122 [Assejnbfée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 septembre 1789.] Chambres dont la composition devra être essentiellement différente ; 3° Que le prince ne pourrît ni proposer ni rédiger là loi, et que la proposition ét lit rédaction en appartiendront exclusivement au Corps législatif; 4° Qu’aucune loi néanmoins ne pourra être exécutée qu’autant qu’elle aura Obtenu le consentement libre du prince. Telle est mon opinion: je vous aurais rendu compte, avec moins de détail, des motifs qui me l’ont fait adopter, si je n’étais malheureusement instruit qu’on s’efforce par toute espèce de moyens, de travestir ep ennemis de la liberté ceux d’entre nous dont les maximes politiques se rapprochent de celles que je viens d’exposer. Il fallait donc, malgré moi, que je prouvasse que si je tiens à mes idées, c’est parce que j’aime sincèrement la liberté, c’est parce que je crois fortement que dans une monarchie héréditaire , et dans un grand empire, la liberté ne peut exister hors du système politique que je vous propose ; c’est parce que je suis intimement convaincu qu’on s’éloigne, dans tous les autres systèmes, de la route qui doit y conduire; c’est parce que je e puis m’empêcher de voip, surtout, que faute e combiner avec l’action réciproque des pouvoirs constitutionnels entre eux, on se dispose à fonder au milieu de nous une autre espèce d’aristocratie, incomparablement plus redoutable que celle que nous venons de renverser. ' Or, je n’ai pu prouver toutes ces cbqses sans me livrer à une discussion de quelque étendue : a côté des vérités que je voulais établir, j’aperçois un grand nombre de préjugés â combattre, et ma tâche s'est nécessairement accrue de tous les efforts qu’il m’a fallu faire pour détruire, autant qu’il était en moi, ces préjugés dangereux, Au peste, je pe me flatte pas d’avoir réussi-La fermentation dans laquelle, depuis quelque temps, on a l’art d’entretenir tes esprits, afin de forcer, s’il était possible, jusque dans le sein de cette Assemblée, la liberté des suffrages, est trop considérable pour que la yérité des principes que j’ai mis sous vos yeux puisse êfre facilement aperçue. Mais un jour arrivera, et peut-être ce jour n’est-ü pas loin, où en revenant sur vos propres idées, vous vous convaincrez, par une expérience personnelle, que ce n’est que dans le calme qu’on peut travailler avec quelque succès à l’établissement d’une bonne Constitution, parce qu’un travail de cette espèce demande les méditations les plps profondes et les combinaisons les plus froides, et que l’on ne combine pas froidement, et que l’on ne médite pas parmi des troubles sans cesse renaissants, et quand les opinions participent des passions dont on est agité. Alors vous sentirez la nécessité de rétablir, avant toute chose, la paix autour de vous, et toutes le? ambitions particulières étant apaisées , et l’ordre régnant dans l’empire, et l’époque des discussions tranquilles étant enfin venue, ôn yous verra sans doute livrer à un nouvel examen tout votre travail actuel sur la Constitution ; et si, parmi vos délibérations, il en existait quelques-unes dont il faudrait vous départir, j’ai une trop haute idée de la pureté des principes qui vous dirigent pour n’être pas convaincu que vous en ferez le sacrifice sans regret. En attendant, j’aurais cru me manquer à moi-même, si, quelle que soit la défaveur, habilement préparée, quj environne aujourd’hui l’opinion que je défends, je m’étais permis de vous dissimuler que je la crois la plus sage, la plus appropriée aux circonstances où vous êtes. Le devoir que m’impose la mission honorable dont je suis chargé, me commande impérieusement de vous rendre compte de mes idées, sans trop rechercher quel en sera le succès ; et dans cette occasion solennelle, et quand il s’agit de prononcer sur les plus grands intérêts de la nation, je me trouverais bien coupable si j’avais pu m’envelopper dans un lâche silence. ASSEMBLÉE NATIONALE, PRÉSIDENCE DE M. LE COMTE STANISLAS DE clermont-tonnepue* Séance du mercredi 23 septembre 1789, au matin (1), M. le Président donne communication de diverses contributions patriotiques, et notamment d’une lettre de M. Beau poil de Sainte-Aulaire de Montplaisir, qui offre à la nation, et sans intérêt, un bois de haute futaie, propre à la construction des vaisseaux ; d’une seconde lettre de M. JDupré, député des communes de Carcassonne, qui envoie une somme de 1,000 livres pour son compte, et 200 livres pour celui des ouvriers de sa manufacture ; d’une troisème lettre de dix curés, députés à l’Assemblée, qui remettent 1,000 livres sur le bureau, avec la générosité de ne pas dire leur nom ; d’une quatrième lettre de M. David, délivreur des écuries de Monsieur, qui, pour concourir à la libération des dettes de l’Etat, envoie 200 livres; d’une cinquième lettre de MM. Girout, Latour, Cheindre, Doché, et autres citoyens attachés au service d’une terre du Comté d’Evreux en Normandie, qui font remettre dans les mêmes vues une somme de 600 livres ; d’une sixième lettre de M. Knapen fils , soldat de la garde nationale de Paris , qui envoie ses boucles d’argent, en observant que ces boucles lui deviennent inutiles, d’après le règlement militaire, qui invite à porter des boucles de cuivre. Ces sacrifices méritent les éloges de l’Assemblée. On rend compte d’une lettre de M. Hache, négociant à Bordeaux, qui fait hommage à l’Assemblée, et en particulier au comité de commerce et d’agriculture, de 150 exemplaires d’un écrit intitulé : « Lettres sur les Colonies. » L’Assemblée est avertie que l’état de la santé de M. Mougins de Rpquefort, curé de Grasse et député de Draguignan, et de M. de Varelles, député du bailliage de Villers-Cotterets, les oblige à suspendre leurs fonctions. On lit une lettre de M. le ministre de la guerre. La voici : « Monsieur le président, le Roi m’ordonne de vous prévenir que, sur les différentes menaces faites par des gens mal intentionnés de sortir de Paris avec des armes , il a été pris différentes mesures pour prévenir de toute inquiétude le siège de l’Assemblée nationale. « Signé : La Tour-DU-Pin-PaüLIN. » (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.