66& [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Il avril 1790.] « Braves vétérans, c’est avec enthousiasme que l’Assemblée nationale reçoit les témoignages de votre patriotisme. Si, jusqu’à présent, vous avez servi la patrie par Votre courage et votre intrépidité, servez-la désormais par vos conseils. Apprenez à la jeunesse que le premier devoir de tout citoyen français est de consacrer sa vie et sa fortune pour le maintien de la liberté, de la Con-stitutiôn et de la monarchie. Dites-lui que vous imiter est le moyen le plus assuré d’acquérir l’estime et la reconnaissance publique. L’Assemblée nationale vous permet d’assister à sa séance. » M. dé Ladres, député de Nancy, expose que des affaires indispensables exigent qu’il s’absente pour trois semaines. L’Assemblée lui accorde ce congé. M. le Président. L’ordre du jour appelle la discussion sur la question relative à l’état civil des juifs. On demande que l’ordre du jour soit interverti et que la parole soit donnée au rapporteur du comité des rapports. L’Assemblée, consultée, adopte cette proposition. M. Goupillean, membre du comité des rapports. Vous nous avez renvoyé l’examen des faits relatifs à la municipalité et à la garde nationale de Montauban. Le régiment de Languedoc et cette garde nationale, après avoir fait entre eux un pacte d’union, excités par les applaudissements que vous avez donnés au pacte fédératif des Angevin�, écrivirent une lettre circulaire à toutes les gardes nationales de la province, pour les engager à imiter cet exemple. Cette lettre a donné des inquiétudes à la municipalité de Montauban qui a défendu de donner des suites à Cette démarche, sous peine de désobéissance. Le comité pense que le pacte fédératif entre le régiment de Languedoc et la garde nationale de Montauban, ne peut avoir pour but de soustraire la garde nationale aux ordres de la municipalité, â laquelle elle est subordonnée, et que M. le président doit écrire à la garde nationale et à la municipalité, afin de les engager à agir de concert pour le maintien de la liberté. M. Charles de Lameth. Je ne sais pas comment l’Assemblée nationale peüt approuverqu’une municipalité, élue peut-être par uu peuple trompé, blâme ce que vous avez vous-mêmes applaudi avec transport. . . Vous trouvez que tout va le mieux du monde, que les affaires sont en très bon ordre, et cependant il est très nécessaire de redonner de la force et du zèle aux amis de la Constitution. L’aristocratie redouble d’efforts. Pendant fa quinzaine de Pâques, on n’a pas craint d’abuser des choses les plus sacrées pour égarer les peuples. (Il s'élève de très violents mnrmures dans ta partie droite de la salle.) M. 1© Président observe à M. de Lameth qu’il est hors de la question. M. Charles de Lameth. C’est mon amour pour la chose publique qui me fait parler ; tout ce qui tend à défendre la liberté est toujours à l’ordre du jour. Le rapport du comité des recherches sur la conduitti de M. l’évêque de Blois prouvera que mes inquiétudes sont bien fondées. Je reviens à l’affaire quinous occupe, et je demande que l'Assemblée approuve la Conduite cjeja garde nationale de Montauban, et blâme celle de la municipalité. M. le baron de Landenberg, député de Belfort, qui s’était absenté depuis quelque temps, rentre dans l’Assemblée nationale et demande la parole sur la discussion. Plusieurs membres: Vous ne pouvez parler, vous n’avez pas prêté le serment civique. M. de Landenberg prête serment et Obtient la parole. Je n’adopte, dit-il, aucune des propositions qui vous sont faites, et je demande qu’on rappelle la garde nationale à l’exacte observation de son devoir ; que la municipalité soit approuvée ; que le réquisitoire du procureur de la commune contre la lettre de la garde nationale soit envoyé à toutes les municipalités du royaume pour leur servir d’exemple et de modèle.” — J’ai appris ce matin que vous avez décrété qu’on ne peut avoir voix délibérative dans l’Assemblée sans prêter le serment de maintenir la nouvelle Constitution. Comme II est de mon devoir de délibérer, j’ai prêté ce serment. M. de Donnai, évêque de Clermont. Je n’ai qu’une observation à faire ; je dois à la religion de la présenter. Si l’on continuait ainsi à suppôt ser des intentions coupables à ses ministres, il serait désormais impossible au clergé d’assister à vos séances. (Une partie de l’Assemblée applaudit. — M. t’évêque de Clermont quitte la satle� Il est suivi par uu graad nombre d’ecclésiastiques.) M. Barnave présente un projet de décret qui est aussitôt adopté. H est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, consacre de nouveau le principe de la subordination des gardes nationales aux municipalités, par l’intermédiaire desquelles les ordres du pouvoir exécutif doivent toujours leur être transmis. « Au surplus, considérant que le pacte fédératif, proposé dans la lettre circulaire écrite par la garde nationale de Montauban, le 13 mars dernier, a été dicté par le plus pur patriotisme, et n’a pu avoir pour objet de se soustraire à l’autorité de la municipalité, à laquelle elle est essentiellement subordonnée; elleapprouve le zèle de la garde nationale, et charge son président de lui écrire, ainsi qu’à la municipalité, pour les engager à travailler de concert au maintien de la Constitution et de la tranquillité publique. » M. le Président annonce que la séance de demain commencera à onze heures du matin. La séance est levée à ouze heures du soir. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE BARON DE MENOU. Séance du dimanche 11 avril 1790 (1). M. Gossin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de ta séance d’hier au matin. Il ne s’élève pas de réclamation. M. Camus. Il est du devoir du comité des pensions de vous appreudre qu’ayant vu des in-(|) Cetje timt est incomplète §u Mmttur? 667 [Assamblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 avril 1790.] culpations dirigées contre lui, et consignées dans une lettre que M. le maréchal deSégur a fait imprimer en supplément au Journal de Paris, il a donné à l’impression les pièces originales au sujet desquelles cette inculpation a été faite. C’est ainsi que le comitéj répondra toujours. M. le comte de Faueigny-Luolnge. On croirait, par ce que dit M. Camus, que M. de Ségur a besoin de se justifier. Une demande de 6,000 livres pour de pauvres parents ne peut être considérée comme un délit pour lequel il faille présenter une justification. M. d’Estourmel. Je suis certain que M. de Ségur n’a rien demandé d’injuste; mais la publicité des pièces peut seule le prouver. M. Camus. M. le maréchal de SégUr se sert du mot calomnie ; il était du devoir du comité de publier les faits. Comme l’impression ne peut être très rapide, il était de son devoir de prévenir l’Assemblée et le public que l’on imprimait ces pièces, afin que l’une et l’autre suspendissent leur jugement. On verra si nous avons calomnié, on examinera, et la peine retombera sur Ceux qui la méritent. M. Martineau. Yoüs avez hier renvoyé au comité ecclésiastique une proposition de M. Mou-gins de Roquefort Dans plusieurs villes le titre de curé est partagé entre cinq du six prêtres ; dans d’autres, il y a uh curé pour les nobles, et un curé pour les non-nobles. Pour faire disparaître ces abus absurdes et bizarres, votre comité ecclésiastique vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale â décrété et décrète uè dans toutes les églises paroissiales où il y a eux ou plusieurs titres de bénéfices-cures, il sera par provision, en cas de vacance par mort, démission ou autrement, d’un des titres, sursis à toute nomination, collation et provision. » Ce décret est adopté. M. d’Haramfrare. M. d’Ogny a écrit au comité des finances une lettre par laquelle il demande qu’un semestre des gages des maîtres de postes soit acquitté* Ce semestre monte à 45,000 livres. Je propose à l’Assemblée d’autoriser M. Necker à fournir cette somme. M. Gaultier de Biauzat. Plusieurs maîtres de postés, qui n’avaient pour tous gages que des privilèges, quittent leurs fonctions: il faut S’occuper de cet objet, qui pourrait retarder le service public. Cette observation est renvoyée au comité des finances* Le décret suivant est ensuite rendu : « L’Assemblée nationale décrètequ’elle autorise le président du comité de liquidation de répondre à M. d’Ogny qu’elle permet qu’on retire de l’arriéré les 45,000 livres dues aux maîtres des postes sur le dernier semestre de ce qui leur est attribué pour les rembourser des frais d’avance pour les courriers, et que Cette somme leur soit payée par le Trésor royal, ou par une avance faite par les fermiers des postes. » M* Vernier, membre du comité des finances, propose deux décrets concernant la ville de Charmes en Lorraine et la ville de Montauban. Ces deux décrets successivement mis aux voix sont adoptés ainsj qu’il suit : Premier décret. « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et vu les délibérations dii conseil général de la ville de Charmes, des 19 septembre 1789 et 26 février 1790, autorise les officiers municipaux de ladite ville à faire un emprunt de 12,000 livres pour approvisionnement de grains, à charge et condition que la rente ou les intérêts de ladite somme, ainsi que la perte qui pourrait résulter du rabais du prix des grains, seront prélevées sur les deniers patri-moniaux de ladite Ville; le tout à charge d’ett rendre compte dans les formes accoutumées. » Deuxième décret. € L’Assemblée nationale, sur le rapport de sou comité des finances, et vu la délibération du conseil général de la commune de Montauban, du 15 mars 1790, ênonciative de celles prises au bureau de charité les 1er et 8 dudit mois, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de dix-huit mille livres seulement, au lieu de celle de trente-six mille livres; pour ladite somme de dix-huit mille livres être répartie au rôle de la capitation de l’année présente, sur tous les articles de trois livres et au-dessus, le recouvrement en être fait par le collecteur ordinaire, et le montant employé en ateliers de charité, de la manière qui sera jugée le plus utile à la classe indigente; le tout à charge de rendre compte, et sans préjudice des contributions volontaires reçues et à recevoir. » M. Dupont (de Bigorre), membre du comité des finances, propose un décret relatif aux octrois des villes en général, et en particulier à l’octroi de la ville de Dax. Ce décret mis aux voix est adopté dans les termes suivants: « L’Assemblée nationale décrète que la ville de Dax, ainsi que toutes les autres villes du royaume, sont autorisées à percevoir les droits d’octrois, sans avoir besoin de lettres-patentes ni d’autres titres que le présent décret ; décrète, en outre, que le présent décret sera très incessamment porté à la sanction du roi. » M. le Président annonce à l’Àssembléê qu’il est parvenu à son adresse une boîte ficelée et cachetée, déclarée contenir quatre-vingts pièces de différente argenterie, dix pièces d’argenterie étrangère, neuf morceaux d’or, deux cent quatre-vingt-cinq livres dix-huit sols, argent de France, et que ce don, qui n’a été accompagné d’aucune lettre d’envoi, est simplement intitulé : Dons patriotiques de la ville deBoicoff. M. le Président annonce ensuite que M. Faul-eon, député suppléant de la sénêcnausséé dé Poitou, dont les pouvoirs ont été vérifiés, demande à jêtre admis dans l’Assemblée, eu remplacement de M. FilleaU, décédé. Cette admission est ordonnée. M. Faulcon monte à la tribune, où il prête le serment civique dans ia forme accoutumée. M. le Président informe l'Assemblée que M. le garde des sceaux vient de lui adresser de# expéditions en parchemin, pour être déposée# dans les archives df l’Assemblée nationale ;