[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j J�embre m” B7l ou trois officiers généraux. Nous allons l’épurer, nous allons discipliner les chefs; ils en ont plus besoin que le soldat. « Nous attendons les secours que nous vous avons demandés. Comptez sur notre zèle à remplir vos vues. Nous espérons que l’armée du Rhin ne restera point en retard et que] la Répu¬ blique ne verra autour d’elle que des victoires. « Les représentants du peuple près V armée du Rhin, « Saint-Just; Le Bas. « P.-S. Envoyez-nous ce que nous vous avons demandé, et nous serons bientôt à Landau. « Pichegru arrive à l’instant; c’est un homme résolu, nous allons l’installer et frapper. » L. Les représentants à V armée du Rhin au comité de Salut public (1). « Strasbourg, 9e jour du 2e mois de l’an II (30 octobre 1793, reçu le 12 novembre). « Citoyens nos collègues, « Nous avons déjà fait connaître le mauvais esprit qui règne à Strasbourg et nous avons fait part des mesures que nous avons prises pour en arrêter la maudite influence. Nous nous plai¬ gnions tous les jours de la faiblesse avec laquelle elles sont exécutées par les autorités constituées ou révolutionnaires, que nous avons créées ou régénérées. Nous comptions que 10,000 citoyens dangereux, suspects ou inutiles sortiraient dans la huitaine de ses murs, et à peine 1,200 per¬ sonnes ont-elles été congédiées. Nous ne pou¬ vons encore exécuter nous-mêmes ce que nous nous proposons, parce que la force nous manque ; il n’y a que 3 à 4,000 hommes de garnison, et la garde nationale, sur laquelle il est impossible de compter, est de 6,000 hommes, « Cependant, les malveillants conspirent; la proximité de l’armée ennemie les enhardit et favorise leurs complots. Nous venons d’en dé¬ couvrir la trace dans une lettre qu’un officier de l’avant-garde a ramassée tombant de la poche d’un émissaire qui cherchait à éviter nos avant-postes pour l’apporter ici. Vous verrez quelles intelligences nos ennemis entretiennent dans la place, comme ils sont sûrs de la majorité des habitants et par quels moyens ils les ont ga¬ gnés et cherchent à augmenter le nombre de leurs partisans. « Nous avons pris sur-le-champ de nouvelles mesures pour surveiller les habitants et les étrangers qui entrent à la ville. Pour décou¬ vrir les correspondants qui agissent et qui sont chargés de diriger la trahison, nous avons or¬ donné des visites domiciliaires qui doivent avoir lieu cette nuit. C’est surtout sur la place d’ Armes où la lettre était adressée que l’on va faire les (1) Archives nationales AFii 151. Aulard i Recueil des actes el de la correspondance du comilé de Salul public, t. 8, p. 133. perquisitions les plus exactes. Il faut que nous trouvions l’agent, le trésorier et les deux per¬ sonnes nommées dans la lettre. On fera main basse sur tous les prêtres que l’on rencontrera; on arrêtera tout financier connu' pour avoir des relations à l’étranger; on saisira leurs trésors et leurs papiers. Nous vous faisons passer les arrê¬ tés que nous avons pris sur tous ces objets. « Si les premières recherches ne suffisent pas, nous les renouvellerons tous les jours et nous ne donnerons aucune relâche à ces scélérats qui veulent trahir la patrie. C’est à ce moment que nous regrettons de n’avoir pas 10,000 sans-culottes à mettre à la poursuite des traîtres; mais ils sont lâches, ici comme partout ailleurs ; si nous ne les saisissons pas, du moins nous les ferons trembler. 4 « Nous cherchons à découvrir cet intrigant sur lequel on compte pour entraîner la société à de fausses mesures, et par malheur trop de gens portent la figure et tiennent le langage qui lui conviennent. « Le tribunal révolutionnaire est en activité depuis quelques jours; c’est surtout contre les marchands avides qu’il agit; déjà plusieurs ont été condamnés à des amendes et à des peines afflictives pour avoir continué de faire deux prix et refusé de se conformer à la taxe, ou qui ont fermé leur boutique. « Nous sommes instruits que quelques com¬ munes ‘des environs favorisent aussi les projets de l’ennemi; elles font des amas d’armes et de subsistances et recèlent des lâches et des traîtres. Milhaud part demain à la tête de 100 hommes d’infanterie, 50 cavaliers et 2 pièces de campagne pour faire une ronde révolution¬ naire. « L’armée tient les lignes : il y a deux jours, l’ennemi attaqua notre droite qui fut obligée d’abandonner le village de la Wantzenau, mais ce poste fut, comme la grande redoute de Wis-sembourg, vendu à l’ennemi, puisque quatre déserteurs du 8e régiment emportèrent avec eux le mot d’ordre, revinrent à la tête des hussards ennemis et surprirent ainsi tout le poste. Sur le bord du Rhin, notre avant-garde, au con¬ traire, repoussa l’ennemi, le chassa de deux vil¬ lages et d’un bois dont nous sommes tou¬ jours maîtres et dans lequel un grand nombre d’Autrichiens ont perdu la vie. Du côté de Saverne, il y�a souvent de petites affaires dans lesquelles nous avons l’avantage, « On assure qu’il est arrivé dans cette partie des hussards et des carabiniers. Si cela est, nous ne tarderons pas à repousser l’ennemi, d’autant que l’on dit qu’il a été obligé de faire passer des troupes au revers des Vosges, où l’armée de la Moselle a bloqué un corps de Prussiens qui, si cela est vrai, seront sûrement taillés en pièces avant l’arrivée de ce secours. « On nous fait espérer 15 à 20,000 hommes venant de Ville-Affranchie; il serait bien utile qu’ils arrivassent promptement. Avec ce ren¬ fort, en trois jours notre armée pourrait être sous les murs de Landau et, certes, les Autri¬ chiens et les émigrés ne feraient pas cette route sans laisser des semelles et des havres acs en arrière. « Le général en chef Pichegru paraît avoir à cœur de réparer promptement les revers que nous avons éprouvés. Il est actif, surveillant et ferme; il parait que l’année prend confiance en lui; il s’attache à maintenir la discipline et 672 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j InJvembïî ira" l’exactitude du service. C’est le point le plus essentiel. « Salut et fraternité. « J. -B. Milhaud; Guyardin. » M. Un des représentants à Varmèe du Rhin au comité de Salut public (1). « Strasbourg, 10 brumaire an II (31 oc¬ tobre 1793, reçu le 18 novembre). « Citoyens nos collègues, « Un grand nombre d’anciens militaires ont obtenu sous le gouvernement monarchi-despo-tique (sic) des lettres d’ancienneté de services avec droit de porter la médaille. Déjà, plusieurs de ces braves gens qui combattent sous les dra¬ peaux de la République nous ont présenté ces titres en parchemin qui portent le nom et la signature du dernier tyran, en nous témoignant leur indignation de voir des noms odieux sur des titres de bravoure. Nous ne pouvons les rem¬ placer, mais nous croyons que la Convention doit détruire tout ce qui rappelle l’antique escla¬ vage des Français. En conséquence, nous vous invitons de proposer à la Convention de faire délivrer au nom de la République des certifi¬ cats de service à ceux qui, fidèles à la patrie, prouvent que dans tous les temps c’était pour elle qu’ils avaient combattu. « Salut et fraternité, « Guyardin. » N. Les représentants à V armée du Rhin au comité de Salut public (2). « Strasbourg, 6e jour de la lre décade du 2e mois de l’an II (27 octobre 1793, reçu le 30 octobre). « Chers collègues et amis, « Déjà non seulement plusieurs heures, mais plusieurs jours se sont écoulés depuis l’envoi de notre dernier courrier, porteur de dépêches importantes pour la conservation de notre armée, des départements du Haut et du Bas-Rhin, et notamment de la place de Strasbourg. Quels secours, quelle réponse avons-nous reçus de vous, citoyens collègues? Aucuns. Ainsi, jugez de nos inquiétudes, car notre situation est toujours la même. Un ennemi nombreux, habile, ayant des chefs expérimentés, poursui¬ vant une armée en déroute, sans chefs, sans dis¬ cipline, désirant le repos, privée de beaucoup ( 1) Archives nationales, carton AFii 151. Aulard t Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public , t. 8, p. 155. (2) Archives nationales, carton AFii 248. Aulard ! Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p. 67. d’objets essentiels, et dont plusieurs individus se livrent parfois au mépris pour les autorités constituées : situation affligeante, et encore bien plus, si on considère le mauvais esprit qui règne dans la place de Strasbourg qui est sans garnison et où les vrais républicains sont en petit nombre. « Dans cet état de choses, citoyens, vous nous laissez sans une réponse, sans nous envoyer des forces que nous et nos collègues réclamons de¬ puis deux mois. Vous vous êtes contentés de proposer à la Convention nationale, à la séance du 1er de ce mois, d’envoyer les citoyens Saint-Just et Le Bas près l’armée du Rhin pour y prendre toutes les mesures de salut public nécessaires. « Ce décret que nous connaissons seulement par les papiers publics de ce jour annoncerait que ces deux collègues vont sans doute rendre à l’armée son ardeur, les forces que la position de l’ennemi exige et dans peu le chasser des lignes au delà de la Lauter. « Il fallait, citoyens, que nous fussions ins¬ truits par les papiers publics de ce décret pour ne pas l’ignorer, car nos collègues non seulement n’ont pas témoigné la moindre envie de se réunir à nous, d’obtenir quelques renseignements qui auraient pu leur être utiles, mais, bien plus, ils se sont expliqués particulièrement à cet égard ; ils ont désiré s’isoler de nous et le paraître ainsi aux yeux du public, puisque dans leur proclamation, ils se sont appelés députés extraor¬ dinaires. « Nous ne voyons pas cependant, ni dans le texte ni dans l’esprit du décret, que cette qua¬ lité leur appartienne. La leur avez-vous donnée par un pouvoir particulier? Nous l’ignorons; mais il n’en est pas moins vrai que cette qualité d 'envoyés extraordinaires fait une mauvaise im¬ pression sur le public, et qu’elle semble annuler nos pouvoirs ou au moins les affaiblir dans l’opinion générale. « Dans leur proclamation dont un exemplaire nous est parvenu par hasard, ils annoncent des exemples qu’on n’a jamais vus, et les malveil¬ lants que nous vous avons dénoncés se plaisent à dire que cette promesse se dirige contre nous. « Faut-il que dans des circonstances aussi dif¬ ficiles, lorsqu’il s’agit de sauver une des parties importantes du territoire de la République, de rendre à une armée sa discipline, son premier lustre, chacun ait à s’entretenir d’un pareil objet? Nous l’aurions tu, si nous n’étions assurés que la chose publique peut en souffrir éminem¬ ment, et qu’il est temps dé nous envoyer des forces, si l’on veut sauver cette partie de la République. « Pourquoi les lignes de Wissembourg ont-elles été rompues? Il y a eu de la trahison à la vérité, mais nous n’étions pas assez forts pour, avec 37,000 hommes, garder si longtemps une étendue de terrain aussi considérable. La posi¬ tion que nous occupons actuellement finira éga¬ lement par nous être enlevée par un ennemi supérieur en forces et en tactique, si vous ne nous envoyez pas de nouvelles forces. « Tous les jours, l’armée est harcelée; l’action d’hier a été vive. Au commencement du jour, du côté de l’avanceneau (sic), des bataillons avaient pris la frayeur jusqu’au point que plu¬ sieurs soldats se sont jetés dans le canal, comme s’ils étaient poursuivis par l’ennemi, et, afin d’empêcher leur retraite, on a été obligé de fermer une porte de la place de Strasbourg.