au troisième régiment d’hussards. Dans une charge de cavalerie, il se précipita au milieu des ennemis avec Waldeck son camarade, et tous deux s’emparèrent d’une pièce de canon. 21) A celui de lieutenant au même régiment, Waldeck, maréchal des logis en chef au troisième régiment d’hussards, est celui dont il est parlé plus haut. 22) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Delback, hussard, au neuvième régiment. Il est un de ceux qui se sont distingués à l’affaire de Warvick, le 26 septembre, et dont la Convention a ordonné l’avancement par son décret du 28 du même mois. SÉANCE DU 22 FRUCTIDOR AN II (8 SEPTEMBRE 1794) - N° 45-46 367 23) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Carlier, hussard au neuvième régiment. Il est dans le même cas que le précédent. 24) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Hameau, hussard au neuvième régiment. Il est également compris dans le décret du 28 septembre 1793. 25) A celui de capitaine au septième régiment de chasseurs, Gagnebin, capitaine de la légion réformée des sans-culottes. Ce jeune militaire s’est distingué dans toutes les affaires où cette légion s’est trouvée à l’armée d’Italie, et notamment à celle de Gillette, le 18 septembre 1793, où il est monté le premier à la redoute. La Convention l’a nommé dernièrement à une place de capitaine d’infanterie; mais sa blessure, l’empêche de servir dans cette arme. 26) A celui de capitaine au même régiment, Fouchet, capitaine au troisième bataillon de la Haute-Vienne. Ses nombreuses blessures le mettent dans l’impossibilité de remplir dans l’infanterie le serment qu’il a fait de ne déposer les armes qu’après l’entière destruction des tyrans. 27) A celui de sous-lieutenant au même régiment, Ordinaire, hussard au neuvième régiment. Il est un de ceux dont la Convention nationale a décrété l’avancement pour récompenser la valeur qu’il a montrée dans l’affaire de Warvick, le 26 septembre 1793. 28) Enfin, à celui de sous-lieutenant au même régiment, Pourcelet, hussard au neuvième régiment. Il est dans le même cas que le précédent. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (87). 45 La Convention nationale, après avoir entendu son comité des Décrets sur les renseignements qui lui sont parvenus, concernant le citoyen Louis - Harmand Deronzières, député suppléant au département d’Eure-et-Loir, déclare que ce citoyen est admis au nombre des représentants du peuple français. Décrété (88). (87) P.V., XLV, 158-164. C 318, pl. 1 284, p. 32 et 41, minute signée de Delmas, rapporteur. Décret n° 10 807. Bull., 22 fruct. Moniteur, XXI, 707-708. Débats, n° 719, 382-386. (88) P.-V., XLV, 164. C 318, pl. 1 284, p. 42, minute signée de Monnel, rapporteur. Décret n° 10 806 (bis). Débats, n° 719, 382-386; J. Mont., n° 132; J. Fr., n° 714-715; J. S.-Culottes, n° 571; M. U., XLIII, 363-364, 372-375. 46 Un membre prononce un discours et présente un projet de décret relatifs à l’instruction publique. GIRAUD : Lorsqu’une puissante et belliqueuse nation effaçant avec courage quatorze siècles d’ignominie, de dégradation et de servitude, a défendu par une énergie prononcée la sublime déclaration des Droits, elle a élargi par son héroïsme la sphère des connaissances, et, signalant avec la rapidité de l’éclair, par une prompte régénération, les hautes destinées d’un peuple brisant l’hydre des préjugés, le talisman de la superstition, le monstre de la tyrannie, elle a marqué du sceau de la réprobation et de la vindicte publique la chute précitée des fléaux et des oppresseurs du genre humain. La nation française, élevée au plus haut degré de gloire, fixe dans ce moment l’attention des nations étrangères. Jalouse de l’indépendance, son idole chérie, elle a frappé de terreur les esclaves du despotisme; et, placée par une divinité protectrice sur les débris fumants du trône, sur les décombres ensanglantés des factions déchirantes, se reportant avec fierté au type de son antique origine, elle a franchi d’un vol audacieux le cercle de plusieurs générations; elle a revendiqué le patrimoine le plus sacré; et, au sein des conjurations, des orages d’un triumvirat plébicide, entre la trahison et la vertu, le poignard des féroces tribuns et l’austérité républicaine, elle a reconquis la liberté. Mandataires d’une nation généreuse, consacrons ce monument durable de la nouvelle génération; retirons des avantages précieux de la victoire en permanence, et par l’enseignement, doublons les délices et la félicité de la postérité, en y laissant pour héritage des institutions, des mœurs dignes de l’admiration et des regards de l’univers. L’instant est enfin arrivé, citoyens, où le premier aréopage de l’Europe doit consolider le majestueux édifice de notre immortelle révolution par la base inébranlable de l’instruction publique. Abordons loyalement cette discussion; dégageons-là avec hardiesse du prestige qui l’environne; laissons aux érudits de l’ancien régime la cruelle habitude d’énerver les principes, de dessécher la morale du peuple. Veut-on, par un système de la plus atroce perfidie, invoquer le joug affreux de l’odieux modérantisme, empoisonner d’insensés paradoxes, de maximes meurtrières, les premiers éléments des jeunes citoyens, l’espoir sacré de la tyrannie ? On brûle sans doute de neutraliser nos efforts et notre courage. Ah ! Dieu tutélaire de mon pays, tu veilleras d’une manière spéciale sur la France libre, qui, en présence de la coalition des despotes, à la face d’un siècle éclairé, a su faire admirer ses vertus, sa grandeur, ses triomphes. Des enfants dénaturés ont conçu le noir complot d’égorger la liberté naissante en propageant des erreurs mortifères, en propageant les vices, en caressant l’ignorance avec le charme séducteur de l’adulation, à l’époque mémorable où la gloire du nom français vole dans les deux hémisphères, où nos soldats républicains, élec-