[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 mai 1791.] 575 membres de votre comité n’ont pu toutes les faire par eux-mêmes ; quand bien même ils l’eussent pu, cela n’aurait pas garanti leur travail de quelques erreurs presque inévitables. Hier même, lors au décret, votre comité en connaissait quelques-unes, trop peu importantes pour vous arrêter. Nous continuons actuellement cette quatrième vérification commencée et nous vous soumettrons le résultat de ce travail ; mais, quand bien même il y aurait lieu à quelque modération, telle que pour le département du Jura, par exemple, que vous a cité le préopinant, nous croyons qu’il ne doit être rien changé au décret très utilé d’hier. Toutefois, pour que la justice soit rendue à tous, l’Assemblée pourra, sur les fonds de modération décrétés, rectifier ces petites inégalités et elle ne sera pas surprise lorsque, sur un travail aussi immense, nous lui proposerions de destiner quelques centaines de mille livres à cet objet. (L’Assemblée décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. Ramel-Nogaret. Je crois, Messieurs, qu’il serait très utile de charger le comité d’imposition de rédiger une adresse à la nation, afin de l’éclairer sur le nouveau mode de contribution publique que vous avez décrété. C’est, à mon sens, le seul moyen de déjouer les manœuvres des malveillants et c’est, de plus, un très bon exemple à donner à nos successeurs. ( Applaudissements .) (L'Assemblée, consultée, décrète la motion de M. Ramel-Nogaret.) M. Prugnon, au nom du comité d'emplacement. Messieurs, le directoire de la Gironde demande à être autorisé à acquérir, aux frais des administrés, le doyenné situé à Bordeaux, et les petites maisons y attenantes, qui sont également nationales, et à y faire les réparations que prescrit la décence pour le logement de l'évêque. Votre comité pense que cet arrangement concilie à la fois l’intérêt de la nation et celui du département. Il paraît également convenable d’autoriser le directoire à placer le séminaire dans la maison des Feuillants : d’un côté, elle est à peu de distance du collège et de la paroisse cathédrale; de l’autre, elle est dans un quartier peu animé, et il n’y aurait qu’un faible parti à en tirer pour la nation, tandis qu’elle vendra très bien les deux séminaires. Une circonstance qui n’est pas d’un petit intérêt, c’est que dans l’église des Feuillants, repose le plus sensé peut-être et le plus relu des philosophes, celui de toutes les heures et de presque tous les âges, Montaigne. Plus heureux en un sens que son compatriote Montesquieu, qui a détrôné doucement tant d’impostures, et préparé le règne de la raison, il a au moins un mausolée presque digne de lui. Si l’église n’était pas conservée, il faudrait déplacer et les cendres et le monument. Avant de quitter ce tombeau, je ne puis me refuser à une réflexion : que l’on ne s’étonne pas en voyant la nation qui a passé pour la plus juste dispensatrice de la gloire, refuser des monuments à ses grands hommes. Si nous ne savons où est la cendre de Corneille, en quel endroit l’on peut porter son tribut sur la tombe de L’Hôpital et de tant d’autres; c’est qu’alors la nation était mineure ; c’est une dette de plus que lui ont laissée ceux qui croyaient jouir éternellement de sa tutelle; elle s’est empressée de la mettre au rang des dettes d’honneur, de faire droit, si je puis m’exprimer ainsi, sur toutes les demandes en réparations que le génie avait à former contre le despotisme, contre ces êtres que l’on nommait censeurs royaux, dont le principal emploi était de mutiler les talents, et de faire des espèces d’eunuques. Pardonnez -moi cet écart; il y a eu, et il y aura à vous faire assez de rapports dont le fond présente la perfection de la monotonie, et le sublime de la stérilité. Je reviens à Bordeaux. Le directoire demande qu’on lui abandonne la jouissance du château ou fort du Ha, pour convertir la tour en prisons criminelles, et pratiquer dans une partie de ce fort des prisons civiles. Il n’y a à Bordeaux, comme dans la très grande partie du royaume, que des cachots malsains, où l’innocent et le coupable sont livrés aux mêmes dangers. Le fort du Ha n’est pas un fort destiné à protéger la ville contre l’ennemi : il a été élevé, au contraire, par Louis XIV, dans la vue de battre la ville qui lui donnait des inquiétudes. On conservera assez d’espace dans le fort pour le détachement des troupes de ligne qui y est ordinairement placé, et qui veillera à la sûreté des prisonniers. On n’aperçoit donc aucun motif qui s’oppose à ce que l’Assemblée ait un légitime égard à la pétition : le calcul des convenances et celui des proportions paraissent également se réunir. Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du département de la Gironde à acquérir, aux frais des administrés, et dans les formes prescrites par les décrets de rassemblée nationale pour la vente des biens nationaux, le doyenné et trois petites maisons attenantes, pour y loger l’évêque, et à placer le séminaire dans la maison des Feuillants de Bordeaux ; en conséquence, décrète que le grand séminaire, situé paroisse de Saint-Séverin, et celui de Saint-Raphaël, seront vendus dans les formes accoutumées ; « L’autorise également à faire procéder à l’adjudication, au rabais, de toutes les réparations et arrangements intérieurs nécessaires pour le logement de l’évêque, sur le devis estimatif qui en sera dressé; le montant de laquelle adjudication sera supporté par les administrés ; « L’autorise aussi à établir les prisons criminelles dans l’ancienne tour du fort du Ha, et les prisons civiles dans la partie dudit fort qui sera jugée la plus convenable pour cet objet, et le ministre de la guerre donnera incessamment les ordres nécessaires à cet effet. » (Ce décret est adopté.) M. Legrand, au nom du comité ecclésiastique, propose un projet de décret relatif à la réduction et à la circonscription des paroisses des villes de Péronne, Néelle, Montdidier , Doullens, Ham et Abbeville. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale décrète : Art. 1er. « Dans le district de Péronne, département de la Somme, toutes les paroisses de la ville et faubourgs de Péronne sont supprimées et réunies en une seule, qui sera établie dans l’église ci-devant collégiale de Sainl-Furcy, sous la même invocation. L’église de Saint-Sauveur sera conservée comme oratoire,