PROVINCE DU PERCHE. CAHIER De dole'ances de V ordre du clergé de la 'province du Perche, arrêté dans l'assemblée générale tenue en la ville de Bellesme , contenant procès-verbal de nomination du député dudit ordre (1). Aujourd’hui mercredi , huitième jour d’avril 1789, en vertu des lettres de convocation qui ordonnent aux trois ordres du bailliage du Perche, à Bellesme et Mortagne, d’élire leurs représentants aux Etats généraux, lesdites lettres de convocation en date du 24 janvier dernier, lesdits Etats généraux fixés à Versailles pour le 27 du présent, de leur donner tous pouvoirs et instructions nécessaires pour la restauration et bien de l’Etat en général et en particulier du bailliage du Perche, le clergé dudit bailliage, considérant que, par le résultat de l’arrêt du conseil du 27 décembre dernier et par ladite lettre de convocation, Sa Majesté a déclaré solennellement: Art. 1er. Que sa volonté est de ratifier non-seulement la promesse qu’elle a faite de ne mettre aucun impôt, sans le consentement des Etats généraux de son royaume , mais encore de n’en proroger aucun sans cette condition ; Art. 2. D’assurer le retour périodique des Etats généraux, en les consultant sur l’intervalle qu’il faudrait mettre entre lçs époques de leur convocation • Art. 3. Que Sa Majesté veut prévenir de la manière la plus efficace les désordres que l’inconduite ou l’incapacité de ses ministres pourraient introduire dans les finances, en concertant avec lesdits Etats les moyens les plus propres d’arriver à ce but; Art. 4. Que Sa Majesté veut que dans le nombre des dépenses dont elle assurera la fixité, on ne distingue pas même celles qui tiennent particulièrement à sa personne ; Art. 5. Que Sa Majesté veut aller au-devant du vœu légitime de ses sujets, en invitant les Etats généraux à examiner eux-mêmes la question qui s’est élevée sur les lettres de cachet, son intention étant d’abandonner à la loi tout ce qu’elle peut exécuter pour le maintien de l’ordre ; Art. 6. Que Sa Majesté est impatiente de recevoir l’avis des Etats généraux sur la mesure des libertés qu’il convient d’accorder à la publicité des ouvrages relatifs à l’administration, au gouvernement et à tout autre objet public ; Art. 7. Que Sa Majesté préfère avec raison aux conseils passagers de ses ministres les délibérations désintéressées et durables des Etats généraux ; Art. 8. Que Sa Majesté a formé le projet de donner des Etats provinciaux au sein des Etats généraux et de former un lien durable entre l’administration particulière de chaque et la législation générale ; (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscril des Archives de l’Empire. Art. 9. Que Sa Majesté a déclaré avoir besoin du concours de ses sujets pour établir un ordre consultant et invariable dans toutes les parties du gouvernement qui intéressent le bonheur de ses sujets et la prospérité du royaume ; Art. 10. Enfin que Sa Majesté demande à connaître les souhaits et les doléances de son peuple; qu’elle désire que, par une confiance et par un amour réciproques entre le souverain et ses sujets, il soit apporté le plus promptement possible un remède efficace aux maux de l’Etat et que les abus en tout genre soient réformés et prévenus ; Ledit ordre du clergé dudit bailliage, donne par ces présentes à son député auxdits Etats généraux les pouvoirs nécessaires pour l’exercice de ce qui suit, savoir : Que le premier vœu du clergé est que son député représente au Roi une adresse de remercî-ments, conçue en des termes qui peignent à Sa Majesté toute la vénération et toute la reconnaissance dont les. ont pénétrés pour sa personne sacrée les déclarations qu’il a faites des susdits principes vraiment constitutionnels et de renouveler la profession de son attachement inviolable à la constitution monarchique et à la maison régnante. PRÉCAUTIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 1er. N’admettre personne aux Etats généraux, s’il n’est député par la nation, toute autre qualité étant contraire aux lois d’une véritable représentation. Art. 2. Arrêter que si un membre des Etats se chargeait de porter à l’assemblée nationale les ordres du gouvernement , il perdrait la qualité de député et ne pourrait plus délibérer. Il pouvait auparavant donner son avis comme représentant de la nation en acceptant la qualité de commissaire du Roi ; il a changé de rôle, il doit être exclu des délibérations. Art. 3. Déclarer les députés, personnes inviolables; qu’ils ne seront comptables qu’envers l’assemblée nationale de ce qu’ils pourront dire, proposer ou faire. Art. 4. Prendre acte de la déclaration du Roi, par laquelle Sa Majesté a reconnu la nécessité du consentement des peuples pour l’établissement légal des impôts. En faire une loi nationale et constitutive. Art. 5. Renvoyer à la fin des séances, les délibérations relatives aux impôts à proposer, soit qu’on juge à propos de conserver ceux qui existent, ou de les remplacer par d’autres moins onéreux à la nation. RELIGION. Art. 1er. Demander qu’on la maintienne dans son intégrité et sa pureté. Ne se porter à rien de ce qui pourrait y porter la moindre atteinte. Art. 2. Empêcher la circulation des livres impies ou obscènes. Art. 3. Maintenir exclusivement le culte public de la religion catholique, apostolique et romaine, 320 [Elats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche. et demander l’exécution des lois relatives à l’observation des fêtes et dimanches, et à la décence que l’on doit garder dans les églises. Art. 4. Conserver les corps religieux ; y maintenir la conventualité et la régularité. CLERGÉ. . Art. 1er. Demander le maintien des lois et ordonnances reçues dans le royaume, qui forment le droit public, ecclésiastique et canonique. Demander la suppression de celle qui attribue aux évêques le droit de punir un ecclésiastique, sans avoir constaté son délit par une information préalable, régulière et contradictoire. Art. 2. Si Ion conserve au clergé sa forme de répartition, que l’ordre des curés, comme le plus nombreux, ait dans les chambres ecclésiastiques autant de représentants que les autres classes de bénéficiers, lesquels représentants seront régénérés par tiers tous les trois ans. Que toutes les opérations desdites chambres soient rendues publiques. Art. 3. Que le syndic et les députés de chaque diocèse, composant les chambres, soient nommées dans les assemblcTes synodales qui se tiendront tous les trois ans. Que chaque député soit nommé par l’ordre qu’il représente. Art. 4. Que l’on ne pourra faire aucune dépense publique ou particulière dans chaque diocèse, à la charge du clergé, qu’elle n’ait été consentie dans lesdites assemblées. Art. 5. Qu’à l’avenir les bénéfices ne soient plus que la récompense du mérite. Art. 6. Que l’arrêt du 5 semptembre touchant les premiers baux de nouvelles constructions, et reconstructions, soit révoqué. Art. 7. Qu’il soit établi dans chaque diocèse un fonds disponible au jugement seul du bureau diocésain , en faveur des prêtres infirmes ou âgés. Art. 8. Que les privilèges honorifiques du clergé, soient confirmés. Art. 9. Que tous les dix ans il se tienne un concile national ; tous les cinq ans un concile provincial. Que dans l’un et dans l’autre, l’ordre des curés surtout y ait une représentation et une place convénables. Art. 10. Que dans les synodes tenus tous les trois ans, il soit réglé entre les évêques et le clergé la discipline intérieure et extérieure du diocèse. Art. 11. Que le clergé du second, ordre, notam-mant les curés, soient admis à toutes les assemblées soit ecclésiastiques, soit politiques, et qu’ils y occupent la place qui leur convient. Art. 12. Que les places d’agents généraux soient désormais nommées par le clergé assemblé dans les Etats généraux. Qu’il soit créé deux nouvelles places; qu’il soit nommé des suppléants pour remplacer ceux qui viendraient à mourir d'une tenue d’Etats à l’autre ; que le mérite et la capacité seuls conduisent à ces places; que les agents soient tenus de donner gratuitement des conseils à tous les ecclésiastiques qui pourraient s’adresser à eux ; que, pour cet effet, il leur soit donné un conseil de six avocats; que lesdits agents soient continuables et révocables à volonté. Art. 13. Que l’usage des monitoires soit restreint, aux cas graves, au jugement des officiaux. Art. 14. Que les évêques ne puissent désormais donner des lettres de grands vicaires qu’à des ecclésiastiques qui auront été employés au moins trois années dans le ministère des paroisses. Que lesdites lettres porteront que le service réel et effectif a été certifié par quatre curés du voisinage. Qu’il en soit de même des offices de grands pénitenciers, théologaux, promoteurs ou autres emplois du gouvernement diocésain. Art. 15. Que le clergé et tous gens de mainmorte soient autorisés à recevoir au denier quarante le remboursement des rentes foncières, à la charge de remplacer le capital soit en fonds de terre, soit en rentes constituées; pourquoi il sera dérogé sur cet article à l’édit de 1749. Art. 16. Que les déports soient supprimés, et qu’en attendant le moment de leur suppression, iis soient toujours accordés aux curés, d’après l’estimation faite par deux experts, exception faite toutefois des biens chargés de fondations, appartenant de droit aux curés. Art. 17. Que les ordonnances royales à l’appui des canons, qui obligent à la résidence, soient renouvelées aux peines y portées. CURES. . Art. 1er. Unir celles qui sont divisées en plusieurs titres; celles qui sont peu nombreuses et peu distantes les unes des autres, sauf le patronage et le droit honorifique des patrons. Art. 2. Augmenter les cures dont le revenu est insuffisant, eu égard aux charges locales. _ Art. 3, Assurer aux vicaires, dans la proportion des cures, une subsistance honnête et convenable ; en établir où il serait nécessaire et augmenter le nombre selon le besoin. Art. 4. Demander qu’il soit dérogé à l’article 3 de� la déclaration du 2 septembre 1786; qu’il soit même accordé à tous curés codécimateurs une certaine somme sur leur portion de dîmes, exempte de contribution commune ; et régler qu’ils ne commenceront à contribuer pour la portion du vicaire, qu’après cette portion privilégiée et proportionnée à leurs charges spéciales. Art. 5. Qu’il soit accordé une indemnité aux décimateurs pour les terres dont la culture a été invertie. . Art. 6. Que les curés rentrent dans la possession des dîmes des terres défrichées depuis 1768, des vertes et menues dîmes, dîmes charnaux, comme ayant été accordées pour l’administration des sacrements. Art. 7. Accorder aux desservants des cures vacantes et des succursales le même sort qu’aux curés portionnaires. Art. 8. Simplifier les formalités des unions de bénéfices. Art. 9. Qu’on ne pourra exercer la prévention en cour de Rome qu’un mois après la vacance du bénéfice. Art. 10. Demander une loi pour régler l’exercice du patronage entre les mains des "non catholiques. Art. 11. Demander que l’Elat et l’Eglise concourent à tracer, d’une manière plus claire, la conduite que les curés doivent tenir dans la célébration des mariages des catholiques avec les non catholiques. Art. 12. Demander une loi uniforme dans le -royaume pour les formalités préalables à la célébration clés mariages des mineurs des deux sexes. Art. 13. Demander que les rituels rédigés dans l’assemblée synodale soient homologués aux différents parlements où ressortissent les différents diocèses. Art. 14. Demander que les curés primitifs cessent d’officier aux fêtes annuelles. 321 [États gén. 1789. Cahiers.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche-! Art. 15. Demander une loi en vertu de laquelle on ne puisse jamais obliger un curé de quitter l’élole dans sa paroisse, comme étant le signe de la juridiction ordinaire. CONSTITUTION. Art. 1er. Déclarer que la France est une monarchie. Art. 2. Que le monarque doit régner suivant les lois. Art. 3. Que la couronne est héréditaire de mâle en mâle et importable. , Art 4. Que tout citoyen français est libre sous la sauvegarde des lois. Art. 5. Que tout citoyen qui serait arrêté et emprisonné, sera mis, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de son juge; qu’il pourra citer et poursuivre devant le juge celui qui l’aura fait arrêter. Art. 6. Supprimer les lettres de cachet et tous autres ordres arbitraires, ménager cependant des ressources aux familles pour réprimer les écarts de leurs membres. Art. 7. Déclarer les propriétés des particuliers et des corps, sacrées et inviolables; même déclaration concernant le commerce des lettres. Art. 8. Aviser aux moyens d’attacher une considération publique à tous les arts et professions honnêtes et utiles. Art. 9. Arrêter les progrès funestes du luxe. Art. 10. Supprimer toutes les places inutiles. Ne conserver que celles qui imposent des devoirs utiles à la société; supprimer leur vénalité; qu’elles soient, sans exclusion, le prix du mérite, des talents et des vertus. Dans la concurrence, toutes choses égales d’ailleurs, donner cependant la préférence à la noblesse. Art. 11. Supprimer la vénalité de la noblesse. Art. 12. Permettre à la noblesse d’exercer certains états honnêtes sans qu’elle déroge. Art. 13. Arrêter qu’à la mort de chaque roi, les Etats s’assembleront un mois après, et que le sacre du nouveau roi se fera dans l’auguste assemblée de la nation. JUSTICE. Art. 1er. Réformer le code civil et criminel; supprimer les peines distinctives dans les crimes capitaux seulement. Art. 2. Accélérer la décision des procès; simplifier les procédures; rendre les procureurs responsables des vices de forme et des suites qu’ils pourraient avoir. Art. 3. Fixer irrévocablement les honoraires et épices des juges, tant pour les jugements des affaires au rapport et productions, pour les actes d’hôtel, législations, prestation de serment, tutelles, transports et présence à l’opposition et reconnaissance des scellés. Art. 4. Statuer définitivement la circonstance dans laquelle les scellés peuvent être apposés et requis. Art. 5. Arrêter d’une manière solide et durable les droits de greffe. Art. 6. Que dans tout bailliage royal ou sénéchaussée, il y ait au moins trois ou cinq juges. Art. 7. xYenlever jamais personne à ses juges naturels. Supprimer, par conséquent, les droits de committimus, droits d’évocation, etc. Art. 8. Etablir une cour souveraine dans chaque province, et que le siège en soit à Bellesme, pour le Perche. Art. 9. Etablir des juges de paix, sans l’aveu desquels on ne pourra intenter aucun procès, lre Série, T. V. les prendre dans chaque classe, pour celles qui sont instruites, afin qu’autanl que possible chacun soit jugé par ses pairs. Art. 10. Attribuer la connaissance des contestations du peuple aux municipalités, comme conciliatrices. Art. 11. Autoriser les municipalités à faire gratuitement les tutelles des pauvres. Art. 12. Attribuer aux tribunaux ordinaires les contestations relatives aux domaines. ETATS PROVINCIAUX. Art. 1er. En établir dans chaque province et adhérer à la demande faite par le Thimerais et la baronnie de Longny, pour être unis à la province du Perche pour toute espèce d’administration, comme en faisant partie autrefois. Art. 2. Que les membres en soient élus par les habitants; qu’ils soient pris dans tous les ordres; qu’ils soient régénérés par tiers à chaque tenue, afin de laisser à chaque citoyen la facilité de prendre part à la chose publique. Art. 3. Dans les provinces un peu étendues, établir une commission dans chaque ville principale, des bureaux de correspondance dans les autres. Etablir également des municipalités. Que les membres en soient électifs, pris dans tous les ordres, et qu’ils se régénèrent par tiers, comme les Etats provinciaux. IMPOTS. Art. 1er. Avant d’en accorder aucun, constater l’Etat réel de la recette, la dépense des charges et du déficit, par l’examen des pièces justificatives. Art. 2. Cette vérification faite, voir les retranchements, économies, bonifications que l’on peut faire en chaque partie. Art. 3. Ne reconnaître plus d’autres impôts que ceux qui auront été librement consentis par la nation assemblée. Art. 4. Consentir à l’égalité de leur répartition entre tous les citoyens, à condition que la dette du clergé sera confondue dans la dette nationale, comme en faisant pardie. Art. 5. Que tout soi productif payera l’impôt; que les parcs et autres terrains d’agrément y seront soumis. Art. 6. Confier la répartition et la perception aux Etats provinciaux. Art. 7. Déterminer la durée de chaque impôt et déclarer expressément qu’à la révolution de chaque époque fixée pour sa cessation, nul ne pourra en demander le payement. Art. 8. Reconnaître et sanctionner la dette publique. Art. 9. Qu’on ne puisse faire aucun emprunt que du consentement des Etats. Art. 10. Supprimer les aides et gabelles; laisser aux provinces la faculté de les remplacer par d’autres impôts qu’elles jugeront moins onéreux. Art. 11. Dans le cas où les droits d’aides seront conserves, supprimer cette inégalité de perception, qui fait que certaines communautés les payent au quatrième, tandis que leurs voisins les payent au huitième. Art. 12. Si la nation refusait de regarder la dette du clergé comme dette nationale, le clergé du second ordre n’entend point contribuer à l’acquit de ladite dette. CAISSE NATIONALE. Art. 1er La mettre sous la dépendance de» 21 322 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] préposés choisis, nommés révocables par le Roi et la nation. Art. 2. Nul ne doit avoir de pension sur la caisse nationale, s’il n’a rendu service à l’Etat. Art. 3. Régler la dépense des divers départements, le nombre des commis nécessaires, leurs traitements et ceux des ministres. Art. 4. Rendre les ministres responsables de leur administration, envers la nation assemblée, ainsi que tous ceux chargés en chef d’une administration quelconque. DOMAINES. Art. 1er. Consentir aux aliénations qui ont pu être faites ou que l’on pourrait proposer, si elles sont avantageuses à la nation et au Roi. Art. 2. Examiner les échanges qui ont pu être faits; annuler ceux qui sont désavantageux au-Roi. Art. 3. Aliéner les domaines en tout ou en partie ; en confier l’estimation aux Etats provinciaux. PERMANENCE OU PÉRIODICITÉ DES ÉTATS GÉNÉRAUX. Art. 1er. Les rendre permanents quelques années, de manière qu’ils puissent s’assembler tous les ans, jusqu’à ce qu’ils aient perfectionné l’ouvrage qu’ils n’auraient qu’ébauché à la première tenue. Art. 2. La réforme étant établie dans chaque partie, les rendre périodiques tous les quatre ou cinq ans. Art. 3. La présidence des Etats doit être élective. Aucune province, aucun député, ne peuvent la réclamer comme droit. Chacun n’apporte à l’assemblée nationale que le titre de citoyen. Art. 4. Que le président soit changé souvent; qu’il ne nomme point les membres des commissions aux bureaux, même règle pour les présidents des bureaux. DIFFÉRENTES VUES SUR LE BIEN PUBLIC Art. 1er. Qu’on établisse dans chaque paroisse une sage-femme instruite et de bonnes mœurs. Supprimer la mendicité. Etablir des bureaux de charité dont les fonds seraient pris sur toutes les propriétés et bénéfices, et surtout en plus forte contribution sur les bénéfices simples. Art. 2. Etablir des maîtres et maîtresses d’école dans toutes les paroisses, en assignant pour ces établissements des fonds fixes, et non pas d’une manière vague, comme dans les édits de 1698 et 1724. Cet article est d’autant plus intéressant, qu’il prépare de dignes sujets pour la formation des municipalités. Art. 3. Que, dans les collèges, l’éducation soit gratuite; que le régime et le gouvernement d’i-ceux appartiennent exclusivement aux évêques; et que les bureaux, s’il est nécessaire de les conserver, soient restreints uniquement à l’administration du temporel. Art. 4. Que les droits de contrôle et du centième denier soient fixés par une loi claire et précise et comme par un tarif dont les commis ne puissent abuser. Art. 5. Modérer les frais de scellés et statuer définitivement les cas dans lesquels les scellés devront être apposés et requis. Art. 6. Suppression des jurés-priseurs vendeurs. Art. 7. Simplifier la perception et reconnaissance des droits seigneuriaux et autres rentes foncières. Art. 8. Demander l’exécution des lois concernant la chasse, les fuies , les colombiers et les j garennes ; donner action civile à tout propriétaire, pour les dégâts commis dans les champs et possessions par les bêtes fauves, pigeons, lièvres et lapins ou autre gibier. Art. 9. Prévenir et empêcher les effets et impunité des banqueroutes et faillites. Art. 10. Que personne ne puisse être privé de son emploi, à moins qu’il ne soit précaire, sans un jugement légal. Art. 1 1 . Prendre en considération l’état malheureux des nègres. Art. 12. Améliorer le�sort des prisonniers ; réformer l’administration des geôles ; ne plus confondre l’innocent avec le coupable. Art. 13. Empêcher les déplacements fréquents des troupes : les employer aux travaux publics. Art. 14. Encourager l’agriculture ; faciliter le commerce, par la suppression des privilèges exclusifs et des entraves qui le gênent, enfin par le reculement des barrières aux extrémités du royaume. Que le droit de retrait lignager et seigneurial, soit incessible. Que les décimateurs du Perche aient une propriété libre des pailles de leurs dîmes, gênée par les arrêts en forme de règlement du parlement de Paris, notamment de l’année 1778. Lesdits articles arrêtés et consentis par toute l’assemblée, elle entend que son député promette sur son honneur de ne recevoir aucune gratification ni bénéfice, de la part de la cour, dans l’espace de six ans, le chargeant de plus de solliciter auprès du conseil la cassation de l’arrêt du parlement rendu entre M. Dupré de Saint-Maur et la dame de Dampierre. D’après il a été procédé, par la voix du scrutin, à la nomination d’un député aux Etats généraux; et la vérification faite pour la première fois, il s’est trouvé que le choix est tombé sur la personne de messire Gabriel-Sébastien Lefrançois, curé du Mage, suivant et au désir de l’article 47 du règlement fait par Sa Majesté, comme ayant obtenu deux voix au-dessus de moitié : lequel a accepté. Et pour le remplacer, en cas d’événement, il a été pareillement procédé à un second scrutin, par le résultat duquel la personne de messire Esprit-Louis Moris, curé de Saint-Mars de Reno, a été choisi, lequel a pareillement accepté; et ont lesdits élus signé lesdits articles et pouvoirs et nomination de leurs personnes, avec les délibérants soussignés sur la minute. Aujourd’hui 14 avril audit an 1789, en la chambre du greffe du bailliage royal du comté du Perche, à Bellesme, Est comparu maître Fontaine, curé de Saint-Pierre de cette ville , secrétaire de l’assemblée de son ordre, lequel nous a remis à titre de dépôt le cahier ci-dessus et des autres parts, ensemble un pareil cahier commençant par ces mots : Précautions préliminaires; duquel dépôt nous avons donné acte, ce que ledit sieur curé a signé avec nous. Signé Fontaine, curé de Saint-Pierre et secrétaire, et Ballot. Délivré conforme à la minute par nous, secrétaire, soussigné. Signé BALLOT. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES CAHIER De Vordre de la noblesse duballiage du Perche ( 1). Art. 1er. L’ordre de la noblesse du Perche charge son député aux. Etats généraux d’y déclarer, avant tout, que la personne de nos rois est sacrée et inviolable; de joindre à ce témoignage de respect et de vénération un tribut personnel d’amour pour le monarque, en lui adressant les actions de grâces les plus solennelles au nom de la noblesse de cette province. Art. 2. Le député de la noblesse réclamera que les articles principaux de la constitution, énoncés dans le rapport de M. le directeur général des finances, du 27 décembre dernier, soient préliminairement et solennellement statués; cette partie essentielle de l’administration devant servir de base à la liberté nationale, et de dédommagement aux sacrifices que les circonstances exigent, il est expressément défendu au député de voter, concourir et consentir à la levée d’aucun impôt ni emprunt, avant l’établissement préalable de la forme constitutionnelle. Art. 3. La province du Perche demande que les Etats généraux se rassemblent à des époques périodiques; en les fixant à trois ans, c’est prendre un terme généralement désiré. Art. 4. Le député demandera, à la prochaine assemblée, qu’on fasse une loi fondamentale de l’Etat. Art. 5. 11 s’opposera fortement à ce qu’il soit établi une commission intermédiaire, sous quelque dénomination que ce puisse être, pour représenter ou travailler au nom des Etats généraux. Art. 6. Les Etats généraux statueront sur le nombre des députés qui composeront à l’avenir l’assemblée nationale, et sur la forme dans laquelle elle sera convoquée; Art. 7. Lorsque les circonstances nécessiteront une régence, les Etats généraux seront convoqués de droit, sans que rien puisse y apporter obstacle : c’est à l’assemblée prochaine qu’il est essentiel de décider quelles seraient, en pareil cas, la forme et l’époque de cette convocation. Art. 8. La noblesse charge son député de déclarer que son vœu est de délibérer par ordre. Art. 9. Elle demande qu’il soit accordé des Etats h la province du Perche, à laquelle seront réunis le Thimerais, le Perche-Gouet et les paroisses qui faisaient partie de l’ancienne élection de Longny. Art. 10. La noblesse prescrit à son député de demander que toutes lois consenties du Roi et des trois ordres soient considérées comme lois nationales, et comme telles enregistrées par les cours souveraines, qui ne pourront y faire opposition ni amendement. Art. 11. Qu’à l’avenir il ne soit établi aucun impôt sans le consentement desdits Etats généraux ; s’il arrivait qu’ils ne fussent pas convoqués à l’époque indiquée, les impôts cesseraient à l’instant d’avoir leur effet, et ceux qui voudraient les percevoir seraient punis comme concussionnaires. Art. 12. Que le ministre des finances fournisse à Rassemblée nationale tous les états nécessaires pour en connaître la situation et fixer le montant du déficit; que les états de dépense de tous les autres départements soient soumis à l’examen des Etats généraux, qui demanderont au Roi les réformes qu’ils croiront possible de faire dans cha-(1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé: le Go uvernement de Normandie, par M. Hippeau. iLEMENT AIRES. [Province du Perc&e.J 323 que département, sans nuire à l’éclat du trône et à la sûreté de l’Etat. Art. 13. Que les dettes du Roi soient reconnues et consolidées par les Etats généraux, qui se réserveront sous leur direction immédiate, et sous l’administration des Etats provinciaux, les revenus nécessaires pour payer les intérêts et rembourser les capitaux. Art. 14. La noblesse déclare que les privilèges pécuniaires étant ceux auxquels l’ordre est le moins attaché, il les sacrifiera sans peine, en se réservant ceux annoncés dans le rapport au conseil par le directeur général des finances, le 27 décembre dernier, et tel qu’il sera statué par les Etats généraux; se réservant, en outre, les droits sacrés de la propriété, et déclarant formellement qu’il ne peut ni ne doit consentir à aucun changement qui opérerait la dégradation dans la personne de ses membres, dans l’essence, la dignité et les prérogatives de ses fiefs. Art. 15. Qu’il convient que les impôts, actuellement existants, soient prorogés seulement pendant la tenue des Etats généraux. Art. 16. Que les Etats généraux s’occupent, dans leur sagesse, de trouver un moyen d’imposer les capitalistes, qui jusqu’à présent ont joui de tous les avantages de la fortune sans contribuer aux charges publiques. Que le député insiste sur la réforme des impo ¬ sitions qui gênent le commerce et l’agriculture, telles que le prix excessif du sel et de droit de traite dans l’intérieur du royaume. Art. 17. Que le Roi soit supplié de fixer une somme pour ses dépenses particulières, celles de sa maison, celles de la Reine et de son auguste famille; que toutes ces sommes, déterminées tel qu’il convient à la majesté du trône et au Roi d’une grande nation, soient versées dans le trésor particulier du monarque, auquel seul il en sera rendu compte, et qui en disposera à sa volonté; que le surplus des impôts soit versé dans une caisse appelée caisse nationale, et que tous les ans chaque ministre rende un compte public de Remploi des fonds de son département, et qu’il en soit responsable. Art. 18. Qu’il soit accordé aux juges royaux une ampliation de pouvoirs, pour juger souverainement jusqu’à une somme plus forte que celle actuellement fixée, qui sera déterminée par les Etats généraux. Art. 19. Que toutes les charges de judicature soient pourvues de leurs officiers, qui ne pourront jamais en posséder plus d’une. Art. 20. Que le nom et l’usage des lettres de cachet soient à jamais abolis. . Art. 21. Qu’aucun citoyen ne puisse être privé de sa liberté que par la loi, et d’après le jugement des tribunaux reconnus de la nation, laissant à la sagesse des Etats généraux à pourvoir à la sûreté publique et à la tranquillité des familles. Art. 22. Que la réforme promise, tant dans le code civil que criminel, soit enfin effectuée. Art. 23. Que toutes les causes criminelles restent à leurs juges naturels, abolissant toutes les lettres d’attribution. Art 24. Que les lettres d’évocation au conseil soient supprimées, excepté celles demandées, par requête civile, en cassation d’arrêt. Suppression de toutes commissions qui ne seraient point consenties de toutes les parties, ainsi que le droit de commitlimus. Art. 25. Que les Etats généraux s’occupent de la rédaction d’une loi qui rétablisse la liberté lé* gitime de la presse : on pense qu’il suffirait que 324 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] l’imprimeur fût caution de l’ouvrage, en y mettant son nom. Art. 26. Qu’ils examinent dans leur prudence tous les objets faisant partie des domaines aliénés, depuis la dernière assemblée nationale, par dons, ventes et échanges ou autrement, etcon-liant à l’administration provinciale ceux qui restent à la couronne, pour en connaître aujourd’hui le produit, et les porter ensuite à leur valeur réelle. Art. 27. La noblesse déclare par son député aux Etats généraux, qu’elle ne reconnaît qu’un seul ordre de noblesse jouissant des mêmes droits. Elle demande qu’il n’y ait que les seules charges des cours souveraines, qui puissent transmettre la noblesse à la troisième génération. Que Sa Majesté soit suppliée de n’accorder la noblesse qu’aux services essentiels rendus à la pairie; que les militaires l’obtiennent par de longs services ou des actions brillantes à la guerre, sur la demande des officiers généraux, et certifiés par ceux qui en ont été témoins, et pour les citoyens qui ont rendu des services signalés à la nation, sur la demande des Etats provinciaux. Art. 28. Le Roi est supplié de ne plus accorder de survivances. Art. 29. La noblesse charge son député de demander qu’il soit établi un conseil, dont les membres tirés par la voix du scrutin, de tous les régiments, puissent enfin donner un code permanent; ce code, mis pendant un an en exécution dans les grandes garnisons, prouvera par l’expérience s’il est analogue au génie delà nation; qu’on augmente la paye du soldat; qu’il ne soit plus avili, et pour lui rendre son ancienne supériorité sur celui des autres nations, qu’on présente à l’élite de l’ordre du tiers le moyen pur de parvenir à la noblesse par le métier des armes. Qu’on ne se permette plus, dans l’exposé des lois qu’on veut prescrire au métier de l’honneur, des phrases affligeantes et qui posent une ligne de démarcation! Art. 30. Qu’à l’avenir tout citoyen, revêtu d’un office civil ou militaire, n’en puisse être privé que par un jugement, et qu’il soit formé par les Etats généraux un tribunal chargé de prononcer sur toutes les destitutions, et sur toutes celles qui auraient pu être précédemment prouvées illégales. Art. 31. Que dans les écoles militaires et à la maison royale de Saint-Cyr, il y ait un nombre fixe de places pour la noblesse peu fortunée de chaque bailliage; qiie ces places soient accordées par le Roi sur la présentation des Etats provinciaux. Art. 32. La noblesse charge en outre son député de demander que le prêt annuel, à intérêt, soit autorisé par une loi. Art. 33. Que les banqueroutiers soient poursuivis à la requête du procureur du Roi. Art. 34. Que tous les privilèges exclusifs soient supprimés, comme contraires au commerce et à l’agriculture. OBJETS RELATIFS A LA PROVINCE. Art. 35. Les intérêts généraux une fois réglés, le député sollicitera, au nom de l’ordre, la cassation demandée par M. Dupré de Saint-Maur contre l’arrêt du parlement du 17 mars dernier, comme contraire aux dispositions de cette coutume qu’il importe à la province de faire exécuter pour maintenir l’ordre des successions. Art. 36. Il représentera que l’excès de la taille que la province supporte s’élève à un tiers au-dessus de celle des autres élections de la même généralité. 11 représentera que son sol, en général d’une médiocre qualité, répond à peine aux travaux et dépenses multipliés du cultivateur; que les campagnes. la plupart en collines, sont sujettes à être dégradées par les eaux; qu’entin le commerce est sans force, et l’agriculture sans vigueur. 11 représentera que la manufacture de Nogent-le-Rotrou, autrefois si florissante, est dans un état de langueur qui annonce visiblement son anéantissement total; que cette stagnation entraîne nécessairement la diminution du prix des laines, et éteindra par la suite l’émulation du cultivateur pour l’amélioration des troupeaux, branche de commerce qui paraît convenir plus particulièrement à la province. Il réclamera fortement contre les droits domaniaux, d’aides et de contrôle qui s’exercent dans l’étendue de son ressort, et il en demandera la diminution et la fixation invariable. Art. 37. Il proposera qu’il soit établi dans chaque village un tribunal de paix, présidé par le seigneur ou le curé, pour arrêter provisoirement toutes contestations qui pourraient s’élever entre les habitants, en lui donnant cependant pouvoir de statuer définitivement sur de légères difficultés, dont la somme sera fixée par les Etats généraux. Art. 38. Enfin, l’ordre de la noblesse, sans prescrire à son député aucuns plans fixes, dont il ne puisse s’écarter, lui ordonne de suivre, le plus qu’il lui sera possible, les principes renfermés dans les instructions, de les bien méditer, et d’en faire la base de sa conduite. Fait et arrêté en la chambre de l’ordre de la noblesse du bailliage du Perche, à Bellesme, le 8 avril 1788. Signé Le chevalier de Fontenay; Savary; Car-pentin; le chevalier de Lonlay; Beaurepos; Vas-concelle; Poulain de Brustel; Mervé; Abot de Li-gnerolles; Magny; le chevalier de Savary; le comte de Laporte, commissaire ; Du Buisson de Blainville, commissaire ; Barville de Nocé, commissaire; Du Mouchet; le chevalier Du Mouchet; La Garigue; La Porte, marquis de Riantz; Tas-cher; Bonnet de Beslou; le comte d’Andlau; le comte des Feugerets; LeBouyer de Sain t-Ger vais; le chevalier de Brustel ; L’Ecuyer; Descorches; Dupré de Saint-Maur; Philmain; Mallard; Mon-duison d’Oursière; Echalard de la Bourguinière; Louis de Fontenay; Saint-Pol; Avesgo de Mont-chevrel; Cissay; Villereau; Le Frère du Frettey; Le Couturier Saint-James; Duportail de la Binar-dière; Hilarion de Fontenay; Dividis; L.-Charles Le couturier de Saint-James; Chandebois; le marquis de Turin ; Guéroult de Saint-Mars, commissaire ; La Martellièrè, commissaire; Guéroult, chevalier delà Goyère, commissaire; Malaise; Cheve-sailles des Perrines ; Louis Collet delà Davillière; Antoine Collet de la Davillière; Pierre Collet de la Davillière; Malestable; Suhard ; Crestien ; le chevalier Crestien ; La Vallée-Uubosq ; Cottin de la Thuillerie; Poissonnier de Prulay ; Launay de Cohardin ; Vanssav; Guéroult, chevalier de Saint-Mars; Guéroult Île la Gohyère; Guilbert du Landey; le chevalier de Glapibn; le chevalier de Guéroult ; Guéroult de Freu ville ; Louis de Vanssay; P.-L. Guéroult de Freuville ; Brulé de Blaru Moucheron; Cliazot; Tirmois; Chandrbois de Bellcgarde; de Rocque; Tarefumir de Saint-Maixent; L’Hermitte; J.-F. de Lonlay; Bonvoust; Lépinay ; Berché; Yilquoi de Thionville; le chevalier de L’Hermitte ; Bayard de la Vingtrie ; le vi- [Etats gén. 1789. Cahiers.] comte de Puisaye, président; Avesgo de Cou-longes, secrétaire. CAHIER De doléances du tiers-état de la province du Perche, arrêté dans V assemblée générale tenue dans la ville de Bellême (l). L’assemblée, pénétrée de respect et de vénération pour la personne du Roi et de toute la famille royale, sentiment qu’elle partage avec tous les citoyens de la province, a arrêté que le premier acte de ses délibérations devait offrir à notre digne monarque un tribut personnel d’amour et d’attachement inviolable pour sa personne sacrée; que les députés de la province seront chargés spécialement de se joindre au surplus de la nation pour adresser les actions de grâces les plus solennelles et les plus touchantes à la bonté et à la justice de Sa Majesté, en reconnaissance de ce qu’elle a attesté d’une manière si noble et si touchante les droits de la nation, droits imprescriptibles, mais trop longtemps oubliés. Que le résultat du conseil de Sa Majesté, du 27 décembre dernier, et les promesses qu’elle fait à ses peuples, les ont pénétrés d’attendrissement. Qu’elle sera très-humblement et très-instamment suppliée de vouloir bien en rappeler sans cesse le souvenir à ses ministres et autres dépositaires de son autorité immédiate, et d’être convaincue que l’ordre du tiers de cette province, comme celui de tout son royaume, est disposé à faire dans ce moment et dans tous les temps le sacrifice de sa fortune et à verser jusqu’à la dernière goutte de son sang pour le salut de l’Etat, le soutien de la couronne et pour le maintien du royaume dans toute sa splendeur. Ensuite, prenant et; considération les objets qui doivent faire la matière de ses délibérations, il a été arrêté, à la pluralité des suffrages, de demander : Art. 1er. Qu’il soit arrêté à la première séance des Etats généraux que les membres de tous les ordres qui les composent, étant des citoyens libres, leurs ressources soient en demeure sous la sauvegarde du Roi et de la nation. Art. 2. Que les Etats généraux s’occupent de leur organisation et des lois constitutives du royaume, avant de rien arrêter de relatif aux subsides. Art. 3. Que le royaume de France est de sa nature un Etat monarchique qu’il intéresse à la nation de conserver et de maintenir dans toute la pureté de cette définition. Art. 4. Que la succession à la couronne continuera d’être dévolue aux aînés mâles et à leurs descendants de mâle en mâle et que la maxime que le royaume ne tombe point en quenouille soit inviolable, et que, la ligne masculine défaillant, le droit d’élire un souverain continue d’appartenir à la nation. Art. 5. Que les assemblées des Etats généraux soient composées de manière que les députés du troisième ordre soient au moins en nombre égal à celui des deux premiers réunis. Art. 6. Que toutes les délibérations à prendre par 1 assemblée des Etats généraux, soit relativement à la formation des lois constitutionnelles, ou à la reconnaissance des maximes fondamantales (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé: le Gouvernement de Normandie f par M. Hippeau. [Province du Perche.] 35g du royaume et aux lois qui intéressent la liberté et la fortune des citoyens, soient formées par la pluralité des suffrages qui seront comptés par tête et non par ordre, forme qui fait la vraie constitution de toute assemblée. Art. 7. Que la formation des différents bureaux pour l’examen des objets qui seront traités dans rassemblée générale, soit observée de manière qu’il y ait toujours dans chaque bureau un nombre de membres du tiers au moins égal à celui des deux premiers ordres réunis. Art. 8. Qu’il soit pourvu par la suite à ce que, dans les assemblées générales de chaque bailliage, le tiers puisse y être représenté en nombre au moins égal à celui des deux premiers ordres réunis, et ce, à raison de la population et non du nombre des paroisses de chaque bailliage. Art. 9. Qu’aux Etats généraux il n’y ait d’autres délibérations que celles des députés des trois ordres. Art. 10. Que la loi consentie parles Etats généraux et sanctionnée par le Roi, soit registrée et publiée dans les tribunaux qui seront désignés par lesdits Etats, sans autre vérification que celles des formes qui seront pareillemeut arrêtées par eux pour la rendre publique. Art. 11. Qu’à l’avenir, il ne soit établi aucun subside ni ouvert aucun emprunt qu’ils n’aient été ordonnés et consentis par les Etats généraux régulièrement convoqués, et que la loi qui les établira soit registrée et publiée. Art. 12. Qu’il soit arrêté que les Etats généraux seront assemblés à des époques fixes et déterminées, sans qu’il puisse jamais être établi dans l’intervalle aucune commission intermédiaire représentative desdits Etats. Art. 13. Que tout le royaume soit érigé en pays d’Etats, et particulièrement la province du Perche, à laquelle seront unis le Thimerais, le Perche-Gouët et les paroisses qui faisaient partie de l’ancienne élection de Longny, qui sont régies par la coutume du Perche, dont le siège sera en la ville de Rellème, afin que chaque Etat provincial puisse répartir comme bon lui semblera les impôts consentis par la nation, sans que l’impôt, quoique accordé par les Etats généraux, puisse jamais être perçu que par les préposés desdits Etats. Art. 14. Que la composition des Etats particuliers de la province soit telle, que l’ordre du tiers soit en nombre au moins égal à celui des deux premiers ordres, et que les délibérations y soient prises ainsi qu’aux Etats généraux, les trois ordres réunis par tête, et que les suffrages soient recueillis alternativement de chacune tête des trois ordres. Art. 15. Que, dans le cas où on laisserait subsister les assemblées provinciales au lieu d’établir des Etats particuliers, on abandonnera à chaque province le droit et la faculté d’en composer une nouvelle formation, comme aussi de présenter au Roi trois sujets pour présidents, tant de Rassemblée provinciale que de celle de département, du nombre desquels le président sera choisi par Sa Majesté, et que les assemblées provinciales ne puissent être formées que des députés de chaque département, qui seront annuellement choisis dans l’assemblée desdils départements. Art. 16. Que les fonctions municipales ne pourront être érigées en titre d’office; que ceux desdits offices actuellement existants soient supprimés en remboursant la finance aux propriétaires; que les villes pourront librement choisir tous les trois ans leurs officiers municipaux et leurs représentants dans les assemblées municipales, se ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Etats gén. 1789. Cahiers.] comte de Puisaye, président; Avesgo de Cou-longes, secrétaire. CAHIER De doléances du tiers-état de la province du Perche, arrêté dans V assemblée générale tenue dans la ville de Bellême (l). L’assemblée, pénétrée de respect et de vénération pour la personne du Roi et de toute la famille royale, sentiment qu’elle partage avec tous les citoyens de la province, a arrêté que le premier acte de ses délibérations devait offrir à notre digne monarque un tribut personnel d’amour et d’attachement inviolable pour sa personne sacrée; que les députés de la province seront chargés spécialement de se joindre au surplus de la nation pour adresser les actions de grâces les plus solennelles et les plus touchantes à la bonté et à la justice de Sa Majesté, en reconnaissance de ce qu’elle a attesté d’une manière si noble et si touchante les droits de la nation, droits imprescriptibles, mais trop longtemps oubliés. Que le résultat du conseil de Sa Majesté, du 27 décembre dernier, et les promesses qu’elle fait à ses peuples, les ont pénétrés d’attendrissement. Qu’elle sera très-humblement et très-instamment suppliée de vouloir bien en rappeler sans cesse le souvenir à ses ministres et autres dépositaires de son autorité immédiate, et d’être convaincue que l’ordre du tiers de cette province, comme celui de tout son royaume, est disposé à faire dans ce moment et dans tous les temps le sacrifice de sa fortune et à verser jusqu’à la dernière goutte de son sang pour le salut de l’Etat, le soutien de la couronne et pour le maintien du royaume dans toute sa splendeur. Ensuite, prenant et; considération les objets qui doivent faire la matière de ses délibérations, il a été arrêté, à la pluralité des suffrages, de demander : Art. 1er. Qu’il soit arrêté à la première séance des Etats généraux que les membres de tous les ordres qui les composent, étant des citoyens libres, leurs ressources soient en demeure sous la sauvegarde du Roi et de la nation. Art. 2. Que les Etats généraux s’occupent de leur organisation et des lois constitutives du royaume, avant de rien arrêter de relatif aux subsides. Art. 3. Que le royaume de France est de sa nature un Etat monarchique qu’il intéresse à la nation de conserver et de maintenir dans toute la pureté de cette définition. Art. 4. Que la succession à la couronne continuera d’être dévolue aux aînés mâles et à leurs descendants de mâle en mâle et que la maxime que le royaume ne tombe point en quenouille soit inviolable, et que, la ligne masculine défaillant, le droit d’élire un souverain continue d’appartenir à la nation. Art. 5. Que les assemblées des Etats généraux soient composées de manière que les députés du troisième ordre soient au moins en nombre égal à celui des deux premiers réunis. Art. 6. Que toutes les délibérations à prendre par 1 assemblée des Etats généraux, soit relativement à la formation des lois constitutionnelles, ou à la reconnaissance des maximes fondamantales (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé: le Gouvernement de Normandie f par M. Hippeau. [Province du Perche.] 35g du royaume et aux lois qui intéressent la liberté et la fortune des citoyens, soient formées par la pluralité des suffrages qui seront comptés par tête et non par ordre, forme qui fait la vraie constitution de toute assemblée. Art. 7. Que la formation des différents bureaux pour l’examen des objets qui seront traités dans rassemblée générale, soit observée de manière qu’il y ait toujours dans chaque bureau un nombre de membres du tiers au moins égal à celui des deux premiers ordres réunis. Art. 8. Qu’il soit pourvu par la suite à ce que, dans les assemblées générales de chaque bailliage, le tiers puisse y être représenté en nombre au moins égal à celui des deux premiers ordres réunis, et ce, à raison de la population et non du nombre des paroisses de chaque bailliage. Art. 9. Qu’aux Etats généraux il n’y ait d’autres délibérations que celles des députés des trois ordres. Art. 10. Que la loi consentie parles Etats généraux et sanctionnée par le Roi, soit registrée et publiée dans les tribunaux qui seront désignés par lesdits Etats, sans autre vérification que celles des formes qui seront pareillemeut arrêtées par eux pour la rendre publique. Art. 11. Qu’à l’avenir, il ne soit établi aucun subside ni ouvert aucun emprunt qu’ils n’aient été ordonnés et consentis par les Etats généraux régulièrement convoqués, et que la loi qui les établira soit registrée et publiée. Art. 12. Qu’il soit arrêté que les Etats généraux seront assemblés à des époques fixes et déterminées, sans qu’il puisse jamais être établi dans l’intervalle aucune commission intermédiaire représentative desdits Etats. Art. 13. Que tout le royaume soit érigé en pays d’Etats, et particulièrement la province du Perche, à laquelle seront unis le Thimerais, le Perche-Gouët et les paroisses qui faisaient partie de l’ancienne élection de Longny, qui sont régies par la coutume du Perche, dont le siège sera en la ville de Rellème, afin que chaque Etat provincial puisse répartir comme bon lui semblera les impôts consentis par la nation, sans que l’impôt, quoique accordé par les Etats généraux, puisse jamais être perçu que par les préposés desdits Etats. Art. 14. Que la composition des Etats particuliers de la province soit telle, que l’ordre du tiers soit en nombre au moins égal à celui des deux premiers ordres, et que les délibérations y soient prises ainsi qu’aux Etats généraux, les trois ordres réunis par tête, et que les suffrages soient recueillis alternativement de chacune tête des trois ordres. Art. 15. Que, dans le cas où on laisserait subsister les assemblées provinciales au lieu d’établir des Etats particuliers, on abandonnera à chaque province le droit et la faculté d’en composer une nouvelle formation, comme aussi de présenter au Roi trois sujets pour présidents, tant de Rassemblée provinciale que de celle de département, du nombre desquels le président sera choisi par Sa Majesté, et que les assemblées provinciales ne puissent être formées que des députés de chaque département, qui seront annuellement choisis dans l’assemblée desdils départements. Art. 16. Que les fonctions municipales ne pourront être érigées en titre d’office; que ceux desdits offices actuellement existants soient supprimés en remboursant la finance aux propriétaires; que les villes pourront librement choisir tous les trois ans leurs officiers municipaux et leurs représentants dans les assemblées municipales, se ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] 326 [Étals gén. 1789. Cahiers.] tracer un plan de gouvernement qui sera sanc-j tionné par les Etats provinciaux, auxquels les comptes seront présentés annuellement, pour être par eux visés et approuvés, et disposer librement des revenus de leur communauté. Art. 17. Que les exclusions données au tiers-état, soit pour occuper les emplois militaires ou ceux de la magistrature dans les cours, soient anéanties et que la motié des places dans les tribunaux supérieurs soient spécialement affectées à l’ordre du tiers. Art. 18. Que les Etats généraux prennent en considération les abus énormes qui existent dans l’entreprise des étapes et convois militaires. Art. 19. Qu’il soit pourvu à la réforme des ordonnances militaires, de manière que le soldat soit traité plus humainement et qu’ou supprime tous les châtiments avilissants ; qu’il soit mieux vêtu et mieux appointé, et, comme au moyen de la réforme, il s’attachera nécessairement au service, qu’alors les milices soient supprimées, comme étant un sujet de désolation pour les familles et gênant la liberté naturelle, sauf à les rétablir en cas de nécessité absolue, et qu’alors on conserve tous les fils aînés des familles de cultivateurs dans les campagnes, ou, à défaut d’enfants, leur premier domestique, et, dans les villes, les fils aînés des bourgeois vivant noblement et les tils aînés des marchands et artisans aidant leurs père et mère dans leur commerce ou métier. Art. 20. Qu’il soit formé des arrondissements dans tous les bailliages, en sorte que les justiciables soient rapprochés le plus possible de leur juridiction. Art. 21. Que ces sièges royaux soient fixés dans l’endroit jugé le plus convenable sur le rapport des commissaires, en délibération de communautés. Art. 22. Qu’il soit procédé à la réformation des coutumes de l’avis des trois Etats, en leur donnant pour base des principes de droit commun et la plus grande uniformité possible; que les codes civil, criminel et de police soient aussi réformés, et que, pour y parvenir, il soit nommé des commissaires choisis dans les premier et second ordre de la magistrature et jurisconsultes. Art. 23. Qu’en simplifiant les formes de la procédure, il soit pourvu à la fixation et à la réduction des honoraires, droits de procédure et de greffe, sauf l’indemnité des propriétaires, même à la suppression de droits de formule, de timbre et autres droits royaux y relatifs. Art. 24. Que les études du droit soient réformées et suivies avec plus d’exactitude, et qu’aucun magistrat ne puisse être pris que dans le nombre des avocats qui auront suivi le barreau dans une juridiction quelconque pendant l’espace de six ans, [et qui se seront distingués dans cette profession par leur capacité, leur probité et leurs mœurs, certifiées tant par le tribunal que par les collèges des avocats; qu’ils ne puissent être admis à aucuns offices qu’ils n’aient atteint l’âge de vingt-sept ans, et que, comme la considération publique est la seule récompense à laquelle puisse aspirer la magistrature du premier et du second ordre, il lui soit accordé une marque de distinction; que la vénalité des offices soit abrogée, sauf le remboursement des propriétaires actuels ; qu’en tout événement, s’ils étaient conservés, les droits de centième denier et vingtième soient supprimés sur tous offices quelconques. A.rt. 25. Que l’usage de toute commission particulière, des évocations au conseil et des commit-timus soit aboli, et que l’attribution au scel du châtelet de Paris, ainsi que les privilèges des bourgeois de la même ville, soient révoqués. Art. 26. Que les prisons soient rendûes plus spacieuses et plus saines , et que l’on procure aux malheureux qui y sont enfermés les choses nécessaires à leur subsistance, en s’occupant particulièrement d’adoucir le sort de ces infortunés, toujours présumés innocents jusqu’à la condamnation. Art. 27. Les Etats généraux seront priés de s’occuper du point de savoir s’il est ou non avantageux au bien public de conférer aux' juges royaux une ampliation de pouvoir et jusqu’à quelle somme il conviendrait la porter. Art. 28. Arrêté qu’il sera demandé qu’il ne puisse être attenté à la liberté des citoyens par la voie des lettres closes ou de cachet, sinon tout au plus sur la demande et l’avis des familles, constatés devant les trois premiers officiers municipaux de l’arrondissement; lesquelles lettres de cachet ne seront délivrées que par M. le chancelier, et qu’aucun gouverneur de province ne puisse faire arrêter aucun domicilié sous aucun prétexte. Art. 29. Que désormais la noblesse ne puisse plus être acquise à prix d’argent, et qu’elle ne soit accordée qu’au mérite et au patriotisme. Art. 30. Que l’impôt territorial et celui de ia capitation, qui seront substitués à tous ceux actuellement existants, soient supportés, sans aucune exception ni distinction entre les trois ordres, dans la pjus parfaite égalité par un seul rôle, et dans la même forme individuelle. Art. 31. Que les Etats généraux s’occupent des moyens d’établir une juste répartition sur les immeubles réels et sur les immeubles fictifs, tels que pensions, rentes perpétuelles et viagères, et autres facultés personnelles, et de former une loi qui prévienne toute espèce de fraude. Art. 32. Que, s’il est jugé que les droits de contrôle et de centième denier soient conservés, ils soient modérés, et qu’il soit pourvu à leur perception par la formation d’un code et tarif clair et précis, qui simplifie et écarte toute interprétation arbitraire, et que, la perception une fois faite, toutes recherches soient interdites contre les redevables. Art. 33. Que la perception du droit de centième denier en succession collatérale, s’il est conservé, ne puisse être exigée que sur le pied des baux ou du revenu commun des héritages déclarés, et que la vente qui pourra en être faite pour un prix d’affection et supérieur à la déclaration, à raison du denier vingt, ne puisse en aucun cas donner lieu à un accroissement de perception, et que, lors de la déclaration à faire par les héritiers collatéraux, il ne puisse être exigé d’eux aucune déclaration par le menu des objets composant un corps de ferme. Art. 34. Que tous les impôts quelconques et autres droits, sous queque dénomination que ce soit, actuellement existants, soient supprimés, et que ceux qui pourront y être substitués pour les besoins de l’Etat soient administrés, perçus et régis par les Etats particuliers qu’il plaira à Sa Majesté d’établir dans chaque province, pour être par eux directement versés dans le trésor public. Art. 35. Que les contestations qui pourront s’élever, soit pour la perception, soit relativement à l’impôt en général, soient décidées provisoirement ar les municipalités et, en cas d’appel, par les tats provinciaux en dernier ressort. Art. 36. Que les impôts ne puissent être accordés que pour un temps limité, et jusqu’au retour 327 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche. des prochains Etats, dont l’époque sera fixée et déterminée par les Etats généraux. Art. 37. Que l’impôt représentatif de la corvée, sous la dénomination d’impôt des routes, soit également réparti sur les trois ordres et par émargement sur le rôle principal. Art. 38. Que l’impôt sur le sel soit supprimé, ainsi que celui sur le tabac, et généralement tous ceux connus sous le nom de régie des aides, en sorte qu’il n’existe plus de commis et que la perception des contrôles se fasse par des gens choisis par les Etats provinciaux, et à leurs es. rt. 39. Qu’il soit établi deux caisses pour y verser tous les deniers provenant des impositions : l’une desquelles à la disposition de la nation; l’autre à celle du Roi, les Etats fixant la destina-nation des fonds de chacune de ces caisses d’une manière invariable, qui fasse la sûreté du souverain et de la nation. Art. 40. Que la liberté du commerce des biens nobles soit établie en faveur du tiers, pour la suppression du droit de franc-fief, comme suite de l’extinction de tout impôt distinctif entre les trois ordres. Art. 41. Que la dette du gouvernement ou le déficit soit examiné et vérifié par les Etats généraux, et qu’une fois constaté, il soit pourvu d’une manière sûre à son acquit sur les fonds de la caisse nationale, et qu’à l’avenir les ministres soient comptables et garants envers la nation des abus de leur administration, et tenus de la rendre annuellement publique par la voie de l’impression. Art. 42. Que les poids et mesures soient établis dans le royaume le plus uniformément possible. Art. 43. ' Que les contrats d’échange ne soient susceptibles d’aucuns droits de lods et ventes, sinon au cas de retour et pour ledit retour seulement, conformément à l’article de cette coutume. Art. 44. Que les Etats généraux s’occupent des abus qu’entraîne la mendicité et des moyens de la prévenir. Art. 45. Qu’ils prennent en considération ce qui peut être relatif aux domaines de la couronne, soit pour leur conservation, soit pour leur aliénation, et particulièrement les abus des échanges ruineux pour l’Etat, et dont on demande les recherches et révisions. Art. 46. Qu’ils s’occupent aussi de la rentrée, dans les mains de Sa Majesté, des domaines engagés, s’ils ne trouvent pas plus expédient de s’en tenir à un supplément de prix, soit en rentes, soit en argent. Art. 47. Que les communautés de tous les ordres religieux au-dessous de vingt soient supprimées, que les religieux soient réunis à une autre maison, en leur laissant un revenu proportionné à leur nombre et à leurs charges, et en leur conservant, pour former ce revenu, les biens d’ancienne dotation, et que le superflu de leurs biens soit vendu, remis dans le commerce, et les fonds versés dans la caisse nationale, de l’emploi desquels les Etats généraux s’occuperont, et que cet emploi, soit des fonds, soit des revenus qu’ils produiront, soit fait au profit de chaque province de leur situation, sous la direction des Etats des-dites provinces. Art. 48. Que les dîmes de toute nature et les champarts soient supprimés, en faisant le remboursement de toutes lesdites dîmes ecclésiastiques ou inféodées dans le temps et au denier qui sera fixé aux Etats généraux ; qu’en cas que cette suppression puisse s’opérer , il soit pourvu à une répartition plus juste et plus égale des dîmes, champarts et revenus ecclésiastiques; et que, pour la décharge des terres labourables, cette répartition s’étende indistinctement sur toutes les possessions particulièrement en faveur des curés et vicaires qui supportent le fardeau du ministère, et des pauvres des paroisses qui y ont un droit assuré ; et que la portionqui leur sera destinée en chaque paroisse soit distribuée par l’avis des curés et des quatre principaux habitants ; et au moyen du traitement honnête qui sera alloué auxdits curés et vicaires, ils seront tenus de rendre gratuitement à leurs paroissiens les fonctions de leur ministère. Art. 49. Qu’aucun ecclésiastique ne puisse réunir en sa personne plusieurs bénéfices, et qu’il soit tenu à la résidence au lieu de celui dont il sera pourvu, à moins que le revenu de ce bénéfice soit au-dessous de 1,000 francs, ou qu’il en fût dispensé par des ordres supérieurs ; auquel cas, si l’absence excédait le temps de trois mois par chaque année, la moitié du revenu serait distribuée aux pauvres du lieu en la manière exprimée au présent article. Art. 50. Que le droit de déport soit supprimé comme odieux et tendant à priver pendant longtemps u.ne paroisse de son pasteur, les pauvres de secours, et les paroissiens d’instructions. Art. 51. Qu’il soit pourvu à l’érection de toutes les succursales et annexes en cures, à leur dotation, ainsi qu’à celles des cures des villes et campagnes, le tout par réunion de bénéfice, même à la réduction du nombre des paroisses dans certaines villes et campagnes, et à leur augmentation dans d’autres où le nombre des paroissiens est trop considérable. Art. 52. Que les lois contre les banqueroutiers frauduleux soient rigoureusement observées ; qu’ils soient poursuivis à la requête du ministère public sur la dénonciation du premier créancier domicilié et solvable; que celui-là soit censé banqueroutier frauduleux qui n’aura, pas de livres ou ne les aura pas tenus suivant les règlements; et que, dans les endroits où il n’y aurait pas de juridiction consulaire, la connaissance de ces matières soit attribuée aux juges des lieux ; que l’usage de toutes lettres de surséance soit abrogé, et que la faveur des lieux privilégiés soit désormais abolie. Art. 53. Qu’il soit accordé des primes d’encouragement aux meilleurs laboureurs de l’arrondissement et aux meilleurs manufacturiers de la province, ainsi qu’à toutes découvertes utiles dans les sciences et dans les arts. Que le traité de commerce avec l’Angleterre soit révoqué ; qu’on recule aux frontières du royaume les douanes et barrières. Art. 54. Les habitants de cette province se plaignent que le haras d’Exmes ait été abandonné à M. le grand écuyer, à la charge de fournir de beaux étalons aux paroisses de cette généralité, quoique le peu qu’il y en a se vende très-cher; ce qui s’oppose à la régénération des beaux chevaux; pourquoi ils désirent une meilleure administration dans cette partie. Art. 55. Qu’on s’oppose à l'exportation des grains hors du royaume, si ce n’est en cas d’abondance et superfluité ; que, pour prévenir le malheur où la nation se trouve plongée actuellement par l’énorme cherté des grains, il soit, dans les temps heureux, établi des magasins nationaux pour en faire la vente et répartition aux peuples, suivant les règlements qui seront faits pour cette partie. 328 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] Art. 56. Qu’il soit pourvu à Rétablissement de quelques maisons, pour y élever, aux frais de la nation, un certain nombre d’enfants pris dans les familles du tiers-état dont les chefs se seront le plus distingués dans leurs emplois, et qui auront rendu le plus de services à l’Etat. Art. 57. Que dans toutes les paroisses il soit établi des écoles gratuites pour l’instruction de la jeunesse. Art. 58. Que les justices subalternes soient supprimées pour simplifier les degrés de juridiction, et que, dans chaque paroisse, il soit établi des juges de paix, dont le nombre et la compétence seront réglés par l’assemblée nationale, et qui connaîtront sans frais les délits des bestiaux et légères contestations. Art. 59. Que les scellés ne pourront être apposés par les juges qu’en cas d’absence ou faillite ; que dans le cas de survivance de l’un des conjoints, ils ne pourront être apposés sans réquisition, à moins que la tutelle n’eût pas été faite dans les vingt-quatre heures ; que les droits en seront modérés dans tous les cas, et que, dans celui où la suppression des hautes justices serait effectuée, les droits des actes de tutelle, affirmation, etc., ne pourront être plus considérables que ceux actuellement perçus dans les hautes justices. Art. 60. Que l’articles 172 de la coutume, en ce qui concerne l’émancipation légale, soit remis en vigueur. Art. 61. Que les offices d’huissiers-priseurs soient supprimés comme onéreux au public en général, et singulièrement à la classe la plus malheureuse et aux mineurs. Art. 62. Que les droits seigneuriaux, sous telle dénomination qu'ils soient exprimés, à l’exception des lods et ventes, et rachats, demeurent sujets au remboursement, que les débiteurs en pourront faire dans les termes fixés par les Etats généraux ; que néanmoins il demeure un cens uniforme à l’arpent et le plus léger possible, sans qu’il y ait toutefois de solidarité entre tous les codétenteurs ; que le rachat excessif dans l’étendue du Perche-Gouët soit modéré, et que la nation assemblée décide sur la forme de l’emploi ou reconstitution des fonds à provenir du remboursement des droits ci-dessus aux gens de mainmorte. Art. 63. Que les droits de péage, havage, mesurage et de banalité, demeurent éteints et supprimés comme préjudiciables à la liberté et au commerce, sauf le remboursement qui sera fixé par les Etats généraux sur les objets qui seront par eux jugés devoir en être susceptibles. Art. 64. Que les règlements tant sur la prohibition de la chasse dans les temps fixés que sur la clôture des pigeons dans les colombiers soient remis en la plus grande vigueur, et qu’il soit avisé aux moyens de détruire les lapins, pigeons fuyards et bêtes fauves, de manière que désormais l’ordre public n’en puisse être troublé. Qu’il soit défendu à tous propriétaires de fiefs de faire tuer les chiens sous prétexte de droit de chasse. Art. 65. Que l’usage des commissaires à terrier soit anéanti. Art. 66. Que les privilèges de roulage et messagerie soient éteints, et qu’il soit pourvu à ce que le service de la poste aux lettres se fasse de manière que le public ne soit point surchargé de frais de ports, ainsi qu’il se pratique maintenant à raison du défaut de direction dans le service d’une ville à l’autre ; que les places de directeur, à raison de la confiance qu’elles exigent, soient à la nomination des citoyens, et qu’en aucun cas le secret des lettres ne puisse être violé parie ministère. Art. 67. Que les seigneurs de la province du Perche seront priés de considérer que la déclaration du Roi, du mois de septembre 1784, en déchargeant les terres hommagées du Perche du droit de franc-fief, les a déclarées roturières de leur nature; que la reconnaissance envers le seigneur, par la forme de l’aveu, est le propre du fief, et qu’en considérant les biens hommagés comme une roture, il semblerait plus naturel d’en desservir les seigneurs par la voie d’une simple reconnaissance lors de la réception, de laquelle se feraient la liquidation et payement du rachat et cheval de service, pour raison de ladite baillée bursale; que les seigneurs n’y perdraient rien et que tous les propriétaires de terres hommagées se trouveraient déchargés d’un grand fardeau par le coût énorme des aveux pour l’objet presque toujours le plus modique ; que ceux desdits deux premiers ordres, qui ne sont pas seigneurs de fiefs, veuillent bien considérer que cette motion leur doit être commune comme au tiers-état, et que ceux mêmes d’entre Jesdits deux premiers ordres propriétaires de fiefs , et qui possèdent le plus souvent eux-mêmes des biens hommagés, ont le môme intérêt de tarir cette source de frais inutiles, sans toutefois que cette somme de reconnaissance puisse rien changer dans l’ordre des successions, non plus qu’au droit de retrait et saisie féodale des seigneurs. Art. 68. Qu’aucun procès-verbal relatif à la pêche et à la chasse ne puisse être rédigé que par deux sergents à garde ou par un seul, assisté d’un témoin domicilié. Art. 69. Qu’il soit permis à tous propriétaires de pêcher à la ligne volante dans les rivières qui arrosent ses héritages. Art. 70. Le tiers-état de la province demande la suppression de tous les gouvernements dans l’intérieur du royaume et la réduction des appointements de ceux qui seront conservés sur les frontières. Art. 71. La suppression de tous les privilèges exclusifs dans le royaume, et notamment ceux du commerce. Art. 72. Une meilleur administration dans l’établissement de la caisse de Poissy, et surtout que ceux qui ne sont point garantis pour les fonds de cette caisse ne soient plus assujettis au droit de sou pour livre. Art. 73. Le tiers-état de la même province demande encore qu’on s’occupe de procurer la liberté aux habitants du Mont-Jura. Art. 74. Ils requièrent aussi la liberté indéfinie de la presse et la suppression absolue de la censure, à la charge par l’imprimeur d’apposer son nom à tous les ouvrages et de déclarer les auteurs, pour, par ceux-ci, répondre de tout ce qui pourrait s’y trouver contraire à l’ordre social. Art. 75. La réduction et arrondissement du ressort des cours souveraines , en sorte que les justiciables soient rapprochés. Art. 76. L’établissement d’un président en cette province pour toutes les paroisses qui sont régies et gouvernées par la coutume, dont le siège sera fixé en la ville de Bellême, comme plus commode, et cette ville étant au centre de la province. Art. 77. Que. pour la confection ou réparation des grandes routes, il soit ouvert des carrières dans les places vagues et les endroits qui pourraient occasionner le moins de dommage, et, que [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES . [Province du Perche.] 329 les propriétaires qui en ont souffert en soient exactement dédommagés. Art. 78. Qu’on veille soigneusement à ce que les marnières et autres excavations soient exactement recomblées. Art. 79. Que Le même officier ne puisse réunir en sa personne plusieurs offices, charges ou comm missions. Art. 80. Que les privilèges des maîtres de poste aux chevaux se trouvent dans le cas de la suppression ci-devant mentionnée. Art. 81. Le tiers-état de la province demande aussi qu’on fasse cesser l’abus des coups d’autorité que font porter les seigneurs, en employant leur crédit auprès des ministres et gouverneurs, pour faire enlever des domiciliés et exercer sur eux une justice militaire, sous le prétexte de désarmement, enlèvement de coutres, contravention au règlement pour les plaques, l’échenillage ou pour autre raison, et que la connaissance relative à ces objets soit attribuée aux juges des lieux, qui pourront modérer l’amende suivant la nature de la contravention. Art. 82. Qu’il soit établi dans toutes les paroisses des sages-femmes et des chirurgiens, surveillés par les médecins des villes voisines. Art. 83. Que toutes les routes commencées dans la province du Perche, et notamment celle de l’Orléanais à Cherbourg, interrompue par le défaut de communication de Nogent à Bellême, et celle de Chartres, passant à Longny, soient faites avant le redressement de la route à l’entrée de la ville de Mortagne, ce redressement n’étant que de pur agrément pour cette ville, la communication de Paris en Bretagne étant faite. Que l’adjudication des routes précède toujours la répartition, et que les nouvelles traces ne puisssent s’opérer qu’avec le consentement des deux députés de la province pour éviter les fraudes, et que le compte arriéré des routes soit arrêté et l’ingénieur tenu de se conformer à la délibération du 10 décembre 1787. Art. 84. Que le retrait féodal ne soit plus désormais cessible. Art. 85. La suppression du ban et de l’arrière-ban. La province du Perche prie les Etats généraux de prendre en considération l’inégalité des répartitions des droits royaux et de toute nature supportés par les villes , particulièrement par celles de Bellême, Mortagne et Nogent, et les indemnités et récompenses dues à ces villes. BELLÊME. Cette ville demande qu’il y soit établi une halle aux toiles, attendu qu’il s’y fabrique, ainsi que dans les environs, beaucoup de toiles, et qu’il se fait en cette ville un commerce considérable de fil. MORTAGNE. La ville de Mortagne se plaint de ce qu’il se perçoit encore aujourd’hui sur les habitants, sous le titre de droits municipaux , sur les boissons et toiles, différents droits établis en 1747, pour le remboursement d’une somme de 23,320 livres, prix principal des offices municipaux créés en 1733, quoiqu’il ait été ordonné, lors de l’établissement de ce droit, que la perception n’aurait lieu que jusqu’à concurrence de cette somme ; que cet impôt onéreux a produit des sommes très-considérables; que ces offices ont été supprimés , sans que la restitution des sommes payées se soit opérée. Elle demande, outre la suppression de ce droit, la restitution ou uue indemnité relative à l’excès de cette perception, particulièrement très-onéreuse à la manufacture des toiles. Elle réclame aussi contre l’abus qu’ont fait les administrateurs des finances de l’impôt relatif au don gratuit établi en 1758; il avait été fixé à 6,030 livres par an; la ville de Mortagne y a satisfait annuellement par l’impôt qu’elle a établi sur les boissons et sur les boucheries. Le Roi a prorogé ce droit et en a fait faire la perception à son profit par des régisseurs. Us l’ont étendu sur les entrées des bois et foins, sous prétexte d’un premier tarif de la ville fait lors de l’établissement de ce don gratuit, tarif qui était demeuré sans exécution, d’après les délibérations de la ville, approuvées par le conseil. IL en est résulté que l’on a perçu sur la ville plus de 18,000 livres par an, au lieu de 6,000 livres. Elle prie les Etats généraux de prendre eii considération et de pourvoir à une indemnité que ses besoins rendent nécessaire. NOGENT-LE-ROTROU. Cette ville expose aux Etats généraux qu’outre qu’elle supporte, comme les autres, un fardeau énorme d’impositions de toute espèce, le tiers de ses habitants est réduit à la mendicité et à la plus extrême misère; son commerce autrefois florissant a totalement péri; il n’existe plus aucune de ces tanneries anéanties par les recherches des employés de la finance. Sa manufacture d’étamines vient d’éprouver le même sort. Son marché, assujetti à des droits de havage et de coutume sur toutes les denrées sans exception, mais surtout sur les grains, est privé de l’approvisionnement nécessaire aux habitants. Ces droits sont le sujet continuel du murmure de ses habitants, et dans les temps de cherté, ils occasionnent des voies de fait et des révoltes. Les frais de marque des marchandises nouvellement augmentés, les droits de pesage, étalage, industrie, octrois, etc..., rendent son commerce désormais sans espoir de retour, et réduisent cette communauté à l’impossibilité absolue de faire les réparations les plus urgentes, surtout celles des ponts tant hors son enceinte que dans les faubourgs, et du pavage de sa traversée pour la communication de Paris dans la Bretagne et l’Anjou, réparations qui ne devraient pas même être à sa charge, le gouvernement s’étant emparé de la première partie de ses octrois originairement établis pour l’entretien de ses ponts et pavages. Que le principal du collège jouît de tous les revenus attachés à son bénéfice, sans être tenu des charges et particulièrement des réparations qui grèvent encore cette communauté contre toute justice, puisqu’il est naturel qu’un bénéficier soit tenu aux charges de son bénéfice. Que cette ville, peuplée de malheureux, contenant trois paroisses, paye au moins 225,000 livres d’impositions par année. Elle supplie donc les Etats généraux de venir à son secours pour les réparations urgentes et i le pavage absolument nécessaire de la ville, et la suppression de tous ces droits de havage et autres perçus au profit du seigneur. Elle demande particulièrement un règlement pour le colportage. Arrêté dans l’assemblée du troisième ordre par nous, lieutenant général du bailliage du Perche, présidant le tiers, ce 7 avril 1789. 330 [Éta's géa. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche. CAHIER Des plaintes , remontrances et instructions de la ville de Mortagne au Perche , adresse' par les habitants d'icelle assemblés en Vhôtel de ville par députés des corps , corporations et communautés , tenue par M. le maire, en présence de MM. les . officiers municipaux , en exécution de la lettre du Roi et du règleinent de son conseil étant ensuite, du 24 janvier dernier, de l’ordonnance de M. le bailli au Perche Ou M, son lieutenant général a Mortagne, en date du 17 février dernier, lue au prône des paroisses et à la porte des églises , issue des messes paroissiales de ladite ville, le Ier mars présent mois (1). Les habitants de ladite ville demandent : Art. 1er. Que s’il est jugé, comme la voix publique l’annonce, que le règlement général qui , avait désigné la ville de Mortagne pour le siège de l’assemblée générale du bailliage du Perche ait été réformé par un règlement particulier qui, eu égard à ce qui s’est passé en 1614, transfère ladite assemblée en la ville de Bellême; dans ce cas, les députés qui seront chargés de représenter le tiers-état du bailliage et châtellenie de Mortagne, commencent par demander acte à M. le grand bailli de ce qu’ils ne comparaissent à ladite assemblée que par respect pour les ordres du Roi, et parce que l’amour du bien public l’emporte dans leurs cœurs sur la considération de tout intérêt particulier; de ce qu’ils protestent que leur comparution ne puisse nuire ni préjudicier à leurs droits et à la disposition dans laquelle ils sont de reprendre l’instance pendante au conseil depuis 1614, entre les villes de Mortagne et Bellême, sur la prééminence respectivement prétendue par les deux villes, ou de se pourvoir par nouvelle action en cas que les pièces de ladite instance ne puissent être recouvrées, à quel effet le présent consentement vaudra autant que de besoin de pouvoir aux députés qui pourront être choisis par le vœu de l’assemblée générale des habitants de la ville de Mortagne ; que les nobles et ecclésiastiques de la châtellenie de Mortagne seront invités à donner adjonction à la „ protestation du tiers-état, et que dans le cas où, contre toute présomption, Injustice de M. le grand bailli se refuserait à leur donner acte desdites protestations, ils aient à se retirer, les communes de ce bailliage déclarant audit cas révoquer tous les pouvoirs qui vont être donnés à leurs députés, et dès à présent comme dès lors les désavouer. Art. 2. Que le tiers-état de la province commence par solliciter de la justice des deux premiers ordres une déclaration authentique et solennelle portant consentement de leur part de supporter par égalité et dans la proportion de leur fortune toutes les contributions sans aucune distinction ni exception, au moyen et parce que le tiers-état déclarera de son côté n’entendre porter aucune atteinte aux droits de propriété dus à chacun, non plus qu’aux rangs, préséances et prérogatives d’honneur appartenant aux deux premiers ordres. Art. 3. Que ce préalable réglé avant tout et consenti comme on a le droit de l’attendre de l’esprit d’équité et de désintéressement des deux premiers ordres, d’après le vœu général du clergé et de la noblesse déjà manifesté dans plusieurs provinces du royaume, comme il ne subsistera (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie, par M. Hippeau. plus de cause réelle de division et de discorde entre les trois ordres, et rien qui puisse troubler l’union, l’harmoni» qu’il importe au bien général de conserver entre eux, il soit proposé aux deux premiers ordres de s’unir pour former le cahier des plaintes et représentations à faire aux Etats généraux et pour déterminer la nature des pouvoirs qui seront donnés aux députés des trois ordres, au moyen et parce que le nombre des représentants des communes se trouvant inférieur à celui des deux premiers ordres, il sera accordé aux députés desdites communes un nombre de voix qui puisse les égaler à celle des deux premiers ordres réunis. Art. 4. Que, dans le cas de réunion des trois ordres, les délibérations soient prises par tête, en commençant, par un membre du clergé, par un membre de la noblesse et ensuite par deux membres des communes, et ainsi de suite, toujours alternativement. Art. 5. Que dans la formation des différents bureaux pour l’examen des différents objets qui seront traités dans l’assemblée générale, la proportion entre les ordres soit observée de manière u’il y ait toujours en chaque bureau un nombre e membres du tiers égal à celui des deux premiers ordres. Art. 6. Qu’il soit pourvu par la suite à ce que, clans les assemblées générales de chaque bailliage, le tiers puisse y être représenté en nombre égal aux deux premiers ordres. Art. 7. Que la nature et la dénomination de tous impôts actuellement existants soient abrogées et changées, et que la masse de tous les impôts affectant les trois ordres soit refondue, si faire se peut, en deux espèces de subsides annuels, fixes, l’un réel sous la dénomination d’impôt territorial, et l’autre personnel sous la dénomination de capitation ou autre équivalent. Art. 8. Que l’impôt représentatif de la corvée soit, sous la dénomination d’impôt des routes, également réparti sur les trois ordres, au marc la livre de leurs impositions réelle et personnelle. Art. 9. Que l’impôt sur le sel, qui est une denrée de première nécessité, soit modifié s’il n’est pas supprimé, et qu’en tout cas le prix en soit rendu égal dans tout le royaume, aux frais de transport près. Art. 10. Que tous les impôts quelconques et autres droits, sous quelque dénomination que ce soit, établis depuis les derniers Etats généraux, soient supprimés, et que ceux qui pourront y être substitués pour les besoins de l’Etat, si les deux premiers sont insuffisants, soient administrés, perçus et régis par les Etats particuliers qu’il plaira à Sa Majesté d’établir dans chaque province, pour être directement versés par elle dans le trésor public. Art. 1 1 . Que tous les impôts ne puissent être accordés que pour un temps limité et jusqu’au retour des prochains Etats, dont l’époque sera fixée et déterminée par les Etats généraux. Art. 12. Que les anciens Etats de la province du Perche soient rétablis, et qu’on y réunisse le Thi-merais qui en faisait anciennement partie, ainsi que Ghamproud, Brézolles et Senonches, qui en ont été distrai ts sous le règne d’Henri II, et même les paroisses qui faisaient partie de l’ancienne élection de Longny, qui font partie de la province et qui sont régies par la coutume du Perche ; qu’en aucun cas les commissaires départis pour l’exécution des ordres du Roi dans les provinces ne puissent être établis juges des contestations relatives à la perception d’aucuns impôts ou droits [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] 331 royaux, et que le droit d’instituer des juges de l’impôt soit rendu aux Etats généraux et particuliers de la nation. Art. 13. Que la tenue des Etats particuliers soit termée de deux ans en deux ans, et celle des Etats généraux tous les quatre ans. Art. 14. Que la composition des Etats particuliers de la province soit telle que l’ordre du tiers soit en nombre égal aux deux premiers ordres, et que les délibérations y soient prises ainsi qu’aux Etats généraux, les trois ordres réunis, par tête, et que les suffrages soient recueillis alternativement entre chacune tête des trois ordres. Art. 15. Que la liberté du commerce des biens nobles soit établie en faveur du tiers par la suppression de toute espèce de droit de franc-fief, commesuite de l’extinctionde toutimpôtdistinçtif entre les trois ordres. Art. 16. Que les compagnies de maréchaussée soient aux ordres de toutes juridictions et qu’il ne puisse être transféré aucun accusé arrêté par elles pour crimes ou délits qu’il n’ait été préalablement informé par le juge du lieu, même décrété, interrogé et les témoins récolés et confrontés dans le cas où il y aurait lieu de craindre pour le dépérissement des preuves, sauf à surseoir le jugement dans le cas où le prévôt réclamerait la compétence, laquelle il sera tenu de faire juger dans la quinzaine de la capture. Art. 17. Qu’il soit procédé à la réformation des coutumes de l’avis des Etats, ainsi qu’à celle des codes civil et criminel, et que pour ce il soit nommé des commissaires dans le premier et second ordre de la magistrature. Art. 18. Qu’il soit formé des arrondissements dans tous les bailliages, nonobstant la différence des mouvances et celle des coutumes, en sorte que les justiciables soient rapprochés le plus possible de leur juridiction. Art. 19. Qu’il soit accordé aux sièges royaux une amplification de pouvoir pour juger en dernier ressort au moins jusqu’à concurrence de 500 livres ; savoir : jusqu’à 200 livres au nombre de trois juges, et au-dessus, jusqu’à 500 livres, au nombre de cinq juges. Art. 20. Que s’il est jugé que les droits de contrôle et centième denier doivent être conservés, ils soient modérés et qu’il soit pourvu à leur perception par la formation d’un code et tarif clair et précis qui simplifie, qui écarte toute interprétation arbitraire, et que, la perception une fois faite, toute recherche ultérieure soit proscrite. Art. 21. Que la perception du droit de centième denier et succession collatérale, s’il est conservé, ne puisse être exigée que sur le pied des baux ou du revenu commun des héritages déclarés, et que la vente qui pourra en être faite pour un prix d’affection et supérieur à la déclaration à raison du denier vingt ne puissse en aucun cas donner lieu à uû accroissement de perception, et que, lors de la déclaration à faire par les héritiers collatéraux, il ne puisse être exigé d’eux aucune déclaration pour le menu des objets composant un corps de ferme. Art. 22. Que les droits des greffiers soient fixés et modifiés, et les formes et leurs expéditions déterminées, et les droits royaux sur tous les actes de justice ainsi que le prix de la formule, notablement diminués. Art. 23. Que les études de droit soient réformées et suivies avec plus d’exactitude, et qu’aucun magistrat ne puisse être pris que dans le nombre des avocats qui auront suivi le barreau dans un siège royal avec assiduité, pendant l’espace de six ans, et qui se seront distingués dans cette profession par leur capacité, leur probité et leurs mœurs certifiées tant par le tribunal que par le collège des avocats, et qu’ils ne puissent être admis à aucuns offices qu’ils n’aient atteint l’âgë de vingt-sept ans ; et que, comme la considération publique est la seule récompense à laquelle puisse aspirer la magistrature du premier et second ordre, il lui soit accordé une marque de distinction ; que si la vénalité des offices n’est pas abrogée, leurs finances soient au moins réduites à un taux modéré, sauf à rembourser aux propriétaires actuels l’excédant de leur fixation actuelle, et qu’en tout événement le droit de centième denier soit supprimé sur tous offices quelconques. Art. 24. Que les droits de péage et de banalité soient supprimés comme contraires à la liberté du commerce et des citoyens, ainsi que les justices seigneuriales, sauf l’indemnité, s’il y échoit, pour les seigneurs particuliers qui en demanderaient. Art. 25. Qu’il soit pouvu d’une manière quelconque pour prévenir les dommages que causent à l’agriculture les bêtes fauves, les lapins et les pigeons. Art. 26. Qu’il soit avisé, par un moyen quelconque, entre les trois ordres, à alléger le poids de la subsistance due aux ministres de l’Eglise, qui, dans l’état actuel des choses, n’est supporté communément que par les propriétaires de terres labourables qui, par leur nature, exigent le plus de dépense et de travail pour les faire produire, et à le faire supporter par toutes les propriétés indistinctement, soit en convertissant la dîme en argent, soit autrement, et que chaque curé ait au moins pour sa subsistance une somme de 1,200 livres, outre son temporel et les fonds chargés de fondations, et que, sur le produit des dîmes, il y ait toujours un fonds affecté pour les pauvres de chaque paroisse, dont la distribution serait faite par le curé et six notables habitants dans les campagnes. Art. 27. Qu’il soit pourvu à l’érection de toutes les succursales en cures, à leur dotation, ainsi qu’à celle des cures de ville, le tout par union de bénéfices, même à la réduction du nombre des paroisses dans certaines villes où le nombre des paroisses est trop considérable et à leur augmentation dans d’autres. Art. 28. Que les Etats généraux veuillent bien prendre en considération l’inconvénient qui résulte pour tous les citoyens de tous les ordres de l’impossibilité où ils sont de se libérer des rentes foncières dues à tous gens de mainmorte ; pourquoi la faculté d’amortir lesdites rentes sera sollicitée, sauf au gouvernement à veiller au remplacement. Art. 29. Que les fonctions municipales ne pourront être érigées eu titres d’office; que ceux créés demeureront supprimés; que les villes pourront se choisir librement leurs officiers municipaux et leurs représentants dans les assemblées, se tracer un plan de gouvernement qui sera sanctionné par les Etatsprovinciaux auxquels les comptes seront présentés pour être par eux visés et approuvés, disposer librement des revenus de leurs communautés, et qu’elles soient affranchies de toutes inspections de commissaires départis, même de celles du gouvernement. Art. 30. Que l’usage de toutes commissions particulières et des évocations au conseil soit aboli, et que tout droit de committimus soit anéanti, et que l’attribution au châtelet de Paris et les privilèges des bourgeois de Paris soient révoqués. 332 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] Art. 31. Que les députés qui seront choisis pour électeurs dans rassemblée préliminaire ne puissent élire pour représentants du tiers aux Etats généraux que les membres de cet ordre. Art 32. Qu’il ne puisse êire attenté à la liberté des citoyens par la voie des lettres closes ou lettres cïe cachet, sinon tout au plus sur la demande des famillps dont la justice aura été reconnue par les commissions intermédiaires des Etats de chaque province. Art. 33. Que dans le cas où on laisserait subsister les assemblées provinciales, au lieu des Etats particuliers, leur constitution soit purgée du vice radical qui les discrédite aux yeux de la nation, en abandonnant à chaque province le droit et la liberté entière d’une formation nouvelle, même celui de présenter au Roi trois sujets pour présidents, tant de l’assemblée générale que de celles de département, parmi lesquels seuls le président pourrait être choisi, et que les assemblées provinciales ne puissent être formées que des députés de chaque département qui seraient annuellement choisis dans l’assemblée desdits départements. Art. 34. Que les exclusions données au tiers-état, pour occuper les emplois militaires ou ceux de la magistrature dans les cours, soient anéanties, et que la moitié des places dans les tribunaux supérieurs soit au contraire spécialement affectée à l’ordre du tiers. Art. 35. Que d’après les établissements de tout genre qui existent dans tout le royaume en faveur des deux premiers ordres, il soit pourvu à rétablissement de quelques maisons où puissent être élevés, aux frais du gouvernement ou de la nation, un certain nombre d’enfants pris dans celles des familles du tiers-état dont les chefs se seront le plus distingués dans leurs emplois et qui auront rendu le plus de services au public. Art. 36. Que toutes réunions de bénélices, abbayes, prieurés, etc., ne puissent être faites en aucun cas à d’autres bénélices, abbayes, communautés ou autres établissements quelconques, si favorables qu’ils puissent être par leur nature, quand ils seront étrangers à la province de la situation desdits bénéfices ou quoique c’en soit des biens en dépendant, et que toutes celles faites à tous évêchés, abbayes et communautés régulières, à partir d’une époque qui serait avisée par les Etats généraux, soient annulées comme diamétralement opposées à l’esprit de la fondation ou au bien-être des provinces qui ont la douleur de voir enlever les productions de leur sol pour alimenter des établissements éloignés. Art. 37. Que les déports soient incontinent supprimés comme droit odieux contraire au bien de la religion et au bien public, et que les curés puissent entrer en jouissance de leur bénéfice à partir du jour de leur prise de possession, une paroisse étant dans l’état actuel des choses deux années de suite le plus souvent sans pasteur, les pauvres sans secours et les enfants sans instruction. Art. 38. Que s’il est conservé des impôts sur les cuirs, sur les boissons, sur les boucheries et sur la marque des fers, ils soient notablement diminués, simplifiés, et que le mode de ces perceptions soit moins vexatoire et moins gênant pour le public et moins à charge pour le nombre des employés, et en tout cas abandonnés aux Etats provinciaux ou assemblées provinciales, etqu’en-iin le droit de quatrième sur les aides, qui existe en quelques provinces, soit réduit au huitième au plus par tout le royaume. Art. 39. Que tous les droits de péage, havage, mesurage soient supprimés, ainsi que tous privilèges exclusifs du roulage et des messageries ; qu’il en soit de même du privilège des maîtres de poste. Art. 40. Que les Etats généraux prennent en considération les abus énormes qui existent dans l’entreprise des étapes et convois militaires. Art. 41. Qu’il soit pourvu à la réforme des ordonnances militaires, de manière que le soldat soit traité plus humainement, et qu’on supprime tous les châtiments avilissants; qu’il soit mieux vêtu et mieux payé ; et comme au moyen de ces réformes le soldat s’attachera nécessairement au service; qu’alors les milices soient supprimées comme étant un objet de désolation pour les familles et gênant la liberté naturelle, sauf à les rétablir dans le cas de nécessité absolue, et qu’alors on conserve tous les fils aînés des familles de cultivateurs dans les campagnes ou, au défaut d’enfants, leurs premiers domestiques, et dans les villes tous les fils aînés de bourgeois vivant noblement, et tous les fils aînés de marchands et artisans aidant leur père ou mère dans leur commerce. Art. 42. Qu’il sera particulièrement observé que le Roi a créé en 1733 les offices municipaux : aucun particulier de la ville de Mortagne ne les a levés. Pour subvenir au remboursement d’un traitant qui en avait payé la finance au conseil, il a été arrêté pour chaque ville une évaluation de ces offices, portée pour celle de Mortagne à 23,320 livres, pour les réunir aux corps municipaux; il a été formé aussi, en 1747, un tarif de droits qui-seraient perçus particulièrement sur la ville de Mortagne jusqu’au remboursement de ce traitant; ils ont été établis sur les boissons et fixés à 2 livres par poinçon de vin, 16 sous par pipe de cidre, 13 sols 6 deniers par pipe de poiré et 8 sous par pièce de toile. L’arrêt du conseil qui établit celte perception porte qu’elle n’aura lieu que pendant le temps nécessaire au remboursement des sommes avancées par le traitant, après lequel les droits demeureront éteints et supprimés. Depuis ce temps ils se sont perçus et se perçoivent encore, en sorte que le remboursement depuis longtemps est opéré. Le Roi' par l’édit de 1764, a supprimé tous les offices municipaux et ordonné le remboursement des offices supprimés. La ville n’a pu obtenir jusqu’à cet instant son remboursement ni même l’intérêt du capital de ces offices; cependant ils sont une propriété de la commune, qui doit être sacrée pour le fisc comme toutes autres propriétés. Par l’édit de 1771 il a été créé de nouveaux offices; le remboursement des anciens, doit s’opérer avant qu’il puisse en être établi de nouveaux. La ville demande la restitution des sommes excessives perçues contre l’esprit et la lettre de l’établissement de ces droits, ou. avec leur suppression, une indemnité relative à l’excès de cette perception, qui ruine particulièrement la manufacture des toiles qui est établie. Art. 43. Que, par l’édit du mois d’août 1758, le Roi a établi pour six ans la perception d’un don gratuit sur toutes les villes du royaume ; il va été annexé un tarif particulier pour celles de chaque généralité où il serait insuffisant; les villes ont été autorisées à en établir de particuliers ; il a été prorogé pour cinq ans par déclaration du 14 novembre 1763. 333 [États gên. 1789. Cahiers. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] La perception devait s’en faire dans la ville de Mortagne, a la charge de faire payer aux régisseurs la somme de 6,000 livres. Ces droits étaient établis suivant le tarif du conseil, annexé à la déclaration du Roi, du 3 janvier 1759, sur les boucheries, buissons, bois et foins. Les droits sur les boucheries ont été affermés dès le 5 avril 17o9. Le 18 avril suivant, il a été délibéré sur le point de savoir si ou laisserait subsister la totalité de ces droits, plus que suffisants pour remplir cette somme de 6,000 livres. Après différentes assemblées, il a été arrêté, conformément à l’article 3 de là déclaration du Roi susdatôe, que les droits sur les foins et bois seraient supprimés comme excédant la somme à fournir au Roi ; cette suppression a été approuvée ar une lettre des régisseurs du don gratuit, du 8 juin 1759, et par une lettre de M. l’intendant d’Alençon, du 9 juillet de la même année; en conséquence, la perception et les droits en ont été restreints sur les boucheries et boissons, et ont été affermés par différents baux, des 8 mai 1761, 3 octobre 1764 et 14 juin 1765 ; le Roi, depuis cette époque, s’est emparé de ce droit et en a ordonné la perception à son profit. Les régisseurs ont fait percevoir ce droit sur l’entrée des bois et foins, quoiqu’ils aient été supprimés en vertu des dispositions de l’article 3 de la déclaration de 1759 et des délibérations de la ville approuvées par le conseil ; ils se sont fondés sur des lettres patentes du 24 août 1769, qui ont ordonné l’exécution du tarif annexé à la déclaration du Roi de 1759, sans s’arrêter aux délibérations particulières des officiers municipaux qui n’avaient pas été dûment autorisées. La ville de Mortagne n’était pas dans le cas de cette exception. Ses délibérations avaient été approuvées par le conseil ; cela est constaté parles lettres ministérielles adressées à la ville ; l’intention n’a été que d’exiger 6,000 livres par chacun an, et lorsque le Roi a prorogé la perception, il n’a pas pu avoir intention de la surcharger au delà. La ville de Mortagne, dans cette position, demande non-seulement l’abrogation du droit principal qui lui est fort onéreux, mais même une indemnité résultant de la perception excessive faite depuis 1769, indemnité que ses besoins rendent nécessaire. Art. 44. Que les lois contre les banqueroutiers frauduleux soient observées plusexactement qu’elles ne l’ont été jusqu’à présent, où il est presque impossible d’obtenir justice contre eux. Art. 45. Que, pour parer aux frais considérables que nécessitent les expertises en justice réglée, qui ne se font qu’à grands frais pour les dommages les plus légers faits par des bestiaux, les municipalités de chaque paroisse soient autorisées à nommer deux et même jusqu’à trois experts de probité reconnue, lesquels constateront le dommage, et dont le procès-verbal ou le certificat qui contiendra l’estimation sera cru en justice. Art. 46. Que les seigneurs de la province du Perche seront priés de considérer que la déclaration du Roi du mois de septembre 1784, en déchargeant les terres hommagées du Perche du droit de franc-fief, les a déclarées roturières de leur nature; que la reconnaissance envers les seigneurs par la forme de l’aveu est le propre du fief, et qu’en considérant les biens hommagés comme une roture, il semblerait plus naturel d en desservir les seigneurs, par la voie de la simple reconnaissance, lors de la réception de laquelle se ferait la liquidation du payement du rachat et cheval de service dus pour raison de ladite baillie bursale ; que les seigueurs n’y perdraient rien, et que tous les propriétaires de terres hommagées se trouveraient déchargés d’un grand fardeau par le coût énorme des aveux pour 1 objet presque toujours le plus modique, et que ceux desdits deux premiers ordres qui ne sont pas seigneurs de fiefs veuillent bien considérer que cette mutation leur doit être commune comme aux tiers-état, et que ceux mêmes d’entre lesdits deux premiers ordres propriétaires de fiefs, et qui possèdent le plus souvent eux-mêmes des biens hommagés, ont le même intérêt à tarir cette source de frais inutiles, sans toutefois que cette forme de reconnaissance puisse rien changer dans l’ordre des successions, non plus qu’au droit de retrait et saisie féodale des seigneurs. Art. 47. Que la suppression des offices d’huissiers-priseurs , ensemble celle des 4 deniers pour livre à eux attribuée, tant à cause de la charge de l’impôt en lui-même, que parce qu’il en résulte une entrave à la liberté des citoyens, qui ne peuvent plus vendre leurs meubles volontairement comme ils le faisaient autrement, soit sollicitée. Art. 48. Qu’il soit accordé des prix d’encouragement au meilleur cultivateur de chaque arrondissement, et au meilleur manufacturier dans chaque manufacture de la province. Art. 49. Qu’il soit sollicité une loi par les États généraux par laquelle le souverain s’interdira la faculté de disposer de ses domaines par la voie d’échange, cette voie étant plus funeste aux intérêts de l’État que celle de l’aliénation, et qu’il soit procédé à la révision de tous les échangés qui se sont consommés depuis irenle ans par des commissaires indiqués par les Étals généraux. Art. 50. Que les ordonnances relatives à l’exercice du droit de chasse et à celui de la pêche soient remise en vigueur ; que l’usage du droit de chasse ne puisse être cédé et encore moins affermé par les seigneurs; que les gardes qui seront par eux préposés pour la conservation de leurs fiefs et bois ne puissent, comme ils le font, chasser journellement sur les héritages des particuliers, dans tous les temps, sans respect pour les productions de la terre qu’ils foulent aux pieds, et sans pouvoir sous aucun prétexte déclore leurs héritages ou y faire des brèches pour s’y introduire, ce qui occasionne l’évasion des bestiaux qui se trouvent dans ces héritages clos et qui vont faire du dommage sur les héritages voisins, ou facilite l’entrée des autres bestiaux dans les mêmes héritages ; et qu’au regard du droit de pêche, il ne puisse en être également usé dans le temps prohibé par l’ordonnance. Art. 51. Que l’usage des lettres de commissaires à terrier soit anéanti. CAHIER Du tiers-état de la paroisse de Loisail (1). Art. 1er. Les habitants de la paroisse de Loisail requièrent qu’il soit demandé aux Etats généraux que les trois ordres du clergé, de la noblesse et clu tiers-état contribuent également à la répartition et au payement de toutes les impositions, de quelque nature qu’elles soient, qui seront ou confirmées, ou autorisées, ou établies de (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé • le Gouvernement de Normandie, par M. Hippeau. 333 [États gên. 1789. Cahiers. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] La perception devait s’en faire dans la ville de Mortagne, a la charge de faire payer aux régisseurs la somme de 6,000 livres. Ces droits étaient établis suivant le tarif du conseil, annexé à la déclaration du Roi, du 3 janvier 1759, sur les boucheries, buissons, bois et foins. Les droits sur les boucheries ont été affermés dès le 5 avril 17o9. Le 18 avril suivant, il a été délibéré sur le point de savoir si ou laisserait subsister la totalité de ces droits, plus que suffisants pour remplir cette somme de 6,000 livres. Après différentes assemblées, il a été arrêté, conformément à l’article 3 de là déclaration du Roi susdatôe, que les droits sur les foins et bois seraient supprimés comme excédant la somme à fournir au Roi ; cette suppression a été approuvée ar une lettre des régisseurs du don gratuit, du 8 juin 1759, et par une lettre de M. l’intendant d’Alençon, du 9 juillet de la même année; en conséquence, la perception et les droits en ont été restreints sur les boucheries et boissons, et ont été affermés par différents baux, des 8 mai 1761, 3 octobre 1764 et 14 juin 1765 ; le Roi, depuis cette époque, s’est emparé de ce droit et en a ordonné la perception à son profit. Les régisseurs ont fait percevoir ce droit sur l’entrée des bois et foins, quoiqu’ils aient été supprimés en vertu des dispositions de l’article 3 de la déclaration de 1759 et des délibérations de la ville approuvées par le conseil ; ils se sont fondés sur des lettres patentes du 24 août 1769, qui ont ordonné l’exécution du tarif annexé à la déclaration du Roi de 1759, sans s’arrêter aux délibérations particulières des officiers municipaux qui n’avaient pas été dûment autorisées. La ville de Mortagne n’était pas dans le cas de cette exception. Ses délibérations avaient été approuvées par le conseil ; cela est constaté parles lettres ministérielles adressées à la ville ; l’intention n’a été que d’exiger 6,000 livres par chacun an, et lorsque le Roi a prorogé la perception, il n’a pas pu avoir intention de la surcharger au delà. La ville de Mortagne, dans cette position, demande non-seulement l’abrogation du droit principal qui lui est fort onéreux, mais même une indemnité résultant de la perception excessive faite depuis 1769, indemnité que ses besoins rendent nécessaire. Art. 44. Que les lois contre les banqueroutiers frauduleux soient observées plusexactement qu’elles ne l’ont été jusqu’à présent, où il est presque impossible d’obtenir justice contre eux. Art. 45. Que, pour parer aux frais considérables que nécessitent les expertises en justice réglée, qui ne se font qu’à grands frais pour les dommages les plus légers faits par des bestiaux, les municipalités de chaque paroisse soient autorisées à nommer deux et même jusqu’à trois experts de probité reconnue, lesquels constateront le dommage, et dont le procès-verbal ou le certificat qui contiendra l’estimation sera cru en justice. Art. 46. Que les seigneurs de la province du Perche seront priés de considérer que la déclaration du Roi du mois de septembre 1784, en déchargeant les terres hommagées du Perche du droit de franc-fief, les a déclarées roturières de leur nature; que la reconnaissance envers les seigneurs par la forme de l’aveu est le propre du fief, et qu’en considérant les biens hommagés comme une roture, il semblerait plus naturel d en desservir les seigneurs, par la voie de la simple reconnaissance, lors de la réception de laquelle se ferait la liquidation du payement du rachat et cheval de service dus pour raison de ladite baillie bursale ; que les seigueurs n’y perdraient rien, et que tous les propriétaires de terres hommagées se trouveraient déchargés d’un grand fardeau par le coût énorme des aveux pour 1 objet presque toujours le plus modique, et que ceux desdits deux premiers ordres qui ne sont pas seigneurs de fiefs veuillent bien considérer que cette mutation leur doit être commune comme aux tiers-état, et que ceux mêmes d’entre lesdits deux premiers ordres propriétaires de fiefs, et qui possèdent le plus souvent eux-mêmes des biens hommagés, ont le même intérêt à tarir cette source de frais inutiles, sans toutefois que cette forme de reconnaissance puisse rien changer dans l’ordre des successions, non plus qu’au droit de retrait et saisie féodale des seigneurs. Art. 47. Que la suppression des offices d’huissiers-priseurs , ensemble celle des 4 deniers pour livre à eux attribuée, tant à cause de la charge de l’impôt en lui-même, que parce qu’il en résulte une entrave à la liberté des citoyens, qui ne peuvent plus vendre leurs meubles volontairement comme ils le faisaient autrement, soit sollicitée. Art. 48. Qu’il soit accordé des prix d’encouragement au meilleur cultivateur de chaque arrondissement, et au meilleur manufacturier dans chaque manufacture de la province. Art. 49. Qu’il soit sollicité une loi par les États généraux par laquelle le souverain s’interdira la faculté de disposer de ses domaines par la voie d’échange, cette voie étant plus funeste aux intérêts de l’État que celle de l’aliénation, et qu’il soit procédé à la révision de tous les échangés qui se sont consommés depuis irenle ans par des commissaires indiqués par les Étals généraux. Art. 50. Que les ordonnances relatives à l’exercice du droit de chasse et à celui de la pêche soient remise en vigueur ; que l’usage du droit de chasse ne puisse être cédé et encore moins affermé par les seigneurs; que les gardes qui seront par eux préposés pour la conservation de leurs fiefs et bois ne puissent, comme ils le font, chasser journellement sur les héritages des particuliers, dans tous les temps, sans respect pour les productions de la terre qu’ils foulent aux pieds, et sans pouvoir sous aucun prétexte déclore leurs héritages ou y faire des brèches pour s’y introduire, ce qui occasionne l’évasion des bestiaux qui se trouvent dans ces héritages clos et qui vont faire du dommage sur les héritages voisins, ou facilite l’entrée des autres bestiaux dans les mêmes héritages ; et qu’au regard du droit de pêche, il ne puisse en être également usé dans le temps prohibé par l’ordonnance. Art. 51. Que l’usage des lettres de commissaires à terrier soit anéanti. CAHIER Du tiers-état de la paroisse de Loisail (1). Art. 1er. Les habitants de la paroisse de Loisail requièrent qu’il soit demandé aux Etats généraux que les trois ordres du clergé, de la noblesse et clu tiers-état contribuent également à la répartition et au payement de toutes les impositions, de quelque nature qu’elles soient, qui seront ou confirmées, ou autorisées, ou établies de (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé • le Gouvernement de Normandie, par M. Hippeau. 334 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perché.] nouveau; sans préjudicier toutefois aux rangs et distinctions dans chaque ordre, et que la délibération à prendre aux Etats généraux sur ces objets et sur toutes les autres affaires qui intéressent la nation en générai soient prises en commun par les trois ordres réunis, et les voix constatées par tête. Art. 2. Que les impôts et droits, de quelque nature qu’ils soient, qui ont été établis depuis les derniers Etats sans le concours de la nation assemblée, soient éteints et supprimés, et qu’il ne puisse en être accordé ni établi aucun que pour un temps limité qui ne pourra excéder celui de la tenue des prochains Etats généraux, et que l’époque du retour desdits Etats généraux soit déterminée et fixée. Art. 3. Que le droit de répartir les impôts soit rendu aux provinces, pour s’opérer d’abord entre les paroisses et communautés, sans pouvoir être confié ni à des commissaires du Roi ni à des pourvus d’offices ; que la répartition en soit aussi rendue à chaque paroisse, notamment celle de Loisail, pour s’opérer entre les divers habitants, propriétaires et contribuables. Art. 4. Qu’il soit accordé à la province du Perche des Etats particuliers pour régler et établir toute distinction d’impôts nécessaires au maintien du commerce, manufactures, chemins, travaux publics qui intéressent la province. Et, dans le cas où Sa Majesté ne jugerait pas à propos d’accorder des Etats particuliers à cette province, demander que la province du Perche, de laquelle cette paroisse fait partie, soit réunie à celle de Normandie, à laquelle elle a été jusqu’à cet instant liée sur tous ces objets. Art. 5. Se plaindre du fardeau des impôts de toute espèce dont cette paroisse est écrasée, de laquelle le sol est en partie inculte, le surplus d’une mauvaise nature. Art. 6. Qu’il soit procédé à la réformation de l’administration et l’abréviation de la justice; que les droits de formule, contrôle, greffe et autres de cette nature, qui la rendent infiniment coûteuse aux sujets du Roi, soient abrogés. Art. 7. Demander que le prix du sel soit diminué ou rendu marchand et égal dans tout le royaume, étant une denrée de première nécessité ainsi que le tabac. Art. 8. Demander que tous les impôts et droits du Roi soient abandonnés par province et par paroisse, en sorte qu’ils soient versés dans les coffres du Roi sans moyens intermédiaires qui en absorbent une partie. Art. 9. Demander la suppression des charges d’huissiers-priseurs créées depuis quelques années, comme onéreuses au public. CAHIER De la paroisse du Pas-Saint-Lomer (1). Les habitants de cette paroisse n’ont d’autres plaintes et doléances à faire que celles qui sont communes à des gens de leur état et condition, savoir qu’ils ne payaient déjà que trop d’impôts de différents genres ; qu’ils désiraient que le dérangement des finances ne fût pas la cause de nouvelles impositions sur eux, parce qu’ils n’étaient pas capables d’en supporter davantage, ayant bien de la peine à acquitter celles qui sont imposées, mais que c’était bien plutôt à ceux qui (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie , par M. Hippeau. sont riches à contribuer à rétablir les affaires du royaume. Quant aux remontrances, ils n’avaient d’autres vœux et d’autres désirs que la paix et la tranquillité publiques ; qu’ils souhaitent que l’assemblée des Etats généraux rétablisse l’ordre des finances et amène en France la joie et la prospérité de l’Etat ; qu’ils ne sont point assez versés dans les choses qui doivent se traiter en ladite assemblée pour donner leur avis, et s’en rapportent aux lumières et aux bonnes intentions de ceux qui y seront députés. Enfin, qu’ils ne connaissent de moyens de pourvoir aux besoins de l’Etat, qu’une grande économie dans les dépenses et un amour réciproque entre le Roi et ses sujets. DOLÉANCES Plaintes et remontrances des habitants de la paroisse de Longpont , élection de Mortagne , adressées le 4 mars 1789 (1). La longue absence de leur seigneur leur cause plus de perte que la cherté du sel et leur taille, dont ils sont surchargés, en ce qu’étant sujets à son moulin de Longpont, banal des plus mal entretenus, manquant du plus nécessaire , de courbes entre autres, ce qui fait perdre en pure perte quantité de farine, malgré la vigilance du meunier actuel ; banalité qu’ils sont forcés de suivre, pour éviter la perte ruineuse des procès Cette même absence les prive encore d’édit de suppression du péage, qu’avait ce seigneur, pour entretenir les ponts dudit lieu, que le Roi se chargea d’entretenir par la suite : ponts aujourd’hui en bois, tout ruinés, qu’un chacun racom-mode pour passer , en risquant sa vie et voiture, sans pouvoir se plaindre à personne, faute de cet édit qui doit être au chartrier du seigneur. Si ledit seigneur eût été présent , lors de la dernière récolte, un homme de la paroisse de Saint-Aubin-d’Apnay, nommé Pierre Jarry, accompagné de onze associés décidés à se battre et tuer, n’aurait pas enlevé, avant maturité, en sept ou huit voitures, toute la récolte de blé, mars et filasse du nommé Claude Morel, habitant de cette paroisse, lequel eut recours (inutilement) au juge de police de la haute justice dudit Longpont et agent du seigneur, ce qui a réduit ce malheureux habitant à la dernière extrémité, sans pain, sans argent et exposé au désespoir ; et étant encore menacé de la même cérémonie par la suite, il a été nécessité de laisser son terrain inculte. Enfin, si le seigneur était présent, tant lesdits ponts que les deux bras de la rivière de Sarthe, qui devraient séparer les provinces, seraient réparés, l’eau n’ayant plus son cours libre , ce qui cause la perte entière des foins des belles prairies que ces rivières arrosent. Il aurait sûrement aussi continué de demander la réparation du grand pont de pierre , dont les voûtes tombées ont fait changer le lit de cette rivière : demande que poursuivait au conseil feu M. le marquis de la Coudrelle, son père, pour pouvoir profiter les uns et les autres des belles prairies qui sont presque chaque année vasées et ne donnant aucun profit, puisqu’on a peine à trouver qui veuille ôter gratis les foins de ces prés. Comment donc, d’après tout cela, ces habitants peuvent-ils vivre, subsister et payer? Y en a-t-il (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des A rchives de l’Empire. 334 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perché.] nouveau; sans préjudicier toutefois aux rangs et distinctions dans chaque ordre, et que la délibération à prendre aux Etats généraux sur ces objets et sur toutes les autres affaires qui intéressent la nation en générai soient prises en commun par les trois ordres réunis, et les voix constatées par tête. Art. 2. Que les impôts et droits, de quelque nature qu’ils soient, qui ont été établis depuis les derniers Etats sans le concours de la nation assemblée, soient éteints et supprimés, et qu’il ne puisse en être accordé ni établi aucun que pour un temps limité qui ne pourra excéder celui de la tenue des prochains Etats généraux, et que l’époque du retour desdits Etats généraux soit déterminée et fixée. Art. 3. Que le droit de répartir les impôts soit rendu aux provinces, pour s’opérer d’abord entre les paroisses et communautés, sans pouvoir être confié ni à des commissaires du Roi ni à des pourvus d’offices ; que la répartition en soit aussi rendue à chaque paroisse, notamment celle de Loisail, pour s’opérer entre les divers habitants, propriétaires et contribuables. Art. 4. Qu’il soit accordé à la province du Perche des Etats particuliers pour régler et établir toute distinction d’impôts nécessaires au maintien du commerce, manufactures, chemins, travaux publics qui intéressent la province. Et, dans le cas où Sa Majesté ne jugerait pas à propos d’accorder des Etats particuliers à cette province, demander que la province du Perche, de laquelle cette paroisse fait partie, soit réunie à celle de Normandie, à laquelle elle a été jusqu’à cet instant liée sur tous ces objets. Art. 5. Se plaindre du fardeau des impôts de toute espèce dont cette paroisse est écrasée, de laquelle le sol est en partie inculte, le surplus d’une mauvaise nature. Art. 6. Qu’il soit procédé à la réformation de l’administration et l’abréviation de la justice; que les droits de formule, contrôle, greffe et autres de cette nature, qui la rendent infiniment coûteuse aux sujets du Roi, soient abrogés. Art. 7. Demander que le prix du sel soit diminué ou rendu marchand et égal dans tout le royaume, étant une denrée de première nécessité ainsi que le tabac. Art. 8. Demander que tous les impôts et droits du Roi soient abandonnés par province et par paroisse, en sorte qu’ils soient versés dans les coffres du Roi sans moyens intermédiaires qui en absorbent une partie. Art. 9. Demander la suppression des charges d’huissiers-priseurs créées depuis quelques années, comme onéreuses au public. CAHIER De la paroisse du Pas-Saint-Lomer (1). Les habitants de cette paroisse n’ont d’autres plaintes et doléances à faire que celles qui sont communes à des gens de leur état et condition, savoir qu’ils ne payaient déjà que trop d’impôts de différents genres ; qu’ils désiraient que le dérangement des finances ne fût pas la cause de nouvelles impositions sur eux, parce qu’ils n’étaient pas capables d’en supporter davantage, ayant bien de la peine à acquitter celles qui sont imposées, mais que c’était bien plutôt à ceux qui (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie , par M. Hippeau. sont riches à contribuer à rétablir les affaires du royaume. Quant aux remontrances, ils n’avaient d’autres vœux et d’autres désirs que la paix et la tranquillité publiques ; qu’ils souhaitent que l’assemblée des Etats généraux rétablisse l’ordre des finances et amène en France la joie et la prospérité de l’Etat ; qu’ils ne sont point assez versés dans les choses qui doivent se traiter en ladite assemblée pour donner leur avis, et s’en rapportent aux lumières et aux bonnes intentions de ceux qui y seront députés. Enfin, qu’ils ne connaissent de moyens de pourvoir aux besoins de l’Etat, qu’une grande économie dans les dépenses et un amour réciproque entre le Roi et ses sujets. DOLÉANCES Plaintes et remontrances des habitants de la paroisse de Longpont , élection de Mortagne , adressées le 4 mars 1789 (1). La longue absence de leur seigneur leur cause plus de perte que la cherté du sel et leur taille, dont ils sont surchargés, en ce qu’étant sujets à son moulin de Longpont, banal des plus mal entretenus, manquant du plus nécessaire , de courbes entre autres, ce qui fait perdre en pure perte quantité de farine, malgré la vigilance du meunier actuel ; banalité qu’ils sont forcés de suivre, pour éviter la perte ruineuse des procès Cette même absence les prive encore d’édit de suppression du péage, qu’avait ce seigneur, pour entretenir les ponts dudit lieu, que le Roi se chargea d’entretenir par la suite : ponts aujourd’hui en bois, tout ruinés, qu’un chacun racom-mode pour passer , en risquant sa vie et voiture, sans pouvoir se plaindre à personne, faute de cet édit qui doit être au chartrier du seigneur. Si ledit seigneur eût été présent , lors de la dernière récolte, un homme de la paroisse de Saint-Aubin-d’Apnay, nommé Pierre Jarry, accompagné de onze associés décidés à se battre et tuer, n’aurait pas enlevé, avant maturité, en sept ou huit voitures, toute la récolte de blé, mars et filasse du nommé Claude Morel, habitant de cette paroisse, lequel eut recours (inutilement) au juge de police de la haute justice dudit Longpont et agent du seigneur, ce qui a réduit ce malheureux habitant à la dernière extrémité, sans pain, sans argent et exposé au désespoir ; et étant encore menacé de la même cérémonie par la suite, il a été nécessité de laisser son terrain inculte. Enfin, si le seigneur était présent, tant lesdits ponts que les deux bras de la rivière de Sarthe, qui devraient séparer les provinces, seraient réparés, l’eau n’ayant plus son cours libre , ce qui cause la perte entière des foins des belles prairies que ces rivières arrosent. Il aurait sûrement aussi continué de demander la réparation du grand pont de pierre , dont les voûtes tombées ont fait changer le lit de cette rivière : demande que poursuivait au conseil feu M. le marquis de la Coudrelle, son père, pour pouvoir profiter les uns et les autres des belles prairies qui sont presque chaque année vasées et ne donnant aucun profit, puisqu’on a peine à trouver qui veuille ôter gratis les foins de ces prés. Comment donc, d’après tout cela, ces habitants peuvent-ils vivre, subsister et payer? Y en a-t-il (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des A rchives de l’Empire. 334 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perché.] nouveau; sans préjudicier toutefois aux rangs et distinctions dans chaque ordre, et que la délibération à prendre aux Etats généraux sur ces objets et sur toutes les autres affaires qui intéressent la nation en générai soient prises en commun par les trois ordres réunis, et les voix constatées par tête. Art. 2. Que les impôts et droits, de quelque nature qu’ils soient, qui ont été établis depuis les derniers Etats sans le concours de la nation assemblée, soient éteints et supprimés, et qu’il ne puisse en être accordé ni établi aucun que pour un temps limité qui ne pourra excéder celui de la tenue des prochains Etats généraux, et que l’époque du retour desdits Etats généraux soit déterminée et fixée. Art. 3. Que le droit de répartir les impôts soit rendu aux provinces, pour s’opérer d’abord entre les paroisses et communautés, sans pouvoir être confié ni à des commissaires du Roi ni à des pourvus d’offices ; que la répartition en soit aussi rendue à chaque paroisse, notamment celle de Loisail, pour s’opérer entre les divers habitants, propriétaires et contribuables. Art. 4. Qu’il soit accordé à la province du Perche des Etats particuliers pour régler et établir toute distinction d’impôts nécessaires au maintien du commerce, manufactures, chemins, travaux publics qui intéressent la province. Et, dans le cas où Sa Majesté ne jugerait pas à propos d’accorder des Etats particuliers à cette province, demander que la province du Perche, de laquelle cette paroisse fait partie, soit réunie à celle de Normandie, à laquelle elle a été jusqu’à cet instant liée sur tous ces objets. Art. 5. Se plaindre du fardeau des impôts de toute espèce dont cette paroisse est écrasée, de laquelle le sol est en partie inculte, le surplus d’une mauvaise nature. Art. 6. Qu’il soit procédé à la réformation de l’administration et l’abréviation de la justice; que les droits de formule, contrôle, greffe et autres de cette nature, qui la rendent infiniment coûteuse aux sujets du Roi, soient abrogés. Art. 7. Demander que le prix du sel soit diminué ou rendu marchand et égal dans tout le royaume, étant une denrée de première nécessité ainsi que le tabac. Art. 8. Demander que tous les impôts et droits du Roi soient abandonnés par province et par paroisse, en sorte qu’ils soient versés dans les coffres du Roi sans moyens intermédiaires qui en absorbent une partie. Art. 9. Demander la suppression des charges d’huissiers-priseurs créées depuis quelques années, comme onéreuses au public. CAHIER De la paroisse du Pas-Saint-Lomer (1). Les habitants de cette paroisse n’ont d’autres plaintes et doléances à faire que celles qui sont communes à des gens de leur état et condition, savoir qu’ils ne payaient déjà que trop d’impôts de différents genres ; qu’ils désiraient que le dérangement des finances ne fût pas la cause de nouvelles impositions sur eux, parce qu’ils n’étaient pas capables d’en supporter davantage, ayant bien de la peine à acquitter celles qui sont imposées, mais que c’était bien plutôt à ceux qui (1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie , par M. Hippeau. sont riches à contribuer à rétablir les affaires du royaume. Quant aux remontrances, ils n’avaient d’autres vœux et d’autres désirs que la paix et la tranquillité publiques ; qu’ils souhaitent que l’assemblée des Etats généraux rétablisse l’ordre des finances et amène en France la joie et la prospérité de l’Etat ; qu’ils ne sont point assez versés dans les choses qui doivent se traiter en ladite assemblée pour donner leur avis, et s’en rapportent aux lumières et aux bonnes intentions de ceux qui y seront députés. Enfin, qu’ils ne connaissent de moyens de pourvoir aux besoins de l’Etat, qu’une grande économie dans les dépenses et un amour réciproque entre le Roi et ses sujets. DOLÉANCES Plaintes et remontrances des habitants de la paroisse de Longpont , élection de Mortagne , adressées le 4 mars 1789 (1). La longue absence de leur seigneur leur cause plus de perte que la cherté du sel et leur taille, dont ils sont surchargés, en ce qu’étant sujets à son moulin de Longpont, banal des plus mal entretenus, manquant du plus nécessaire , de courbes entre autres, ce qui fait perdre en pure perte quantité de farine, malgré la vigilance du meunier actuel ; banalité qu’ils sont forcés de suivre, pour éviter la perte ruineuse des procès Cette même absence les prive encore d’édit de suppression du péage, qu’avait ce seigneur, pour entretenir les ponts dudit lieu, que le Roi se chargea d’entretenir par la suite : ponts aujourd’hui en bois, tout ruinés, qu’un chacun racom-mode pour passer , en risquant sa vie et voiture, sans pouvoir se plaindre à personne, faute de cet édit qui doit être au chartrier du seigneur. Si ledit seigneur eût été présent , lors de la dernière récolte, un homme de la paroisse de Saint-Aubin-d’Apnay, nommé Pierre Jarry, accompagné de onze associés décidés à se battre et tuer, n’aurait pas enlevé, avant maturité, en sept ou huit voitures, toute la récolte de blé, mars et filasse du nommé Claude Morel, habitant de cette paroisse, lequel eut recours (inutilement) au juge de police de la haute justice dudit Longpont et agent du seigneur, ce qui a réduit ce malheureux habitant à la dernière extrémité, sans pain, sans argent et exposé au désespoir ; et étant encore menacé de la même cérémonie par la suite, il a été nécessité de laisser son terrain inculte. Enfin, si le seigneur était présent, tant lesdits ponts que les deux bras de la rivière de Sarthe, qui devraient séparer les provinces, seraient réparés, l’eau n’ayant plus son cours libre , ce qui cause la perte entière des foins des belles prairies que ces rivières arrosent. Il aurait sûrement aussi continué de demander la réparation du grand pont de pierre , dont les voûtes tombées ont fait changer le lit de cette rivière : demande que poursuivait au conseil feu M. le marquis de la Coudrelle, son père, pour pouvoir profiter les uns et les autres des belles prairies qui sont presque chaque année vasées et ne donnant aucun profit, puisqu’on a peine à trouver qui veuille ôter gratis les foins de ces prés. Comment donc, d’après tout cela, ces habitants peuvent-ils vivre, subsister et payer? Y en a-t-il (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des A rchives de l’Empire. [États gén. 1789. Cahiers, J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] 33g d’aussi affligés dans tout le royaume, surtout ledit Morel ? Signé G. Morel. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances du chapitre de Carrouge, diocèse de Séez, élection de Falaise (1). 1° Que n’étant pas juste qu’une foule d’excellents sujets dans l’Eglise n’aient aucun bénéfice, pendant que d’autres les accumulent sur leurs têtes, il serait avantageux de réformer un si grand abus, d’interdire impérieusement et efficacement la pluralité de toute sorte de bénéfices, lorsqu’un serait suffisant pour une honnête subsistance; les Etats généraux tenus à Blois défendirent de tenir deux cures, deux évêchés ; Charles IX fit demander au concile de Trente, par ses ambassadeurs, qu’on ne donnât qu'un bénéfice à chaque ecclésiastique. Tel était l’esprit de saint Louis, tel est celui des saints canons , auxquels sont conformes les décisions de la Sorbonne ; 2° Que, pour mettre un frein à l’ambition et à la cupidité, il serait nécessaire de fixer la suffisance dont parle le concile de Trente : pour les seigneurs évêques, à 15,000 liv. ; pour les abbés, à 6,000 liv., parce que, dans le cas où il plairait à Sa Majesté de les nommer à de plus riches abbayes, ils lui remettraient celles dont ils seraient pourvus ; 3° Qu’en considération des déclarations, édits de nos rois, des anciens canons, par lesquels tous bénéficiers sont tenus à la résidence à peine de perte des fruits, il serait arrêté par les Etats généraux, sous les mêmes peines ou autres, que les évêques résideraient dans leurs diocèses, sans qu’ils pussent s’absenter plus de trois mois dans l’année, à moins que l’utilité évidente de l'Eglise ou de l’Etat ne l’exigeât; que, pour prévenir les abus auxquels la non-résidence donne lieu, il serait nécessaire que les Etats généraux suppliassent le Roi, la Reine, Monsieur, les princes et princesses du sang de ne point appeler pour leurs aumôniers les évêques, qui, de droit divin, doivent vivre au milieu de leur troupeau ; 4° Qu’il serait avantageux à la religion que , dans chaque diocèse, il n’y eût qu’une abbaye ou communauté régulière du même ordre, dans laquelle il y aurait au moins quinze religieux profès; alors les règles de l’institut seraient exactement observées, l’office divin y serait fait avec décence et édification; , 5° Que la quote morte des réguliers qui ont des bénéfices-cures attachés à leur ordre fût, à la diligence des fabricants, employée aux réfections et réparations des presbytères et bâtiments en dépendant, des églises paroissiales, et que le surplus du prix des meubles que se procurent les prieurs-curés, à même les fruits des paroisses, fût consacré à l’eutretien d’un maître ou maîtresse d’école gratuite, ou d’un bureau de charité, ou enfin distribué par la municipalité aux pauvres de la paroisse. On ne peut voir sans douleur et sensibilité le procureur d’une riche maison conventuelle y faire transporter une abondante succession, qui est véritablement celle des pauvres qui sont frustrés de leur héritage ; 6° Qu’il serait avantageux au public que les réfections etréparalions de toute espèce de béné-(1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie , par M. Hippeau. fices-cures fussent à la charge des titulaires et de luers héritiers, sans que, dans aucun cas, les paroissiens pussent en être inquiétés; 7° Que les communautés régulières de l’un et de l’autre sexe ayant, par leur profession, renoncé aux honneurs du siècle, il serait avantageux à la prospérité du royaume de mettre dans le commerce tous droits honorifiques et seigneuriaux, des marquisats, comtés, baronnies et tous autres fiefs qui sont entre leurs mains, en ce compris les patronages des cures attachés aux fiefs ; 8° Que le prix qui en reviendrait fût employé à payer tout ou partie des dettes du clergé ; 9° Que les autres patronages des. cures séculières, dont jouissent lesdites abbayes, soit par aumône, donation ou autrement, sans avoir les fiefs, fussent vendus aux seigneurs propriétaires desdits fiefs sur lesquels les églises paroissiales ont été édifiées et fondées. Des religieux séparés par état du reste du monde, n’ayant aucune part dans le gouvernement des paroisses, ne doivent pas en choisir les pasteurs ; 10° Que les seigneurs évêques ne puissent être prévenus en cour de Rome , à raison des cures et canonicats, à leur présentation, sauf le droit des gradués et des indultaires ; 11° Qu’il fût fait défense aux archidiacres d’exiger aucuns droits des curés et fabriciens pour les visites annuelles qu’ils font eux-mêmes ou qu’ils font faire par les doyens dans les paroi ses de leur archidiaconat , vu qu’elles sont dispendieuses aux curés et qu’il n’en résulte aucun avantage aux paroisses ; 12° Qu’après le décès des titulaires, les revenus des prestimonies , fondations non décrétées, à l’exception de celles qui ont pour vœu l’instruction de la jeunesse ou les fonctions de vicaire, fussent employés à l’établissement d’un bureau de charité ou d’une école de filature ou dentelle pour les enfants de l’un et de l’autre sexe des paroisses où lesdites prestimonies sont fondées. Les messes seraient acquittées par les curés ou vicaires ; 13° Que les chanoines séculiers, collectivement curés primitifs des paroisses dans lesquelles ils sont établis et domiciliés, fussent réintégrés dans les droits curiaux ; que leurs églises séparées de l’église paroissiale fussent érigées en église matrice pour la commodité des seigneurs et des bourgs qui en sont voisins et fort éloignés de leur église paroissiale, qui deviendrait succursale ; qu’un des chanoines, au choix du patron, soit laïque , soit ecclésiastique , serait nommé curé, serait aidé dans ses fonctions curiales par les autres chanoines et un vicaire amovible résidant à la succursale; 14° Que, pour ne point ôter aux prieurs, chanoines et autres bénéficiers, l’honnête suffisance qui leur est due et que leur procuraient leurs titres, dont les fonds sont ou des dîmes ecclésiastiques ou inféodées , Sa Majesté fût suppliée que les revenus de quelques abbayes fussent employés au payement de toutes les portions congrues du royaume ou qu’il fût satisfait à la subsistance des congruistes par l’union gratuite des bénéfices simples; 15° Qu’en conformité d’un arrêt du parlement de Normandie , il fût fait défense à tous curés d’exiger aucuns droits pour les baptêmes, mariages et sépultures, et qu’il fût seulement permis de prendre ce qui serait offert; 16° Que, pour faire cesser les plaintes occasionnées par Ja distribution des biens aumônés aux pauvres dans grand nombre de paroisses, il serait [États gén. 1789. Cahiers, J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.] 33g d’aussi affligés dans tout le royaume, surtout ledit Morel ? Signé G. Morel. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances du chapitre de Carrouge, diocèse de Séez, élection de Falaise (1). 1° Que n’étant pas juste qu’une foule d’excellents sujets dans l’Eglise n’aient aucun bénéfice, pendant que d’autres les accumulent sur leurs têtes, il serait avantageux de réformer un si grand abus, d’interdire impérieusement et efficacement la pluralité de toute sorte de bénéfices, lorsqu’un serait suffisant pour une honnête subsistance; les Etats généraux tenus à Blois défendirent de tenir deux cures, deux évêchés ; Charles IX fit demander au concile de Trente, par ses ambassadeurs, qu’on ne donnât qu'un bénéfice à chaque ecclésiastique. Tel était l’esprit de saint Louis, tel est celui des saints canons , auxquels sont conformes les décisions de la Sorbonne ; 2° Que, pour mettre un frein à l’ambition et à la cupidité, il serait nécessaire de fixer la suffisance dont parle le concile de Trente : pour les seigneurs évêques, à 15,000 liv. ; pour les abbés, à 6,000 liv., parce que, dans le cas où il plairait à Sa Majesté de les nommer à de plus riches abbayes, ils lui remettraient celles dont ils seraient pourvus ; 3° Qu’en considération des déclarations, édits de nos rois, des anciens canons, par lesquels tous bénéficiers sont tenus à la résidence à peine de perte des fruits, il serait arrêté par les Etats généraux, sous les mêmes peines ou autres, que les évêques résideraient dans leurs diocèses, sans qu’ils pussent s’absenter plus de trois mois dans l’année, à moins que l’utilité évidente de l'Eglise ou de l’Etat ne l’exigeât; que, pour prévenir les abus auxquels la non-résidence donne lieu, il serait nécessaire que les Etats généraux suppliassent le Roi, la Reine, Monsieur, les princes et princesses du sang de ne point appeler pour leurs aumôniers les évêques, qui, de droit divin, doivent vivre au milieu de leur troupeau ; 4° Qu’il serait avantageux à la religion que , dans chaque diocèse, il n’y eût qu’une abbaye ou communauté régulière du même ordre, dans laquelle il y aurait au moins quinze religieux profès; alors les règles de l’institut seraient exactement observées, l’office divin y serait fait avec décence et édification; , 5° Que la quote morte des réguliers qui ont des bénéfices-cures attachés à leur ordre fût, à la diligence des fabricants, employée aux réfections et réparations des presbytères et bâtiments en dépendant, des églises paroissiales, et que le surplus du prix des meubles que se procurent les prieurs-curés, à même les fruits des paroisses, fût consacré à l’eutretien d’un maître ou maîtresse d’école gratuite, ou d’un bureau de charité, ou enfin distribué par la municipalité aux pauvres de la paroisse. On ne peut voir sans douleur et sensibilité le procureur d’une riche maison conventuelle y faire transporter une abondante succession, qui est véritablement celle des pauvres qui sont frustrés de leur héritage ; 6° Qu’il serait avantageux au public que les réfections etréparalions de toute espèce de béné-(1) Nous empruntons ce cahier à l’ouvrage intitulé : le Gouvernement de Normandie , par M. Hippeau. fices-cures fussent à la charge des titulaires et de luers héritiers, sans que, dans aucun cas, les paroissiens pussent en être inquiétés; 7° Que les communautés régulières de l’un et de l’autre sexe ayant, par leur profession, renoncé aux honneurs du siècle, il serait avantageux à la prospérité du royaume de mettre dans le commerce tous droits honorifiques et seigneuriaux, des marquisats, comtés, baronnies et tous autres fiefs qui sont entre leurs mains, en ce compris les patronages des cures attachés aux fiefs ; 8° Que le prix qui en reviendrait fût employé à payer tout ou partie des dettes du clergé ; 9° Que les autres patronages des. cures séculières, dont jouissent lesdites abbayes, soit par aumône, donation ou autrement, sans avoir les fiefs, fussent vendus aux seigneurs propriétaires desdits fiefs sur lesquels les églises paroissiales ont été édifiées et fondées. Des religieux séparés par état du reste du monde, n’ayant aucune part dans le gouvernement des paroisses, ne doivent pas en choisir les pasteurs ; 10° Que les seigneurs évêques ne puissent être prévenus en cour de Rome , à raison des cures et canonicats, à leur présentation, sauf le droit des gradués et des indultaires ; 11° Qu’il fût fait défense aux archidiacres d’exiger aucuns droits des curés et fabriciens pour les visites annuelles qu’ils font eux-mêmes ou qu’ils font faire par les doyens dans les paroi ses de leur archidiaconat , vu qu’elles sont dispendieuses aux curés et qu’il n’en résulte aucun avantage aux paroisses ; 12° Qu’après le décès des titulaires, les revenus des prestimonies , fondations non décrétées, à l’exception de celles qui ont pour vœu l’instruction de la jeunesse ou les fonctions de vicaire, fussent employés à l’établissement d’un bureau de charité ou d’une école de filature ou dentelle pour les enfants de l’un et de l’autre sexe des paroisses où lesdites prestimonies sont fondées. Les messes seraient acquittées par les curés ou vicaires ; 13° Que les chanoines séculiers, collectivement curés primitifs des paroisses dans lesquelles ils sont établis et domiciliés, fussent réintégrés dans les droits curiaux ; que leurs églises séparées de l’église paroissiale fussent érigées en église matrice pour la commodité des seigneurs et des bourgs qui en sont voisins et fort éloignés de leur église paroissiale, qui deviendrait succursale ; qu’un des chanoines, au choix du patron, soit laïque , soit ecclésiastique , serait nommé curé, serait aidé dans ses fonctions curiales par les autres chanoines et un vicaire amovible résidant à la succursale; 14° Que, pour ne point ôter aux prieurs, chanoines et autres bénéficiers, l’honnête suffisance qui leur est due et que leur procuraient leurs titres, dont les fonds sont ou des dîmes ecclésiastiques ou inféodées , Sa Majesté fût suppliée que les revenus de quelques abbayes fussent employés au payement de toutes les portions congrues du royaume ou qu’il fût satisfait à la subsistance des congruistes par l’union gratuite des bénéfices simples; 15° Qu’en conformité d’un arrêt du parlement de Normandie , il fût fait défense à tous curés d’exiger aucuns droits pour les baptêmes, mariages et sépultures, et qu’il fût seulement permis de prendre ce qui serait offert; 16° Que, pour faire cesser les plaintes occasionnées par Ja distribution des biens aumônés aux pauvres dans grand nombre de paroisses, il serait 336 [États géix. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province dn Perche.1 utile de régler que ces revenus fussent mis en mense pour un bureau de charité ou partagés par les curés, de l’avis du substitut du procureur général (s’il s’en trouvait dans les lieux), ou enfin des municipalités ; 17° Qu’il serait avantageux à la nation qu’il n’y eût qu’un seul impôt auquel tous les sujets du monarque seraient assujettis sans distinction, lequel impôt serait levé sur les biens-fonds, l’industrie et les personnes capites ; 18« Que, pour ne point ôter à la noblesse et au clergé tous leurs privilèges, l’un et l’autre ordre eussent la liberté de diviser entre eux la portion de l’impôt auquel il est juste que tous les citoyens contribuent; 19° Que les chambres ecclésiastiques, auxquelles est attribuée la connaissance des décimes et autres taxes, etc., fussent différemment composées; que la répartition du nouvel impôt fût faite en présence du seigneur évêque (.les suffrages des députés des chapitres, communautés rentées, des abbés, de deux des plus anciens curés de chaque doyenné préalablement pris), lesquels seraient avertis quinze jours auparavant par le syndic du diocèse ; 20° Que, dans aucun cas, il ne puisse être donné atteinte aux propriétés inhérentes, aux bénéfices séculiers, soit par titre ou possession centenaire, même quadragénaire, dans les coutumes où elle a force de loi ; 21° Que la déclaration du Roi, du 29 mai 1786, concernant les dîmes, soit exécutée, selon sa forme et teneur, dans la province de Normandie, nonobstant tous règlements et arrêts à ce contraires. La tranquillité des décimateurs et des déci-mables exige qu’il en soit ainsi ; 22° Que, pour faire cesser les justes plaintes des cultivateurs entourés ou voisins des forêts plantées à vingt lieues des plaisirs du Roi, les conservateurs des chasses et dites forêts y feront tuer, par chacun an, quarante fauves, et même plus, sur les représentations des assemblées de département; 23° Que la liberté qui serait donnée aux particuliers de tuer les pigeons, serait une atteinte aux propriétés seigneuriales, l’autorisation tacite d’une espèce de brigandage civil. Nous remontrons en même temps qu’il serait avantageux à la nation d’enjoindre aux seigneurs ayant droit de colombier, à peine d’amende , de les tenir enfermés au temps de la semaille et des récoltes ; 24° Que, pour l’exportation des denrées du bocage aux villes, des marnes, charrées nécessaires pour la culture des terres ingrates de la majeure partie de la basse Normandie, du bas Maine et autres provinces, les chemins de bourg à ville, de bourg à bourg, fussent incessamment rendus praticables aux frais et même à l’impôt général ; 25° Que les assemblées provinciales, leur organisation et administration, dont l’utilité est reconnue, trouvent dans les Etats généraux une consistance perpétuelle ; 26° Que l’odieux impôt de la gabelle, déjà jugé par le monarque, soit au plus tôt anéanti ; que les administrations provinciales et de département fassent voiturer des approvisionnements de sel dans les anciens greniers, où les sujets de leur arrondissement viendront aux jours accoutumés en prendre, selon leurs besoins, par demi-quart, quart, etc., à un prix qui sera d’autant plus modique qu’il n’y aura plus d’archers, de gableurs à salarier; que, pour la facilité des pauvres et autres, il y aura dans les paroisses un ou plusieurs revendeurs, qui le distribueront par poids et petites mesures au prix qui leur sera fixé par les assemblées provinciales ; 27° Que, pour arrêter tout ainorcementet attrait au faux saunage, il serait à désirer que le prix du sel lut le môme dans le3 provinces limitrophes et même dans tout le royaume; que jamais de l’eau de la mer ne puisse être interdite à ses riverains ; 28° Que les simples archers, gardes-sel, fussent employés, aux dépens des provinces, à l’entretien et confection des routes de différentes classes et aux travaux publics jusqu’à leur décès arrivant, car il ne serait pas juste de les laisser sans emploi et sans pain; 29° Qu’il fût également pourvu par l’administration aux besoins des commis aux aides, dont la suppression n’est pas moins nécessaire pour la tranquillité publique; 30° Que, dans tous les bourgs, il y eût au moins deux archers de maréchaussée résidants; que les mauvais sujets, ceux mêmes qui contreviendraient aux règlements et ordonnances des provinces touchant le sel et le tabac, et qui en seraient convaincus, fussent envoyés à perpétuité aux îles; 31° Qu’il serait avantageux au royaume d’occuper, en temps de paix, à l’exemple des Romains, l’infanterie au travail des routes et de leur donner une paye plus forte; ils en seraient plus forts et plus robustes; 32° Que les abus dans le tirage des milices, toujours dispendieuses aux paroisses, que les intendants ou leurs subdéiégués appellent au lieu de leur résidence, fussent réformés, et que les miliciens, peu de temps après le tirage, fussent incorporés ou que chaque paroisse fournît une somme pour tenir lieu de la milice; 33° Que la liberté accordée par la déclaration du mois de mai 1788, aux justiciables, de franchir les degrés des juridictions seigneuriales, est une atteinte aux droits que donnent plusieurs coutumes, et notamment celle de Normandie, aux hauts justiciers, résultant de l’injonction qui leur est faite par l’article 18 d’avoir un juge, un procureur fiscal et un greffier résidant dans le chef-lieu de leur justice, vu que ce serait en réduire le plus grand nombre à une impossibilité à laquelle ils ne pourraient remédier que par des pensions onéreuses et souvent au-dessus de leur fortune; 34° Que la faculté accordée à deux justiciables, d’éluder les juges de la classe inférieure, serait nuisible aux pauvres citoyens éloignés d’un bailliage de quatre à cinq lieues, et quelquefois huit à neuf. Tels sont les vassaux de plusieurs hautes justices. En effet, un malheureux journalier, pour revendiquer sa haie, son fossé usurpé par un riche voisin, l’appellerait inutilement devant son juge naturel, où il ferait à peu de frais entendre sept à huit témoins; son adversaire le contraindra de faire sa preuve devant un juge royal; il n’aura pas le moyen de fournir à de si grands frais; il abandonnera son héritage à la puissance de son usurpateur; 35° Que, pour simplifier des frais qui, quelquefois, deviennent ruineux pour des contestations très-peu importantes, ne point écarter les justiciables des premiers juges; il serait avantageux que les hauts justiciers, spécialement ceux dont le district est à quatre lieues et au delà, jugeassent définitivement les procès dont le fond n’excéderait pas 100 livres; que les appels des sentences des hautes justices, surtout celles éloignées de cinq lieues des bailliages, fussent immédiatement portés à un tribunal souverain; [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Province du Perche.l 337 36° Que les arrêtés des cours souveraines, de n’admettre dans leurs corps que des nobles fussent déclarés nuis, comme prejudiciables au tiers-état, qui n’v aurait aucun membre pour la défense de ses droits; 37» Que, pour rapprocher les justiciables des bailliages, il serait très-avantageux de procéder le plus tôt possible à de nouveaux arrondissements; 38° Que, pour abréger la longueur des procès, il ne fût alloué aucune taxe aux procureurs, excepté pour le premier écrit et un second, qui contiendrait au plus deux feuilles en grosse, à raison de vingt-cinq lignes à la page, quinze syllabes à la ligne; • 39° Que les banqueroutiers frauduleux, plus nuisibles à la prospérité du royaume que les voleurs publics, soient exemplairement et très-rigoureusement punis en conformité d’un ancien règlement. Arrêté en Chapitre, ce 12 mars 1789. Guernon des Acres, chanoine-doyen; Chéra-dame, chanoine; Huard, chanoine; Chauvière, chanoine ; Tartarin, chanoine. P. S. Le clergé éprouverait une perte considérable qui rejaillirait sur la classe indigente des citoyens, si le système de substituer une pension aux dîmes et biens-fonds qui lui appartiennent faisait fortune dans les années de disette. Les bénéficiers, loin de porter des secours aux pauvres qui les environnent, auraient eux-mêmes à peine de quoi vivre. Des pensions en argent n’offrent au clergé qu’une suite de troubles et de contestations par la progression que les temps amènent dans le prix des comestibles. Chéradame, chanoine . 22 lre Série, T. Y.