4 [Assemblée' nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 mai 1791.] iités des îles. Par exemple, un membre a avancé Qu’il n’y avait que cinq à six mille hommes de couleur dans les colonies, tandis que si l’Assemblée veut se faire donner des renseignements au bureau des colonies, elle y verra que Saint-Domingue seulement fournit une population de 30,000 personnes de couleur, et que cette population est au moins égale à celle des blancs, si elle ne la surpasse. Je suis en état de donner sur ce fait-là et sur d’autres des renseignements authentiques qui rassureront l’Assemblée ; et je la supplie encore une fois, au nom de mes frères, qu’elle veuille bien décréter que nous serons personnellement entendus à la barre. « J’ai l’honneur d’être, avec respect, etc... « Signé : RAYMOND. « Pour les cinq commissaires des citoyens de couleur. » M. le secrétaire fait ensuite lecture d’une adresse de la société des amis de la Constitution , séant à Uxès, relative au même objet. M. le Président. Les ouvriers de la nouvelle église de Sainte-Geneviève annoncent à l’Assemblée qu’ils feront célébrer, samedi prochain 14 mai, dans la nef d’entrée de cette basilique, un service en mémoire d’Honoré Riquetti-Mira-beau, et qu’ils ont fait placer sur le fronton l’inscription qu’elle a décrétée. M. Eiebrun. Messieurs, je demande que le comité d’imposition présente au plus tôt à l’Assemblée le projet de suppression de la caisse de Poissy; car il nous en a coûté hier 26,000 livres d’escompte. M. Dauchy, au nom du comité d’imposition . Après demain le projet pourra être présenté. L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret des comités de Constitution , de la marine , d’agriculture et de commerce , et des colonies, réunis , sur l’initiative à accorder aux assemblées coloniales dans la formation des lois qui doivent régir les colonies et sur l'état civil des gens de couleur (1). M. Lanjninaig (2). Ce qui peut surtout par-raître étonnant dans cette Assemblée, c’est qu’une uestion décidée d’avance par les principes, fon-ée sur la justice, sur l’autorité de vos décrets antérieurs et sur les intérêts d’une sage politique, éprouve autant de difficulté et que vous n’ayez pas déjà décrété que les gens de couleur seront admis à l’exercice de tous les droits politiques, Permettez-moi, Messieurs, comme on a cherché à vous en imposer par des autorités, par des frayeurs, permettez-moi de relever deux faits remarquables, après quoi j’examinerai les autorités qui peuvent déterminer cette décision. On vous a parlé au nom de quatre comités réunis permi lesquels se trouve le comité de Constitution, à qui nous devons la rédaction des plus sages décrets que nous ayons rendus. Ehl bien, Messieurs, il faut que vous sachiez que le comité de Constitution n’a aucune part à ce travail, sinon qu’il a envoyé à cette Assemblée, dite de quatre comités, un seul commissaire, M. Démeunier, et les membres du comité de Constitution (1) Yoy, Archives parlementaires, t. XXV, séance du 11 mai 1791, p. 736. (2) Ce discours est très incomplet au Moniteur. n’ont pas pris la défense de ce travail. M. Démeunier n’a donc certainement pu concourir au projet de décret, que par son vœu individuel, puisque le comité qui l’envoyait ne s’était pas occupé de cette matière. Il est encore faux que les 35' membres dont on vous a parlé hier y aient concouru ; car dans les dernières séances de cette Assemblée de comités il ne se trouvait qu’environ 12 membres ayant voix délibérative. M. de Curt. Ce que vous dites n’est pas exact ; il y avait au moins 40 membres; les 4 comités étaient réunis en grande partie, lorsque l’article constitutionnel a été rédigé, on l’adopta à l’unanimité, excepté un seul. C’est moi, Messieurs, qui avais été chargé de vous faire ce rapport; un accident qui m’arriva m’empêcha de vous le faire ; et j’atteste à l’Assemblée que le lieu du comité des colonies était plein des autres membres du comité lorsque l’article constitutionnel aété convenu et lorsque le mode pris pour convoquer le comité colonial à Saint-Martin a été arrêté. Ces faits sont exacts, et j’en atteste l’honneur. M. Lanjuïnais. Eh bienl sur l’honneur je démens le fait. Il résulte seulement de tout cela qu’il y a des nuages... (Murmures.) M. Gombert. Il ne faut pas d’esprit de parti comme cela, laissez parler l’opinant. M. Arthur Dillon. Comment laisser parler l’opinant? M. de Curt. Tous les membres, au nombre de 30, sont gens d’honneur; ils attestent le fait et j’imprimerai leurs noms. M. Lanjuinaig. Il faut maintenant poser la question : malgré l’adresse qu’on a mise dans cette discussion, vous ne pouvez vous dissimuler que la question doit être abordée de fait, qu’il ne s’agit pas seulement d’un avant-faire droit, mais que ce qu’on veut vous faire décider, comme une mesure provisoire qui ne préjuge rien, tend à priver irrévocablement une portion de population libre dans nos colonies, qui est tantôt de la moitié, et à enlever formellement à ces hommes les droits de citoyen actif. Ou bien le congrès qui va être établi décidera en faveur de la justice et de la liberté, ou il décidera contre la vérité des principes. Dans le premier cas, s’il propose de rendre justice aux citoyens de couleur, on dit que ce sera un moyen de plus de resserrer les liaisons entre les colons de couleur et les colons blancs. S’il en est ainsi, j’observe qu’il n’y a dans cette hypothèse nul inconvénient à déclarer, dès à présent, ce que vous attendez de la justice et de la lumière des colons blancs. Mais c’est sur l’autre partie de l’alternative qu’il faut s’arrêter. Si le congrès déclare qu’il ne peut admettre les citoyens de couleur à l’exercice des droits politiques, et étant donné qu’aujour-d’hui on vous dit sans cesse dé ne pas prononcer, vous allez donner le signal du carnage, tout est perdu. Eh bien! Messieurs, lorsque ce congrès aura parlé, lorsqu’il aura prononcé la séparation éternelle des citoyens de couleur et des colons blancs, je demande ce que vous pourrez faire. Avec quelles armes pourrez-vous combattre? Si l’on parvient en ce moment à vous inspirer de vaines terreurs, que n’obtiendra-t-on pas lorsque les prétentions des colons seront appuyées de